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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 328

  • L'exécution par la Résistance d'Albert Kromer, chef de la Milice à Carcassonne

    Albert Kromer né le 12 juin 1905 à Belfort, commerçant 21 rue Georges Clémenceau, est exécuté avec Elise Journet née le 17 février 1903 à Carcassonne - son épouse - au second étage de son appartement situé rue Tranquille.

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    Le Midi Socialiste / 25 février 1944

    Le chef de centaine Kromer fut avec René Bach - l'interprète de la Gestapo - la figure la plus redoutée de la collaboration Carcassonnaise. Marié à une Carcassonnaise depuis le 23 octobre 1929, il tenait un magasin de jouet dans la rue de la gare depuis plusieurs années. En représailles après l'affaire de Belcaire dont nous allons parler plus bas, la Résistance commença par lui adresser un courrier le 8 décembre 1943, puis un cercueil miniature pour lui souhaiter une Bonne année 1944.

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    L'exécution de Kromer

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    Le magasin de jouet Kromer et leur appartement

    © Google maps

    Les chefs de la Résistance, ayant décidé d'éliminer Kromer, demandent aux dirigeants de la Région R3 de leur fournir des volontaires pour l'abattre. On leur envoie deux jeunes gens appartenant aux groupes francs. Il s'agit de Louis Bonfils alias "Paulo" né le 12 août 1920 à Nice et de Mathieu alias "Fracasse". Le premier sera fusillé à Montpellier pour avoir ensuite tenté d'assassiner le chef du groupe Collaboration de Narbonne, le 7 avril 1944. Le second, fit partie du commando qui assassina Philippe Henriot le 28 juin 1944 à Paris ; il sera tué pendant la Libération de la capitale en août de la même année.

    Mathieu se présente donc le 24 février 1944 à la porte du domicile des époux Kromer, rue Tranquille à Carcassonne. Il tire trois balles de pistolet 7,65 ; deux atteignent Kromer qui est tué sur le coup, la troisième atteint sa femme qui s'était portée à son secours. Blessée au visage, elle est transportée à la clinique Cathala (route de Toulouse) où elle décèdera le lendemain.

    Aux obsèques des époux Kromer, tout ce que Carcassonne compte de collaborateurs et miliciens est là, dont 120 francs-gardes en uniforme avec leurs armes. Les allemands offrent deux couronnes et sont représentés par quatre officiers dont un colonel. L'enquête confiée à deux inspecteurs du Service régional de police judiciaire de Montpellier ne donnera rien.

    Après l'exécution, les deux Résistants furent pris en charge par l'abbé Courtessole. L'équipe resta à Carcassonne, tantôt hébergée par madame Fournier, tantôt à l'hôtel.

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    Albert Kromer est inhumé à Villemoustaussou dans le caveau de sa belle famille.

    L'affaire de Belcaire

    Au début du mois de novembre 1943, les allemands avaient eu connaissance que des réfractaires du S.T.O (Service du Travail Obligatoire) se cachaient à Belcaire et Camurac, où ils recevaient de l'aide. Ils exigèrent de la police française qu'elle mène une enquête. Les commissaires Pierre Escudey et Gabriel Creupelandt furent chargés de la mission. Ils étaient Résistants et dressèrent, bien entendu, un rapport négatif. Celui-ci n'ayant pas convaincu la Gestapo, c'est là qu'entre scène Albert Kromer - membre du P.P.F et chef de la Milice sous le numéro MO-221. Accompagné par l'inspecteur de la Gestapo Hoffman, ils font une descendante à l'hôtel Bayle de Belcaire. Ils y recueillent des renseignements en se faisant passer pour des résistants. Ils apprennent que L'hôtel Bayle héberge des clandestins et que le menuisier Julien Toustou, emploie en cachette des réfractaires du S.T.O.

     Le 29 novembre au cours d'une opération menée au petit matin par 60 soldats du 71e régiment de l'Air, cantonné à la caserne Laperrine de Carcassonne, des policiers allemands, de René Bach et de miliciens avec Albert Kromer, plusieurs personnes sont arrêtées. Elles sont amenées dans les geôles de la caserne pour y être interrogées. Seront déportés en Allemagne : Jacques Vacquié (Maire de Camurac), René Bayle (Hôtelier), Julien Toutou (Menuisier), René Fournet, Raymond Demarchi, Baptiste Arnaud et Raymond Dieuzère.

    Témoignage de Reine Bayle en 1989

    "J'avais flairé un piège quelques jours auparavant en voyant dans l'hôtel deux hommes, un chef de la Gestapo et un marchand de jouet nommé Kromer. Le 29, lors des arrestations elle aperçoit que les allemands arrachent du registre de l'hôtel la page où est inscrit le nom du commerçant. Le lendemain, raconte Reine, je suis allée à Carcassonne, à la préfecture et au commissariat pour avoir des renseignements sur l'arrestation de mon frère René, puis dans une rue du centre ville j'ai reconnu ce Kromer dans son magasin. Grâce à une cousine, on m'avait indiqué le marchand de jouets. Revenue à Belcaire, il y avait le sous-préfet, on faisait semblant de ne pas croire mes explications. Par chance, les allemands ne m'ont jamais interrogé. Je n'ai pas été inquiétée."

    Le 10 janvier 1944, une perquisition a lieu dans le bureau du commissaire Escudey et au domicile de son adjoint, Gabriel Creupelandt. Ils sont envoyés en déportation. Pierre Escudey, né à Toulenne le 24 novembre 1909, mourra à Neuengamme le 6 janvier 1945.

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    Gabriel Creupelandt, né à Roubaix le 31 décembre 1910, mourra le 28 février 1945 à Vaihingen. Ce dernier a son nom gravé au Monument aux morts de Bram.

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    Leurs noms figurent sur une plaque en hommage aux "Morts pour la France" dans la cour du commissariat de Carcassonne.

    Sources

    La 2e guerre mondiale dans l'Aude / J. Allaux

    La Résistance audoise / Lucien Maury

    Archives de l'Aude

    Généanet

    Merci à Sylvain le Noach pour ses renseignements sur G. Creupelandt

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  • Quand Talleyrand annonçait la venue de Monsieur (frère de Louis XVI) à Carcassonne en 1777

    Dans une lettre en date du 30 mai 1777, Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord alors député du clergé, annonce à Monsieur de Pelletier - major de Carcassonne - la venue prochaine en sa ville de Monsieur, le frère du roi Louis XVI. 

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    © Collection Philippe Maillard

    Avec l'aimable autorisation du site : www.le-prince-de-talleyrand.fr

    Paris, le 30 mai 1777.

    Je vous donne avis, Monsieur, que Monsieur arrivera le 24 du mois prochain à Carcassonne, et crois ne pouvoir mieux faire pour vous mettre à portée de connaître les honneurs militaires qui devront être rendus à ce prince, que de vous envoyer copie de la lettre que M. le comte de Saint-Germain m’a fait l’honneur de m’écrire à cette occasion en vous recommandant de vous y conformer en tout ce qui peut vous y regarder.

    Comte de Périgord.

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    Hôtel Pelletier du Claux, rue Trivalle

    Il s'agit de Jean Anne Crépin de Pelletier (1724-1790), dernier major commandant la Cité.

    (Carcassonne d'hier à aujourd'hui / p.525)

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    Monsieur en 1788

    (futur Louis XVIII)

    Dans une lettre de M. Bertin - supérieur du séminaire de Saint-Charles à Toulouse - en date du 14 juin 1977, il est également annoncé le passage du comte de Provence dans la région.

    "Monsieur arrive à Toulouse vendredi prochain le 20 du courant. Il séjournera le 21 et partira le dimanche 22, après avoir entendu la messe, pour aller coucher chez M. l'évêque de St-Papoul ; le 23, il ira voir le bassin de St-Ferréol et reviendra coucher à St-Papoul. Le 24, il partira sans doute après la messe pour aller à Carcassonne, à moins que, voyageant sur le canal, il ne s'en écarte pas. C'est ce que j'ignore. Si cela est, vous pourriez bien ne pas le voir à Narbonne."

    (Bulletin de la Commission archéologique de Narbonne / 1895)

    En effet, au printemps 1777 le futur Louis XVIII assiste à Toulouse à une séance des Jeux floraux. Une réception en son honneur est même organisée par les parlementaires de cette ville chez le comte Riquet de Caraman. Il embarque ensuite au Pont St-Sauveur et poursuit son périple sur le Canal Royal du Languedoc.

    Après avoir couché à St-Papoul chez Mgr Jean-Antoine de Castellane, il visite le 23 juin l'école de Sorèze. Il veut tout savoir depuis les programmes jusqu'aux menus et donnera au jeune commandant du bataillon, un brevet pour entrer dans sa garde à la fin de ses études. 

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    École royale de Sorèze

    Ces cérémonies terminées le futur page de Monsieur, le jeune Montgaillard se précipita chez ses parents pour leur annoncer l’heureuse nouvelle, ceux-ci se mirent aussitôt à constituer le trousseau, de leur fils, afin qu’il pût être envoyé à Versailles au premier avis. Ils attendirent un mois, deux mois, six mois, un an... Rien ne vint. Ce n'était qu'une « promesse de Monsieur » et Monsieur n'en avait tant répandu le long de sa route que parce qu’il était résolu à n'en tenir aucune...

    (Michel Demelin / Sorèze : au coeur du Languedoc...)

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    © Chroniques de Carcassonne

    Ancien échêvé de Carcassonne

    Monsieur arriva avec son escorte à Carcassonne, le 24 juin 1777. Il alla dîner et coucher à l'évêché (aujourd'hui, préfecture de l'Aude) chez Mgr de Bezons ; dans la même chambre qu'occupera en 1815 son frère Louis de France, duc d'Angoulème.

    "Lorsqu'en 1777, Monsieur, comte de Provence, qui depuis a régné si glorieusement sous le nom de Louis XVIII, passa à Carcassonne, on servit à ce prince des vins de Limoux et de Villemoustaussou : il eut la bonté d'en faire éloge à M. de Bezons ; le vin de Villemoutaussou provenait d'une vigne qui appartenait depuis longtemps à la famille Don, et dont le M. le secrétaire perpétuel de la Société d'Agriculture de l'Aude est actuellement propriétaire. Un habitant de Limoux, que la Révolution dans sa fermentation tumultueuse et dans ses collisions centrifugeuses avait porté à Saint-Pétersbourg, réchauffait les estomacs des habitants de cette capitale du nord avec les vins de son pays et sa blanquette gracieuse."

    (Journal de la Société d'agriculture de l'Aude / 3e année)

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    Château de Ventenac

    Le comte de Provence repartit de Carcassonne le lendemain où il devait coucher à Ventenac-en -Minervois chez M. de Caraman, avant de rejoindre Narbonne.

    Il est fort regrettable que dans le département de l'Aude, on ne regarde l'histoire de France qu'à partir du 4 septembre 1870 et la proclamation de la République. Faut-il être à ce point sectaire pour ne jamais évoquer dans les livres contemporains, la visite des illustres personnages de l'Ancien de Régime à Carcassonne ? 

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  • La belle histoire de l'ancien asile de Bouttes-Gach

    Un enfant est déposé à la porte de l'hospice de Carcassonne, le 20 avril 1818. Sur ces vêtements, un papier est accroché avec l'inscription suivante : "Gaudefroy Lucien, né aujourd'hui 19 avril 1818 marqué au petit doigt de la main gauche, n'est pas baptisé." Ce bébé retrouvera probablement sa mère biologique - Jeanne Marie Louise Gach, née à Floure en 1776 - avec laquelle il vivra à Saint-Couat d'Aude jusqu'à la mort de celle-ci, le 27 août 1859. Nous avançons comme hypothèse que Bouttes soit le nom du père qui ne l'a jamais reconnu. On retrouve ce patronyme dans le Narbonnais...

     Lucien Bouttes-Gach poursuit même des études de droit, selon le recensement de 1836. Il sera élu comme maire de Saint-Couat à deux reprises et sous deux noms différents. Entre 1843 et 1848, sous le nom de Lucien Bouttes-Gach et de 1871 à 1874, sous celui de Gaudefroy Bouttes. Ceci s'explique par le fait qu'il ait choisi de modifier son patronyme par jugement du 26 mars 1862. 

     N'ayant pas d'héritier naturel et ne souhaitant pas que le profit de ses biens fasse l'objet d'un enrichissement, il rédige entre 1847 et 1873 six testaments différents. Le 19 novembre 1873, il institue le département de l'Aude comme son légataire universel. En 1874, Bouttes-Gach met fin à ses jours ; le département devient propriétaire du domaine d'Aussières près de Narbonne - acquis aux enchères par le défunt en 1872, ancienne propriété de M. Mareschal - et du domaine de Saint-Couat, qu'il met en vente aux enchères publiques en mai 1875.

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    © Le figaro

    Domaine d'Aussières (673 ha) : Mise à prix 415.000 francs

    Le domaine d'Aussières près de l'abbaye de Fontfroide a été acquis en 1999 par les Domaines Barons de Rothschild (Lafite). Il aura fallu dix ans pour remettre sur pied la production et sortir les premières cuvées, il y a seulement deux ans.

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    Château de St-Couat (141 ha) : Mise à prix 850.000 francs

    Le premier nommé est adjugé en juillet 1875 à MM. Bousquet et Bergasse pour la somme de 415.000 francs. Le second ne sera vendu qu'après une baisse de prix pour 625.000 francs à Joseph Lignières, propriétaire à Ferrals. Le Conseil général dispose d'un gros héritage.

    La succession

    Le testament spécifie que le département devra s'acquitter de trois legs particuliers dont l'un est ainsi spécifié :

    "Je lègue 100.000 francs à tous mes parents du côté maternels au degré successible."

    Par voie de presse, la préfecture demande aux parents de M. Bouttes-Gach de se faire connaître. Le 12 août 1875, ils sont 68 a revendiquer cette part de l'héritage. Les neveux et nièces vont intenter un procès afin de toucher en supplément, les 20.000 francs qui leur étaient dévolus dans un testament antérieur datant de 1860 ; le département obtient gain de cause en avril 1878. M. Antoine Marty - avocat et propriétaire à Floure - ami du défunt, réclamera l'exécution des deux testaments de 1852 et 1860 dans lesquels M. Bouttes-Gach lui lègue ses meubles, ses voitures, ses chevaux et ses bijoux. Son nom n'apparaissant pas dans le testament de 1873, le département refusera de lui céder cette partie de l'héritage, arguant que l'antériorité n'a plus de validité. Marty va aller en justice et obtenir gain de cause ; la préfecture interjettera appel. Les fabriques des églises de Saint-Vincent et de Saint-Couat vont elles-aussi réclamer leur part. Le 30 août 1879, elles acceptent les bases de la transaction adoptées en avril, au sujet de la délivrance des legs en faveur de ces établissements. 

    Les voeux du défunt

    Le reste de mes biens, je le lègue au département de l'Aude, pour un hospice sain et élevé. Je souhaite que ma fortune serve à but d'utilité publique et non a assouvir des cupidités particulières.

    Les problèmes d'apurement de la succession Bouttes-Gach durèrent plusieurs années... Le Conseil général chercha néanmoins le meilleur moyen pour faire respecter les voeux de son bienfaiteur. En janvier 1876, Justinien Capmann propose d'affecter la somme provenant de la succession à la création d'une école des arts et métiers dans l'Aude. Cette proposition ne sera pas retenue ; M. le préfet fait étudier par l'architecte départemental M. Desmaret, un projet ayant pour but la création d'un asile où tous les secours que peut réclamer l'humanité dans tous les cas de maladie à tous les âges, seraient donnés gratuitement. 

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    © Polices mobiles

    L'asile en 1942, en bordure de la route de Toulouse

    La construction de l'asile

    Entre le décès de M. Bouttes-Gach et le début des travaux de l'asile, il s'écoulera huit années de procédures, commissions et autres atermoiements. En 1880, plusieurs propriétaires offrent des terrains pour l'édification du futur hospice. Priorité est donnée aux terres de MM. Albarel et Cabrié situées en bordure de la route de Toulouse, si les fouilles dans le sol révèlent l'existence d'une eau suffisante pour les besoins de l'asile. A défaut, ce seront les terres de M. Combes-Gaubert à l'Estagnol ou celles de Mme Riscle à la Gravette qui seront choisies. 

    Le 16 juillet 1881, l'entreprise de maçonnerie de Michel Cau se voit confier la construction des bâtiments pour un montant de 135.000 francs. Le 26 août 1882, la même entreprise doit réaliser la platrerie, la charpente et le dallage pour 16.000 francs. Enfin, les travaux de menuiserie, parquets et serrurerie sont dévolus à M. Falcou pour 30.000 francs. Au total, ce sont 183.000 francs + 2000 francs d'imprévus.

    Deux sociétés ont offert de fournir des appareils pour l'installation du gaz : M. Flander de la Cie Néerlandaise et directeur de l'usine à gaz de Carcassonne ; M. Huguet, appareilleur à Carcassonne. Malgré le devis avantageux de ce dernier, l'offre de M. Flander est retenue car la Cie Néerlandaise réalisera la canalisation extérieure de 400 mètres à ses frais.

    L'acquisition d'une horloge avec cloche en raison de l'éloignement de l'asile avec le centre de la ville est conclue de gré à gré - selon l'usage pratiqué dans les communes de l'Aude - avec le sieur Péghoux, horloger à Carcassonne. Celui-ci sera chargé de la maintenance pour une durée de dix ans.

    Afin d'honorer la mémoire du généreux bienfaiteur, un buste prendra place au milieu du vestibule. On demande à M. Malbret - photographe à Carcassonne - la reproduction d'un cliché de M. Bouttes-Gach. Il est question de rechercher un sculpteur parisien, puis de s'offrir les services de M. Godin, auteur des sculptures ornant le fronton du Palais de justice. En 1883, M. Injalbert de Béziers tient l'affaire.

    Le 12 janvier 1881, les élus du Conseil général se prononcent sur la construction d'une chapelle à l'intérieur de l'asile. Au sein de l'assemblée départementale, l'hostilité des libres-penseurs gagne à une voix de majorité contre ce projet. Ils indiquent que jamais M. Bouttes-Gach n'a évoqué cette résolution dans son testament, qu'il ne devait pas être si croyant pour s'être suicidé et que la création d'une chapelle catholique exclue de fait les mahométans et autres religions. L'économie réalisée sur ce poste de dépense permettra, selon eux, la création de lits supplémentaires. Les défenseurs de la chapelle fendent cet argument en mettant en avant les contradictions budgétaires, avec la création d'une maison du jardinier pour 18.000 francs.

    L'administration

    Les sept membres nommés par le Conseil général administrent l'asile. Leurs fonctions sont bénévoles et leur mandat renouvelé par cinquième chaque année. Ils sont rééligibles. Le 14 janvier 1885, M. Jean-Baptiste Progent - Officier d'administration des bureaux de l'intendance, en retraite - est nommé comme directeur. M. Antoine Lauze lui succédera en 1901. Le fonctionnement financier de l'asile est assuré par l'encaissement de 24 bons du trésor pour 240.000 francs et d'un nouvel achat de rente pour 711.000 francs placés à 5% sur l'état. 

    En 1886, l'asile accueille 40 pensionnaires. Les repas coûtent 1,40 francs par pensionnaire ou 400 francs par an. L'excédent de recette se monte à 3.800 francs. Il est observé que le tarif de 0,80 franc pour deux repas est bien faible pour proposer de la qualité. A moins que le jardin n'améliore l'ordinaire, les pensionnaires risquent fort de manger plus souvent des patates que de la viande.

    "C'est l'heure du déjeuner qui a lieu à 11 heures et demi. Nous avons vu défiler devant nous les pensionnaires au moment où ils se rendaient au réfectoire. Ils étaient tous convenablement vêtus et paraissent en général disposés à faire honneur au déjeuner, dont le menu était ainsi composé : soupe au jus, plat de haricots et figues sèches. Ce repas avait été précédé d'un premier déjeuner qui avait eu lieu à huit heures et demi et qui était composé d'une soupe au lait. Le dîner du soir comprenait un plat de pois au jambon et une salade. Telle était la carte de ce jour, et certes elle n'avait pas été dressée pour la circonstance. Les convives ont pris place autour d'une table reluisante de propreté. A côté du couvert chaque pensionnaire avait une large rondelle de pain blanc et frais dont la croûte dorée des plus appétissantes et une bouteille de vin de demi litre.

    Les dortoirs, vastes et aérés, présentaient une double rangée de lits parfaitement alignés et dont la régularité aurait plus au sergent de chambrée le plus exigeant. La lingerie, aux étagères bien garnies et pourvues de casiers numérotés, renferme les objets appartenant à chaque pensionnaire. La cuisine, les magasins pour conserver les provisions font plaisir à voir. Tout indique une surveillance méticuleuse de la part du directeur, un souci très réel de la conservation du matériel et du bien-être des pensionnaires.

    La vérité nous oblige à ajouter que ce n'est pas cependant des témoignages unanimes de satisfaction que l'on recueille de la part des habitants de l'Asile. Ils se plaignent, en général, de ce que la nourriture est moins bonne que les années précédentes. Les plats de viande qui ont été supprimés du programme sont regrettés par ceux qui ayant été habitués à un meilleur régime dans les premiers temps ne peuvent pas s'expliquer la diminution apportée à leur bien-être, ce qui prouve que le bonheur n'est pas de ce monde.

    (La Fraternité de l'Aude / 8 juillet 1887)"

    L'Asile au fil du temps

    En 1884, l'asile de Bouttes-Gach devient pour un temps une annexe de l'hôpital général de Carcassonne afin d'accueillir les malades touchés par le choléra. Ils y sont mis en quarantaine et soignés jusqu'à la fin de l'épidémie. Le 19 octobre 1906, M. Fondi de Niort signale la ruine prochaine de l'asile de Bouttes-Gach. Les réparations étant considérables, il propose de le supprimer et de donner les soins à domicile. On décide finalement de faire les réparations les plus urgentes. Le 23 avril 1909, on propose la transformation en partie de l'asile en une école professionnelle pour les pupilles de l'assistance publique.

    Guerre 14-18

    L'asile de Bouttes-Gach est aménagé en annexe de l'hôpital le 16 novembre 1915 pour les soldats contagieux, jusqu'au 29 septembre 1919. 277 soldats allemands y seront internés.

    Guerre 39-45 

    L'asile est transformé en caserne pour le GMR Minervois qui s'y installe le 16 novembre 1941. Après la création de la Milice Française à Carcassonne en 1943, ce sont les troupes de la Franc-garde agissant contre les maquis qui occupent Bouttes-Gach.

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    A La Libération, la Résistance prend possession des lieux avant que le 1er juillet 1945, la CRS 163 n'en fasse sa caserne.

    La fin de Bouttes-Gach

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    L'incendie de l'asile de Bouttes-Gach

    En 1976, un violent incendie détruit l'ancien asile de Bouttes-Gach. La CRS s'installe dans de nouveaux locaux, route de Narbonne. Le 15 septembre 1980, le département cède à la ville, suivant estimation des Domaines, un terrain de 1980 m2 sur lesquels se trouvent les anciens ateliers de l'ex-caserne de CRS. Dans ces bâtiments ont envisageait de loger le Foyer du Méridien. Finalement, les bâtiments ruinés seront rasés et on construira sur leur emplacement la résidence du Méridien. Aujourd'hui, on a oublié qu'un enfant abandonné aux portes de l'hospice en 1818 a ensuite légué une immense fortune pour le bien-être des vieillards les plus démunis. Plus rien sur ce site n'indique la mémoire de Lucien Bouttes-Gach, bienfaiteur du département de l'Aude.

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    © Google maps

    La résidence Méridien sur l'ancien asile Bouttes-Gach, en 2016

    Sources

    Cet article a nécessité deux jours de travail de recherche et de synthèse. Il a été rendu possible grâce à la consultation des délibérations du Conseil général de l'Aude entre 1875 et 1883, des journaux locaux, de l'état civil et du recensement sur le site en ligne des archives de l'Aude. C'est donc comme presqu'à chaque fois, un travail de fourmi auquel l'auteur s'est livré. Il vous est demandé - si vous deviez vous servir de ces informations - de le citer. Nous comptons sur l'honnêteté morale des lecteurs.

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