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Seconde guerre mondiale - Page 37

  • Michel Karner (1904-1970), cet Allemand héros de la Résistance audoise

    Michel Karner, né à Münich le 13 septembre 1904, a fait de sa vie une lutte contre la répression et pour les respect de la personne humaine. Dès 1933, Il fit partie des démocrates allemands qui s'opposèrent à la montée au pouvoir du nazisme incarné par Adolf Hitler. Nous allons voir comment cet homme s'est retrouvé à Carcassonne pour combattre au sein de la Résistance locale. Malgré ces faits d'armes, il semble qu'aucun livre ou journal n'ait jamais consacré, dans notre ville, un seul portrait à Michel Karner. 

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    Jusque-là, Michel Karner occupait un poste de monteur-ajusteur au sein d'une entreprise allemande travaillant pour la marine. Alors qu'il s'est établi à Bilbao, pensant échapper au nazisme, la République espagnole est menacée par la guerre civile. Tout naturellement, il rejoint les mouvements anti-fasciste et adhère au Parti communiste du Pays Basque.

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    © Archives de la Guerre civile espagnole (Salamanca / Espagne)

    Après la chute du nord de l'Espagne, désormais dans les griffes des phalangistes, Michel Karner entre au printemps 1937 temporairement en France, avant d'aller combattre dans les Brigades internationales. Quand Franco renversa la République par un coup d'état, des milliers d'espagnols cherchant à fuir se réfugièrent à la frontière et passèrent en France. Le gouvernement français parqua ces étrangers jugés subversifs dans des camps, gardés par des gendarmes. La défaite française et l'avènement du gouvernement de Vichy en 1940, allait considérablement changer le destin de ces familles espagnoles. D'abord, l'Etat Français livra une petite partie des anciens combattants Républicains à Franco. Ils furent torturés et exécutés par les troupes du Caudillo. Dans l'espoir de faire libérer les soldats français prisonniers en Allemagne, Vichy remit aux Allemands les fichiers contenant les noms des Républicains. 26 000 d'entre eux furent contraints de travailler (Travaux forcés) pour l'organisation Todt, à la construction des défenses allemandes le long de la côte. 40 000 furent déportés en Allemagne. Certains purent s'enfuir loin de l'Europe, les autres s'engagèrent dans des mouvements de Résistance.

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    © Memorias del olvido

    Républicains espagnols dans la Résistance française 

    Comme beaucoup d'anciens combattants espagnols, Michel Karner fut contraint aux travaux forcés par le gouvernement de Vichy. Il dut s'employer à la construction des routes et des ponts.

    "En 1927, je déménageais en Espagne et j'y vivais bien jusqu'en 1936. Ensuite, je mettais au service de la République mes connaissances spéciales et mon aide. Je restais isolé en France jusqu'en décembre 1939. Après ma libération, les espagnols purent à nouveau s'organiser. En 1942, les premières attaques de résistance débutèrent." (14 avril 1961)

    Après 1942, Michel Karner fait partie de l'une des compagnies de guérilleros espagnols. Il se bat autour de Carcassonne dans le maquis contre les troupes nazies et la Milice française. Le 20 janvier 1944, il est arrêté avec deux camarades et interrogé dans la caserne Laperrine à Carcassonne. Il racontera son supplice au procès de l'un de ses bourreaux, Oskar Schiffner :

    "J'étais porteur de tracts. On m'a demandé aussitôt de les traduire en allemand. Arrivé au mot "Boche", qui figurait sur une phrase, je fus prié d'en donner le sens exact. J'ai alors déclaré que je ne le savais pas exactement, mais que dans le jargon espagnol cette appellation correspondait à celle de "fou". Inutile de dire comment cette réponse fut accueillie. J'eus la mâchoire cassée, une clavicule fracturée. Je crachais encore le sang, un an après mon retour de déportation. Schiffner a certes participé à mon arrestation, mais il n'était pas là quand je fus maltraité à la caserne Laperrine. Personnellement, il n'est donc pas responsable. Mais j'estime qu'il l'est pour beaucoup dans les mauvais traitements qui me furent infligés par ses compatriotes."

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    Oskar Schiffner sera réintégré dans la police de la RFA après son procès.

    Karner est envoyé à Montpellier puis Compiègne, avant d'être déporté à Neuengamme par le transport du 21 mai 1944. Fin avril 1945, il est libéré avec plusieurs déportés contraints par les SS, de nettoyer le camp et de faire brûler les archives. Michel Karner embarque sur un bâteau en direction de la Suède. Le 11 mai 1945, la Croix rouge suédoise l'évacue. Il revient en France et s'établit à Carcassonne avec son épouse jusqu'à son décès en avril 1970. Michel Karner faisait partie de l'Association des déportés, internés, résistants et patriotes de l'Aude. 

    Sources

    Morir por la libertad / Eduardo Pons Prades / 1995

    Procès d'Oskar Schiffner / 18 mars 1953

    Memorias del Olvido. La Contribución de los Republica- nos Españoles a la Resistencia y a la Liberación de Francia. Actas del Coloquio organizado por la F.A.C.E.E.F. los 9 y 10 de junio de 1995 en el Instituto Cervantes en París, Paris 1996.

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  • Simone Veil s'était réfugiée près de Carcassonne en juin 1940

     Tout le monde sait bien qu'avant la loi sur l'Interruption Volontaire de Grossesse que Simone Veil défendit à l'Assemblée Nationale, les femmes n'avaient que des aiguilles à tricoter à s'introduire dans le vagin pour stopper une maternité non désirée. Que beaucoup d'entre elles mouraient d'hémorragies. Que les faiseuses d'anges passaient devant les tribunaux et que certaines étaient même guillotinées. Que d'autres plus fortunées, allaient se faire avorter dans des pays où la pratique était légalisée. Que la majorité des filles mères gardaient leur enfant en l'abandonnant devant les églises ou les maternités, ou bien étaient mises à la rue par leurs familles, se considérant déshonorées. Madame Veil mit ainsi fin à bien des drames sanitaires et sociaux, non sans créer un vif émoi dans les milieux conservateurs et religieux.

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    Simone Veil née Jacob arrêtée à Nice par la Gestapo en raison de sa religion juive, sera envoyée à Auschwitz avec sa mère et sa sœur. Son père et son frère, dans un camp en Estonie. Seule la jeune Simone et sa sœur reviendront vivantes de cet enfer. Dans une interview accordée au Mémorial de la Shoah, Simone Veil raconte pendant près de trois heures ce passé qui la tourmente. Nous avons relevé le passage concernant son séjour près de Carcassonne.

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    Le 10 juin 1940, l'Italie de Mussolini déclare la guerre à la France. A Nice où vivent les Jacob, le père de Simone est un homme posé et clairvoyant. Il n'a qu'une peur ; c'est qu'une fois l'armistice signée, les Italiens ne revendiquent l'ancien comté de Nice et éventuellement la Savoie. "Mes enfants Italiens ? Jamais ! s'exclame t-il." Pensant les protéger de ce péril, il les envoient par le train rejoindre ses oncles et tantes. Ces derniers ayant fui Paris depuis l'invasion de la France par les troupes Allemandes, s'étaient réfugiés dans un village à côté de Carcassonne. Dans les souvenirs de Simone Veil, elle arrive le 15 ou 16 juin 1940 dans cet hôtel près de Carcassonne. Là, pendant trois ou quatre jours, elle vit entassée avec ses oncles et ses tantes. Les gens déracinés pleuraient et l'angoisse se faisait encore plus vive. C'était un lieu où se trouvaient beaucoup de réfugiés Belges. L'atmosphère pesante contrastait avec le bel été chaud qui s'annonçait. Finalement, la crainte d'une séparation encore plus longue avec ses parents amena les oncles et tantes à la renvoyer à Nice. Le téléphone fonctionnait encore... Eux, souhaitaient trouver le moyen de rejoindre l'Angleterre. Simone avec sa sœur et son frère rentra sur la côte d'azur où un effroyable destin l'attendait avec sa famille.

    Peut-être ne saurons-nous jamais dans l'hôtel de quel village, Simone Veil a séjourné. Je pencherais pour Bram, qui fut un lieu de rassemblement important pour les réfugiés de Belgique à cette époque. 

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  • Le 20 août 1944, l'avion de James Millard Alston est abattu au-dessus de Pezens.

    L'avion du lieutenant américain James Millard Alston, né à Linden en Alabama le 12 décembre 1918, est abattu par la Flak (DCA Allemande) au-dessus de la nationale 113 entre Pezens et Pennautier, le 20 août 1944. Son appareil appartient à une escadrille de SQ 01 spécialisés dans la chasse de nuit. Elle a pour mission de mitrailler les colonnes allemandes en provenance de Toulouse, afin d'éviter qu'elles ne rejoignent la vallée du Rhône.

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    © findagrave.com

    Lt James Millard Alston

    (1918-1945)

    Touché par un tir de la DCA ennemie, l'avion prend feu et s'écrase à Grazailles (Carcassonne) à proximité du domaine de Gougens. Pour le situer grossièrement aujourd'hui, disons près du Conseil départemental.

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    © Patrick Ertel

    Le lieu du crash en 1944

    James Millard Alston s'est éjecté de son appareil. Il a une légère blessure dans l'avant-bras gauche causée par des éclats l'obus ; il atterrit en parachute au lieu-dit "As Plos" sur la commune de Pennautier. Grâce à Sylvain le Noach - spécialiste des unités et mouvements de troupes allemandes dans l'Aude - nous avons une traduction du rapport rédigé par le lieutenant à son retour de mission.

    j. millard alston

    Avion semblable à celui de J. Millard Alston

    Voici des extraits du rapport de mission 

    "Touché par le mitraillage d'une Flak. Fuite épaisse de fumée noire. Finalement le moteur est mort. Le voile de parachute ne s'est pas déployé. Redéployé le plus loin possible, j'ai pu m'extirper en lâchant le bord de fuite. [...] J'ai atterri à côté du lit d'un ruisseau séché, à 15 pieds des arbres. J'ai grimpé dans les arbustes. J'ai couru le long du ruisseau couvert d'un sous-bois dense. J'ai longé le lit du ruisseau, j'ai trouvé un trou sous une bûche et j'ai réussi à mes glisser parmi les troncs d'arbres. J'avais l'intention de rester jusqu'à la tombée de la nuit. Une heure et demie plus tard, j'entends quelqu'un venir des sous-bois. Un paysan vraiment âgé. Je lui au fait comprendre (indéchiffrable) vers des civils. Il a mimé qu'il allait revenir. Quinze minutes plus tard, il est revenu avec un chapeau blanc en flanelle ou un béret. 

    Il m'a amené chez un ami. On a suivi des chemins de campagne jusqu'à une ferme. J'ai été nourri et il a insisté pour j'aille me coucher. J'ai dormi trois heures. Je me suis réveillé et un autre homme était là (probablement un maquisard). Escorté 3-5 minutes jusqu'à une autre ferme. Deux maquisards sont venus. Un d'entre-eux m'a amené à Saverdun. Je suis resté là jusqu'au 25 août. Famille Fontanelle. Ils m'ont bien soigné. Je pouvais demander tout ce que je voulais.

    Deux ex-pilotes sont allés pour s'assurer que l'avion était complètement détruit. Je suis monté dans une voiture et je suis allé à Foix. Ici, j'ai contacté la mission des alliés - la ville venait juste d'être prise. Une journée avec eux. Quelqu'un de Toulouse a envoyé une voiture pour moi et je suis allé là-bas. "

    j. millard alston

    Manuscrit du rapport du Lt James Millard Alston

    Grâce à la Résistance française, le lieutenant américain rejoindra l'Angleterre, l'Irlande et enfin son pays d'origine. Il reprendra du service lors de la bataille du pacifique contre les Japonais. Son appareil est à nouveau touché au sud d'Okinawa le 25 mars 1945. Cette fois, la mer n'aura pas épargné la vie de James Millard Alston. Son corps n'a jamais été retrouvé.

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    © findagrave.com

    Vieux cimetière de Linden (Alabama)

    En 2001, des membres de sa famille sont venus des Etats-Unis, se recueillir sur le lieu du crash à Carcassonne. Avec cet article, nous souhaitons rendre hommage à tous ces combattants étrangers qui ont défendu la liberté sur le sol français. 

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    © Patrick Ertel

    La famille de J. Millard Alston sur les lieux du crash à Carcassonne

    A Pennautier, une plaque rend hommage au lieutenant Alston et à tous ses compatriotes

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    Merci à Sylvain le Noach

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