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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 228

  • Les secrets des anciens remparts médiévaux de la Bastide Saint-Louis (III)

    L'avant dernier volet de notre série sur les anciens remparts de la ville basse, nous amène aujourd'hui le long des boulevards Barbès et du commandant Roumens. Le bastion Montmorency tire son nom du gouverneur du Languedoc, dont les armoiries figuraient au centre de deux frontons reposant sur deux colonnes. On les aperçoit encore sur chacune des deux faces de l'ouvrage. 

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    Le bastion Montmorency en 2017

    Cet ouvrage, le mieux conservé des quatre autres qui enserrent la ville basse, fut construit sur les fondations de la primitive porte des Jacobins. Elle est représentée sur le dessin ci-dessous datant de 1467. Elle était munie d'une avant porte donnant sur un pont de bois, qui s'avançait vers l'actuelle rue de la Digue. Un fossé en avant de la porte recevait les eaux pluviales et usagées qui ruisselaient le long des murs. Selon une chronique, elle avait dû être édifiée en 1357. La tour du Tenda (A), au bout de la rue de la Digue, jouait le rôle de sentinelle en point névralgique. Car, selon Cros-Mayreveille, c'est là que passait autrefois la voie romaine en direction de la Cité.

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    © Bibliothèque Nationale de France

     Le bastion Montmorency a dû ensuite conserver sa destination militaire, car une casemate servit au début du XIXe siècle de loge maçonnique. La loge Napoléon s'installa en cet endroit ; les décorations symboliques seraient l'œuvre de Gamelin fils. 

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    © Droits réservés

    La loge maçonnique dans les années 1970

    Le bastion devint la propriété de Coste-Reboulh jusqu'à son décès en 1891. C'est ensuite L. Parlange, négociant en vins ayant ses bureaux allée d'Iéna, qui en prit possession. Il offre l'agrément d'un parc en terrasse, aux murs ornés extérieurement de supports d'armoiries et flanqué d'échauguettes. L'une d'entre elles fut aménagée en loggia ; elle porte un blason aux armes de Montmorency en donne sur le boulevard Pelletan.

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    La loggia du bastion avec les armes de Montmorency

    Cette loggia éclaire une très grande salle qui était meublée, au temps de M. Parlange d'une cheminée monumentale à colonnes en bois de chêne, avec des lambris de deux mètres de haut. Au début des années 1930, le bastion fut acquis par Émile Delteil qui y fonda une clinique bien connue des Carcassonnais. Aujourd'hui, tout ceci appartient au groupe Korian qui administre la maison de retraite Montmorency.

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    En cheminant en direction du boulevard Barbès, arrêtons-nous à porte des Jacobins (B). Sur sa droite, la disparition d'un kiosque à journaux et l'aménagement de surface du parking des Jacobins, mit au jour en 1992 les vestiges du rempart de la ville basse. Il s'agit de l'unique tronçon conservé et visible par tous. Après 1764, il fut question de transformer les anciennes portes défensives de la ville en de monumentales entrées ouvertes sur l'extérieur. Seule la porte des Jacobins fut réalisée en 1779 par Pagnon. Toutefois, elle ne prendra ce nom qu'en 1812. Elle s'appela successivement "Porte Saint-Louis", "Porte des Casernes" et à la Révolution "Porte de la Fraternité". 

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    Avant d'arriver à la cathédrale Saint-Michel (C), vous remarquerez une tour arasée mise au jour vers 1950, ouvert à la gorge. Elle comportait trois niveaux jusqu'à la hauteur du chemin de ronde, situé sur les chapelles de la cathédrale qui au rez-de-chaussée possédait trois archères. Cet ouvrage ne figure pas sur le plan de 1462, c'est donc qu'il fut sans doute réalisé postérieurement. La cathédrale est la plus ancienne de la ville basse.

    Sa construction n'a rejoint, au cours des ans, le clocher que vers le XVe siècle où les murs se sont soudés à cette tour porche utilisée comme beffroi. Le passage du Prince noir fut l'une des causes qui précipitèrent la finition de l'édifice, car le nouveau plan de réduction de la ville porta l'enceinte du côté méridional de l'église. Un chemin de ronde crénelé démoli par Viollet-le-duc ou son successeur Boeswilvald, courait au-dessus des chapelles avec passage au travers des contre-forts. (Antoine Labarre)

    On remarque sur ce mur méridional diverses ouvertures murées en plein cintre, dont la plus belle est à mi-longueur de façade d'une façon jumelée. Il s'agit d'enfeux, sortes de tombeaux aménagés dans l'épaisseur des murs pour recueillir les restes des personnes inhumées en ce lieu.

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    Le square de l'armistice de 1918

    Ce square devant le parvis de la cathédrale était une nécropole. Lors de la création de ce jardin en mars 1951, plusieurs corps furent soulevés et enlevés avec la terre de déblai. De par les ossements qu'Antoine Labarre a vus, il en déduisit que nos ancêtres étaient de fortes corpulence. En remontant le grand escalier vers le boulevard, jetons un oeil sur l'angle nord-ouest de la cathédrale. Nous y voyons le reste d'une porte. Il s'agit de la porte des morts qui servait à faire communiquer l'ancien cimetière dont nous venons de parler, avec le nouveau. Il était aménagé hors du rempart dans le vaste fossé qui s'étendait du jardin du Chapitre (à côté de l'hôtel de police) jusque légèrement au-dessus de la rue Jules Sauzède et en largeur sur tour le boulevard, route comprise. Des trouvailles funéraires furent faites autours d'aménagements de canalisations de gaz, d'eau ou d'égouts. Ce cimetière fut désaffecté en 1778.

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    L'étendue de l'ancien cimetière désaffecté en 1778

    Par ce qu'il en reste, la porte des morts doit sa particularité à la disposition des gonds qui la faisaient s'ouvrir vers l'extérieur, c'est-à-dire vers le cimetière. Ceci paraît anormal si on songe que le mur de l'église servait de rempart et que le système de fermeture était exposé aux attaques de l'assaillant. Selon, Labarre, en temps de guerre une barbacane la protégeait.

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    Sur la traversée qui unit le boulevard Barbès à la rue Tomey, une chapelle funéraire avait été édifiée au XVIe siècle pour servir de sépulture aux évêques de Carcassonne. On ignore si elle a pu servir. Mais sous les escaliers montant au boulevard Barbès, subsiste la crypte qui fut percée par Viollet-le-duc, lequel voulait créer à l'ouest une entrée monumentale avec baldaquin. Pour réaliser les fondations, il perça le caveau. De cette chapelle, on remarque encore les arrachements et deux chapiteaux frustes ans le mur du clocher. Les deux piliers d'entrée de cette chapelle ont été démolis lors de la création du jardin.

    Sources

    A. Labarre / L'Indépendant / 1975

    H. Alaux / Quartier et faubourgs au fil du temps / 2002

    Martial Andrieu / Notes et synthèses

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2017

  • Une œuvre originale de Camberoque vandalisée à l'école Jules Ferry

    Dans ce quartier populaire de Carcassonne, la presse se fait très souvent l'écho des faits divers de vandalisme perpétré par certains individus désœuvrés. Or, le vandalisme ne saurait-être assimilé particulièrement à une population, une communauté voire une jeunesse. Il existe bel et bien un autre type de saccage inodore mais loin d'être indolore. Nous voulons parler de celui des cols blancs ; ceux qui a longueur d'année se chargent de diffuser la morale et le civisme, à travers l'école et la police. 

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    Il y a quelques jours, je suis tombé sur un documentaire de 1969 réalisé sur le peintre Carcassonnais Jean Camberoque. Il est sans doute inutile de le présenter, car nous avons déjà fait un article et nombreux sont parmi vous, ceux qui le connaissent. Dans ce film diffusé pour la télévision régionale, Camberoque évoque son travail de céramiste et comment il en avait fait l'apprentissage. En 1949, alors qu'il passait dans la région de Castelnaudary, il s'arrêta chez un potier céramiste. Il s'intéressa à la matière de l'émail, particulièrement à la couleur des pots et des assiettes. Elle pouvait se prêter à des réalisations murales et leur donner un peu de gaité. Ainsi, il fit un séjour dans une poterie en se familiarisant à la technique - les couleurs qui sont crues ne rendent leur éclat qu'après la cuisson. Ce n'est qu'après cette période d'initiation, que Camberoque réalisera une œuvre en céramique sur la façade du collège du Dr Lacroix à Narbonne en 1960. Signalons au passage, que la sous-préfecture de l'Aude a prix soin de faire restaurer l'ensemble des œuvres du peintre, se trouvant dans sa juridiction. C'est très certainement peu de temps après, qu'une céramique décorera l'entrée de l'école Jules Ferry dans le quartier du Viguier à Carcassonne.

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    Voici l'œuvre dans son intégralité en 1969

    "Cette œuvre en céramique réalisée pour l'école Jules Ferry est au fond symbolisée par ce mouvement un peu joyeux des enfants. Le tout, dominé par ce poème d'Eluard qui s'appelait "Liberté", dont j'ai écrit quelques phrases en haut de la céramique. J'ai essayé de traduire une espèce de gaité, de joie de vivre. J'espère y être arrivé." (Jean Camberoque / 1969)

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    Piqué par ma curiosité coutumière, j'ai envoyé un ami prendre des photographies sur place. A dire vrai, j'étais loin de m'attendre à pareil vandalisme sur une œuvre d'art. Un peu comme si le Conservateur du Musée des Beaux-arts de Carcassonne avait cisaillé en deux un tableau de Gamelin pour faire de la place, la céramique subit un sort identique. Au fond, n'est-ce pas un musée à ciel ouvert avec une valeur pédagogique, puisque situé dans une enceinte scolaire ?

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    A une date que nous ne saurions déterminer, une partie de la céramique a été supprimée afin de réaliser une porte d'accès. On peut estimer qu'un bon mètre et cinquante centimètres ont été détruits. Déjà, une grille en fer du plus bel effet est venu s'appuyer sur les carreaux avec une saignée dans le mur. Plus loin, la pose d'un interphone a supprimé une dizaine de carreaux. Si cette œuvre gênait les nouveaux aménagement indispensables à la vie quotidienne de l'école, on aurait pu chercher à avertir les héritiers du peintre. Tout simplement, rechercher une autre solution qu'une basse manoeuvre de maçonnerie exécutée avec l'assentiment de la mairie et de la direction de l'école.

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    Le poème de Paul Éluard sur la liberté, a été amputée de ses deux premiers vers. N'est-ce pas là, un beau symbole ? Les responsables ne pourront pas affirmer qu'ils ne connaissaient pas l'auteur de cette céramique. Elle est signée en bas et à droite... Hier, j'ai informé le cabinet du maire de Carcassonne. Au-delà de cas, cela pose la question de l'avenir des ouvres d'art sur l'espace public de notre ville. Depuis longtemps, je réclame la constitution d'une commission afin de les inventorier. Le désert n'est pas assez grand à Carcassonne pour ceux qui veulent y prêcher...

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2017

  • Les secrets des anciens remparts médiévaux de la Bastide Saint-Louis (II)

    Nous poursuivons notre tour des anciens remparts médiévaux avec aujourd'hui, les boulevards Jean Jaurès et Camille Pelletan. Afin de faire face à de probables attaques des Huguenots, la ville dut revoir ses systèmes de défense. À partir de 1530, les vieux murs du XIVe siècle furent aménagés en une courtine et renforcés à l'aide des pierres des anciens couvents des Cordeliers et des Jacobins. Ces bâtiments situés à l'extérieur des remparts - square Gambetta et en-dessous de l'actuelle caserne Laperrine - menaçant la défense de la ville basse, furent rasés. Les religieux se réfugièrent à l'intérieur des remparts et rebâtirent leurs couvents sur l'emplacement actuel de la poste centrale et du Théâtre municipal Jean Alary. Quatre gros bastions triangulaires à oreillons, englobant les vieilles tours médiévales, firent leur apparition.

    L'intérieur comprenait deux rampes d'accès pour monter l'artillerie sur les terrasses, au-dessous desquelles ont pratiquées casemates, soutes et chambres de mines, galeries de circulation débouchant par des poternes sur les fossés. (Gustave Mot)

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    Un bon schéma valant mieux qu'un long discours, nous avons dessiné à l'échelle sur une vue aérienne Google maps, l'emplacement du Bastion du bourreau à partir des contours du bastion du Calvaire. Le seul qui est aujourd'hui intact à 90 % - il ne lui manque qu'un oreillon. Après quoi, nous avons juxtaposé les deux images à l'endroit où se tenait celui du bourreau, à l'angle du boulevard Sarraut et du boulevard Jean Jaurès. Au centre, la tour du XIVe siècle.

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    Nous nous trouvons actuellement à la pointe extrême de ce bastion construit en 1590 avec les pierres du couvent des Cordeliers. En face, se trouvait depuis 1958 la clinique Saint-Vincent transformée maintenant en logements. Les travaux de démolition du bastion du bourreau débutèrent le 3 mars 1885. Il est possible que les pierres aient été vendues pour édifier les belles demeures le long du boulevard Jean Jaurès. Les restes de la tour médiévale ont été abattus en 1974, lors de la rénovation de la clinique St-Vincent. Déjà en 1962, on y avait trouvé deux magnifiques chapiteaux gothiques avec leurs colonnes.

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    Cette maison de 1903 a été bâtie sur le tracé de l'oreillon sud-est, d'où sa forme arrondie. Dans le même alignement, citons l'entrepôt de charbon Gisclard. C'est sur l'ancien Cinéma des familles, que fut édifiée la clinique St-Vincent en 1958. Si l'on poursuit en direction du square Gambetta, on remarquera que les maisons ont été posées sur les anciens remparts. Il suffit de descendre dans les caves...

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    C'est le cas par exemple ici

    Fermant la rue du 4 septembre, on trouvait la tour de la Bouscaterie. Quelques mètres plus loin, à l'hôtel Central, la tour de la Curaterie. A l'angle de la rue de Verdun, une grand tour carrée ressemblant à un bastion, qui avait nom de "Tour de Jaule". Ici, la déformation de geôle qui faisait fonction de prison. L'entrée de cette prison se trouvait rue de Verdun (Actuellement, caviste Le verre d'un), à côté de la poterne ayant remplacé la porte des Cordeliers.

    bastion du bourreau

    De cette prison, il reste la porte monumentale du XVe siècle, avec arceau en tiers points et piliers moulurés. C'est une entrée massive dont la façade comportait des meurtrières. Une de celles-ci fut démolie pour créer un couloir.

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    Dessin de la bastide par Antoine Labarre.

     C'était une tour carrée de 5 mètres environ de couloir sur 3 mètres de passage, surmontée d'un étage et munie d'ouvertures pour le tir à l'arquebuse avec un mâchicoulis. Sa construction avait été décidée en 1570 par le capitaine Puget, chevalier de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem aux ordres du Maréchal de Danville. Cet individu passait pour un expert militaire et fut député à Carcassonne, en raison des évènements, pour défendre la ville contre les Huguenots. 

    Après que Mgr de Bezons a fait combler les fossés en 1764 et planté des arbres, il fut question de remplacer les anciennes portes défensives par des entrées monumentales. Ce projet ne se fit que pour l'actuelle Porte des Jacobins. Nous nous projèterons la fois prochaine entre les bastions Montmorency et de la Tour Grosse.

    Sources

    Antoine Labarre / L'Indépendant / 1975

    Gustave Mot / carcassonne, ville basse / 1963

    H. Alaux / Quartiers et faubourgs au fil du temps / 2002

    Synthèse et notes / Martial Andrieu

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