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Seconde guerre mondiale - Page 3

  • Salsigne : Depuis 80 ans ils le savaient...

    C'était exactement le 31 janvier 1944. Ce jour-là, treize mineurs appartenant à un GTE (Groupement de Travailleurs Étrangers) ont été embarqués dans des camions militaires allemands, au vue et au su de tous. Tous, c'est-à-dire les autres. Ceux qui n'étaient pas juifs ou étrangers, et surtout pas des deux. Ceci ne peut être nié ; ils savaient, car dans son récit de témoignages sur Trassanel, l'écrivaine Annie Kochert-Bonnefoy a interrogé des habitants. Je cite, le passage de son livre "Ils voulaient vivre libres". Un ouvrage non à vocation historique, mais à évocation testimoniale : 

    "Le Midi, à l'heure de la pause, il n'était pas rare que nous partagions notre repas, assises sur une banquette du café de Conques. Aujourd'hui, Ginette me racontait avec moult détails sordides, l'arrestation d'une vingtaine de juifs qui avait eu lieu en janvier à Salsigne. Elle tenait l'histoire d'une commerçante, voisine et maie d'un dénommé Léopold Shloss.

    Ce jour-là, les pauvres gens qui avaient été recensés en tant que juifs (et qui représentaient donc l'ennemi suprême pour nos envahisseurs) furent rassemblés dans un hangar à l'extérieur du village pour y être interrogés avant leur déportation pour Auschwitz. L'un des hommes, qui a eu l'incroyable chance de réussir à s'échapper, a raconté l'horreur à tous ceux qui voulaient bien l'entendre. Dans la région, beaucoup savaient que des juifs avaient été arrêtés, mais on ignorait comment s'était passée la rafle, et où ces gens avaient été envoyés. En fait, personne ne savait grand chose sur cette triste affaire. les faits sont ainsi arrivés à l'oreille de la voisine de Léopold Schloss : comme le brave homme refusait de trahir ses coreligionnaires qui n'avaient pas été encore fichés par la préfecture, il fut terrassé de coups de poing au visage et tenu en respect par le canon du révolver que Bach tenait appuyé contre sa tempe. Le gestaltiste lui enfonça les côtes et lui écrasa les parties Gestapiste à grands coups de pieds avant de s'acharner sur le pauvre homme jusqu'à l'interposition de l'officier commandant la troupe. Ce n'est qu'à cet instant, profitants de la panique, que le témoin de ce drame réussit à s'enfuir."

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    La plaque payée par M. Montané, ancien mineur de Salsigne

    Le travail historique que j'ai effectué grâce à l'ouverture des archives du procès de René Bach, n'apportait pas de témoignage pouvant affirmer que les gens du coin étaient au courant, à part le garde-champêtre de Salsigne.. Il a surtout démontré la véracité de cette histoire tragique, à travers les témoignages des victimes et de l'accusé. Le récit d'Annie Kochert ne laisse pas de doutes, à condition que les gens qui se sont confiés à elle n'affabulent pas. Dès lors, il convient de nous interroger sur les raisons pour lesquelles, les autorités locales ont fait silence sur cette histoire. Pourquoi n'a-ton jamais posé de plaque en hommage à ces malheureux ? Le silence porterait-il des secrets peu avouables ?  L'inaction de camarades pour cacher et préserver la vie de leurs collègues étrangers, ou pire, la dénonciation de quelques traitres ? 

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    Le Monde (Magazine). 27 janvier 2024

    Un article paru ce matin dans le Magazine du journal Le Monde, titre : "Le village de Salsigne se souvient de ses treize mineurs juifs raflés par les nazis." Pas sûr que cela soit sans réticences car la commémoration, désirée par MM. Montané et Ogé, soulèverait en secret un flot de réprobations du côté des maires du voisinage. Mercredi 31 janvier à 11h, on devrait rendre hommage à ces treize malheureux. Robert Montané a acheté la plaque à ses frais et ira la poser lui-même. On craint qu'elle ne soit vandalisée. Mon travail historique, s'il a permis comme le dit le journal Le Monde de faire resurgir l'histoire de cette rafle, ne plairait pas du tout aux camarades actuels.

    http://musiqueetpatrimoinedecarcassonne.blogspirit.com/archive/2016/09/15/arrestations-et-assassinats-des-juifs-de-la-mine-de-salsigne.html

    Ce communiqué de presse m'a été transmis. Il est publié in-extenso

    "Nous sommes tous des Juifs Allemands" ?

    Célèbre cri de centaines de milliers de manifestants en mai 1968 quand la France,horrifiée, découvrit qu'était ainsi défini Daniel COHN-BENDIT, futur député européen ( liste EELV).

                                                                                                                                                                                                                                                                                  31/01/1944....31/01/2024 :

    Le 18 mai 1945  (en exécution de la réquisition numéro 254 du juge d'instruction de Carcassonne en date du 12 mai 1945 ) des gendarmes recueillent des témoignages à SALSIGNE à propos de la rafle du 31 janvier 1944 de mineurs-ouvriers ,êtres humains de confession israélite . Un des témoins ---résidant de SALSIGNE---parle à 14 h de <<déportés (....)de race juive allemande >>. Oui , vous avez bien lu  :  << de race juive allemande >> ! Nous sommes le 18/05/1945 et la guerre est gagnée depuis le 08/05/1945. René BACH (qui a piloté la rafle du 31/01/1944  ) est en prison, les panzers ne vont pas revenir mais  on parle néanmoins  de << race juive allemande >>......Pour combien de temps ? Qu'est-ce que cela sous-entend ?

    Par exemple ,pour d'autres mineurs-ouvriers, êtres humains de confession musulmane , ayant rejoint le Corps Franc de la Montagne Noire et tués au combat ( entre autres Meziane TAHAR ,Mohamed  BEN BOURENI, Rabia KIMOUN, Ahmed GUERCHOUCHE ) ,oserait-on un jour parler de <<  race maghrébine musulmane  >> ? Quelles rues portent leurs noms ?

    Par exemple ,pour  les êtres humains de confession israélite ,ayant rejoint le Corps Franc de la Montagne Noire et tués au combat ( entre autres  Raymond LEVY-SECKEL,etc...), oserait-on un jour parler de << race juive alsacienne >> ? Quelles rues portent leur nom ?

    Par exemple , pour les êtres humains de confession israélite raflés le 24/08/1942 dont un seul survivra (Simon SALZMAN, Chevalier de la Legion d'Honneur  ultérieurement) ,reviendra  dans l'Aude puis travaillera comme mineur-ouvrier  jusqu'à sa retraite ,oserait-on parler de << race juive  westphalienne >>  ?

    Par exemple , pour un être humain de confession chrétienne comme l'Abbé Albert GAU qui sauva de la déportation et des chambres à gaz des centaines de ses << frères >>(pour le citer) oserait-on parler de << race  catholique  audoise >> ? Les villes de CARCASSONNE et de BRAM  se sont heureusement souvenu ..... 

    31 janvier 1944....31 janvier 2024 : 80 années  pour  12 mineurs-ouvriers tués en déportation.  Et il ne faut pas d'une commémoration ?

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  • Louis Blasi (1891-1944), commissaire des RG à Carcassonne.

    Si tout revenait, rien ne changerait même le pire. La France d'aujourd'hui est bien mûre, le fruit ne demande qu'à tomber de l'arbre. Les cibles sont ressorties et même prêtes à être collées. Les responsables de la pseudo-décadence, désignés. Ce jour-là, le ball-trap des revanchards vichystes déchus depuis 80 ans, fera de nouvelles et nombreuses victimes.

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    N'oublions pas que tout commença par des listes de juifs, de franc-maçons, de communistes et autres indésirables affichées dans le Journal officiel par le régime de Vichy. L'Etat français accrochait autant de cibles dans le dos, reprises en coeur par les journaux de la collaboration sans aucune vergogne. Gringoire, fasciste et antisémite - pardon du pléonasme - donnait en pâture les noms à abattre. Dans le viseur du journal figurait Louis Blasi, commissaire des Renseignements généraux en poste à Carcassonne, pour son appartenance à la Franc-Maçonnerie.

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    Sur le mémorial des victimes du nazisme à l'intérieur du Grand Orient de France, 16 rue Cadet à Paris, figure le nom de Louis Blasi.

    Né à Toreilles le 7 août 1891, Louis Blasi était entré dans la police le 8 mai 1922 comme inspecteur à Montpellier. Initié dans la loge Fidélité-Travail de cette ville, il s'affilia ensuite à "La libre pensée" de Carcassonne, ville dans laquelle il occupa les fonctions de commissaire spécial des renseignements généraux à partir du 15 août 1937. Louis Blasi eut pour mission la gestion du camp de réfugiés espagnols de Bram. Le 17 août 1941, M. Cabouat, Préfet de l'Aude, le révoque sur ordre de Vichy en raison de son appartenance à une société secrète. Cela ne l'empêche pas de se montrer lors du rassemblement républicain du 20 septembre 1942, commémorant la bataille de Valmy.

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    Le logement de Louis Blasi à Carcassonne, 50 rue d'Alsace.

    Agent du réseau de renseignement Gallia de la Résistance, attaché au BCRA à Londres, la Gestapo de Carcassonne commence à le suspecter d'espionnage. Le 14 juin 1944, Louis Blasi est arrêté par les services de la police allemande dans un café de Rodez. Les informations permettant sa capture ont été livrées par Lamouret (fusillé à la Libération), secrétaire du PPF de Carcassonne, à la Gestapo via l'agent Joseph Robert. Le Parti Populaire Français, organe fasciste, fondé par Doriot et principal allié des nazis avec le Rassemblement National Populaire de Marcel Déat. Louis Blasi se retrouve à la prison de Rodez. 

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    © Blog, Maquis de Bouscalous

    Les funérailles des trente martyrs de Sainte-Radegonde, le 20 août 1944

    Le 17 août 1944, les Allemands font sortir trente prisonniers politiques. Ils seront exécutés à Sainte-Radegonde. Louis Blasi fut de ceux-là.

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    Tombe à Toreilles (Pyrénées-Orientales)

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    Cette plaque en hommage aux policiers de Carcassonne où figure le nom de Louis Blasi, n'a pas été emportée dans le nouveau commissariat. Elle se trouve dans l'ancien, à l'abandon et dans l'indifférence.

    Sources

    Procès de Joseph Robert devant le tribunal militaire

    Jugement de Cour martiale de M. Lamouret

    Le Maitron

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  • Charles Maurras, l'antisémite, le 26 avril 1942 à Carcassonne.

    En farfouillant dans les archives d'une histoire qu'on a voulu dissimuler, à défaut d'avoir pu la faire disparaître, on se rend compte qu'à Carcassonne il n'y avait pas que des résistants. A l'invitation du président de la Fédération départementale de l'Action Française, le comte Christian de Lorgeril, une conférence fut donnée le 26 avril 1942 par Charles Maurras au Théâtre municipal. L'Action Française, fondée en pleine affaire Dreyfus afin de jeter au pilori l'innocence d'un capitaine injustement accusé de trahison en raison de son judaïsme, trouva en Maurras l'éloquence d'un porte-voix. Philosophant sur le nationalisme intégral en prônant l'exclusion des juifs, dont Léon Blum auquel il voue une haine féroce, l'académicien avait trouvé son public au sein de l'extrême droite française et de ses soutiens monarchistes.

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    Juste avant la guerre, l'Action Française se porte bien dans l'Aude. Elle compte des correspondant à : Carcassonne, Aigres-vives, Azille, Barbaira, Boutenac, Bram, Canet d'Aude, Castelnaudary, Castelnau d'Aude, Coursan, Conques-sur-Orbiel, Cuxac d'Aude, Espéraza, Ferrals-des-Corbières, Ginestas, Lacassaigne, Laurabuc, Laure, Lézignan, Limoux, Saint-Hilaire, Montréal d'Aude, Narbonne, Névian, Pennautier, Pexiora, Rieux-Minervois, Saint-André-de-Roquelongue, Saint-Nazaire, Saint-Papoul, Sallèles d'Aude, Tourouzelle, Trèbes et Villedaigne.

    La très grande partie de ces responsables locaux sont de grands propriétaires viticoles. Nous retrouverons leurs noms associés au Service d'Ordre Légionnaire, puis à la Milice de l'Aude à partir de février 1943. Ils soutiennent le régime de Vichy et la collaboration avec le Reich, vers lequel ils exportent le vin. Autant dire que si la réunion du 26 avril porte essentiellement sur le Félibrige - Maurras admire Frédéric Mistral - elle ne peut-être que politique. A ce sujet, laissons la parole au chroniqueur de l'Action Française qui en donne un compte rendu.

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    "Poursuivant sa tournée de conférences, Charles Maurras parlait mercredi soir au Théâtre municipal de Carcassonne. Présenté en langue d'Oc par l'abbé Salvat, félibre majoral, qui lui dit toute l'émotion qu'il ressentait à l'accueillir dans la ville où lui même avait fait ses études secondaires, notre directeur exposa longuement, devant un auditoire nombreux et attentif, l'oeuvre de Mistral, sous les trois aspects du nouvel Etat français : Travail, Famille, Patrie.

    De longs et vigoureux applaudissements saluèrent le conférencier et, avant de se séparer, l'assistance écouta debout "La Marseillaise". M. Cabouat, préfet de l'Aude, qui n'avait pu assister à cette manifestation d'une haute tenue littéraire, s'était fait représenter par M. Rousseau, chef de cabinet.

    Nous avions également remarqué parmi les personnalités présentes MM. Jourdanne, maire de Carcassonne ; Clément, Inspecteur d'Académie ; le colonel Imbart, représentant le général Guizard, président du Secours National ; Gélis, président de la Légion française des combattants, et le chanoine Sabarthe, vice-président ; le commandant Mercury, retenu par son service, s'était fait représenter ; le chanoine Cannac, supérieur du Petit Séminaire ; le pasteur Sellier ; Pierre Embry, bibliothécaire de la ville ; le vice-président de la Chambre de commerce, etc.

    Notons enfin la présence du comte Christian de Lorgeril, président des Amis de l'Action Française, qui avaient organisé cette manifestation au profit de la Légion Française des Combattants et du Colis du Prisonnier, ainsi que celle de M. Level, représentant de Monseigneur le Comte de Paris.

    A la sortie de la conférence, les Amis de la l'Action Française se réunirent dans une salle de l'hôtel Terminus et le comte de Lorgeril présenta à Maurras les nombreux groupements venus à bicyclette des communes avoisinantes, notamment le vaillant groupe de Laure-Minervois."

    Charles Maurras est condamné le 27 janvier 1945 par la cour de justice de Lyon pour Haute trahison et intelligence avec l'ennemi. Il est déchu de son siège à l'Académie française.

    Sources

    Journal de L'Action française / 16 mai 1942

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