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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 533

  • 20 août 1944: Baudrigues, vision d'horreur

    Le 19 août 1944, les allemands évacuent Carcassonne après presque deux années d'occupation dans le département. A la prison se trouvent notamment des résistants et l'on s'inquiète du sort qui leur sera réservé, après que l'ennemi eût informé la Croix-rouge qu'elle n'aura pas à leur apporter le repas de midi. Il y a parmi eux Jean Bringer (fonctionnaire des eaux et forêts), Aimé Ramond (Officier de paix) et le Dr Delteil (Chirurgien et propriétaire de la clinique du Bastion). Le préfet envoie alors deux délégués charger de négocier un échange de prisonniers, mais le sous-chef de la Gestapo "Schiffner"déclare que seul le Dr Delteil sera libéré avec d'autres détenus sans préciser lesquels. Le chirurgien aurait été gracié pour avoir soigné des soldats allemands dans sa clinique. Vers 11 heures du matin, ceux qui vont être libérés voient monter dans un fourgon cellulaire de la prison, six hommes et deux femmes. Un autre homme, peut-être déjà mort ou agonisant, sur lequel on avait tiré pour avoir tenté de s'évader fait également partie du convoi. L'escorte sera vue à la sortie de la ville en direction de Limoux.

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    Ils se rendent en fait au domaine de Baudrigues situé sur la commune de Roullens, où ils ont entreposé des torpilles de 50 à 500 kilos et d'autres munitions. Intrigué par cette agitation peu coutumière, le régisseur Henri Cambon s'instruit auprès de l'adjudant-chef qui lui conseille de fuir car tout va sauter. A Villalbe, hameau de Carcassonne dont les champs jouxtent ceux du domaine, certains ouvriers agricoles ont aperçu des fils et se doutent de l'iminence d'une explosion. Alphonse, à peine âgé de 20 ans se propose d'aller les couper, mais ses amis du hameau l'en dissuaderont car les allemands pourraient exercer des représailles sur la population. Ils assisteront de loin à l'explosion(la première à 16h45 et la dernière à 16 heures) des neufs depôts sur seize que les "boches" avaient minés.

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    Le lendemain 20 août 1944 les dégâts sont considérables et c'est une vision d'épouvante. "Nous avons été parmi les premiers à Villalbe, à nous rendre sur place" souligne Alphonse. "Ce que nous avons vu dépasse tout ce que nous pouvions imaginer. Pendus aux branches des arbres encore debouts, des morceaux de boyaux et de cervelle. Il ne restait rien du parc." ajoute t-il.Trois corps pourront seulement être reconstitués grâce à certains éléments: Ramond, Bringer et un inconnu. Par exemple, madame Bringer reconnaîtra les restes de son mari à l'alliance d'un doigt. Au total ce sont neuf cadavres que l'ont dit avoir retrouvés dans le parc, sur la base du rapport de gendarmerie. Celui-là même prétend qu'un homme a été fusillé dans le dos et une femme de face. Cela sous-entendrait l'hypothèse qu'ils étaient déjà morts avant l'explosion, mais il est tout aussi possible qu'ils aient été attachés en vie sur le dépôt. On n'a pas pu retrouver une tête !

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    Selon Julien Allaux, les 7 personnes non identifiées sont: Maurice Sevajols (arrêté à Perpignan le 7 août 44 et transféré à Carcassonne dix jours après); Pierre Roquefort, Jean Hiot, Léon Juste et Gilbert Bertrand, tous les quatre rescapés du maquis de Trassanel. Les deux femmes restent inconnues, mais il semblerait qu'elles aient été de confession juive. Les recherches menées par M. Allaux en 1988 permettent de penser qu'il n'y a pas eu 9 mais 14 victimes à Baudrigues. En effet, comme Maurice Sevajols d'autres résistants arrêtés avec lui étaient détenus à Carcassonne. Au lendemain de la tuerie la gendarmerie retiendra neuf, mais le 5 mai 1945 le juge d'instruction accompagné d'un médecin a constaté que des débris humains avait été au cours des huit derniers mois, recueillis par le régisseur du domaine et déposé dans un cercueil. La liste des martyrs serait donc la suivante: Bringer Jean, Ramond Aimé, Roquefort Pierre, Hiot Jean, Juste Léon, Avignon René, Bronson Jacques (né le 16 février 1923 à St-Pé de Bigorre), Gros André, Sevajols Maurice, Torrent André, Bertrand Gilbert, Baills Simon et deux femmes inconnues.

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    Aimé Ramond fut inhumé le 27 août 1944 à Montgeard (H-G). Nous voyons ci-dessus l'hommage rendu par ses collègues avec la pose d'une stèle dans la clairière de Baudrigues.

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    Pour les obsèques de Jean Bringer, le 31 août 1944 toutes les administrations sont fermées. Le corps est exposé dans une chapelle sur la place Carnot, puis amené à la cathédrale Saint-Michel. Il sera inhumé au cimetière du même nom.

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    Chaque année lors de la commémoration de la libération de Carcassonne, une gerbe est déposée sur les lieux même du massacre.

    Sources

    Les martyrs de Baudrigue (Julien Allaux)

    Témoignages recueillis auprès de villalbois (signalés en rouge)

    Crédits photos

    Google

    Collection privée

      Midi-Libre

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  • An american in Carcassonne

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    Un couple d'américains passe en 1932 sur le Pont vieux à bord d'une belle décapotable. Ils sont admiratifs devant la beauté de cette cité médiévale.

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    Auparavant, ils étaient passés au Syndicat d'initiative, au numéro 1 de la rue de Verdun. Là, des personnes compétentes et amoureuses de leur ville leur avaient donné gratuitement, un guide de 20 pages en anglais sur l'histoire du château.

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    On leur remit également cette brochure en français contenant la liste des hôtels et leurs tarifs. Au total, 460 chambres dont 420 avec l'eau courante. Ils furent heureux de lire qu'ils n'auraient pas à s'acquitter de la taxe de séjour. Autre liste, celle de tous les commerçants affiliés au Syndicat d'initiative avec leurs produits avec un plan de la ville.

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    Une fois arrivés sur la place Saint-Nazaire, le service de bagages de l'Hôtel de la cité prit leurs effets sur lesquels il posa cet autocollant. Puis, le voiturier alla mettre le véhicule dans le garage situé derrière la basilique. "Welcome in the walled city of Carcassonne!" dit l'hôtesse d'accueil avec son accent typiquement chantant. "You're name, please?" Le touriste américain répondit simplement: "Mr and Mrs Stewart James"

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    L'acteur américain James Stewart et Gloria, son épouse, dans le hall de l'hôtel de la cité.

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    Lors du déjeuner, ils prirent place dans la prestigieuse salle à manger de l'hôtel. On leur servit une cuisine de grande qualité dans la tradition française chère à Prosper Montagné. Ils garderont à jamais un souvenir inoubliable de ce décor de cinéma, bien plus magique que ceux d'Hollywood.

    Voilà comment dans ces années là, Carcassonne savait recevoir les grands de ce monde qui aujourd'hui fuient vers le Pays basque ou la Côte d'azur. Carcassonne garde majoritairement ses mangeurs de glaces et de kebab sans éducation ni respect qui débarquent de la plage les jours de pluie. Faut dire que le commerçant de la cité s'est adapté, il est à leur image. Heureusement, certains parmi eux résistent et tirent la Cité vers le haut mais pour combien de temps ?

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    Lien permanent Catégories : Cinéma
  • Une affiche de la distillerie Sabatier vaut-elle de l'or?

    L'ancienne distillerie de Michel Sabatier située sur l'avenue du général Leclerc n'a pas encore livré tous ses secrets architecturaux et artistiques, comme nous l'avons découvert la semaine dernière. Nous allons nous intéresser aujourd'hui à une affiche publicitaire, dessinée pour vanter les bienfaits du produit phare de la distillerie: La liqueur de la Micheline.

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    Cette affiche a été réalisée pour l'Exposition universelle de Paris en 1900. La majestueuse Cité de Carcassonne veille sur le Palais de la Micheline et sur la distillerie de l'Or-Kina. Vous remarquerez dans cette mise-en-scène, qu'on a volontairement agrandi l'ensemble des bâtiments de l'usine afin de leur donner davantage d'importance. La distillerie est presque aussi imposante que l'antique cité médiévale. Et pour cause... Tout le génie publicitaire de La Micheline repose sur une légende probablement inventée par Sabatier lui-même, selon laquelle il aurait retrouvé dans une des tours de la Cité en 1856 (la tour de l'Inquisition) un vieux parchemin. Celui-ci revélait la recette d'un antique breuvage dont lui seul connaisait désormais le secret de fabrication. Pourquoi Micheline? Tout simplement parce que l'inventeur en aurait été Michelin Boato au IVe siècle.

    Une égérie de l'antiquité romaine, présente sur un plateau en or s'élevant au dessus de Carcassonne, les deux produits de la distillerie: La Micheline et l'Or-kina. Une femme à ses pieds en vénère le culte. N'oublions pas que Carcassonne dès le IIIe siècle était occupée par les romains. Sabatier triche sur l'origine ancestrale de son breuvage. Pour montrer qu'il a su traverser les âges, il n'hésite pas à se mettre en scène avec ses belles bacchantes, dans un costume théâtralisé de la comédie italienne du XVIe siècle. D'une main, il tient une coupe et de l'autre, un clairon de fanfare. Peut-être a t-il voulu également signifier ses origines limouxines, en référence au carnaval et à la Blanquette?

    Sabatier, le mécène et le bienfaiteur de la ville, souhaite ainsi symboliser l'emprise de son pouvoir économique sur Carcassonne. A la fin du XIXe siècle, début XXe siècle, les industriels mettaient leur argent dans l'essor culturel de leur ville. Sabatier a financé le premier embrasement de la Cité en 1898, la venue des Cadets de Gascogne, les orchestres et orphéons de Carcassonne, le théâtre de la Cité...etc. Une rue porte son nom, entre la rue Trivalle et l'avenue Leclerc.

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    Cette affiche a été dessinée par Louis Oury (1846-1929) qui n'est autre, s'il vous plaît, que le décorateur des plafonds du Grand-Escalier de l'Opéra Garnier.

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    Nous pouvons aisément comparer le style utilisé par cet élève d'Isidore Pils avec celui de l'affiche de Sabatier. Le choix d'Oury n'est sans conteste, pas l'oeuvre du hasard. En effet, le patron de la distillerie était un féru d'opéra et s'y rendait régulièrement lors de ses séjours parisiens. Il avait même fondé avec son frère Jacques, une harmonie dans son usine.

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    Nous avons retrouvé la bannière de l'Harmonie de la Micheline.

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    Les employés de l'établissement formaient la phalange de musiciens de cet orchestre. Dès 1851, François Teysseyre avait créé la première école municipale de musique gratuite de Carcassonne.

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    Le Palais de la Micheline à ses heures de gloire

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