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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 330

  • La statue de la fontaine rue Pont vieux, a t-elle disparu ?

    Qu'est-il arrivé à la vieille fontaine de la rue du Pont vieux ? C'est la question se sont posés quelques amoureux du patrimoine, en observant sa disparition soudaine du paysage de ce quartier de la ville. On a d'abord pensé qu'afin de réaliser le ravalement du mur de derrière, on avait dû naturellement déposer la vieille dame. En fait, ce n'est pas tout à fait cela...

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    L'ensemble du socle en pierres de taille qui permettait à la statue de s'élever à quatre mètres de hauteur - donnant une perspective monumentale aux piétons arrivant du Pont vieux - a lui aussi été supprimé. D'après les renseignements que nous avons obtenus, c'est pour des raisons de sécurité que la statue a été enlevée.

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    Il est vrai pour l'avoir constaté moi-même, que l'arrière de la sculpture n'était plus tenu que par des arceaux rouillés rendus apparents par l'effritement du grès. Toujours d'après nos sources, une restauration serait à l'étude mais impossible, compte tenu de l'état de fragilité de la pierre. Il pourrait alors être envisagé de réaliser un moulage afin d'en faire une copie. C'est en effet une technique qui a fait ses preuves à Carcassonne - la statue au sourire dans l'enfeu de la Porte Narbonnaise en est un exemple. Avec un bémol, toutefois... L'état est bien plus riche que les finances actuelles de la commune. Le budget ténu de la ville de Carcassonne permettrait-il cette restauration ? On voit mal comment la mairie pourrait refaire cette statue dans l'immédiat, à moins de lancer une souscription ou à faire appel au mécénat d'entreprise. Tiens, en voilà une idée !

    Nous avons des craintes motivées par les usages du passé - les municipalités passent, les projets trépassent et finalement s'oublient. Des décennies après, un nouveau Martial Andrieu viendra soulever l'épineuse question : Mais où est donc passée la statue ? On la retrouvera aux serres municipales transformée en un caillou informe, à cause de nombreuses années passées sous les intempéries. 

    Un peu d'histoire

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    Selon les travaux de l'historien Henri Alaux, cette statue aurait été sculptée avec des matériaux provenant de la première fontaine monumentale érigée au XVIIe siècle, place Carnot. Jean-Louis Bonnet explique qu'en 1808, il y avait à cet endroit quelques sculptures et une espèce de rocher qualifié de Neptune ; sur décision municipale, il aurait été vendu car jugé ridicule au moment de recevoir l'Empereur Napoléon 1er. Toujours selon M. Bonnet, la statue actuelle représentant un femme avec une cruche aurait été installée au milieu du XIXe siècle.

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    D'après mes recherches, les habitants du quartier venaient chercher l'eau à cette fontaine sur la place du Barry. Le "barry" en occitan désigne un quartier, comme du reste le barrio en castillan.

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  • Le 18 octobre 1905, le célèbre Buffalo Bill est à Carcassonne

    William Cody (1846-1917), alias Buffalo Bill ; la figure mythique de la Conquête de l'ouest américain pose ses bagages avec sa troupe à Carcassonne, lors d'une tournée en France.

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    Le grand chef Sioux Sitting Bull et Buffalo Bill

    Le chasseur de bisons et le chef indien participent en 1885 à la tournée en Amérique du nord du Buffalo Bill's Wild West. Il s'agit de la troupe fondée en 1882 par le célèbre trappeur retraçant des épisodes de la Conquête de l'ouest. En 1889, Sitting Bull n'obtiendra pas l'autorisation de se rendre sur le vieux continent lors de la tournée européenne. 

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    En 1905, plus de cent villes françaises accueillent le Buffalo Bill's Wild West dont Carcassonne, le 18 octobre. Au dernier moment, les autorités militaires de la ville décident de ne pas donner l'autorisation à la troupe de s'installer sur le champ de tir de Romieu. La morve des animaux faisait craindre la propagation éventuelle d'une épidémie. C'est donc sur le champ de courses de la Fajeolle que se produira le spectacle.

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    L'express du midi

    "Pour traverser l’Atlantique, il fallut seize bateaux pour transporter l'ensemble des huit cents hommes ainsi que les cinq cents chevaux de la troupe. En France, il ne fallait pas moins de trois trains spéciaux pour les conduire de ville en ville. Les cinquante wagons américains, représentant une longueur de près d'un kilomètre étaient précédés par des fourgons de tête mis à disposition par des compagnies régionales qui fournissaient également ceux fermant la marche. Les wagons- lits du convoi, possédaient la particularité d'être deux fois plus longs que leurs homologues Européens, et, fait remarquable, celui du Colonel Cody était un véritable appartement composé d'une cuisine, d'une vaste salle à manger, d'une petite chambre occupée par ses domestiques, d'une chambre à coucher ainsi qu'un cabinet de toilette.

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    Buffalo Bill au milieu de ses hommes

    Pendant que les hommes de la troupe procédaient a l'érection des tentes, les indiens en faisaient de même en dressant leurs tepees. Il ne fallait que deux heures pour emmener tout le matériel, soit mille deux cents pieux, quatre mille mats, 23000 m2 de toile, trente mille mètres de cordages, près de huit mille sièges et pas loin de dix mille pièces de bois et de fer indispensables. .Des centaines de tentes surmontées des drapeaux de toutes les nations devaient offrir une vision contrastant singulièrement avec les remparts de la vielle Cité. On peut penser que grâce aux trois grandes dynamos alimentant ce campement cosmopolite, Carcassonne connut ainsi ses premières illuminations.
    Les représentations avaient lieu généralement à deux heures de l'après midi et à huit heures du soir. Bien que les acteurs puissent être exposés aux intempéries, il en était tout autrement des spectateurs, ceux-ci bénéficiant de l'abri d'une immense tente rectangulaire.

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    L'ouverture du spectacle se faisait au son d'un pittoresque orchestre de cow-boys, alors que Buffalo Bill en grande tenue, se présentait lui-même accompagné de ses cavaliers. Il faut souligner que le colonel mettait un point d'honneur, en faisant pénétrer les indiens à sa suite, de les valoriser constamment. S'enchaînaient ensuite des exhibitions de cavaliers, de cow- boys, d'indiens en nombre aux costumes chatoyants, de Mexicains, d'Arabes, d'authentiques samouraï et même de cosaques. Des «Western-girls», ainsi que des sqaws, offraient aux badauds médusés un tableau d'un exotisme inoubliable...

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    A Carcassonne, on vint de fort loin pour admirer cette représentation unique en son genre. Il faut dire que dans l'organisation, rien n'était négligé pour la promotion, d'innombrables affiches étaient placardées dans les villes et villages environnants faisant aujourd'hui le bonheur des collectionneurs." (sudinsolite.com)

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    "Bien que 10.000 personnes assistaient au spectacle de l'après-midi. Ce fut de midi à deux heures un va-et-vient continuel et une interminable théorie de piétons se dirigeant vers l'hippodrome. Le spectacle de Buffalo sans être extraordinaire, valait d'être vu pour son originalité. Mais ce qu'on a avalé et rapporté de poussière !"

    (L'express du Midi)

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  • Mario Vargas Llosa (Prix Nobel de littérature) évoque Carcassonne dans un de ses romans

    Est-il utile que nous vous présentions le romancier péruvien

    Mario Vargas Llosa,

    tant ses écrits sont universellement reconnus de part le monde et traduits en plusieurs langues ? Le Prix Nobel de littérature 2010 qui soutint pendant de nombreuses années le régime Castriste cubain, glissa peu à peu du communisme vers le libéralisme à partir de 1968.

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    © Wikipédia

    Comme de nombreux artistes et intellectuels, il prit l'idéal révolutionnaire en pleine figure quand il se rendit compte des effets de l'effroyable dictature soviétique sur les masses populaires - notamment au moment du printemps de Prague. Cela me fait penser à tous ceux qui sont actuellement tentés de voir en Vladimir Poutine, un idéal patriotique contre la barbarie islamiste. Méfions-nous des postures, elles cachent très souvent des ambitions bien moins avouables. Confondre tourisme et immigration dans un pays contrôlé par la propagande d'état et où toute manifestation d'opposition se termine avec une balle entre les deux yeux - comme au bon vieux temps du camarade Staline - peut avoir des conséquences inattendues sur l'idéal recherché...

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    Dans notre article hier, nous avons évoqué le séjour de Flora Tristan - féministe et défenseuse des droits des ouvriers - en 1844 à Carcassonne. Mario Vargas Llosa - citoyen péruvien, comme le père de Flora - publie en 2003 un ouvrage en langue espagnole sur les rapports entre la féministe et le petit-fils qu'elle n'a jamais connu - le peintre Paul Gauguin. Ce roman sera traduit en français et publié aux éditions Gallimard, sous le titre "Le paradis - un peu plus loin. 

    El paraiso en la otra esquina

    Le 7 avril 1803 naît à Paris la militante féministe et ouvriériste Flora Tristan, fille d'un officier péruvien au service du Roi d'Espagne et d'une bourgeoise parisienne. Un siècle plus tard, le 8 mai 1903, son petit-fils, Paul Gauguin, meurt seul et presque aveugle dans sa case des îles Marquises. Le curieux rapport entre les deux dates, tout comme les liens de parenté entre le peintre et l'activiste politique, ne sont ici que le point de départ d'un récit qui met en scène leurs vies parallèles et leur destin commun. Sous la plume de Mario Vargas Llosa, Flora Tristan et Paul Gauguin deviennent Flora et Paul - Florita l'Andalouse et Koké le Maori -, deux êtres libertaires, passionnés et profondément humains, mais hantés par une quête de l'absolu qui leur donne une dimension tragique. Ils iront jusqu'au bout de leurs rêves et ils paieront cher leur audace. Pourtant, leur chute semble aussi admirable que leur envol, car elle est porteuse d'espoir. Ce roman nous dit que le paradis qu'ils cherchaient se trouve toujours un peu plus loin, mais il le fait dans une langue qui nous le rend très proche : celle des grandes utopies politiques et artistiques qui ont marqué les temps modernes. (Source : Gallimard)

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    Timbre édité en 1984

    Le livre de Vargas LLosa reprend à son compte dans un style romancé, les aventures mouvementées de Flora Tristan à Carcassonne au sein du monde ouvrier. En voici quelques extraits...

    "Le soir même où Flora était arrivée à Carcassonne, elle eut une rencontre désagréable avec les fouriéristes locaux, qui M. Escudié à leur tête, avait organisé sa visite. Ils lui avaient retenu une chambre à l'hôtel Bonnet, au pied des remparts. Elle était déjà couchée quand les coups à la porte la réveillèrent. Le gérant de l'hôtel se confondait en excuses : des messieurs insistaient pour la voir. Il était très tard, qu'ils reviennent demain. Mais comme ils n'en démordaient pas, elle enfila une roche de chambre et sortit à leur rencontre. La douzaine de fouriéristes venus lui souhaiter la bienvenue était ivre. Elle eut un geste de dégoût. Ces bohèmes prétendaient-ils faire la Révolution en sablant le champagne, en s'imbibant de bière ? L'un d'eux qui, bafouillant et le regard vitreux, voulant à tout prix lui montrer les églises et les remparts médiévaux au clair de lune s'entendit répondre :

    - Que m'importent les vieilles pierres alors qu'il y a tant d'êtres qui ont des problèmes à résoudre ! Sachez que j'échangerais sans hésiter la plus belle église de la chrétienté contre un seul ouvrier intelligent. Ils la virent dans une telle colère qu'ils partirent.

    Tout au long de la semaine passée dans la ville, ces phalanstériens de Carcassonne - avocats, experts agricole, médecins, journalistes, pharmaciens, fonctionnaires, qui s'appelaient eux-mêmes les chevaliers - furent une source permanente de problèmes. Avides de pouvoir, ils projetaient une action armée dans tout le midi de la France.Ils disaient avoir gagné à leur cause beaucoup de militaires et de garnisons entières. Dès la première réunion, Flora les critiqua avec véhémence. Leur radicalisme, leur dit-elle, servait dans le meilleur des cas à remplacer au gouvernement des bourgeois par d'autres, sans modifier le système social, et, dans le pire des cas, il provoquerait une répression sanglante qui ruinerait le mouvement ouvrier naissant. L'important était la révolution sociale, non le pouvoir politique. Leurs plans de conspiration, leurs fantasmes de violence plongeait les travailleurs dans la confusion, les éloignaient de leurs objectifs, les faisaient s'épuiser dans une action subversive à caractère purement politique, où ils s'exposeraient à être décimés par l'armée, dans un sacrifice inutile pour la cause. Les chevaliers avaient de l'influence sur le milieu ouvrier, et ils assistèrent aux réunions de Flora avec les travailleurs des filatures et des fabriques de tissus. Leur présence intimidait les pauvres qui, devant ces bourgeois, osaient à peine émettre une opinion. Au lieu d'expliquer les buts de l'Union ouvrière tu devais t'exténuer, des heures durant, à porter la contradiction à ces politicards qui enflammaient les ouvriers avec leurs plans de soulèvement armé, en vue duquel, disaient-ils, ils avaient caché dans les lieux stratégiques quantité de fusils et de barils de poudre. La perspective de prendre le pouvoir par la force, excitait malheureusement beaucoup de travailleurs. [...]

    Tu étais pour l'amour, pour les idées, pour la persuasion, contre les balles et les échafauds. C'est pourquoi tu étais exaspérée par ces effrayants bourgeois de Carcassonne, pour qui tout se résoudrait en levant des régiments et en dressant la guillotine sur les places publiques. Que pouvait-on attend de gens aussi stupides ?"

    Mario Vargas Llosa a lu sans aucun doute les notes de voyages de Flora Tristan. Dans un style littéraire très intelligible, il a vulgarisé la pensée de la féministe en se l'appropriant. A tel point que l'on se demande si l'auteur ne parle pas à travers elle, en n'en retranscrivant qu'une image subjective. Là, est l'intérêt d'avoir lu les deux récits... Nous nous ne lancerons pas dans une étude comparée - ce n'est pas l'objet de ce blog - mais cela pourrait être un sujet intéressant à étudier.

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