Nous sommes en 1948, une jeune femme va changer de sexe. Soixante-quatorze ans plus tard, les personnes transgenres sont toujours regardées comme des bêtes de foire, persécutées et mise au banc de la société dans certains états pourtant reconnus comme civilisés. Ce n’est pas en cassant le thermomètre que l’on fera tomber la température. En attendant, des humains souffrent d’être nés dans un corps qui ne leur ressemble pas.
Claire Brésoles
Claire Brésoles, née à Narbonne le 10 novembre 1929, est la fille de Bernard Brésoles et de Angèle Cathary. Issue par sa mère d’une famille Carcassonnaise, elle vit avec ses parents dans un appartement de la rue Courtejaire. Élève très brillante à l’école, Claire songe à devenir professeur. Si elle joue remarquablement bien du piano, son véritable talent c’est l’athlétisme qu’elle pratique sur le terrain d’entraînement du stade Albert Domec. Son coach - comme l’on dirait aujourd’hui - n’est autre qu’Henri Combes qui élève son pur sang au sein de l’ASC.
À 14 ans, Claire Brésoles a déjà enregistré les meilleurs performances françaises cadettes. Elle réalise le 150 m en 20’’ et 2 dixièmes, le 300 m en 44’’ et 4 dixièmes, le 500 m en 1’ 2’’ et 1 dixième. Elle lance le poids sur 12 m et 37 cm , le saut en longueur sur 4 m 88 et compte 2915 points au triathlon. À 16 ans, la fédération d’athlétisme refusa son engagement sur 400 m au championnat du monde, dont le record était détenu par la suédoise Anna Larsson en 1’ 2’’ et 9 dixièmes. Distance trop prolongée pour une cadette, prétexta par deux fois la fédération. Cela n’empêcha pas Claire Brésoles de battre ce record à Saint-Gaudens en 1’ 1’’ 9 dixièmes. L’année suivante, elle remporta une médaille d’argent au championnat d’Europe à Oslo en relais 4 x 100 m.
Claire Brésoles à Carcassonne en 1945 lors d'une course cycliste
Titulaire de deux baccalauréats, fort bien constituée dans sa tête comme dans son corps, Claire décide d’opérer une mutation sexuelle à partir de 1948. Elle troque ses jupes pour le costume avec une facilité déconcertante pour l’époque. Après deux interventions à la clinique Velpeau de Paris et 15 000 francs pour obtenir un certificat du tribunal de Narbonne, Claire devient Pierre Brésoles à l’État-civil. Il passe sans aucun soucis son conseil de révision, effectue son entrée à l’université des sciences de Toulouse avant de remplir ses obligations militaires. Côté coeur, il fréquente Monique Pibre, institutrice de son état, avec laquelle il songe à se marier. Les parents tarderont à donner leur consentement à cause du « Qu’en dira-t-on ». Il finit par épouser sa bien-aimée le 4 juillet 1952 et aura deux enfants : Denis et Daniel.
Spécialiste en botanique, docteur en science à l’Université de Clermont-Ferrand, professeur à l’Ecole normale de Perpignan, proviseur au collège de Rochechouart dans la Haute-Vienne, que dire la carrière de cet éminent Carcassonnais ? Dans les années 1970, Pierre Brésoles s’installa dans le petit village d’Eus, situé près de Prades dans les Pyrénées-Orientales. C’est là qu’il termina ses jours et qu’il est inhumé depuis 2018. Il avait alors 88 ans.
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Commentaires
Bravo et merci Martial pour ce blog très intéressant.
Bonne semaine
Amitiés
Patrick
Merci pour cette biographie racontée avec exactitude et beaucoup de délicatesse. Bravo pour votre travail!