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Seconde guerre mondiale - Page 40

  • Les funérailles de Jean Bringer - chef FFI - le 31 août 1944

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    Jean Bringer

    (1916-1944)

    Chef départemental FFI, il est exécuté par les nazis sur le dépôt de munitions de Baudrigues (à Roullens) le 19 août 1944 avec plusieurs de ses camarades de combat.

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    A travers des photographies totalement inédites, nous allons tenter le retracer le parcours de cette triste journée du 31 août 1944 pendant laquelle les Carcassonnais, rendirent un dernier hommage à ce héros de la résistance audoise. Nous avons matérialisé en rouge le cheminement du cortège à travers le centre-ville.

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    Le cercueil contenant les restes de Jean Bringer (il ne sera identifié par sa veuve que grâce à son chevalière) est exposé dans une chapelle ardente sur la place Carnot. Elle est veillée par ses frères d'armes.

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    Les différentes troupes résistantes (Corps franc de Montagne noire, FFI, FTP, Maquis de Picaussel...) défilent et rendent les honneurs à la dépouille de Jean Bringer sur la place Carnot. La levée du corps est faite par l'évêque de l'Aude, Mgr Jean-Joseph Pays.

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    Le cortège funèbre au départ de la place Carnot devant le café "Chez Félix". Tenant les cordons du poêle, on reconnaît à droite Charles Fourès. Résistant aux côtés de Jean Bringer, il a fait sa carrière de journaliste au Midi-Libre. Sa veuve, madame Cécile Farges, vit encore à près de 95 ans ; elle a été faite dernièrement Chevalier de la légion d'honneur pour ses actes de résistance à côté de son époux.

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    A l'arrière du corbillard se tient dignement madame Bringer dans un crêpe noir, qui devra désormais élever seule, son unique enfant Jean-Marie âgé seulement d'un an. A sa droite, on reconnaît Gilbert de Chambrun (1909-2009), chef des FFI pour le Languedoc-Roussillon et Commandant du 81e régiment d'infanterie de l'armée du général de Lattre de Tassigny. Il sera député de la Lozère jusqu'en 1956. Juste derrière lui, Georges Morguleff qui fera partie de l'état-major du 81e RI. A la gauche de madame Bringer, se tient Lucien Roubaud, délégué à l'Assemblée Consultative provisoire siégeant à Paris entre novembre 1944 et août 1945. A côté lui, le préfet Augé. Juste derrière ce dernier, on aperçoit Louis Amiel (1897-1971) nommé au Comité départemental de libération et maire provisoire de Carcassonne d'août à septembre 1944 (lire Carcassonne, d'hier à aujourd'hui/ Bonnet/ pp.390). A sa gauche, Francis Vals (1910-1974) est le président du Comité départemental de libération de l'Aude. Maire socialiste de Narbonne en 1959, il sera battu par Hubert Mouly en 1971. Il restera député jusqu'à sa mort et est inhumé à Leucate. Derrière lui se trouve Guy David, adjoint de Bringer; à côté avec le béret, c'est André Coumes dit "Capitaine Cabot".

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    Ce jour-là dans le cortège, il y avait le Dr Marcel Cannac (au second plan) dont le cabinet se trouvait sur le boulevard Marcou. Ce médecin est mort dans d'étranges circonstances dans la clinique Delteil...

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    Pour l'occasion, une foule immense suit le cortège ou prend place en bordure de celui-ci. Toutes les administrations et commerces resteront fermés toute la journée.

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    Les anciens combattants de la Grande guerre

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    Les enfants de choeur précèdent la Société musicale Sainte-Cécile qui, tout au long du parcours, joue la Marche Funèbre de Frédéric Chopin. Ici, le cortège passe à l'angle des rues de la préfecture et Barbès devant le Bar de la poste. Le magasin de vêtements à l'extrème droite, est aujourd'hui la boucherie Péténuzzo.

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    Le corbillard emprunte le boulevard Camille Pelletan devant l'ancien Café du musée (aujourd'hui, la Trésorerie générale) et la maison du compositeur Paul Lacombe.

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    Après un passage par la rue Voltaire rythmé par le bourdon de la cathédrale Saint-Michel, le cercueil est déposé à l'intérieur du lieu saint. L'homélie de Mgr Pays fut des plus poignantes suivie de l'absoute. Monsieur Tournier, titulaire du grand orgue, malgré sa cécité versait des larmes qui paraissaient inconsolables. De mémoire de Carcassonnais, on n'avait jamais vu pareille foule aussi émue. Une fois la cérémonie terminée, le cortège funèbre se mit en marche en direction du cimetière Saint-Michel.

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    Devant le cercueil disposé à l'entrée du cimetière, les combattants de l'ombre entonnent La Marseillaise. On reconnaît à premier plan à droite, Lucien Maury alias Franck, chef du maquis de Picaussel.

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    Le cercueil est porté en sa dernière demeure par Louis Raynaud, Louis Bahi et Lucien Maury.

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    Mgr l'évêque de l'Aude et les frères du couvent des Capucins bénissent une dernière fois la dépouille de Jean Bringer avant la mise au tombeau.

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    Le cercueil est placé provisoirement dans le caveau familial de Louis Amiel, résistant et maire provisoire de Carcassonne. Six mois plus tard, les restes de Jean Bringer seront transférés au cimetière de Pierrelatte dans la Drôme.

    Remerciements:

    A J. Blanco, sans lequel je n'aurais pas obtenu ses photographies uniques et inédites

    A ma tante, Isabelle Alay, pour ses souvenirs

    Sources:

    La résistance audoise/ Lucien Maury/ Tome 2/ 1980

    Carcassonne d'hier à aujourd'hui/ JL Bonnet

    La seconde guerre mondiale dans l'Aude/ Julien Allaux

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  • Cinq attentats dans Carcassonne au cours de la nuit du 25 juin 1946

    Un an après l'armistice du 8 mai 1945 mettant fin à la Seconde guerre mondiale, des attentats ne faisant que des dégâts matériels allaient se produire dans Carcassonne. Dès le mois de septembre 1944, les miliciens qui avaient pu être arrêtés furent jugés et fusillés. Les autres s'enfuirent vers l'Espagne où ils trouvèrent asile au Grand hôtel Continental de Barcelone. Un grand nombre de personnes suspectées d'intelligence avec l'ennemi furent incarcérées à la prison de Carcassonne, à l'hôpital général et au Grand séminaire. Certaines y passèrent plusieurs mois en attente de leur jugement qui intervint en décembre 1944 devant la chambre civique de l'Aude. Cette dernière se déclarant incompétente pour les faits les plus graves, c'est la Cour de justice de la République qui les jugea entre janvier et avril 1945. Les miliciens en fuite furent condamnés à mort par contumace ; les autres, les collaborateurs, les membres du PPF et de la LVF à des peines d'Indignité nationale et à la confiscation des biens. Les mois passèrent... Ces derniers firent très souvent appel et la cour de cassation minora les peines de la Cour de justice dès l'année 1946. Tant et si bien qu'à partir de 1951, le Président de la République amnistia presque en totalité les anciens miliciens et collaborateurs, en même temps que les actes pour résistance. Ceux qui s'étaient exilés purent rentrer au pays presque la fleur au fusil, sans que les familles de déportés ou de résistants aient la possibilité de protester. Fermez le ban ! En six ans, ces gens avaient été lavés des crimes de guerre. Ce qu'il faut dire qu'un des avocats défenseurs et le président du tribunal qui les jugea dans l'Aude, avaient été soit dans la Légion Française des Combattants et de la Révolution Nationale en 1942, soit déjà en place sous Vichy. 

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    Dans la rue de la gare en 1946

    Un an après les rancoeurs chez les patriotes restèrent très vives - ce qui n'excuse en rien certaines attitudes - de voir que finalement la justice avait été - selon eux - si clémente. On ne le dit pas assez, mais l'occupation Allemande avec le soutien de l'Etat Français provoqua une guerre civile entre Français. Dans ce type de de conflit, les revanches sont inévitables et ceux qui avaient été dénoncés, dénoncèrent à leur tour. Ceux qui avaient crevé de faim s'attaquèrent à ceux qui s'enrichirent avec le marché noir, etc... C'est dans cette ambiance qu'en 1946 à Carcassonne, plusieurs attentats se produisirent dont nous vous relatons les faits ci-dessous. Les noms des personnes ont été remplacés par une initiale.

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    Le Midi-Libre a été créé à la Libération par le résistant Carcassonnais Lucien Roubaud. Ce journal remplaça "L'éclair" qui s'était compromis dans la collaboration. 

    Midi-Libre

    Mercredi 26 juin 1946

    Dans la nuit de lundi à mardi vers 2 heures du matin, coup sur coup, quatre explosions provenant de divers points de la ville déchirèrent le silence. Celles-ci n'ont pas fait de victimes mais ont provoqué des dégâts matériels importants.

    A 1h52, une explosion  avait lieu rue Victor-Hugo, à la laiterie de Monsieur B, ancien membre du "groupe collaboration". La grille de fermeture du magasin fut arrachée de sa glissière et tordue à mi-hauteur, la vitrine complètement détruite au ras du sol. Sur la bordure en bois, une cavité de 33 cm de largeur située à 4à cm au bord de la porte semble désigner l'endroit où avait été placé l'explosif. Il a été retrouvé un petit morceau de cuivre de 4 cm de longueur provenant d'un détonateur. Deux autres magasins, situés en face, ont été également leur vitrine démolie. A 30 mètres du lieu de cette explosion inconnue d'ailleurs, mais dans une moindre mesure, pour les suivantes les fenêtres des immeubles ont eu de nombreux carreaux brisés.

    A 1h54, une nouvelle explosion avait lieu, rue de Verdun, à l'épicerie C. Ce magasin n'a que peu souffert de l'explosion et seul un trou de 33 cm de diamètre se trouve au bas d'une vitrine.

    A 1h59, une troisième détonation se produisit rue du marché, chez Monsieur R, qui fut membre du "groupe collaboration". La devanture a été entièrement réduite en morceaux, malgré les volets de bois qui la protégeaient. Sur le côté gauche de ce magasin, la partie cimentée a été désagrégée sur 30 cm de longueur et la partie en bois se trouvant au-dessus a été complètement arrachée. Les deux magasins situés en face ont eu leur vitrine partiellement endommagée.

    Quelques minutes après, une quatrième explosion se faisait entendre rue Georges Clémenceau, à l'ancienne boucherie H, dont le nouveau propriétaire est depuis un an M. Ange P. La grille de la devanture a été tordue, l'encadrement des glaces arraché et celles-ci complètement brisées. Les marbres destinés à recevoir la viande ont été cassés sous l'effet de l'explosion. L'engin ayant provoqué celle-ci semble avoir été placé à 50 cm du sol entre la grille et la vitrine. Les devantures d'un magasin voisin et de deux magasins situés en face ont volé en éclats. 

    D'après les premiers renseignements qui ont pu être recueillis, toutes ces explosions auraient été provoquées au moyen de plastic. Cette hypothèse a d'ailleurs été confirmée par la découverte faite hier matin, rue Courtejaire, devant l'imprimerie R, d'une boule de plastic de 300 grammes environ, prête à fonctionner, mais dont les conditionnement défectueux avait dû empêcher la détonation.

    Deux explosions se sont produites hier matin (25 décembre, NDLR) à Alet, provenant de deux engins explosifs qui avaient été placés devant les bureaux de la société hyppo-métallurgique.

    Une information est ouverte en vue de découvrir le ou les auteurs de ces explosions.

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  • Inédit ! La lettre d'adieu de Marceau Perrutel (1908-1944) à son père

    Marceau Perrutel naît à Castelnaudary en 1908. Pendant l'occupation, il rejoint la clandestinité et organise le maquis de l'Aveyron, dont il sera le chef départemental FFI. Ce patriote avait été arrêté le 26 juillet 1944 à Millau Plage en compagnie de ses deux camarades Henri Froment et René Verdier. Trouvé par un berger au ravin de la Canebière situé à proximité de la Borie Blanque, il avait été torturé puis froidement abattu par la Milice française le 6 août 1944 à coups de révolver.

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    © ADA 11

    Lettre inédite 

    Monsieur le commissaire de Millau,

    Je vous fais parvenir cette lettre, d'abord pour vous dire que la plupart des pièces qui ont été produites dans mon affaire sont fausses. J'ai un nom et un matricule des F.F.I. Monsieur le commissaire, je vous saurais gré de bien vouloir faire parvenir cette lettre à mon père 7, enclos St-Louis. Route de Montréal à Carcassonne.

    Bien cher père et toute la famille,

    Je vais mourir. C'est pour la France, mais je t'assure que je ne compte pas mourir dans des circonstances aussi odieuses. Ici, on m'accuse de tout, de l'armée de Staline, alors que je n'ai jamais servi que dans les Forces Françaises de l'Intérieur. Ceci leur permet de me tuer comme un chenapan, sans patrie ni drapeau. Sans doute, je vais mourir écharpé, mais qu'à cela ne tienne, ma conscience est propre. Ici on me reproche les sabotages ; à mon avis, il vaut bien mieux cela que l'aviation qui détruit tout et manque souvent le but.

    Pour ma part, de toutes les actions auxquelles j'ai participé, aucune vie humaine n'est à regretter, et cela me réconforte. Eux, font comme s'ils ne faisaient pas de victimes. Voilà huit jours que j'attends la mort ; enfin elle vient, je l'en remercie, mais c'est sous la forme du martyre. Rose est certainement morte aussi.

    La foule a manifesté pour moi, c'est tout ce qui me réconforte car elle ne croit pas aux mensonges et me prend pour un de ses fils. Cher père, tu ne peux comprendre combien de loin j'ai pensé à toi. Encore, lorsque la foule manifestait, je pensais à toi, je te voyais traîner dans la foule. C'est avec cette pensée que je vais mourir. Ici, on refuse à me prendre pour un soldat des F.F.I. Pourtant c'est bien avec honneur que j'ai servi pour la France ; car les sabotages que l'on nous reproche nous ont été enseignés par des officiers parachutés d'Algérie. Ceci c'est pour te mettre au courant de ce faisait ton fils. Je termine en t'embrassant bien fort ainsi que toute la famille. N'oublie pas d'aller apporter la nouvelle aux parents de Rose.

    Pour la France - Pour le drapeau - Adieu mon père.

    Marceau Perrutel

     

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    © Maquisards de France

    Stèle commémorative située à Milhau au "Haut du Crès"

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    La rue Marceau Perrutel depuis le 23 novembre 1944

    Située dans le quartier des Capucins, cette rue porte d'abord par arrêté municipal du 28 décembre 1868, le nom de rue Neuve du Mail. Elle conduisait au jeu du mail qui se partiquait sur des terrains aménagés pas très loin de là.

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