Originaire du Cantal, la famille Rougié vient s’installer à Carcassonne à partir de 1851 au numéro 44 de la rue du Mail, dans le quartier des Capucins. C’est là que Pierre, né le 27 décembre 1812 dans le petit village de Cautrunes sur la commune de Jussac, a établi son atelier de chaudronnerie dans lequel il vit avec son épouse Marie Delzangles, née à St-Cernin le 30 janvier 1830. C’est dans ce village qu’il se sont mariés avant de donner naissance à Carcassonne à Antoine, le 10 décembre 1851. Ce sera leur unique enfant, car onze jours plus tard Marie décède, certainement des suites de l’accouchement. Elle n’avait que 21 ans ! Antoine ne connaîtra donc pas sa mère et sera élevé par un père qui, très tôt, lui apprendra le dur métier de chaudronnier afin qu’il puisse un jour lui succéder. A quarante ans, alors que l’on croyait cet endurci incapable de trouver chaussure à son pied, il finit tout de même par rencontrer une jeune femme de quinze ans sa cadette. La jolie Victoire Blanquefort, née le 22 décembre 1866 à Durfort-Lacapelette dans le Tarn-et-Garonne, l’épousera durant les beaux jours de l’année 1890 à Carcassonne. Elle lui donnera deux enfants : Pierre Alphonse Louis le 12 janvier 1893 et Marie, deux ans plus tard. Le ménage a acquis le rez-de-chaussée du 33, rue Victor Hugo afin qu’Antoine puisse travailler chaudrons, poêles et casseroles. L’enseigne porte désormais en belles lettres « A. Rougié » et le patron s’est adjoint les services d’un ouvrier pour l’aider dans sa tâche. Il s’agit d’Emile Conrié ; il possède le même âge que la maîtresse des lieux et vient du même village du Cantal, mais du hameau de St-Martin.
Cette photographie a été prise le 20 février 1893 devant l'atelier, 33 rue Victor Hugo. Sur les genoux de Victoire se trouve le petit Alphonse, âgé seulement d'un mois. A côté, sa mère. Antoine Rougié porte le bel habit du dimanche avec près de lui, son ouvrier Emile Conrié.
Lorsqu’en Antoine put espérer que son fils Alphonse reprît le flambeau de la chaudronnerie, le temps de la guerre venait de sonner la mobilisation générale. Hélas, cet unique garçon dont les mains si précieuses auraient été d’un grand secours pour un père déjà fatigué par des années de labeur ; ces mains, disons-nous, seront brisées par les éclats d’un obus tiré aveuglément par, peut-être, un autre chaudronnier à casque à pointe, de l’autre côté de la tranchée. C’est tellement stupide, la guerre ! Revenu dans son foyer sans la pension d’invalidité qu’il était en droit d’attendre, le jeune Alphonse ne pourra y prétendre que bien des années après.
L'atelier vers 1910. Emile Conrié près d'une fontaine construite récemment. Antoine a désormais la moustache blanchie ; sa belle-mère et son épouse Victoire.
Alors, une fois son pauvre père disparu, il vendra des toiles et du tissu dans le local de chaudronnerie de la rue Victor Hugo. Ainsi s’éteignit trois générations de chaudronniers chez les Rougié, venus du Cantal pour chercher fortune à Carcassonne. Seul le cousin Alphonse Delzangles, installé 3, rue du Pont Neuf, continuera encore en bon auvergnat à étamer casseroles et éviers.
L'ancien atelier avec encore des tissus en vitrine ; nous sommes le 10 janvier 1970
Nous sommes partis uniquement de deux photographies, achetées dans une brocante afin de réaliser cet article. Avec les maigres indices qu’elles contiennent, nous avons été en mesure de retracer la vie de cette famille grâce au travail généalogique : Etat-Civil (Aude, Cantal, Tarn-et-Garonne), recensement, recensement militaire, annuaires (1893, 1904, 1911), factures à en-tête, journaux d’époque.
L'atelier de chaudronnerie Rougié en 2020
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Commentaires
Un travail exceptionnel !!
Merci Martial !!
Bravo!
Belle histoire d'une famille . Merci encore.
Aude
Ouf ! Enorme travail d'historien , pour moi qui ai connu ce commerce en activité , un choc .
Félicitations pour ces recherches
Un grand merci
je ne viens pas souvent, hélas, mais c'est toujours un plaisir de lire vos articles. Merci
Passionnante votre recherche ! Merci de faire revivre ce passé pour nous .
Merci pour ecet article qui montre comme bien d'autres parus la diversité des métiers dans la ville. Un métier de plus avec un savoir-faire qui a disparu. Faire rétamer des ustensiles de cuisine en cuivre, aujourd'hui, relève d'une mission impossible pourtant on sait vous les vendre...
très bon article, merci
Histoire d’une famille très intéressante…. Dans les années 50, il y avait toujours le père Rougié, marchand de drap et marcheur infatigable que l’on rencontrait sur les routes autour de Carcassonne. Il était venu à pied à la colonie des capucins ( Co de Laurent) au dessus des Martys voir son fils Pierre moniteur, qui fera Saint-Cyr et deviendra officier supérieur dans la Légion.
Merci pour tous ces articles forts instructifs
Bonjour et mille merci pour cet article.
Je suis le petit fils d ALPHONSE ROUGIÉ ,drapier,et fils dePIERRE ROUGIÉ,toujours en vie et a qui cet article va offrir un grand bonheur.
Que de souvenirs....j ai adoré aller chez mes gds parents...
Encore merci...
Bonjour Philippe fils de Pierre que j'ai connu à la colonie de Co de Laurent et dont je garde un excellent souvenir. Toutes mes amitiés à votre père.
Bonsoir
Merci pour cet article, je vais pouvoir compléter l'arbre généalogique descendant. Je suis une descendante directe des Rougier de Jussac, et je vis dans le Cantal, il y a une petite erreur ce n'est 1812 mais 1819 pour l'année de naissance de Pierre, la migration vers Carcassonne est beaucoup plus ancienne avant 1730, il y avait d'autres cousins Rougier qui avaient boutique au 118 grande rue à Carcassonne en 1866 (Géraud, j'ai son livre journal) je ne sais pas situer cette rue aujourd'hui? mon ancêtre à la 6éme génération ,un autre Antoine Rougier est décédé le 19 fevrier 1851 à Carcassonne, il faut que je vienne faire un tour aux archives pour continuer mes recherches, Bonne continuation
La grand rue est l'actuelle rue de Verdun à Carcassonne.
Bonsoir, merci pour l'adresse, autre précision Jean Emile Conrier est né à Saint-Martin de Valois ( aujourd'hui rattaché à la commune de Saint-Cernin), env 10km au nord de Jussac
Pierre s'est remarié le 16 août 1855 à Girgols ( cantal) avec Marie Rose Fanjouquet, il décède le 29/08/1894 à cautrunes ( Jussac)