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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 533

  • Une affiche de la distillerie Sabatier vaut-elle de l'or?

    L'ancienne distillerie de Michel Sabatier située sur l'avenue du général Leclerc n'a pas encore livré tous ses secrets architecturaux et artistiques, comme nous l'avons découvert la semaine dernière. Nous allons nous intéresser aujourd'hui à une affiche publicitaire, dessinée pour vanter les bienfaits du produit phare de la distillerie: La liqueur de la Micheline.

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    Cette affiche a été réalisée pour l'Exposition universelle de Paris en 1900. La majestueuse Cité de Carcassonne veille sur le Palais de la Micheline et sur la distillerie de l'Or-Kina. Vous remarquerez dans cette mise-en-scène, qu'on a volontairement agrandi l'ensemble des bâtiments de l'usine afin de leur donner davantage d'importance. La distillerie est presque aussi imposante que l'antique cité médiévale. Et pour cause... Tout le génie publicitaire de La Micheline repose sur une légende probablement inventée par Sabatier lui-même, selon laquelle il aurait retrouvé dans une des tours de la Cité en 1856 (la tour de l'Inquisition) un vieux parchemin. Celui-ci revélait la recette d'un antique breuvage dont lui seul connaisait désormais le secret de fabrication. Pourquoi Micheline? Tout simplement parce que l'inventeur en aurait été Michelin Boato au IVe siècle.

    Une égérie de l'antiquité romaine, présente sur un plateau en or s'élevant au dessus de Carcassonne, les deux produits de la distillerie: La Micheline et l'Or-kina. Une femme à ses pieds en vénère le culte. N'oublions pas que Carcassonne dès le IIIe siècle était occupée par les romains. Sabatier triche sur l'origine ancestrale de son breuvage. Pour montrer qu'il a su traverser les âges, il n'hésite pas à se mettre en scène avec ses belles bacchantes, dans un costume théâtralisé de la comédie italienne du XVIe siècle. D'une main, il tient une coupe et de l'autre, un clairon de fanfare. Peut-être a t-il voulu également signifier ses origines limouxines, en référence au carnaval et à la Blanquette?

    Sabatier, le mécène et le bienfaiteur de la ville, souhaite ainsi symboliser l'emprise de son pouvoir économique sur Carcassonne. A la fin du XIXe siècle, début XXe siècle, les industriels mettaient leur argent dans l'essor culturel de leur ville. Sabatier a financé le premier embrasement de la Cité en 1898, la venue des Cadets de Gascogne, les orchestres et orphéons de Carcassonne, le théâtre de la Cité...etc. Une rue porte son nom, entre la rue Trivalle et l'avenue Leclerc.

    Léon-Louis Oury

    Cette affiche a été dessinée par Louis Oury (1846-1929) qui n'est autre, s'il vous plaît, que le décorateur des plafonds du Grand-Escalier de l'Opéra Garnier.

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    Nous pouvons aisément comparer le style utilisé par cet élève d'Isidore Pils avec celui de l'affiche de Sabatier. Le choix d'Oury n'est sans conteste, pas l'oeuvre du hasard. En effet, le patron de la distillerie était un féru d'opéra et s'y rendait régulièrement lors de ses séjours parisiens. Il avait même fondé avec son frère Jacques, une harmonie dans son usine.

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    Nous avons retrouvé la bannière de l'Harmonie de la Micheline.

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    Les employés de l'établissement formaient la phalange de musiciens de cet orchestre. Dès 1851, François Teysseyre avait créé la première école municipale de musique gratuite de Carcassonne.

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    Le Palais de la Micheline à ses heures de gloire

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  • Maison de la Gestapo: Le silence des associations de combattants

    Lorsque je m'interrogeais sur le profond silence des associations d'anciens combattants ou de déportés de l'Aude, au sujet de la destruction programmée de la Maison occupée par la Gestapo route de Toulouse, je reçus un article de presse de 2004. Il a été publié dans la dépêche à Villeneuve sur Lot (47). A sa lecture, on se doute que l'unification des mouvements de résistance s'est arrêtée après la libération. Chacun le sien, chacun son idée politique. Là, où les associations carcassonnaises se fourvoient c'est que dans la maison de la route de Toulouse, il n'y a pas eu que des républicains espagnols torturés. Nous parlerons bientôt d'Aimé Ramond qui y fut interné et interrogé par Bach et ses sbires.

    Interdits de mourir «pour la France»

    Domence Serveto-Bertran et Jaume Serot-Bernat. Deux noms, sans rien autour. Au milieu des dix «Morts pour la France», ces deux noms sont restés nus. Les républicains espagnols, dont près de 80 000 auraient traversé le département durant la guerre, n'ont pas droit aux honneurs. Et lorsqu'ils accomplissent aux côtés des résistants français des actes héroïques, les uns sont décorés, les autres, ignorés.

    En février 1944, lors de la révolte d'Eysses, les nombreux Espagnols prisonniers prennent part, comme les autres, au soulèvement. Comme les autres, ils subissent les représailles allemandes. Et finalement, deux Catalans figurent parmi les douze fusillés. Domence Serveto et Jaume Serot sont morts pour la France. Mais la France leur refuse ses honneurs. Question de principe.

    «En principe, les étrangers n'ont pas le droit à la mention de «Mort pour la France», explique-t-on au bureau des mentions du ministère de la Défense, sauf s'ils sont engagés à titre étrangers dans l'armée française... Dans l'état actuel des choses, ces personnes ne peuvent pas obtenir la mention».

    Domence Serveto et Jaume Serot ont résisté. Ils ont été fusillés. Pourquoi cette différence ? Sur le point d'éditer un ouvrage sur les douze fusillés, l'amicale des anciens d'Eysses a découvert il y a peu cette injustice. «Pour moi, qu'ils soient espagnols, français ou chinois, il n'y a pas de différence. Ce sont tous des anciens d'Eysses» explique avec émotion le secrétaire général de l'amicale, Jules Bloch. Aujourd'hui, il cherche à contacter les familles, qui doivent déposer une demande auprès du ministère de la Défense.

    La mairie de Villeneuve souhaite également engager une procédure visant à réparer cet oubli. Tout comme l'association pour la mémoire des réfugiés républicains espagnols. «Nous nous battons depuis des années pour que soit reconnu le rôle des guerrilleros dans la Résistance » explique Jean Morente, président d'AMORE 47. Le 17 juillet, l'association de résistants ANACR47, avec AMORE 47, organise à Damazan, une journée en hommage aux guerrilleros et Républicains espagnols afin d'honorer, autant que faire se peut, ceux qui se sont battus pour un pays qui n'était pas le leur et ont donné une leçon de solidarité bien plus porteuse de sens que tous les beaux discours sur la construction européenne. (Sandrine Morel)

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  • L'Eden-théâtre, un joyau du XIXe siècle

    Transformer un ancien théâtre du XIXe siècle qui reçut les plus belles vedettes de l'opéra et du Music-hall, en bureaux pour abriter les organisations syndicales. C'est où ? Mais à Carcassonne bien sûr ! Voilà un exemple qui démontre comment le politique a soigné et soigne encore ses intérêts électoraux, sur le dos de l'histoire, du patrimoine et de la culture. Au passage, je vous invite à observer les menuiseries en aluminium donnant sur le boulevard. Elles sont d'époque... Enfin, je veux dire de 1986. On pourrait au moins les changer, en harmonie avec les actuelles prescriptions de l'ABF. Quant à savoir si le façade est classée, c'est une réponse que je n'ai pas. Il faudrait y songer, non ?

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    "L'Eden-Théâtre" était en fait un Music-hall dont la construction remonte autour de 1910. Adossé à l'ancien rempart entourant la ville, son premier directeur était M. Duffaut qui dirigeait aussi le "Cinéma des familles". Ce lieu de spectacle avait une troupe d'artistes sédentaires dont les fers de lance étaient le comique Juguler, la fantaisiste Paulette Pastor et le chanteur Ruquet. L'affaire tourna jusqu'à la fin des années 1920 mais devant son manque de rentabilité, le directeur de l'époque M. Chatenet dut se rédoudre à transformer L'Eden en cinéma. Quelques années plus tard avec l'arrivée du cinéma parlant, l'établissement fut le dernier du genre à fermer ses portes. Les vieux carcassonnais parlaient de ce théâtre comme d'un petit bijou avec son balcon et ses tentures. Le rideau de scène avait été décoré par Louis Bugnard. Juste avant que, sous l'impulsion de Raymond Chésa, on ne le sauve de la destruction et on le transforme en "Maison des syndicats". En 1986 mon oeil d'adolescent curieux s'était glissé furtivement en son antre. Là tout n'était que désolation car pendant des années on avait laissé pourrir un lieu, qui aurait fait aujourd'hui le bonheur de jeunes artistes. Des syndicalistes dans un lieu de spectacle? Pourquoi pas, ils n'ont pas leur pareil parfois pour mettre en scène leurs manifestations...

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