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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 181

  • La destruction de l'ancienne École normale de Carcassonne

    Il est inutile de préciser que les municipalités qui se sont succédé tout au long du XXe siècle, ont été les plus destructrices pour ce qui concerne le patrimoine historique de notre ville. En ce domaine, la palme d'or toutes catégories revient à Monsieur Antoine Gayraud et à l'ensemble de son conseil municipal. Ces gens-là n'avaient aucun respect pour l'héritage que les anciens nous avaient transmis ; il fallait à tout prix raser les vieilleries et construire à la place des cubes de béton : Hôtel Dieu, Lycée de garçons, Chapelles, etc. C'est dans ce mouvement que l'on fit disparaître l'École normale de la rue Littré. 

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    Oh ! Certes, à l'époque la façade du bâtiment n'était pas bien reluisante. Il suffisait d'un ravalement pour lui rendre son lustre d'antan, mais on préféra faire travailler le BTP. Encore de nos jours, les vautours de   la truelle sortis de chez lego, rêvent encore de pouvoir bâtir dans la Bastide leurs fameux cubes en béton. On prend trop souvent ici les mesures de la verticalité avec l'horizontalité du portefeuille. Bref !... Donc, au début de l'année 1975, l'entreprise Depaule envoya ses pelles mécaniques mettre à bas l'École normale. La construction de cette dernière s'était réalisée au XVIIIe siècle, en réemploi avec les vieilles pierres des remparts de la porte de Toulouse. Que croyez-vous qu'ils en firent ? Ils les concassèrent et les utilisèrent ensuite pour la réalisation des routes. 

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    La vieille porte d'entrée fut l'unique objet à être conservé, grâce à l'architecte des Bâtiments de France. Le millésime indiquant la date de 1709 partit avec les gravats. Vous pouvez encore apercevoir les montants de cette porte dans un recoin de l'immeuble cubique qui remplaça l'École normale.

    ecole normale

    Il faut vraiment le savoir car rien n'indique l'histoire de cette porte...

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    Le chef d'œuvre que nous a laissé à la place cet architecte dont la postérité n'a pas, fort heureusement, retenu le nom est sans doute du plus bel effet. Un parking souterrain a été réalisé, mais où sont passées les fouilles archéologiques ? Pourtant sur son emprise, il y avait l'ancien couvent des Augustins. 

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  • La naissance de l'hégémonie du Parti Socialiste dans l'Aude

    Au lendemain de la Libération du département de l'Aude, déclarée officiellement le 25 août 1944, le paysage politique est à reconstruire. Au cours des derniers mois précédant la débâcle Allemande, l'aspect politique au sein des Mouvement Unifiés de Résistance occupe grandement les esprits. Les maquis d'obédience communiste s'occupent avant tout de liquider le nazisme, ennemi redoutable du bolchevisme depuis la fin du pacte de non agression. En coulisse, chacun place ses pions... Henri Noguères et Francis Missa pour le Parti Socialiste clandestin tentent d'obtenir de Gilbert de Chambrun (Chef régional FFI) et de Lucien Roubaud, des places à l'intérieur du futur Comité Régional de Libération. Le refus entraîne la saisine de la Commission des conflits du Conseil National de la Résistance ; elle se prononce en faveur de Noguères. Désormais, le Parti socialiste obtient la légitimité politique d'être représenté dans le Comité de Libération. Il ne va pas s'en priver... Contrairement à ce qui est largement défendu, les communistes combattants ne sont pas si nombreux dans le département de l'Aude. L'essentiel de la force des partisans du camarade Staline réside dans l'énorme débauche d'énergie à occuper le terrain malgré le manque d'effectifs. Là, où il faudrait dix personnes pour diffuser des tracts, porter des messages ou saboter des routes, une seule personne parfois exécute ce travail. Sur le plan politique, le parti communisme fonde plusieurs mouvements dont le Front National, pour donner l'impression de sa puissance, alors même qu'il fonctionne qu'avec peu de militants. En dehors de sa sphère d'influence, le Parti Communiste place des sous-marins dans d'autres mouvements : Parti Socialiste, Mouvement de Libération Nationale, C.G.T, etc. Le Parti Socialiste veut avant tout éviter que les partisans de Moscou ne s'emparent du pouvoir par les armes. Ce ne sont pas les seuls, car les parachutages alliés sur les maquis communistes de l'Aude sont quasiment inexistants, au cours de l'été 1944.

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    Dans ce pays où tout est à reconstruire après l'effondrement du régime de Vichy, le Parti Socialiste joue sa carte. Son objectif ? Chasser du pouvoir les Radicaux-Socialistes, qui ont la main mise sur l'Aude depuis plus d'un siècle et qui, dans leur majorité, ont été Pétainistes. En septembre 1944, la droite qui n'était incarnée politiquement que par Vichy n'existe plus. Un boulevard s'ouvre devant la gauche, encore faut-il faire preuve d'opportunisme. Le résistant Francis Vals d'obédience socialiste, propulsé à la tête du Comité Départemental de Libération fait appel à un ancien de la S.F.I.O, conseiller départemental de Capendu avant guerre. Georges Guille de retour à Carcassonne après avoir été professionnellement exilé par Vichy, n'a pas de passé de Résistant connu. Qu'importe ! Vals en fait son adjoint ; il lui donne pour mission de chapeauter les Comités Locaux de Libération, chargés de mettre en place les municipalités provisoires. Dans celles-ci, il faudra veiller à épurer les anciens sympathisants du maréchal non sans quelques difficultés : "Beaucoup d’anciens membres de municipalités nommées par Vichy s’opposent à l’installation des Comités Locaux de Libération. Toute personne qui y fera obstacle sera traduite devant un tribunal populaire. (Jacques Bounin - Commissaire de la République)" 

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    © affiches.socialistes.free.fr

    A côté de ses fonctions au Comité Départemental de Libération, Georges Guille multiplie les réunions politiques durant l'automne 1944. Il créé une cellule de recrutement de jeunes socialistes et l'on ne se bouscule pas au portillon. Selon Robert Anguille, qui fut de ceux-là, vers le mois d'octobre-novembre 1944 il assista à l'une des réunions de Guille au café Calmet à Carcassonne : "Il n’y avait pas grand monde afin de refonder la section socialiste de l’Aude ; à peine sept personnes. Dans ce café, Guille s’emportait contre les quelques militants car les affiches étaient trop petites. Il y avait Claude Escuret (fille d’une journaliste de Midi-Libre) qui deviendra secrétaire fédérale du PS. A cette époque, la permanence se trouvait en face de la poste. Le Midi-Libre à l’angle de la place de la poste, côté pharmacie. Les jeunes communistes, tous Staliniens, étaient plus nombreux. On arriva à 1200 jeunes socialistes dans l’Aude ; la section de Narbonne était la plus importante. Celle de Carcassonne comptait 400 militants entre 1973-1974." Petit à petit le Parti Socialiste (SFIO) tisse sa toile en partant à la conquête du département. Si le gain électoral encaissé lors des élections municipales de 1945 peut être considéré comme modeste, celui des cantonales renverse la carte politique de l'Aude. En 1936, trois cantons étaient socialistes et les autres, radicaux. En 1945, 28 cantons socialistes, 2 communistes et 1 M.R.P.

    A Carcassonne, les élections municipales de 1945 portent aux affaires la liste commune Républicaine et antifasciste. Avec la volonté de Roubaud, l'ancien député Radical-Socialiste Henri Gout, qui n'avait pas voté les pleins pouvoirs à Pétain, devient maire de la ville. Dans tout le département, les femmes ont pour la première fois la possibilité de voter. Ceci explique en partie, un taux d'abstention avoisinant les 40% en moyenne. Dans les villages des Corbières, les sympathisants de la Ve colonne sont restés chez eux. 

    Elections municipales 29 avril 1945

    Carcassonne

    Inscrits : 19403

    Votants : 12100

    Exprimés : 11058

    Elus

    Henri Gout (Parti Radical Socialiste), Mlle Billot (Résistance), Lucien Roubaud (PS), Dr Cannac (Résistance), Léon Noubel (PS), Louis Raynaud (PS), Gaston Valette (PS), Maurice Demons (PS), Mme Picolo (PS), Jean Sablé (Résistance), Léopold Castel (Résistance), Léon Bonnemaison (PC), Henri Maury (PC), Louis Amiel (PRS), Emmanuel Mestre (PC), Jean Denat (PC), François Vidal (PRS), Camille Gachet (PRS), Suzanne Lespinasse (PS), Jean Rougé (PRS), Joseph Comes (PRS), Léonce Escande (PRS), rené Paris (PRS), Emile Patebek (PS), Mlle Germaine Gladieu (PC), François Cathala (PRS), Charline Margarida (PC), Mme Roche (Résistance), Jules Pelouze (PC) et Marie-Jeanne Mavières (PRS).

    Narbonne

    Liste Socialiste élue

    Castelnaudary

    Inscrits : 5601

    Votants : 3824

    Exprimés : 3701

    Elus

    Liste des groupements de Résistance et d'Union Républicaine et Antifasciste 

    Joseph Degrave / Maire

    Limoux

    Inscrits : 3908

    Votants : 3159

    Exprimés : 3116

    Elus

    Liste Résistante contre Liste Radicale

    La Nouvelle

    Inscrits : 1682

    Votants : 827

    Elus

    Liste unique avec 368 voix, soit 44% des votants

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    Après le congrès d'Epinay, Georges Guille s'opposera à la main mise de Mitterrand sur l'appareil politique nouvellement constitué. La fin de la S.F.I.O sonnait pour lui le glas de l'idéal auquel il croyait. Bientôt, il ne serait plus le Président du Conseil général de l'Aude, laissant à Robert Capdeville la destiné du département de l'Aude. 

    Sources

    Notes, recherches et synthèse / Martial Andrieu

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  • Cet homme qui empêcha la destruction des platanes du square Gambetta...

    De 1248 à 1570, l'emplacement de l'actuel square Gambetta était occupé par le jardin et le couvent des Cordeliers. Il fut démoli sur l'ordre d'un commandant militaire afin de permettre à la ville basse de se défendre contre les huguenots.

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    Le nouveau square Gambetta réalisé en 2016

    La construction du Pont neuf entre 1850 et 1873 amena la la création d'une place sur le terrain appelé autrefois, "la place au charbon". On pensa dessiner une place triangulaire, puis le Conseil municipal dans sa délibération du 18 janvier 1950 opta plutôt pour la forme rectangulaire que nous connaissance encore aujourd'hui.

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    Le Square Gambetta en 1900

    En 1859, l'architecte Buckler proposa d'entourer la place d'une double rangée de platanes. Le 8 décembre de l'année suivante, Antoine des Plas eut l'idée de faire construire un bassin central alimenté par une gerbe d'eau. Ce jardin ainsi aménagé en son centre prit le nom en 1864 de Sainte-Cécile, patronne des musiciens. Restait à délimiter ses abords par une clôture en pierre de Beaucaire. Son espace désormais parfaitement matérialisé, prit la dénomination de square Gambetta en 1881, soit un an avant la mort de l'illustre défenseur de la République.

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    Durant l'été 1944, les Allemands craignant un débarquement allié sur les côtes méditerranéennes vont ordonner la destruction de ce merveilleux havre de paix. Le colonel commandant la place militaire de Carcassonne, souhaite que l'axe donnant sur la route de Narbonne soit dégagé, afin de contrer l'avancée des troupes alliées. Des Carcassonnais sont alors réquisitionnés, mais aucun d'entre-eux ne souhaite vraiment raser ce magnifique jardin. C'est sous la contrainte que la municipalité devra se plier aux exigences de l'occupant. Les micocouliers, les saules pleureurs et autres arbustes remarquables disparaissent à jamais, tout comme les bassins et le superbe kiosque à musique. Dans le boulevard entourant le square, des tranchées anti-char sont creusées. Voilà le triste spectacle de cet été 1944 !

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    Le square après le départ des Allemands

    Certains éléments du décor seront mis à l'abri et sauvés par les municipaux. Deux statues : Mercure et La France blessée. La première se trouve actuellement dans la cour du musée des beaux-arts ; la seconde au cimetière Saint-Michel. D'autres, comme les balustres en pierre de Beaucaire, se trouveraient chez un particulier dans le quartier du Païchérou. Peu de choses, en somme. 

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    En revanche, la double rangée de platanes plantée en 1859 a résisté à la destruction du square. Vous pouvez encore l'admirer de nos jours, elle est vieille de 159 ans ! Au moment de la démolition, le colonel Allemand demanda avec insistance à Roger Gayraud, chef des services techniques de la mairie, que l'on active l'abattage des platanes. L'employé communal trouva alors un subterfuge afin de l'empêcher. Il rétorqua à l'officier que le S.T.O (Service du Travail Obligatoire) avait considérablement diminué ses effectifs et que, par voie de conséquence, la vitesse d'exécution s'en trouvait altérée. M. Gayraud fit valoir que l'on ne pouvait répondre aux souhaits de l'autorité militaire avec pour seule main-d'œuvre, des retraités diminués par les restrictions alimentaires. Le débarquement en Provence n'ayant eu lieu que 4 jours avant le départ des troupes Allemandes, l'affaire en resta là. 

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    Désormais, lorsque vous passerez sous les ombrages des platanes du square Gambetta, vous aurez sans doute une pensée émue pour Roger Gayraud.

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