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La Cité

  • Quand la Cité de Carcassonne s'envola vers New-York

    Le 14 mars 1953, la cité médiévale de Carcassonne prit son envol dans un avion affrété par la compagnie Air France en direction des Amériques. Oh ! certes, il ne s'agissait pas là de l'une des acquisitions d'un riche américain pour compléter sa collection de monuments français réinstallés sur le sol des Etats-Unis, mais plutôt d'un vol touristique à but promotionnel.

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    À l'initiative du Dr Jean Girou, président du Syndicat d'initiatives de l'Aude, la superbe maquette réalisée par M. Bouichou - artisan menuisier dans notre ville - allait entamer un périple à travers les aéroports du Nouveau monde. Présentée avant son départ à Me Georges Soum, président de la délégation spéciale municipale faisant office de maire, la cité miniature devait s'envoler depuis Orly vers les aéroports de New-York, Washington, Philadelphie et Boston dans lesquels elle serait exposée aux yeux des voyageurs.

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    Son périple se poursuivit vers l'Amérique latine avant de revenir à Carcassonne. Depuis tout ce temps, la maquette a été remisée au premier étage de l'ancienne mairie sous sa vitre de protection. Nous suggérons qu'elle puisse être désormais exposée dans le hall de l'Office du tourisme, si une place peut lui être trouvée.

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    La cité de Carcassonne de M. Bouichou, artisan menuisier

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2020

  • Les maires de la Cité médiévale pendant la Révolution française

    Sous l’Ancien régime, Carcassonne possédait deux administrations municipales distinctes établies respectivement dans la Ville basse (la Bastide) et la Ville haute (La Cité). Lorsqu’éclatèrent les premiers soubresauts de l’insurrection parisienne précédant les évènements du 14 juillet 1789, la cité médiévale s’administrait sous la présidence de Jean-Pierre Crocy (1723-1813), notaire et Premier consul de la Ville haute. Loin de Paris, la prise de la Bastille ne sembla pas altérer ni perturber outre mesure les délibérations des consuls, certainement convaincus que le roi saurait apaiser les esprits belliqueux. Tout rentrerait bientôt dans l’ordre, pensaient-ils, n’ayant pas été informés de la réponse que le duc de la Rochefoucault-Liancourt fit à Louis XVI, ce 15 juillet 1789 :

    « Non, Sire, ce n’est pas une révolte, c’est une Révolution ».

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    Dans la salle des séances de l’hôtel de ville situé au cœur de la cité médiévale, le maire Jean-Pierre Crocy et ses officiers municipaux signent le 28 juillet 1789 une adresse au roi, dans laquelle ils le supplient de rappeler Necker. Ce texte devra être envoyé à l’Assemblée nationale et aux députés des trois ordres, avec « prière de le mettre sous les yeux du roi ».

    « Nous avons la satisfaction de vous annoncer que les jours de troubles et de désolation qui ont tous affligé la France, ont cessé. Que le calme et la tranquillité sont rétablis dans la capitale, que la paix, l’union et la concorde règnent dans tous les ordres, grâce à la bonté du roy et aux moyens efficaces pris avec autant de sagesse que de prudence par l’Assemblée nationale. Que le roy a paru au milieu de son peuple, que sa présence a pénétré ses sujets de la joie la plus vive qui tous à l’envie se sont empressés de donner à ce souverain prince Louis XVI, des témoignages de leur fidélité, de leur amour et de leur zèle. Évènement heureux et à jamais mémorable qui va procurer à la Nation les plus grands avantages, le conseil des sages, les meilleures lois et la paix dans tout le royaume. Que des actions de grâce ne devrons-nous pas rendre à un monarque si bien faisant qui n’a d’autre désir que le bonheur de ses peuples, que des sentiments de reconnaissance devrons-nous à l’Auguste Assemblée nationale qui a soutenu avec tant de fermeté le trône, la gloire de notre roy et le droit de la Nation. C’est à tous Messieurs, à nous acquitter de ces devoirs et à supplier sa Majesté de rappeler auprès d’elle Monsieur Necker. Ce ministre sage et vertueux qui travaille depuis si longtemps à la restauration de la France ».

    Faisant suite à cette adresse, les consuls décident qu’il sera célébré une messe dans l’église Saint-Sernin, le dimanche suivant à dix heures. Ils supplient le roi de permettre aux habitants de la cité, ville haute, de rendre à sa Majesté l’hommage de leur fidélité, de rappeler M. Necker et manifestent à l’Assemblée nationale, les sentiments de la plus vive reconnaissance et l’attachement de tous les citoyens.

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    L’administration de la Ville haute cherche également à se prémunir contre d’éventuelles attaques d’insurgés qui, gagnés par la fureur révolutionnaire, pourraient s’en prendre physiquement aux plus fortunés. Le 3 août 1789, une délibération entérine la création d’une garde-bourgeoise pour veiller sur les biens et les personnes. Des commissaires sont désignés à la Cité (Maguelonne de Naucadéry, Cazaintre père, Etienne Laffon, Jean Duffort fils, Carles, François Bonnery aîné), à la Trivale (Salières aîné, Rigaud, Avar, Barbaza, Aussenac, Fournié) et à la Barbacane (Alboize, Celles aîné, Castres, Marc Vidal, Lassalle, Guillaume Salières). Le 29 août, décision est prise de fermer la porte d’Aude jour et nuit sauf le dimanche les jours de fêtes, pour des raisons de sécurité. Une plainte des habitants réussira à la maintenir ouverte la journée, mais un mur sera bâti entre les lices à la tour de l’Évêque pour intercepter la communication dans la Cité.

    Une longue période d’instabilité, de doutes et de peurs s’installe peu-à-peu au sein de la municipalité. Crocy démissionne avec deux autres consuls, Vidal et Lamé, pour des raisons inhérentes à ses occupations le 24 septembre. Il restera néanmoins greffier jusqu’à la période de Terreur, où les nouveaux consuls lui refuseront le certificat de civisme le 30 brumaire An II. Les craintes d’une insurrection couvent. L’abbé de Moleville, chanoine et archidiacre de l’église de Carcassonne, ci-devant Consul, témoigne de la situation dramatique dans laquelle les habitants sont prostrés :

    « Il n’était que trop vrai que la communauté est dans la position la plus affligeante. La plus grande partie de ses habitants étant réduits à la dernière misère, le travail de la laine étant l’âme qui vivifie le corps de l’artisation, ce corps est réduit à un état de dépérissement lorsque cette ressource lui manque, jamais le travail n’a été plus rare dans cette circonstance, presque tous les marchands ayant éprouvé une secousse dans leur commune ont été obligés de renvoyer une grande partie de leurs ouvriers, ce renvoi qui a presque frappé en entier sur les artisans de la Communauté, a porté la misère à son comble. Il n’y a aucune espèce de travail, presque tous les ateliers sont fermés, et l’on à la douleur de voir que le nombre des malheureux égale presque le nombre des individus. Les citoyens favorisés de la fortune sont en si petit nombre que cette multitude d’être souffrants ne peut se ressentir de leur générosité. Si nous ne prenons les moyens les plus efficaces pour procurer un prompt secours à tous ces pauvres, la misère qui nous afflige va nous rendre les témoins des plus grands malheurs. Nous aurons la douleur de voir les enfants succomber en proie à la nudité et à la faim, et les parents excités par le désespoir se porter aux plus grands excès. La seule ressource qui nous reste est d’occuper cette multitude de gens oisifs et de les garantir des horreurs de la faim. »

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    A la suite de ce rapport, l’assemblée vota unanimement une supplique à Mgr l’Intendant afin que la Communauté l’autorise à emprunter la somme de trois mille livres pour le soulagement des pauvres, en les occupant aux réparations du chemin qui s’avoisine. 

    Charles Peyraudel († 18114), chirurgien, second consul et lieutenant de maire prend sa succession avant qu’une délibération ne désigne le 21 octobre, François Maguelonne de Naucadéry (†1822) au poste de Consul et maire de la Ville haute. Barbaza et Daderne, troisièmes et quatrièmes consuls, ainsi que quatre bourgeois et quatre artisans comme officiers municipaux. Le procureur ne s’y impose pas tant que l’on ne s’écarte point du l’arrêt du Conseil d’état du roi du 27 octobre 1774 et de la Cour du parlement de Toulouse du 16 octobre 1782. Mgr l’Intendant devra néanmoins approuver cette délibération.

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    Emplacement de la chapelle de la confrérie des Pénitents gris

    Le décret de l’Assemblée nationale et les Lettres patentes sur l’établissement de la municipalité, ne permirent plus à Naucadéry d’être désigné de la sorte. Il fallut organiser un vote au sein des deux arrondissements composés des paroisse Saint-Sernin et Saint-Nazaire. Ils comprenaient non seulement la Ville haute, mais également les faubourgs de la Trivalle et Barbacane, les hameaux de Montlegun et Montredon. Cette population de près de quatre mille habitants représentée par des citoyens actifs à même de voter, fut convoquée le 3 février 1790 à huit heures en assemblées particulières. Soixante-quinze citoyens actifs de la paroisse Saint-Sernin se rendirent au Couvent des R.P Capucins (actuellement, Notre-Dame de l’abbaye) ; les cent quatre de la paroisse Saint-Nazaire votèrent dans la confrérie des Pénitents gris (actuellement, place St-Jean dans la Cité). L’issue du scrutin revint favorable à François Maguelonne de Naucadéry, démocratiquement élu maire de la Ville haute. Pour des raisons que nous ignorons, Peyraudel continua son office sans que le nouveau maire prît ses fonctions. Lors d’un nouveau scrutin sur le même mode que le précédent, François Henry Abraham (1720-1812) fut élu le jeudi 11 février 1790. Cet ancien Conseiller du roi et connétable de la Cité resta en poste jusqu’au 16 avril 1790.

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    Hôtel de ville de la Cité avec la porte d'entrée au pied de la tour du Trésau

    Durant la période de la Terreur, l’ancien salpêtrier originaire de Béziers, Jean Marie Guilhen officia en remplacement d’Abraham. On retiendra qu’il alla quérir le 20 novembre 1793 avec ses officiers municipaux les titres féodaux et archives de la Cité, se trouvant dans la tour du Trésau. C’était à cet endroit que se tenaient depuis le XVIe siècle, les séances des conseils municipaux. Sur le linteau de la porte au pied de la tour on voit encore les armes du Consulat. Ces documents précieux et irremplaçables furent ensuite brûlés sur la place de la Liberté (actuellement, jardin du Prado) au milieu de la liesse populaire. Le noble Maguelonne de Naucadéry y assistait en qualité de juge de paix du canton.

    L’absence des registres des délibérations du conseil municipal de la Cité pour la période 1795-1799, ne nous permet pas de poursuivre nos recherches. Toutefois, la réunification des deux villes se fit en 1800 suivant un arrêt des Consuls de la République. La Cité médiévale perdait ainsi son indépendance et tout ce qui faisait sa singularité.

    Sources

    ADA 11 / Etat-civil

    Délibérations du conseil municipal 1789-1793

    Cartulaire / Mahul

    Carcassonne d'heureuse rencontre / Nelli et Alaux / Edisud

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  • La Cité de Carcassonne par Antoine Guillemet (1841-1918)

    Elève de Corot et plus tard proche de Manet, Monet et Courbet, Jean Baptiste Antoine Guillemet est considéré comme l'un des maître du paysage de la fin du XIXe siècle. Il naît à Chantilly en 1841 de Louise Durosoy dont il porte pour un temps le nom, en l'absence de père connu. Ce n'est que deux ans plus tard qu'Arsace Guillemet consentira à le reconnaître. Au mois de février 1911, le journal "L'excelsior" nous apprend que le peintre "achève à l'atelier un tableau d'imposantes dimensions, où la Cité dresse ses nobles murs et ses tours sarrasines au-dessus du vieux pont romain et des campagnes aux lignes fermes, dans joie du soleil." Il est probable que Guillemet ait posé son chevalet durant l'année 1910 sur les bords de l'Aude en contrebas du Pont vieux. La couleur du feuillage nous laisse penser que ce fut à l'automne, par l'une de ces après-midi où le soleil n'a pas encore quitté sa belle exposition. La barque près de la rive du fleuve témoigne de la présence d'une sablière à cet endroit. En effet, les ouvriers procédaient à l'extraction du sable et l'importaient sur leurs embarcations ; ceci se retrouve sur des cartes postales de cette époque. Ceci pourrait également expliquer le choix de l'endroit que Guillemet aurait pu repérer grâce à une photographie. Autre détail... Nous avons trouvé des Guillemet natifs de plusieurs villages de l'Aude au XVIIIe et XIXe siècle, notamment à Saint-Hilaire. Au XVIe siècle, un curé du chapitre cathédral de Carcassonne s'appelait Guillemet. Est-ce à dire qu'il avait de la famille dans l'Aude ?

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    En 2019, le lieu où Guillemet posa son chevalet à la même époque. 

    Cette toile, Guillemet la présenta au Salon des Artistes Français en avril 1911 avec un autre tableau tiré de son pinceau, "La plage de Villiers". Si "La Cité de Carcassonne" remporta le premier tour de scrutin, elle fut battue au second tour par une toile de Renard. Les gazettes de l'époque rapportent : "Il nous découvre un quadrilatère ensoleillé, solidement bâti sur sa hauteur, avec, dans le bas, une vaste vallée, dont la fraîcheur n'a rien à envier ni à Equien, ni à Moret, paysages favoris du grand paysagiste." (Le soleil / 29 avril 1911). "La Cité de Carcassonne, bellement peinte par Guillemet, est un petit paysage, simple esquisse, mais du plus vigoureux accent et enlevée comme par jeu." (La Gazette de France). On apprend que cette toile était destinée au Musée du Luxembourg. Elle sera acquise par l'Etat suite à l'exposition de l'Ecole des Beaux-arts et viendra ensuite enrichir les collections du Musée des Beaux-arts de Carcassonne.

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    Aujourd'hui, elle se trouve dans le bureau du secrétariat du maire à Hôtel de ville de Carcassonne. Elle y jouit d'une belle lumière et d'un bel emplacement, remarqué par tous ceux qui ont ensuite rendez-vous dans le bureau du premier magistrat de la ville. 

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