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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 90

  • Jean Antoine Marty (1838-1916), Ministre du commerce et maire de Carcassonne

    Ce fils de négociant naquit à Carcassonne le 31 janvier 1838, étudia le droit et obtint son doctorat à Paris. Il se maria le 9 mai 1865 à Azille avec Marie Augusta Fabre avec laquelle il eut deux garçons : Antoine (1866-1929), préfet de la Vienne et Albert (1871-1942), docteur en médecine, maire d’Aix-les-bains. Avocat inscrit au barreau de Carcassonne, Jean Marty fut un opposant farouche au Second Empire et donna son adhésion au manifeste antiplébiscitaire en 1869. L’avènement de la République le fit entrer au conseil municipal et lui permit de se faire élire bâtonnier le 15 novembre 1875. Par suite de la démission d’Abel Petit, il accepta le 7 dimanche 1885 le poste de maire plus par dévouement que par conviction : « Si je ne consultais que mes goûts, je refuserais les fonctions que vous me faites l’honneur de me confier. Mais dans les circonstances actuelles un refus pourrait ressembler à une défection. C’est pourquoi j’accepte. »

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    Il ne le conserva d’ailleurs pas longtemps puisqu’ayant choisi de conduire la liste républicaine aux élections législatives d’octobre 1885 contre les conservateurs réactionnaires, il choisit de démissionner aussitôt après avoir été élu député. De nouvelles élections municipales devaient avoir lieu afin de compléter le conseil municipal et nommer un nouveau maire. 

    A l’Assemblée nationale, le nouveau député siégea à côté de Jean Casimir Périer qui le nomma ensuite Ministre du commerce de son gouvernement du 3 décembre 1893 au 30 mai 1894. Le Président du Conseil des ministres avait pu apprécier les qualités de celui qui avait présidé le groupe viticole et la commission des douanes à la chambre des députés. Favorable aux poursuites contre le général Boulanger et cosignataire de la proposition de loi sur les retraites des ouvriers de Jean Jaurès, l’activité parlementaire de Marty fut des plus remarquées. Malgré cela, il ne put empêcher la perte de la mairie de Carcassonne au profit des radicaux en 1896. Il perdit successivement les législatives de 1898 contre Théron et 1906 contre Jules Sauzède. Il commença alors une carrière dans la magistrature le 8 octobre 1900 en qualité de Conseiller à la cour d’appel de Paris. Chevalier de la légion d’honneur par décret du 11 janvier 1908, la mémoire de Jean Antoine Marty s’effaça avec l’avènement du radicalisme dans l’Aude. On donna bien volontiers plus de gloire à son cousin germain Antoine Marty, dont la vie politique fut quasi anecdotique. Le ministre Marty n’aura pas les honneurs d’une artère dans Carcassonne ; il s’éteindra chez, 8 rue de la République, le 5 novembre 1916. Inhumé le 7 novembre 1916 à Carcassonne, il repose au cimetière Saint-Vincent.

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    La tombe du député et ministre Jean Antoine Marty. Il repose avec son épouse, son fils Antoine et sa belle-fille.

    Sources

    Etat-civil / ADA 11

    Le Courier de l'Aude, la Fraternité

    Délibérations du conseil municipal

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  • Fernand Ancely (1927-2005), maire de Carcassonne

    © Guy Anduze

    Né le 24 mars 1927 à Narbonne, Fernand Ancely avait eu la douleur de perdre son frère aîné dans un camp de concentration pendant la Seconde guerre mondiale. Maurice et son ami André Saura s’étaient fait arrêter par la police allemande à la frontière espagnole, alors qu’ils menaient des actions en lien avec la Résistance audoise. A Carcassonne, Fernand entra très tôt comme employé de banque à la Société Bordelaise et gravit progressivement tous les échelons jusqu’au poste de directeur d’agence en 1976. Après la Libération, il fut des premiers à militer au sein des jeunesses socialistes, nouvellement créées dans l’Aude par Georges Guille et Francis Vals. Peu à peu, la S.F.I.O mit un terme à la domination sans partage du parti Radical-Socialiste qui s’était compromis en 1940 en votant les pleins pouvoirs à Pétain. Seule la capitale audoise conserva un maire radical jusqu’en 1965 où Jules Fil parvint au poste de premier magistrat de la ville. C’est à cette époque que Fernand Ancely devint conseiller municipal. Après la mort de Fil auquel succéda Antoine Gayraud, il occupa successivement le poste d’adjoint chargé du personnel puis celui de Premier adjoint au maire.

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    Pendant la maladie d’Antoine Gayraud, il assura l’intérim et après son décès, fut désigné par sa majorité au conseil municipal pour le remplacer. Il fut élu maire de Carcassonne le 26 mai 1981 par 28 voix sur 33 votants, composés par 17 socialistes et 16 communistes. L’opposition n’ayant pas pris part au vote, on peut légitimement penser que les alliés du Parti communistes français ne se sont pas tous ralliés à sa candidature. Jusqu’aux élections du mois de mars 1983, Fernand Ancely poursuivra l’œuvre de son prédécesseur et mènera à bien le projet d’une salle de congrès sur l’emplacement de l’ancien hôpital général. C’est aujourd’hui la salle du Dôme, inaugurée par son successeur en 1985. On peut également mettre le programme d’amélioration de l’habitat, le Conseil communal de la culture, le C.A.R.T (autobus de la ville) aux crédits de Fernand Ancely.

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    La salle du Dôme

    Au moment de la désignation de la tête de liste socialiste pour les élections municipales de 1983, deux candidats déposèrent leur candidature : le maire sortant et le député Joseph Vidal. Avec deux voix de majorité, Fernand Ancely emporta l’adhésion du vote militant sur son concurrent. C’était sans compter sur l’intervention du bureau national du Parti socialiste qui sous l’égide de Jean Poperen, refusa de reconnaître la victoire d’Ancely en validant la candidature de Vidal. Dès lors, ce déni de démocratie interne favorisa l’émergence de deux clans au sein de la section locale, bientôt rivaux. Les ancelistes, forts de leur légitimité dans les urnes, montèrent une liste dissidente avec le maire sortant. De leur côté, les partisans de Joseph Vidal présentèrent leur candidat sous la bannière de l’union de la gauche avec les alliés communistes. Au soir du premier tour, l’ensemble des voix de gauche réunissait près de 60% des suffrages en comptant la liste "Le Cap" de Peytavi (8,6%) et la liste Faye (2%). Arrivé derrière Joseph Vidal (34,18%), Fernand Ancely (15,51%) ne se maintint pas au second tour mais ne donna pas de consigne de vote. La liste d’union de la droite (RPR et UDF) « Carcassonne avenir » menée par Raymond Chésa qui n’avait aucune chance de remporter l’élection, fut élue à la surprise générale le soir du second tour avec 53% contre 47% à Joseph Vidal. « La gauche la plus bête du monde » comme le titre du livre de Georges Guille, venait de se faire hara-kiri à Carcassonne.  

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    Profession de foi du candidat investi par le PS

    S’il est vrai que des électeurs de Fernand Ancely portèrent leurs voix sur Raymond Chésa ou, dans le meilleur des cas, votèrent blanc, toute la défaite ne peut pas leur être imputée. Si le bureau national ne s’était pas mêlé du vote légitime des militants, la ville de Carcassonne serait restée dans leur giron. Loin de se réconcilier, les socialistes carcassonnais mangèrent leur pain noir jusqu’en 2009, soit vingt-six de purgatoire. L’embellie de la victoire de J-C Pérez fut de courte durée en raison de dissension, d’alliés communistes jouant leur propre partition car maris d’être considérés comme la variable d’ajustement électoral. 

    La vie politique de Fernand Ancely s’acheva avec la défaite de Jacques Arino qui, dans un élan de réconciliation, avait pris l’ancien maire sur sa liste comme possible premier adjoint en 1995. Il s’éloigna définitivement de la vie publique et mourut presque dans l’indifférence générale le 8 février 2005. Il fut inhumé civilement trois jours plus tard au cimetière La conte.

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  • La boulangerie et minoterie Maymou au Moulin du roi

    La vente de la filature de draps de l’île, de terrains et des bâtiments du Moulin du roi par les héritiers d’Edouard Vié en 1860 avait dispersé l’ensemble des biens entre de nouvelles mains. En bordure du béal sur le bras droit de l’Aude, des minoteries s’installèrent tirant partie de la force hydraulique afin d’extraire la farine selon les procédés mécaniques les plus modernes. Jean Maymou (1849-1911) y créa une miroiterie-boulangerie dans la seconde moitié du XIXe siècle qui devint progressivement la plus importante de la ville. Elle dut néanmoins affronter à plusieurs reprises les tourments d’un fleuve déchaîné par les désordres de la météo. Ainsi par exemple, lors de la terrible inondation de 1891, toute la minoterie fut emportée sous les eaux avec charrettes et chevaux. Le propriétaire subit des pertes matérielles énormes mais parvint tout de même à se relever du désastre.

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    Jean Maymou en haut des escaliers avec le canotier

    Le succès de l’entreprise de Jean Maymou n’allait pas sans susciter des jalousies et des rancœurs parmi ses concurrents qu’elle accusait de sous peser le pain mis à la vente. Ce proche d’Antoine Durand qui figurera sur la liste républicaine progressiste contre Jules Sauzède, obtint du maire qu’il prît le 6 décembre 1890 un arrêté municipal afin de poursuivre les fraudeurs. La menace n’ayant pas eu les effets coercitifs attendus pour stopper la pratique, Jean Maymou fit publier une lettre dans le Rappel de l’Aude et le Petit méridional le 21 février 1892. Dans celle-ci, il s’en prend à ses concurrents qu’il accuse de vendre du pain sans le peser et ainsi de tirer un bénéfice sur les miches portées à domicile.

    "Vous vous rappelez n'est-ce pas que quelques kilos de pain furent achetés chez certains boulangers, où il manqua 160 grammes par kilos. Sur les 300 kilos de pain qu'ils fabriquent, ils en font avec le poids exact, qu'ils ont bien soin d'étaler sur leurs étagères, ceux-là sont vendus chez eux. Les 280 restants, qui ne font pas le poids, bien entendu, sont portés à domicile et le tour est joué."

    La réponse des 49 boulangers de la ville réunit en syndicat ne se fit pas attendre. Elle envoya Jean Maymou et les journaux devant le tribunal pour dénonciation calomnieuse. Le 8 avril 1892, il fut condamné à payer 50 francs d’amende, plus la moitié des frais de justice.

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    Le Moulin du roi avant l'incendie de 1917

    La même année, l’usine de l’île, propriété des Anglais, fut ravagée par un incendie et les ouvriers se retrouvèrent sans travail. La boulangerie Maymou se porta aux secours des sinistrés sans le sou, en leur octroyant un crédit pour qu’ils puissent se fournir en pain. Une telle sollicitude fut communiquée dans le journal en précisant que la concurrence n’avait pas voulu s’aligner sur la générosité de la boulangerie Maymou. Faut-il donc s’étonner qu’un jour passant devant la caserne, Jean Maymou ait été attaqué physiquement ? Il ne dut son salut qu’à l’appui de cavaliers du 17e dragons volant à son secours.

    Là où la boulangerie Maymou faisait dix à douze fournées par jour, ses concurrents n’en produisaient que deux. Doté d’un personnel et de voitures circulant en ville, elle pouvait se permettre de ne pas augmenter le prix du pain et de faire crédit. La concurrence, aidée d’un apprenti qu’elle ne payait pas ou de la patronne, réussissait à faire des bénéfices grâce à la main d’œuvre malgré seulement deux fournées. Jean Maymou réalisait 23,92 francs par fournée ; les autres boulangers 27,92 francs par fournée avec un seul ouvrier. Ce procédé n’a guère changé de nos jours, où des boulangeries qui ont de gros coûts de fonctionnement et de main d’œuvre sont rentables grâce à la quantité de pain produite.

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    Après le décès de Jean Maymou en septembre 1911, puis de sa veuve Marie Tournier sept ans plus tard, les époux Lavie hériteront de la minoterie. Au Moulin du roi, ils sont encore quatre minotiers à la veille de la Seconde guerre mondiale : Guilho, Cals, Borrel et Lavie. Au Moulin neuf, près du Pont vieux, se trouve Armengaud. Après la Libération et jusque dans les années 1960, il n’y aura plus que Boutteville associé à Blanchard.

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