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Seconde guerre mondiale - Page 4

  • Louis Blasi (1891-1944), commissaire des RG à Carcassonne.

    Si tout revenait, rien ne changerait même le pire. La France d'aujourd'hui est bien mûre, le fruit ne demande qu'à tomber de l'arbre. Les cibles sont ressorties et même prêtes à être collées. Les responsables de la pseudo-décadence, désignés. Ce jour-là, le ball-trap des revanchards vichystes déchus depuis 80 ans, fera de nouvelles et nombreuses victimes.

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    N'oublions pas que tout commença par des listes de juifs, de franc-maçons, de communistes et autres indésirables affichées dans le Journal officiel par le régime de Vichy. L'Etat français accrochait autant de cibles dans le dos, reprises en coeur par les journaux de la collaboration sans aucune vergogne. Gringoire, fasciste et antisémite - pardon du pléonasme - donnait en pâture les noms à abattre. Dans le viseur du journal figurait Louis Blasi, commissaire des Renseignements généraux en poste à Carcassonne, pour son appartenance à la Franc-Maçonnerie.

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    Sur le mémorial des victimes du nazisme à l'intérieur du Grand Orient de France, 16 rue Cadet à Paris, figure le nom de Louis Blasi.

    Né à Toreilles le 7 août 1891, Louis Blasi était entré dans la police le 8 mai 1922 comme inspecteur à Montpellier. Initié dans la loge Fidélité-Travail de cette ville, il s'affilia ensuite à "La libre pensée" de Carcassonne, ville dans laquelle il occupa les fonctions de commissaire spécial des renseignements généraux à partir du 15 août 1937. Louis Blasi eut pour mission la gestion du camp de réfugiés espagnols de Bram. Le 17 août 1941, M. Cabouat, Préfet de l'Aude, le révoque sur ordre de Vichy en raison de son appartenance à une société secrète. Cela ne l'empêche pas de se montrer lors du rassemblement républicain du 20 septembre 1942, commémorant la bataille de Valmy.

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    Le logement de Louis Blasi à Carcassonne, 50 rue d'Alsace.

    Agent du réseau de renseignement Gallia de la Résistance, attaché au BCRA à Londres, la Gestapo de Carcassonne commence à le suspecter d'espionnage. Le 14 juin 1944, Louis Blasi est arrêté par les services de la police allemande dans un café de Rodez. Les informations permettant sa capture ont été livrées par Lamouret (fusillé à la Libération), secrétaire du PPF de Carcassonne, à la Gestapo via l'agent Joseph Robert. Le Parti Populaire Français, organe fasciste, fondé par Doriot et principal allié des nazis avec le Rassemblement National Populaire de Marcel Déat. Louis Blasi se retrouve à la prison de Rodez. 

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    © Blog, Maquis de Bouscalous

    Les funérailles des trente martyrs de Sainte-Radegonde, le 20 août 1944

    Le 17 août 1944, les Allemands font sortir trente prisonniers politiques. Ils seront exécutés à Sainte-Radegonde. Louis Blasi fut de ceux-là.

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    Tombe à Toreilles (Pyrénées-Orientales)

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    Cette plaque en hommage aux policiers de Carcassonne où figure le nom de Louis Blasi, n'a pas été emportée dans le nouveau commissariat. Elle se trouve dans l'ancien, à l'abandon et dans l'indifférence.

    Sources

    Procès de Joseph Robert devant le tribunal militaire

    Jugement de Cour martiale de M. Lamouret

    Le Maitron

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  • Charles Maurras, l'antisémite, le 26 avril 1942 à Carcassonne.

    En farfouillant dans les archives d'une histoire qu'on a voulu dissimuler, à défaut d'avoir pu la faire disparaître, on se rend compte qu'à Carcassonne il n'y avait pas que des résistants. A l'invitation du président de la Fédération départementale de l'Action Française, le comte Christian de Lorgeril, une conférence fut donnée le 26 avril 1942 par Charles Maurras au Théâtre municipal. L'Action Française, fondée en pleine affaire Dreyfus afin de jeter au pilori l'innocence d'un capitaine injustement accusé de trahison en raison de son judaïsme, trouva en Maurras l'éloquence d'un porte-voix. Philosophant sur le nationalisme intégral en prônant l'exclusion des juifs, dont Léon Blum auquel il voue une haine féroce, l'académicien avait trouvé son public au sein de l'extrême droite française et de ses soutiens monarchistes.

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    Juste avant la guerre, l'Action Française se porte bien dans l'Aude. Elle compte des correspondant à : Carcassonne, Aigres-vives, Azille, Barbaira, Boutenac, Bram, Canet d'Aude, Castelnaudary, Castelnau d'Aude, Coursan, Conques-sur-Orbiel, Cuxac d'Aude, Espéraza, Ferrals-des-Corbières, Ginestas, Lacassaigne, Laurabuc, Laure, Lézignan, Limoux, Saint-Hilaire, Montréal d'Aude, Narbonne, Névian, Pennautier, Pexiora, Rieux-Minervois, Saint-André-de-Roquelongue, Saint-Nazaire, Saint-Papoul, Sallèles d'Aude, Tourouzelle, Trèbes et Villedaigne.

    La très grande partie de ces responsables locaux sont de grands propriétaires viticoles. Nous retrouverons leurs noms associés au Service d'Ordre Légionnaire, puis à la Milice de l'Aude à partir de février 1943. Ils soutiennent le régime de Vichy et la collaboration avec le Reich, vers lequel ils exportent le vin. Autant dire que si la réunion du 26 avril porte essentiellement sur le Félibrige - Maurras admire Frédéric Mistral - elle ne peut-être que politique. A ce sujet, laissons la parole au chroniqueur de l'Action Française qui en donne un compte rendu.

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    "Poursuivant sa tournée de conférences, Charles Maurras parlait mercredi soir au Théâtre municipal de Carcassonne. Présenté en langue d'Oc par l'abbé Salvat, félibre majoral, qui lui dit toute l'émotion qu'il ressentait à l'accueillir dans la ville où lui même avait fait ses études secondaires, notre directeur exposa longuement, devant un auditoire nombreux et attentif, l'oeuvre de Mistral, sous les trois aspects du nouvel Etat français : Travail, Famille, Patrie.

    De longs et vigoureux applaudissements saluèrent le conférencier et, avant de se séparer, l'assistance écouta debout "La Marseillaise". M. Cabouat, préfet de l'Aude, qui n'avait pu assister à cette manifestation d'une haute tenue littéraire, s'était fait représenter par M. Rousseau, chef de cabinet.

    Nous avions également remarqué parmi les personnalités présentes MM. Jourdanne, maire de Carcassonne ; Clément, Inspecteur d'Académie ; le colonel Imbart, représentant le général Guizard, président du Secours National ; Gélis, président de la Légion française des combattants, et le chanoine Sabarthe, vice-président ; le commandant Mercury, retenu par son service, s'était fait représenter ; le chanoine Cannac, supérieur du Petit Séminaire ; le pasteur Sellier ; Pierre Embry, bibliothécaire de la ville ; le vice-président de la Chambre de commerce, etc.

    Notons enfin la présence du comte Christian de Lorgeril, président des Amis de l'Action Française, qui avaient organisé cette manifestation au profit de la Légion Française des Combattants et du Colis du Prisonnier, ainsi que celle de M. Level, représentant de Monseigneur le Comte de Paris.

    A la sortie de la conférence, les Amis de la l'Action Française se réunirent dans une salle de l'hôtel Terminus et le comte de Lorgeril présenta à Maurras les nombreux groupements venus à bicyclette des communes avoisinantes, notamment le vaillant groupe de Laure-Minervois."

    Charles Maurras est condamné le 27 janvier 1945 par la cour de justice de Lyon pour Haute trahison et intelligence avec l'ennemi. Il est déchu de son siège à l'Académie française.

    Sources

    Journal de L'Action française / 16 mai 1942

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  • A la recherche d'un inconnu, déporté du camp de Dachau

    Récemment, un ami m'a donné un document manuscrit contenu dans une enveloppe expédiée en 1957. Ce courrier était arrivé chez son père, ancien résistant, sans qu'il ne fut possible d'en connaître l'expéditeur. Le document se présente en un seul et long papier quadrillé, sur lequel on a dessiné à la main le plan fidèle du camp de concentration de Dachau. Ceci, dans un but bien précis. L'expéditeur, jusqu'ici inconnu, écrit au dos du document le récit de son internement. A l'aide de lettres majuscules, il indique les endroits qu'il a fréquentés.

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    Afin de remonter la piste de l'illustre inconnu, il fallait un indice. Or, notre individu avait pris soin de dessiner l'insigne et le numéro de déporté qu'il devait porter sur lui durant son internement : 72570. Notons que ces chiffres devaient être également tatoués sur le bras des prisonniers à leur arrivée dans le camp. La lettre F, correspondant à la catégorie des déportés politiques.

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    Autant chercher une aiguille dans une meule de foin... L'inconnu ayant pris soin de noter dans son récit la date de son entrée à Dachau, le 20 juin 1944, nous avons pu remonter la piste. Il faisait partie des 2140 déportés partis du camp de Royalieu à Compiègne vers Dachau, le 18 juin 1940. En grande majorité, ces individus étaient initialement détenus à la centrale d'Eysses ou à Villeneuve-sur-Lot. En consultant les registres de ce transport parti de Compiègne, nous avons épluché tous les matricules. Le numéro 72570 nous est alors apparu sous les noms de Roger Bertrand Adrien Fourès, né le 4 novembre 1918 à Toulouse. Ecoutons désormais ce qu'il raconte.

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    En arrivant à Dacahu, le 20 juin 1944. J'ai été enfermé pendant un mois au Block 17 (A), puis j'ai été envoyé à Allach, un autre camp à 8km. Quand je suis tombé malade le 15 janvier, j'ai été évacué sur Dachau et mis au Block 22 (B), puis je suis rentré à l'infirmerie au Block 13 (K). J'y suis resté 15 jours, en sortant je suis allé au Block 22 (B) et au Block 24 (C). Quand j'ai été jugé guéri on m'a mis au Block 16 (D) où tous les jours j'allais travailler au kommando des tresses (E). Là, je faisais des tresses avec des bouts de chiffons.

    La veille de la libération, les SS nous avaient réunis sur la place d'appel (L), c'était de là que nous devions partir pour aller à la gare, où on devait soi-disant nous évacuer, mais où en réalité on devait y rester. C'est d'ailleurs là (M) qu'ils ont tué tous les juifs ce même jour.

    A la Libération le 29 avril 1945, tous les Français nous avons été au Block (F) jusqu'à notre rapatriement. J'ai retrouvé mes affaires au magasin (J) et tout ce que j'ai porté nous l'avons trouvé dans les magasins des SS (H). Vous verrez que dans ce camp rien ne manquait. Il y avait aussi une maison de passe où tous les capos allaient le dimanche. Les capos, ce sont ceux qui étaient prisonniers comme nous, mais qui nous commandaient et qui nous donnaient les coups. Quand je suis arrivé à Dachau, c'est aux douches (O) qe l'on m'a pris toutes mes affaires et que l'on m'a donné le beau costume de bagnard.

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    Entrée du camp de Dachau au mois de mai 1945

    En bafouillant sur internet, nous avons trouvé des informations sur les conditions de l'arrestation de Roger Fourès. Marié en 1942 à Odette Pubill à Laroque-d'Omes (Ariège), il menait une vie ordinaire comme préposé des postes à Mazirat (Allier). Le 25 mai 1944, les Allemands arrivent à Mazirat et, pensant arrêter les résistants locaux, encerclent la maison qui leur sert de refuge. Mais les maquisards ne sont pas là et en représailles, ils alignent des hommes du village contre un mur et prennent trois otages : Jean Berger, Roger Fourès et Marcel Marionnet. Les otages sont amenés à la prison de Montluçon et de là sont transférés la prison militaire allemande de Moulins.

    Roger Fourès n'était pas résistant. Toutefois, les otages n'étaient souvent pas pris au hasard. Le maire devait établir une liste sous la contrainte. Dans le cas de Roger Fourès, son activité syndicale ou ses opinions politiques connues ont fait de lui un coupable désigné. Il a fini sa vie le 10 septembre 1987 à Lavelanet, après avoir achevé sa carrière comme receveur PTT à Rodôme dans l'Aude.

    Sources

    Fonds pour la mémoire de la déportation

    AFMD de l'Allier

    Musée de la Résistance de Besançon (Affiche)

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