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Portraits de carcassonnais - Page 13

  • Louis de Cadalvène (1756-1847)

    Voici un Carcassonnais dont personne ne s'est semble t-il intéressé dans notre ville ... Louis Cadalven naît à Versailles le 18 décembre 1756. A 17 ans, il occupe la fonction de valet puis de Huissier de la chambre de Monsieur, le frère du roi et Comte de Provence. Au moment de la tourmente révolutionnaire sous le régime de la Terreur, Cadalven réussit à s’échapper des Tuileries grâce au savant Monge, Ministre de la Marine en 1792. Ce dernier le nomme alors Commissaire des guerres du département de l’Aude. A Carcassonne, Cadalven organise et structure les établissements militaires de la capitale audoise et de Narbonne ; il effectue également la levée de masse de l’Aude. Il rencontre sa future épouse Jacquette Pauline Thoron, fille d’un négociant résidant dans l’ancienne paroisse Saint-Michel (Section de l’Égalité). Caldaven habite, lui, dans la Section de la Fraternité.

    Au mois de septembre 1793, le Commissaire des guerres est affecté à l’armée des Pyrénées sous les ordres de Dugommier, afin de reprendre la main sur les Espagnols. Le 18 nivôse An II, Caldaven devient Commissaire ordonnateur en chef de la division de Mont Louis, mais ne résiste pas aux turpitudes hivernales qui font cruellement souffrir sa santé. Il réintègre Carcassonne où tout le monde le réclame, de la municipalité jusqu’au préfet. Sans compter, sa promise dont il est éloigné depuis plusieurs mois. Après un bref séjour à Narbonne, il s’établit dans la capitale audoise et s’y marie le 12 décembre 1797. De cette union naissent quatre enfants à Carcassonne dont :

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    © Généanet

    Jules Charles Antoine de Cadalvène (1798-1852), Directeur de la poste française.

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    © Généanet

    Edouard Pierre Marie (1799-1852), historien et égyptologue.

    En juillet 1808, Napoléon qui est en guerre avec l’Espagne a prélevé le personnel militaire de la région afin de constituer un corps d’observation. Cadalven est affecté au 3e corps d’observation des Pyrénées-Orientales, commandé par le général Reille. Le 21 juillet, blessé à la main gauche et le 14 août, demande à rentrer à Carcassonne étant d’en l’impossibilité de poursuivre sa mission. Le 19 août, le Baron Trouvé, Préfet du département de l’Aude, demande au Ministre que M. de Cadalven dont le poste est resté vacant à Carcassonne y revienne : "Il est passé pour mort, il n'est que blessé, sa santé était déjà très faible quand il partit à l'armée, elle a été complètement délabrée par la fatigue de la journée où il a été blessé, il sera longtemps hors d'état de faire du service actif, dans la montagne surtout."

    En demandant l'envoi d'un Commissaire des Guerres à Carcassonne, il demande de préférence M. Cadalven: "Les bonnes intentions qui animent ce militaire, le zèle qu'il apporte dans l'exercice de ses fonctions, l'harmonie qui a toujours régné dans nos relations sont pour moi de puissants motifs de le désirer. Signé: Trouvé. » Satisfaction fut donnée au Préfet de l'Aude et au Commissaire Cadalven qui est de nouveau affecté à Carcassonne.

    Cependant, les nécessités de la guerre d'Espagne vont obliger à envoyer encore une fois le commissaire Cadalven à Narbonne. Aussitôt des démarches sont faites pour le faire rester à Carcassonne: c'est la Municipalité, Dejean frère du Ministre, le Général Guillet, commandant le département de l'Aude, Lacuée, conseiller d'Etat, le Préfet Barante, etc... si bien que, par décision du 12 avril 1810, le Ministre fait rentrer le Commissaire Cadalven de Narbonne à Carcassonne qu'il ne quittera plus avant la fin de sa carrière militaire. Bonaparte 1er Consul, nomme Cadalven par arrêté du 18 vendémiaire An X, à l'une des 204 places de Commissaire des guerres.

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    Louis XVIII, frère de feu "Louis Capet".

    Le retour au pouvoir des Bourbons donne à Cadalven la possibilité de tirer partie de sa position passée comme huissier de la chambre du frère du Roi, futur Louis XVIII. Il obtient plusieurs charges pour ses fils, est maintenu comme Commissaire des guerres. Surtout, la médaille de Chevalier de Saint-Louis lui est octroyée. 

    Les Cent jours et le retour de Napoléon sont un désastre pour ce militaire dénoncé le 21 avril 1815 par le général Chartrand auprès du Ministre comme : « Royaliste distingué, qui depuis 20 ans exerce les mêmes fonctions à Carcassonne, ses dépravations ont fait beaucoup de mal à Sa Majesté, il y a lieu de le remplacer. » Jean Hyacinthe Chartrand, né à Carcassonne, commandant du département de l'Aude pendant les Cent jours, sera fusillé en 1816. Inhumé à Lille, une rue porte son nom dans notre ville près de la place Carnot.

    Cadalven fait alors des pieds et des mains pour rester auprès de sa famille à Carcassonne et fait intervenir le Comte Maurice Mathieu. L’exil de Napoléon à Sainte-Hélène fait à nouveau son bonheur et Caldaven réclame la Légion d’honneur et son retour chez lui. Louis Cadalven est anobli par Sa Majesté Louis XVIII le 15 février avec titre d’écuyer.

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    © Visseaux.org

    Armoiries de Louis de Cadalvène

    D'argent au chevron de gueules, accompagné en chef de deux chênes arrachés de sinople et en pointe d'un lévrier courant de sable collecté d'azur bouclé d'or, au chef abaissé et ondé d'azur chargé de trois mollettes d’or.

    Dans les années qui suivirent, il parviendra à faire modifier son patronyme en Louis de Caldavène, en expliquant que l’orthographe est erronée. Ce militaire qui - comme beaucoup à cette époque - parviendra à survivre à tous les régimes après la Révolution, s’éteindra à l’âge de 90 ans à Paris en janvier 1847. 

    Sources

    Un Commissaire des guerres sous la Révolution et l'Empire / 1934

    Journal militaire / XIIIe année / An X

    Visseaux.org

    ADA 11 / Etat-Civil

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2019

  • Le Carcassonnais Etienne Laborde, officier de l'Empereur Napoléon 1er

    Etienne Laborde naît à Carcassonne le 3 décembre 1782 et est baptisé le lendemain dans la paroisse Saint-Sernin. Son père, Jean Laborde, occupe les fonctions de greffier à l’Hôtel de ville et sa mère, Jeanne Marie Menot, ne travaille pas. 

    Le 3 octobre 1793, le très jeune Laborde rejoint le 2e régiment de ligne dans lequel il occupe successivement les fonctions de caporal, fourrier, sergent et sergent-major. Le 7 juin 1809, il est en Espagne lorsqu’il reçoit son brevet de sous-lieutenant. Le 14 octobre 1811, le lieutenant Laborde suit son régiment en Allemagne, fait la campagne de Russie et passe Capitaine le 8 avril 1813 au moment d’entrer en Saxe.

    « M. Laborde s’est constamment distingué par son zèle pour le service, sa bonne conduite et sa bravoure, notamment au combat de Soltonanska en Russie le 23 juillet 1812, où cet officier, alors lieutenant de grenadiers au 85e de ligne, a sauvé la vie au grenadier Dranet, qui était de la même compagnie, tué de sa main un soldat russe, et blessé grièvement deux autres au moment où ces trois soldats russes allaient massacrer le grenadier Dranet, qui était tombé en leur pouvoir : c’est en récompense de cette action qu’il a été décoré de la Croix de la Légion d’honneur ! »

    Pendant le combat, il avait été blessé d’un coup de feu à la joue. Le 17 novembre suivant à Viasma, c’est au genou qu’il fut frappé. Parmi les actions courageuses de notre Carcasosnnais, ajoutons la note suivante : « Le 12 janvier 1814, M. Laborde reçut l’ordre de M. le général de Cambronne de partir à onze heures du soir de Langres (Haute-Marne) avec 150 hommes pour se réunir à un détachement de 600 hommes, commandé par le lieutenant-colonel Albert, du deuxième régiment de grenadiers, à l’effet d’aller attaquer 1200 Autrichiens qui s’étaient établis dans un village à une lieue et demie de Langres. M. Laborde, qui était placé avec 150 hommes à la sortie du village par où l’ennemi a cherché à se sauver, lui a fait beaucoup de mal, en a blessé plusieurs de sa main et a fait un grand nombre de prisonniers : c’est en récompense de cette action qu’il a été fait officier de la Légion d’honneur. » Ceci lui valut d’être élevé au grade d’Officier de la Légion d’honneur le 21 février 1814.

    Lorsque l’Empereur est exilé à l’île d’Elbe, ce dernier le choisit pour l’accompagner au sein du Bataillon-Napoléon avec grade de Capitaine adjudant-major, le 13 avril. Cette présentation avait été faite sur proposition du général Cambronne. Etienne Laborde eut l’occasion de rencontrer un autre Carcassonnais célèbre, le Baron Peyrusse, payeur de la couronne. Ce dernier se tenait à Orléans lorsque Laborde, gardien du trésor de l’Empereur garni de quarante-deux millions, s’y rendit afin de déposer le dernier fourgon contenant huit millions. Notons que les hommes qui accompagnaient l’Empereur portaient tous la cocarde tricolore jusqu’à l’embarquement. Cet embarquement d’évasion pour lequel il fut le premier averti le 26 février 1815. Le 1er mars pour Cent Jours, Napoléon remettait le pied en France et reprenait son pouvoir. La fidélité de Laborde sera récompensée par le grade de Chef de bataillon des chasseurs à pied de la Garde impériale.

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    La bataille de Waterloo

    Lors de la bataille de Waterloo, il se tient aux côtés du maréchal Ney. Sous la Seconde Restauration, il est rétrogradé au rang de capitaine et passe dans la Légion de l’Aude. Il reçoit la Croix de Saint-Louis le 25 mai 1825. Après 1830, on lui octroi les fonctions de Commandant de la place de Cambrai. Dix ans plus tard, alors que l’ancien officier profite de sa modeste retraite à Paris, il se rend à Londres et rencontre le prince Louis-Napoléon pour lequel il n’est pas inconnu. Avec dix-sept autres conjurés, il prépare une action à Boulogne-sur-mer contre le pouvoir de Louis-Philippe 1er, Roi des Français.

    Dans la nuit du 5 au 6 août 1840, Louis-Napoléon Bonaparte débarque avec une cinquantaine de conjurés près de Boulogne-sur-Mer. Prendre la ville, la sous-préfecture et la mairie nécessiterait trop d’effectifs. Les conjurés décident de se rendre à la caserne du 40ème régiment d’infanterie pour que celui-ci apporte les renforts nécessaires. La tentative est un échec. Contraint de fuir, Louis-Napoléon et quelques complices montent dans un canot pour rejoindre leur bateau. Des coups de feu éclatent, le prince est blessé, le canot chavire et les fugitifs sont recueillis. Arrêtés, ils sont traduits devant la justice royale.

    Le procureur général du Roi près de la Cour des Pairs, Franck Carré, les rend coupables « le 6 août 1840 d’un attentat dont le but était de détruire, soit de changer le gouvernement, soit d’exciter les citoyens ou habitants à s’armer contre l’autorité royale, soit d’exciter la guerre civile, en armant ou en portant les citoyens ou habitants à s’armer les uns contre les autres. » Etienne Laborde fera deux ans de prison à Chaillot dans la maison du docteur Pinel.

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    Signature d'Etienne Laborde

    Après la Révolution de 1848, Louis-Napoléon se présente à l’élection présidentielle - la première au suffrage universel. Il est élu et laisse son siège de député de la Charente-Inférieure à Etienne Laborde qui siègera à l’Assemblée du 13 mai 1849 au 2 décembre 1851. Ce bonapartiste se retrouve à droite dans l’hémicycle. Après le Coup d’état du Prince Président devenu Napoléon III, Il est nommé comme Gouverneur du Palais du Luxembourg où siège actuellement le Sénat.

    Etienne Laborde meurt à Paris (VIe arrondissement) le 31 juillet 1865 à 82 ans ; un très bel âge pour l’époque. Son unique fille Gabrielle mourra 18 ans avant lui à l’âge de 29 ans à Carcassonne chez le sieur Borrel, 6 rue Pinel alors qu’elle visitait cet apprêteur de draps.

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    Ouvrage d'Etienne Laborde / 1840

    Sources

    Recherches / Synthèse et rédaction / Martial Andrieu

    Le plutarque de 1847 / Biographie des hommes du jour

    ADA 11 / Etat-Civil

    Cour des Pairs / Procès-Verbal / 1841

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  • Joseph Poux, l'historien de la Cité de Carcassonne.

    © ADA 11

    Joseph Poux naît à Carcassonne dans la rue du Pont vieux, le 11 avril 1873. A l’âge de dix ans, il perd son père et part avec sa mère rejoindre sa famille à Albi. Dans la ville Tarnaise, il fait de brillantes études au lycée Lapérouse et décroche son baccalauréat le 16 octobre 1892. Reçu 6e au concours de l’Ecole Nationale des Chartes, Joseph Poux en sort avec le diplôme d’archiviste paléographe en 1898 et intègre les Archives de l’Ariège. Quatre ans plus tard, sur recommandation du ministre Delcassé, l’historien est nommé archiviste de l’Aude. Lorsqu’il arrive à Carcassonne, Joseph Poux est d’abord frappé par l’exiguïté des locaux ne permettant pas un classement un optimum des collections. L’endroit est poussiéreux et malcommode ; le nouvel archiviste départemental entreprend alors ce que l’on nomme dans le jargon professionnel : un désherbage. C’est-à-dire qu’il procède à l’élimination des papiers inutiles : « C’est peu d’être suffoqué, durant de longues heures, par l’épaisse et noire poussière qui se dégage des laisses empilées dans les coins les plus inaccessibles, il faut encore procéder à l’examen attentif de chaque article, interpréter de son mieux la lettre des instructions, peu précises souvent, qui règlent les suppressions, et endosser la responsabilité délicate de débarrasser les séries sans les appauvrir. » A cette époque, les Archives départementales se trouvent dans un local adossé à la Préfecture de l’Aude ; elles déménageront dans les années 2000 dans un nouveau bâtiment d’une grande fonctionnalité en-dessous de Grazailles. 

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    Les anciennes Archives de l'Aude, rue Jean Bringer

    Animé d’une grande puissance de travail, Poux multiplie les publications et les mémoires dans les Annales du Midi et les bulletins des sociétés savantes. Muni de documents innombrables, l’historien s’assigne une mission après avoir entendu le sous-secrétaire d’état aux Beaux-arts Dujardin-Beaumetz, déplorer une étude sérieuse sur la Cité de Carcassonne. Joseph Poux qui dans sa jeunesse avait assisté aux restaurations de Viollet-le-duc, se met à l’ouvrage. Il écrira l’histoire de la Cité et annonce ainsi son programme : « L’ouvrage que nous projetons d’écrier contribuerait à combler une lacune que tout le monde déplore. Il s’agirait de prendre le monument à son berceau, de déterminer étape par étape tous les détails de son développement organiquie entre le XIIe et le XIVe siècle (L’épanouissement), de suivre pas à pas l’incessante désagrégation de l’œuvre à travers 500 ans d’inutilisation pratique et de quasi-abandon (La décadence), de caractériser enfin la physionomie nouvelle imprimée à des ruines par le talent puissant, mais inégal, de Viollet-le-Duc (La restauration). »

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    La tour de la Chapelle avant les restaurations

    D’une façon méthodique à l’aide de fiches, Poux réalise ce tour de force et publie avec le concours de son ancien camarade Edouard Privat, les cinq gros volumes entre 1927 et 1937. Il s’agit là de l’ouvrage de référence par excellence qu’il convient de posséder dans sa bibliothèque. Si vous manquez de place, sachez qu’il existe du même auteur un « Précis historique, archéologique et descriptif de la Cité de Carcassonne » édité en 1923. Il sera traduit en Anglais, trois ans après.

    Joseph Poux décède le 9 juin 1938 à Carcassonne et est inhumé au cimetière de la Cité. Pouvait-il en être autrement ? A la fin de l’année 1938, une stèle est érigée par souscription dans le jardin du Prado à proximité de la Porte Narbonnaise, avec en son centre un médaillon de bronze sculpté par Ducuing. Mes demandes de restauration de celle-ci sont restées longtemps vaines, jusqu’en 2015 où Jean-François de Mialhe, alors conseiller municipal en charge de la Cité, a pu rendre sa dignité à ce monument.

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    Dans le quartier des Capucins le nom de Joseph Poux est associé à une place depuis le 10 décembre 1940. Il est bon de savoir qui étaient ces grands Carcassonnais dont on le nom n'évoque plus rien. Reste leur œuvre qui se perd depuis la disparition des René Nelli, Gaston Bonheur, Joe Bousquet, etc. Tous ces érudits Audois qui avaient une envergure au-delà des frontières du département emportant l'histoire de chez nous avec eux. 

    Sources

    C-M Robion / Joseph Poux / 1988

    Jean Girou / La vie des personnages célèbres de l'Aude / 1940

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