Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 6

  • La blanchisserie Roumens, rue du Manège

    Au début du XXe siècle, Henri Daraud et Victorine Fouscais sont propriétaires de bâtiments situés au lieu-dit "Chemin de l'Aude" à proximité de la rue de Grignan prolongée. Le 26 mars 1918, l'ensemble des biens se retrouve entre les mains de la Société des Grandes Hôtelleries de France moyennant la somme de 17000 francs. Il s'agit d'un corps d'immeuble à usage de lavoir et d'habitation, ainsi qu'un terrain inculte servant d'étendoir situés 3 rue du Manège. Jacques Roumens (1871-1955), ébéniste de son état, ainsi que son épouse Jeanne Reiss, sage-femme, en font l'acquisition le 19 février 1920. C'est ainsi qu'est fondée "La blanchisserie du progrès".

    WhatsApp Image 2025-03-23 at 11.24.18.jpg

    Le 2 juillet 1943, Jacques Roumens vend à Georges Reiss, son neveu adoptif, l'ensemble du fonds de commerce. A cette époque, la surface industrielle s'étend sur 430 m2 entre la rue Andrieu et le Quai Bellevue.

    WhatsApp Image 2025-03-23 at 11.04.04.jpg

    Georges Reiss

    (1898-1973)

    L'historien Claude Marquié nous fait la description suivante du fonctionnement de la blanchisserie durant cette période. Le linge sale, à l'arrivée à l'usine, était réparti selon sa catégorie (draps, serviettes, torchons, mouchoirs), puis marqué à l'encre sur l'ourlet à l'envers du tissu, avec un code client.

    WhatsApp Image 2025-03-23 at 17.42.11.jpeg

    Le linge était envoyé dans de grandes lessiveuses rotatives, puis séché sur des cintres dans une chaufferie alimentée par d'immenses chaudières. Ce travail qui exigeait une certaine force physique était exercé par deux ou trois hommes.

    WhatsApp Image 2025-03-23 at 17.44.57.jpeg

    Le linge propre et sec était ensuite amené dans l'atelier où les femmes assuraient le repassage en le glissant dans les calandres. De l'autre côté de la machine, le linge ressortait entre les mains de deux autres ouvrières qui, dans un geste constamment reproduit, procédaient au pliage.

    WhatsApp Image 2025-03-23 at 17.51.09.jpg

    Le coin supportant le marquage à l'encre était replié pour que l'ouvrière de l'atelier suivant puisse repérer facilement la quantité de ligne d'un même client et en effectuer l'emballage précis. Cela conditionnait l'établissement de la facture correspondante par la secrétaire-comptable.

    WhatsApp Image 2025-03-23 at 10.56.40.jpg

    Monsieur Bousquet

    WhatsApp Image 2025-03-23 at 10.55.57.jpg

    Un chauffeur-livreur effectuait ensuite au domicile de chaque client, la livraison de son linge. Avant son décès, Georges Reiss passa l'affaire à son neveu Michel Fuséro. La blanchisserie Roumens ferma ses portes en 1975. Dans un premier temps l' ICV a acheté l'usine. La famille Audabram ayant racheté l’ ICV, tout fut transformé en appartements.

    Capture d’écran 2025-04-01 à 14.37.39.png

    L'ancienne blanchisserie Roumens, aujourd'hui.

    Sources

    Claude Marquié, L'écho de Carcassonne (1943), Généanet, Michel Fuséro.

    Crédit photo

    Isabelle et Michel Fuséro que je remercie.

    _________________________________________

    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2025

  • Affaire Saint-Vincent : ITE MISSA EST ?

    Faisant suite à l’affaire du projet immersif, voté au cours du dernier conseil municipal, on nous a envoyé une note de François Amigues, Conservateur des Antiquités et Objets d’art de l’Aude, en date du 26 mars dernier. Adressée au préfet de région ainsi qu’à l’évêque de l’Aude, elle définit la position officielle du Conservateur quant à ce son et lumière à l’intérieur de l’église. Veuillez en prendre lecture ci-dessous.

    Capture d’écran 2025-03-31 à 11.30.15.png

    Une affaire fait actuellement grand bruit à Carcassonne, c’est le projet de son et lumière à l’église Saint-Vincent. J’en ai été averti que par ouï-dire, mais pas officiellement. Si j’interviens à ce sujet, c’est que mes fonctions de Conservateur des Antiquités et Objets d’Art de l’Aude m’obligent à prendre position au sujet de la sécurité des oeuvres d’art que contient cet édifice.

    Il faut avant tout rappeler que si ces oeuvres sont propriété de la commune, dans la mesure où elles sont protégées au titre des Monuments historiques (Classées ou inscrites MH), elles font alors partie du patrimoine national et l’administration des MH doit veiller sur elles, en tant que « trésor national ». Le conservateur que je suis et les deux collègues « conservateurs délégués » sommes nommés pour cela.

    Le projet dont il est question présente un réel danger en particulier pour toutes les oeuvres d’art peintes, dont les tableaux du célèbre peintre carcassonnais, Jacques Gamelin. D’après ce que l’on sait du projet, dont on se garde de donner les détails, exposer ces oeuvres pendant dix ans et quasiment sept jours tout au long de l’année, la projection de brumes (brouillards, projetés par des brumisateurs et des fumigènes), tout cela est néfaste pour les oeuvres exposées. Ces oeuvres sont affectées au culte catholique et doivent donc rester à Saint-Vincent. On ne peut les déplacer.

    Il est donc assez ahurissant qu’il ne soit pas venu à l’esprit des concepteurs cette notion de protection des oeuvres d’art. Notre service ne peut rien faire d’autre que d’alerter les autorités sur l’extrême danger dans lequel on va placer ces trésors nationaux, dont on trouvera la liste jointe. 

    Il en est de même pour l’orgue, un des plus beaux de la province. Un tel instrument est d’une grande fragilité de par même les matériaux utilisés (Bois, étain…), toutes composantes éminemment périssables et qui nécessitent un entretien et un contrôle de l’humidité et en particulier en évitant projections de produits volatiles.

    On ne peut donc pas être d’accord avec un tel projet, qui met à ce point en danger les oeuvres d’art et l’orgue, il témoigne du peu d’intérêt de ceux qui l’on conçu pour le patrimoine carcassonnais. Je mets personnellement en garde ses auteurs contre la dégradation ou le dépérissement progressif des oeuvres d’art conservées dans l’église Saint-Vincent de Carcassonne, confinée et aux vitraux aveuglés, pour une si longue période de dix ans.

    Capture d’écran 2025-03-31 à 11.32.30.png

    Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2025

  • En librairie, la biographie inédite de Paul Giro sur Joë Bousquet.

    Faut-il nous émouvoir de n’avoir pas vu paraître depuis fort longtemps, une biographie inédite du poète alité de la rue de Verdun ? Oui, sans aucun doute. Paul Giro réussit la gageure de sortir la mémoire de Bousquet du carcan régionaliste, dans lequel on s’applique à l’enfermer depuis trente ans. D’ailleurs, c’est précisément à cette date que l’auteur, sur les conseils d’amis, commença sa recension. Expurgeant toutes idées convenues, s’en tenant strictement à l’étude critique d’une abondante correspondance, Paul Giro nous livre un autre regard sur Joë Bousquet.

    Capture d’écran 2025-03-26 à 18.52.09.png

    « Le domaine où ces idées reçues sont peut-être les plus répandues est celui de la période militaire de sa vie, que couvre le premier tome de cette ambitieuse biographie. Non, le blessé de Carcassonne n’a pas devancé l’appel lors de la Grande guerre ; non, à aucun moment de cette guerre il n’a été lieutenant ; non, cette blessure ne se produisit pas, le 27 mai 1918, sur le territoire de Vailly (Aisne), mais sur le plateau de Brenelle ; non, au sein des troupes françaises, on ne comptait pas l’Oberleutnant Max Ernst ; non,, ce qui a frappé Joe Bousquet, ce ne fut pas une « balle allemande », mais un éclat de schrapnel ; et enfin non, ce projectile — qui le priva de l’usage de ses jambes pour les restant de ses jours — ne lui sectionna pas la colonne vertébrale… En s’appuyant sur de nombreux documents inédits (et en particulier la considérable correspondance de Joe Bousquet), Paul Giro remet à sa place véritable cette blessure trop fameuse — dont on fait le centre et la matrice de tout, y compris du processus créatif dans lequel le poète devait ultérieurement s’engager. Avant elle, en vérité, il souffrit d’un « mal d’enfance » (pour reprendre le titre de l’un de ses livres), d’un « mal natal » : cette mélancolie, au sens presque nosologie, l’a empêché à jamais, à la suite du traumatisme subi lors d’une naissance catastrophique, de se sentir comme étant tout à fait au monde. La vie amoureuse de Bousquet, qui a fait la matière de tant de gloses, est, depuis ses irrétrouvables rêves d’enfance, mise ici au premier rang des « champs d’application » de sa mélancolie… Jusqu’à ce soir de novembre 1916 où, assistant au Werther de Massenet à l’Opéra de Béziers, le sous-lieutenant Bousquet rencontra une jeune femme qui lui inspira sur-le-champ ce qu’André Breton nommera « le mystérieux, l’improbable, l’unique, le confondant et l’indubitable amour » : elle s’appelait Marthe Marquié. Comme dans une tragédie grecque, un processus était dès lors fatalement enclenché, qui devait atteindre son acmé le 27 mai 1918. »

    Capture d’écran 2025-03-26 à 20.02.30.png

    Paul Giro est né à Carcassonne le 17 avril 1950 dans la rue Armagnac, cinq mois avant la mort de Joe Bousquet. Après des études au lycée Paul Sabatier où il fit la connaissance de René Nelli, il entra en Khâgne au lycée Pierre de Fermat de Toulouse. À Paris, il intègra d’abord Science Po puis l’ENA. Haut fonctionnaire, il fut Chargé de mission au Conseil constitutionnel auprès de Robert Badinter. 

    Joe Bousquet, d’une mort l’autre fait partie d’une trilogie dont le premier tome se nomme Mourir (1897-1918). Les deux autres tomes sortiront aux printemps 2027 et 2028. On peut se le procurer à Carcassonne à librairie Breithaupt, rue Courtejaire. On peut aussi le commander en ligne aux éditions Claire Paulhan. 460 pp. 28

    Editions Claire Paulhan

    Séance de dédicaces au Festival du livre, samedi 12 avril à 17 h, Grand Palais (Paris)

    _____________________________

    Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2025