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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 185

  • Émile Marchais (1899-1958), autopsie d'un préfet de l'Aude sous Vichy

    Notre enquête s'achève sur les préfets de l'Aude nommés par Vichy durant l'Occupation, par Emile, Lucien, Gilbert Marchais. Né à Saint-Yriex-la Perche dans le département de la Haute-Vienne le 9 novembre 1899, Emile Marchais est le fils d'un imprimeur. Il n'est mobilisé durant la Grande guerre qu'à partir du mois d'avril 1918, alors qu'il effectue ses études de droit. Il réside avec ses parents à Confolens (Charente) et obtient en 1926, une licence. Sa carrière de futur haut fonctionnaire débute comme attaché du cadre auxiliaire chef de cabinet du préfet des Ardennes. Jusqu'au 19 juillet 1940, où l'autorité allemande le relève de ses fonctions, il occupe plusieurs postes, notamment à Blois (Chef de cabinet de la préfecture), Châteaudun (Eure-et-Loir) et à Langres (Haute-Marne).

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    Emile Marchais, sous-préfet de Montluçon

    Le maréchal Pétain le nomme sous-préfet d'Alès (Gard) puis de Montluçon durant l'automne 1940. Le 18 juin 1942, Emile Marchais devient Intendant de police de la région de Lyon à la disposition du secrétaire général (René Bousquet), jusqu'à sa nomination comme préfet de l'Aude qui interviendra au mois de septembre 1943. Il remplace à ce poste Marc Freund-Valade, fonctionnaire à l'entière dévotion des lois de l'Etat-Français et responsable de la déportation du procureur Morelli. Marchais allait exercer ses fonctions dans la continuité de son prédécesseur, peut-être avec un peu moins de zèle. Comme tout préfet du maréchal Pétain qui se respectait, il recevait les chefs de la Milice ou celui de la Gestapo dans son bureau. Il n'empêcha pas les rafles des réfractaires du S.T.O, ni d'ailleurs celle des miliciens de Robert Pincemin contre les magasins juifs de Carcassonne. Une épopée dans laquelle les hommes au signe Gamma, volèrent plus de 50 000 francs à ces commerçants. Pas un mot, contre le crime de guerre de Trassanel, pas plus contre l'exécution des patriotes à Baudrigues.

    Le 9 mai 1944, Darnand - Secrétaire général du maintien de l’ordre - fait porter une instruction aux préfets régionaux de Montpellier, Toulouse et Limoges : « Arrestation et regroupement dans les régions de Toulouse , Montpellier et Limoges des réfugiés espagnols du sexe masculin de 18 à 45 ans et des israélites français et étrangers du même sexe et du même âge. » La tranche d’âge est ensuite modifiée dans le courant du mois de 16 à 60 ans pour les espagnols et israélites. Les Allemands n’étaient pas associés à une telle opération, ni demandeurs.
    Le préfet de l’Aude (Emile Marchais) estime à 500 le nombre de personnes à regrouper. Il demande un GMR entier (60 hommes environ) et précise que le chef de la Milice départementale est prêt à joindre ses hommes à l’opération. Le préfet prévoit six wagons de marchandises et six de voyageurs au départ de Narbonne. L’opération fut stoppée en raison du débarquement du 6 juin 1944 (La Libération confisquée / 1993)

    Quand vint la Libération de la ville, il ordonna la destruction des archives de la préfecture dans la chaudière. Trop de papiers compromettant finirent par la faire éclater. 

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    La préfecture de l'Aude

    Quand les F.F.I entrèrent dans Carcassonne le 21 août 1944, ils s'emparèrent de la préfecture. Au grand dam de Félix Roquefort, une semaine après, l'ancien préfet de Vichy n'était toujours pas arrêté. Protégé dans ses appartements préfectoraux à l'abri de l'épuration sauvage, son successeur allait lui sauver la mise. Pierre Augé, ancien consul de Chine et Résistant, nommé par Jacques Bounin (Commissaire de la République) arrivait à Carcassonne le 29 août 1944. Il devait remplacer le honteux Emile Marchais, compromis dans la politique de Vichy. Il négocia avec Gilbert de Chambrun (Chef régional de Libération), le représentant du commandant F.T.P et le Comité départemental de Libération, l'arrestation de Marchais.  La Cour de justice n'étant pas encore installée, Pierre Augé ne voulait pas de justice expéditive en Cour martiale pour son prédécesseur. Donc, contrairement à ses confrères du Languedoc, l'ancien préfet de l'Aude ne fut passé par les armes. Cette anecdote d'importance est racontée par Pierre Cazejust, secrétaire général de la préfecture de Pierre Augé à cette époque.

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    L'Allemagne occupée en 1945

    Emile Marchais a t-il pour autant été condamné par la Cour de justice ? Il est suspendu de ses fonctions le 28 août 1944, c'est la moindre des choses. Mit en disponibilité avec demi-traitement le 3 juillet 1945 et promu Secrétaire général du gouvernement de la Sarre, puis du Wurtenberg. Il s'agit ni plus ni moins d'une région d'Allemagne, placée sous tutelle de la France. Comme Jean Cabouat, préfet de l'Aude sous Vichy, Emile Marchais est recyclé auprès des Gaullistes authentiques en Allemagne. Peut-être enfin s'est-on aperçu en 1946 du passé peu glorieux de ce serviteur de Laval et Pétain ; le 1er juillet 1946 il est mis à la retraite.

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    L'ancien préfet de l'Aude se recycle en devenant le directeur de la Cité hospitalière de Lille en janvier 1952, puis du C.H.R d'Angers où il mourra en fonction le 3 octobre 1953. Entre temps, la chancellerie de la Légion d'honneur le fera Chevalier suite au décret du 12 décembre 1952. L'enquête réalisée sur la moralité de l'impétrant laisse apparaître les mentions suivantes : "Bon fonctionnaire du cadre de réserve". La gendarmerie et le préfet du Nord émettent un avis favorable. Le 18 avril 1953, Emile Marchais, ancien préfet de Vichy, reçoit la croix de chevalier de la légion d'honneur des mains de Louis Dominique Antoine Fataccini - Commandeur de la Légion d'honneur. Nous sommes sous la IVe République ; une époque où l'on amnistie l'ensemble des anciens Miliciens de Darnand. Qui est Dominique Fataccini ? Engagé dès août 1940 dans la France Libre, ce militaire fut l'un des fidèles du général Leclerc en Afrique. Emile Marchais venait devant l'histoire d'obtenir un certificat de virginité. Fermez le ban ! Aux Morts de la Résistance...

    Sources

    Recherches, notes et synthèse / Martial Andrieu

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2018

  • Les origines et la construction du Collège de Varsovie à Carcassonne

    © Martial Andrieu

    Dans une précédente chronique en date du 11 août 2017, nous avions évoqué la création par la ville de Carcassonne du Collège de jeunes filles. Celui-ci avait provoqué l'expulsion des Sœurs Saint-Joseph de Cluny de leur couvent, situé dans l'actuel collège André Chénier. Ce nouveau collège est si prospère que le conseil d'administration dans sa délibération du 13 décembre 1912, émet le vœu qu'il puisse être transformé en lycée. Le conseil municipal valide ce souhait et charge l'administration communale d'effectuer les démarches nécessaires auprès des pouvoirs publics. Hélas, la Grande guerre interrompt ce projet. Les locaux seront réquisitionnés par l'autorité militaire afin d'y installer un hôpital complémentaire. En octobre 1915, le collège est transféré dans l'ancien couvent Notre-Dame, 42 rue Victor Hugo. Le 26 mai 1919, le maire Gaston Faucilhon lit en séance le rapport de Mlle Delbosc, directrice du collège.

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    "La guerre a fatalement entraîné l'ajournement de ces projets mais la vitalité du Collège s'est affirmée au cours de ces années d'épreuves pendant lesquelles, malgré ses tribulations, il a prospéré. Son effectif actuel de 368 élèves pour une population de 30 000 habitants l'emporte sur celui de beaucoup de lycées dans des villes d'importance même supérieure. C'est pourquoi il ne me semble pas trop hardi de demander sa transformation prochaine."

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    Mlle Delbosc, première directrice du lycée

    Après la lecture de ce courrier, le conseil municipal confirme sa délibération du 6 juillet 1913. Il régularise également le transfert du collège de jeunes filles (Couvent de Cluny, rue de Verdun) à l'immeuble du Couvent Notre-Dame, rue Victor Hugo. Le 22 décembre 1913, le Dr Tomey nouvellement élu à la tête de la commune confirme que le projet "tant attendu" de transformation du collège en lycée sera mené rapidement. Il met en avant les conditions déplorables dans lesquelles sont accueillis les 350 élèves, supérieurs en nombre à ceux d'Agen ou de Montauban. Ce n'est que le 10 novembre 1925 qu'un traité constitutif est transmis, par le Ministre de l'Instruction publique, pour approbation. De nouvelles démarches seront entreprises, car l'enseignement du latin n'est pas prévu. 

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    L'ancien couvent Notre-Dame avant sa transformation en lycée

    Un lycée national de jeunes filles est créé à Carcassonne à compter du 1er octobre 1925. L'établissement recevra des externes libres et des externes surveillées. La ville est autorisée à y annexer un internat où seront admises des demi-pensionnaires et des pensionnaires.

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    Porte de la chapelle de l'ancien couvent qui donnait dans la rue des Etudes. 

    Le décret officialisant cette création est signé le 28 février 1926 par Edouard Daladier, ministre de l'instruction publique et Paul Doumer, ministre des finances. Daladier approuve le devis des travaux de transformations, sous réserves de l'exécutions des modifications demandées par la Commission des bâtiments des Lycées et des Collèges. Il serait trop long d'en reproduire ici le détail.

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    Plan du rez-de-chaussée avant sa transformation

    La dépense est arrêtée à 2 324 311 francs. L'état accorde une subvention à la hauteur de la moitié de la somme totale, payable par annuité de 150 000 frs pendant dix ans. 

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    Le nouveau lycée de jeunes filles

    Le 13 août 1929, l'entreprise Fiorio de Limoux est adjudicataire des travaux, tracés selon les plans des  Bertrand et Enderlin. Les travaux sont effectués en cinq tranches. Les deux premières sont livrées le 21 juillet 1933. La porte d'entrée donnant sur le boulevard du Canal (Bd de Varsovie) est en fer forgé, à deux battants sur l'imposte. Elle pèse 1033 kg... Le chauffage central est installé par M. Garric de Carcassonne et l'électricité par M. Laborde. Les autres entrepreneurs sont Chaveau, Busque, Cau, Bourrounet, Pomiès et les Forges de Strasbourg.

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    Cour du lycée de jeunes filles

    En 1937, des difficultés de trésorerie, consécutives au retard du versement de la subvention de l'état, conduisent l'entreprise Fiorio a arrêter le chantier. Les travaux ne reprendront qu'en 1939... Ils ne seront finalement réceptionnés que le 8 janvier 1941 ! L'entrée du lycée était jusqu'en 1931, 42 rue Victor Hugo. Au mois de février 1944, les Allemands réquisitionnent le lycée. Les élèves sont installés dans les locaux de l'école André Chénier. L'internat est déplacé à l'Hôtel Vitrac, rue du Pont vieux, qui devient la cantine. Depuis 1942, le propriétaire était rémunéré pour servir la Légion des Combattants et des Volontaires de la Révolution Nationale à raison de 40 000 francs annuels. Le personnel d'internat est logé dans des chambres en ville. 

    Bureau d'administration sous l'Occupation

    Jourdanne, maire

    Mme Thomas, directrice

    M. Granel, professeur adjoint

    Mlle Escande, économe d'internat

    Hyvert et Amiel, membres nommés par le Recteur 

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    Les Allemands dans le lycée sous l'Occupation

    En 1947, des travaux de surélévation sont exécutés côté boulevard. L'architecte est M. Bourely et l'entrepreneur, Cazanave Noël. L'ancien lycée de jeunes de filles prend le nom de Varsovie après la guerre, en hommage à la ville martyr de Pologne rasée par les nazis. En 1960, la chapelle désaffectée est transformée en vestiaires au rez-de-chaussée et dortoirs, à l'étage. L'orgue est vendu à Mgr Cazemajou, chancelier de l'évêché. Où est-il aujourd'hui ? 

    Sources

    Notes, recherches et synthèse / Martial Andrieu

    L'enseignement public à Carcassonne / S. Dariscon-Rolland

    Archives de l'Aude

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  • François, Pierre Milhet (1881-1949), député de l'Aude

    François, Pierre Milhet est né à Carcassonne le 9 avril 1881. Fervent défenseur de la laïcité, son premier mandat est celui de Conseiller municipal de Carcassonne. Sa profession d'Instituteur ne le dispense d'aller défendre la patrie durant la Grande guerre, dont il reviendra amputé du bras gauche. Il recevra la Médaille militaire et la Croix de guerre pour ses faits d'arme et prendra la présidence des mutilés de l'Aude.

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    François Milhet est élu la première fois comme Député de l'Aude le 16 novembre 1919 sur la liste de la Fédération d'Union économique, agricole, démocratique et sociale. Il siège comme élu du Parti Radical Socialiste. Lors de son mandat, il défend la Société des Nations (ancêtre de l'ONU) dont il souhaite des pouvoirs étendus. A L'Assemblée nationale, il est membre de la commission des armées et des pensions militaires. Il veille également sur le budget des travaux publics afin que le Canal du midi n'y soit point oublié. Ses prises de positions contre le communisme pour défendre la propriété individuelle, sont radicales. François Milhet fera un second mandat le 11 mai 1924 puis se retira de la vie politique après celui-ci en 1928. Il mourra à Carcassonne le 16 octobre 1949 à l'âge de 68 ans.

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    La maison de François Milhet dans laquelle sa sœur donnait des cours de piano ; elle est située sur la place Marcou dans la cité médiévale.

    Sources

    Dictionnaire des parlementaires (1889-1940)

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