On pourrait toujours rabâcher la belle histoire qui arrange trop souvent la conscience des biens pensants ; celle qui enjolive la vérité sur certains héros tardifs d'hier érigés à la Libération en procureurs de l'épuration expéditive. Assassiner, voler ou tondre ne constitue pas un acte héroïque, loin s'en faut... Lorsqu'on a le temps et la chance de se plonger dans la vraie histoire que l'on trouve dans les dossiers d'archives, on trouvera le discernement nécessaire pour mettre un terme aux idées reçues. Vous savez bien, celles contenues dans certains manuels d'histoire où à la fin les gentils sont très gentils et les méchants, très méchants. Quand on mesure l'étendue de l'âme humaine peut-on sincèrement croire que certains de ces hommes se sont ainsi rangés d'un côté, sans intérêts ni prédation. Laissons donc aller notre esprit critique en évitant autant que possible les préjugés des sentences populaires. Elles n'ont fait que trop de mal en maculant l'intégrité des libérateurs par des actes d'une cruauté sans nom.
Si la vraie Résistance au sein des Comités d'épuration a mis en place des Cours de justice dans le respect du droit, afin de décider du sort des collaborateurs et miliciens, il en est qui se revendiquant d'elle ont déshonoré la cause qu'elle défendait. En son sein, des hommes ont assassiné sans jugement à la prison de Carcassonne, torturé et volé dans le canton de Limoux, assassiné le capitaine "Charpentier" parce qu'il avait découvert le vol d'argent parachuté, tondu de pauvres femmes...etc. Le pire c'est que ces misérables ont bénéficié de la loi d'amnistie de 1954 et de l'appui des réseaux politiques auxquels ils appartenaient dans les maquis. Tout cela entachant les valeurs de Résistance, il a fallu sauver ces mécréants.
Les Carcassonnais, comme ailleurs, se sont acharnés sur des femmes déconsidérées pour avoir couché avec des "bôches". On appelle cela la collaboration horizontale... L'actrice Arletty en fut le symbole d'après-guerre : "Mon coeur est Français, mais mon cul est international" dira t-elle à ses juges. Certaines les ont aimé tout simplement et des enfants sont nés de ces relations, d'autres leur ont soutiré des infos pour la Résistance, encore d'autres se sont révélées indicatrices de la Gestapo.
L'épuration sauvage
Peu de temps après le départ des Allemands, des pseudo-résistants vont se livrer dans Carcassonne à des pratiques en dehors des règles de droit. Outre les forfaits contre les miliciens et collabos, les femmes ne vont pas être épargnées par cette répression. Toutes celles- enfin presque - qui seront reconnues sans jugement, sans preuves et le plus souvent sur la rumeur, pour avoir eu des relations avec l'occupant, seront molestées et tondues.
C'est dans cette maison bourgeoise, située en haut de la rue de la liberté qu'elles seront livrées à la honte publique et promenées à travers la ville.
© secretintelligenceservice
Les officiers de la Kommandantur 734 de Carcassonne comme le colonel Bodo Gieche ou Frank Raith ont eu chacun des maîtresses françaises avec lesquelles ils ont habité en ville. Pour ce dernier, ce fut 27 rue du 4 septembre. Parmi les horreurs de la guerre, notons l'histoire de cet enfant abandonné à l'écluse du Fresquel au Pont rouge chez Mme X, pendant que ses parents Franz Dierkes et sa maître Élisabeth Sinitzine fuyaient Carcassonne en août 44. D'après le C.N.R.S, on recense 100.000 enfants nés de liaisons entre françaises et soldats allemands.
Il n'est pas question d'exonérer les responsabilités de certaines de ces femmes qui ont vraiment collaboré et dénoncé des patriotes. La plupart ont échappé à l'épuration sauvage en fuyant avec leurs amants. D'autres l'ont subi ou ont été jugées par la Cour de justice. L'épuration sauvage a eu raison d'une jeune femme Carcassonnaise tondue sur la rumeur ; elle était vierge... Elle s'est suicidée quelques jours après.
____________________________
© Tous droits réservés/ Musique et patrimoine/ 2015