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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 326

  • Le garage automobile des Quatre chemins

    Le quartier des Quatre chemins avait autrefois une activité artisanale florissante. A la croisée des chemins entre la route de Limoux d'une part, et la route de Montréal d'autre part, c'était une voie de passage très importante. Aujourd'hui, ce quartier a beaucoup évolué mais il reste encore certains bâtiments pouvant témoigner de son passé.

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    D'abord bureau de l'Octroi au début du XXe siècle, le bâtiment fut ensuite occupé dans les années 1930 par le garage Houles avec sa station service. C'était l'époque des vieille pompe à essence...

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    L'ancien garage après avoir été très longtemps la mercerie Dedieu est aujourd'hui une agence bancaire. En revanche, l'ensemble du bâtiment a conservé son aspect d'origine. C'est assez inédit dans Carcassonne pour que nous le soulignons...

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  • La conférence Anti-maçonnique de Robert Vallery-Radot, le 26 octobre 1942

    Que l'on le veuille ou pas ; que l'on l'accepte ou pas... Carcassonne a toujours été une ville conservatrice et profondément catholique. Elle se distingue en cela de sa rivale Narbonnaise, beaucoup plus laborieuse et populaire. Il y a dans la capitale audoise depuis fort longtemps une bourgeoisie qui dirige ou qui pèse fortement sur sa destinée. Quand on nous parlons d'élan bourgeois, nous ne faisons pas de distinction entre ceux de gauche et ceux de droite. Le Radicalisme socialiste a prouvé dans notre région qu'il s'accommodait fort bien de la politique de Vichy. Il n'est d'ailleurs pas étonnant de voir quelques noms célèbres localement émerger aux côtés des maréchalistes, dès 1940. Dans ce contexte, doit-on s'étonner de voir l'écrivain catholique Robert Valléry-Radot au Théâtre municipal, le 26 octobre 1942 ?

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    Qui est Vallery-Radot ?

    Robert Vallery-Radot (1885-1970), croix de guerre et légion d'honneur à la boutonnière pour ses faits d'armes durant la Grande guerre est ami de Mauriac et Bernanos avant 1914. Tenté par le fascisme en 1930, il milite contre la Franc-Maçonnerie et publie de nombreux ouvrages sur ce thème. En 1940, il rejoint le régime de Vichy et doit s'exiler en Espagne à la Libération pour échapper à l'épuration. Après l'amnistie, il est ordonné prêtre en 1953 et finit ses jours à l'abbaye cistercienne de Bricquebec (Manche). Il prend le nom de père Irénée.

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    Dans son ouvrage "La contrition de Joë Bousquet", le chanoine Sarraute indique que Vallery-Radot s'est rendu au chevet de Joë Bousquet en 1942 : "Admirateur du poète François-Paul Alibert qui était un ami de Joë Bousquet et plus qu'un ami, une sorte de maître, c'est certainement en sa compagnie qu'il vint le voir." Radot rendit compte de sa visite au chanoine Sarraute en ces termes à propos de Bousquet : "C'est un gnostique". (...) Il lit Erigène, Saint-Jean de la Croix, mais il n'y a pas chez lui la moindre pratique."

    La conférence

    "En présence d'un public attentif et nombreux M. Vallery-Radot fait un historique très documenté de la Franc-Maçonnerie rappelant ses origines à Londres, en 1777, d'où elle s'étendit immédiatement en France, tout en restant sous l'obédience du roi d'Angleterre et de deux pasteurs anglicans qui édictaient les mots de passe. 

     L'orateur met en évidence la coopération d'idées et d'action de la City anglaise et de la F-M, l'influence néfaste des écrivains français du XVIIIe siècle tels que Voltaire, Montesquieu, Diderot qui symbolisent l'esprit maçonnique, et on arrive aux déplorables résultats dont nous supportons les funestes conséquences.

    M. Vallery-Radot montre que les adeptes de la secte sont de trois sortes : les naïfs, les fanatiques et les profiteurs. Il espère que les premiers auront compris ; quant aux autres, il déclare qu'ils doivent cesser de nuire. L'orateur insiste sur l'action criminelle conjuguée de l'Angleterre et de la F-M pour nuire à la France. Il rappelle les évènements de Fachoda, la scandaleuse attitude des francs-maçons qui, en juin 1917, tenaient un congrès à Paris pour empêcher la paix avec l'Autriche qui aurait mis fin à la guerre un an plus tôt. Il dénonce le rôle d'hommes d'état américains et anglais dont le but était d'asservir la France comme le montrent les plans Young, Dawes, etc... et flétrit l'alliance de la finance internationale de la Cité de Wall-Street, cimentée par les liens maçonniques.

    Aussi, M. Vallery-Radot n'hésite pas à affirmer que les responsables de la défaite sont les francs-maçons alliés aux juifs et soutenus par le communisme destructeur. La guerre actuelle, dit-il, est une guerre d'idées qui met d'un côté les barbares d'Asie alliés aux juifs et aux maçons et de l'autre les défenseurs de la civilisation européenne. Il faut prendre position et l'orateur conclut en proclamant que la France, fière de son passé à ses traditions, ne peut pas hésiter et confiante dans son destin suivra les directives du Maréchal qui lui a montré la voie de la renaissance et de la résurrection."

    (L'Eclair / 1942)

    Si de nombreux catholiques ont été bercés par la propagande de Vichy, c'est qu'ils se faisaient la même idée que Vallery-Radot sur le déclin de la France, ci-dessous exprimée en 1941. Une idée qui n'a pas disparu... Le discours de M. Valléry-Radot résumé par l'Eclair en 1942, a encore aujourd'hui un côté très contemporain. Ce qui est intéressant à étudier, ce sont les rapports sociologiques et idéologiques assez troublants entre Carcassonnais, que l'on nous présente depuis 1944, à priori, comme opposés.

    "Il ne s’agit pas de savoir s’il y a tel ou tel Juif qui a bien servi la France (il en existe certes et nous en connaissons), mais si, dans son ensemble, la nation juive, par sa conception économique du monde, autant que par le ferment révolutionnaire qu’elle porte héréditairement en elle, a tenté par tous les moyens de dissoudre la chrétienté. Or, les faits sont là."

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  • L'artiste peintre Jean Dubuffet (1901-1985) à Carcassonne chez Joë Bousquet

    Nous sommes au début de 1944...

    Jean Dubuffet

    n'est pratiquement connu de personne. Dans sa chambre sombre et calfeutrée de la rue de Verdun, Joë Bousquet reçoit une lettre de son ami Jean Paulhan au sujet de ce nouveau peintre : "Te parlerai de lui..." Les mois passent et la curiosité du poète Carcassonnais se trouve mise à mal : "Tu me fais griller d'impatience avec Dubuffet..." lui répond-il. 

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    © Archives Fondation Dubuffet

    Jean Dubuffet en 1945

    Durant l'année 1944, Jean Dubuffet envoie une de ses toiles à Joë Bousquet. Il s'agit de "Haut négoce" dont nous avons emprunté la photo ci-dessous à la Fondation Jean Dubuffet.

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    © ADAGP, Paris 2016

    "Chaque jour, je pense à Dubuffet, et maintenant devant Haut négoce (on est gosse, on naît gosse, on n'est gosse) qu'il m'a envoyé, et qui a chassé la nuit de ma chambre, car pour mieux voir ce tableau, je vis les contrevents ouverts... (Lettre de Jean Paulhan)"

    "Ce dimanche aurait été comme effacé de ma vie si je n'avais eu continuellement sous les yeux le petit Dubuffet. Je te devrai et lui devrai d'avoir passé le jour le plus inoubliable, le plus créateur de mon existence... Mais j'avais le Dubuffet ! J'ai d'abord admiré ces couleurs, j'ai vu les trouvailles avant tout, l'art de creuser une teinte avec des lignes, de donner à des bleus, grâce à des traits noirs, une sorte de profondeur ardente. Mais hier soir, déjà, ayant posé la peinture près de Paul Klee j'ai vraiment préféré le Dubuffet et j'ai compris pourquoi."

    "Une nouvelle lettre de Joë Bousquet, si émouvante ! il aime bien, vous voyez, mon Haut Négoce". Il a ouvert sa fenêtre et moi, j'aime passionnément ses lettres... (Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan)

    Le 4 avril 1946, Joë Bousquet écrit au chanoine Sarraute : "Dubuffet m'envoie un admirable recueil de lithos en couleurs". L'année suivante, Jean Dubuffet se déplace à Carcassonne et rend visite à Joë Bousquet. Il réalise coup sur coup trois portrait du poète dans son lit, dont un en grand format se trouve au Museum Of Modern Art de New York (MOMA).

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    © ADAGP, Paris 2016

    En retour d'une admiration réciproque, Bousquet écrit "Partition" dont la veine poétique est essentiellement issue des liens tissés avec Dubuffet. On pourra lire dans le remarquable ouvrage "Max Ernst, l'imagier des poètes" la note suivante :

    "Dans la Romance du seuil, Joë Bousquet intitule une de ses sections "La Rainette du noir" qui renvoie à son texte concomitant sur Dubuffet dans lequel il compare la main de Dubuffet à la rainette du noir."

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    On pourra également se référer au catalogue de l'exposition Jean Dubuffet qui se tint au Musée des beaux-arts de Carcassonne en 1998.

    Paysages du mental

    Sources

    La contrition de Joe Bousquet / Gabriel Sarraute / 1981

    La chambre de Joe Bousquet / Pierre Cabanne

    J. Bousquet : Une vie à corps perdu / E. de la Héronnière 

    Remerciement à Fondation J. Dubuffet

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