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Peintres et sculpteurs - Page 8

  • Charles Antoine Cazanave, un peintre Carcassonnais oublié

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    Charles Antoine Cazanave naît le 17 février 1882 à Carcassonne dans une famille aisée de négociants en meubles. Son père, Jacques (1842-1911), est associé avec Théophile, son frère, au sein de l’entreprise familiale d’ébénisterie et de décoration fondée en 1760. Les ateliers de fabrication se trouvent dans la rue Basse, dans un grand bâtiment qui fait angle avec la rue de l’Olivier. Longtemps après, il fut occupé par les locaux de la Bibliothèque départementale. Les deux frères Cazanave exposent leurs meubles au n° 26 de la Grand rue (actuelle rue de Verdun). On distingue encore dans l’imposte au-dessus de la porte, l’inscription « Cazanave frères ». Quant au jeune Charles Antoine, il passe sa jeunesse avec son frère Jean (1876) et ses sœurs Lucie (1879) et Célestine (1891) dans un immeuble au n°6 du Square Gambetta.

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    © Galerie Drylewicz

    Il y avait une fois (1923)

    A l’instar des familles de la bonne société Carcassonnaise, les enfants participent à des activités artistiques. Le talent de Charles Antoine pour le dessin s’exprime d’abord au sein du lycée de la ville dans la classe d’Henri Pringuet. Oublié de notre mémoire, Pringuet fut un peintre remarquable dont on peut admirer les tableaux à l’intérieur de l’Hôtel de la Cité. On peut supposer ensuite que Charles Antoine Cazanave, poussé par son professeur, s’en alla étudier à l’Ecole des Beaux-arts de Toulouse. Dans cette ville, il fit la connaissance d’Henri Martin et d’Antonin Delzers (1873-1943) qui lui prodiguèrent mains conseils pour perfectionner sa technique. Les rapports entre Delzers et Carcassonne, se retrouvent dans une œuvre gravée que le maître réalisa à partir du tableau de Benjamin-Constant conservé au Musée des Beaux-Arts de la ville : « Les Chérifas ».

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    © Christie's

    Femmes alanguies 

    Vendu chez Christies en 2012 pour 2375 £

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    Salammbô chez Matho, d'après l'œuvre de Gustave Flaubert

    Vendu 2912 €

    Peu avant la Grande guerre que Charles Antoine Cazanave ne fera pas à cause d’une atrophie de la jambe, il se marie avec Françoise Paule Magne († 17.05.1945). Dès lors, le peintre ne s’occupe guère d’ébénisterie et se consacre pleinement à son art.

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    © Artnet

    Figures chinoises

    C’est un pastelliste de très bonne facture inspiré par l’orientalisme. Nous avons retrouvé un certain nombre de toiles passées récemment en salle des ventes afin que vous puissiez en juger. Charles Antoine Cazanave réalisera également des portraits. L’un d’entre eux nous est parvenu ; il s’agit de celui de Joë Bousquet. Le mère du poète née Marie Cazanave, était  la cousine germaine de Charles Antoine.

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    © Collection privée

    Portrait de J. Bousquet

    Les œuvres de Cazanave figureront à de nombreuses reprises au salon de la Société Nationale des Beaux-Arts et à celui des Artistes français. Il est étonnant que ce peintre soit oublié à Carcassonne après la lecture de la biographie inédite que nous réalisons. Son nom est simplement mentionné dans le dictionnaire Bénézit avec des dates erronées. La vie de Charles Antoine Cazanave s’achève à Palaja le 24 juillet 1952, après quoi son corps est inhumé dans le caveau familial du cimetière Saint-Vincent à Carcassonne (Carré 00, Tombe 28).

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    Tombe de Charles Antoine Cazanave

    Sources

    Cet article inédit a été réalisé à partir de recherches généalogiques. Nous remercions le gardien du cimetière Saint-Michel et les services des concessions funéraires de la ville de Carcassonne. 

    Explications des ouvrages de peinture / Hérissany / 1934

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    Le peintre et son modèle (1925). www.paulbert-zerpette.com

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2019

  • Henri Andrieu, un artiste peintre Carcassonnais oublié

    Marie Jean Henri Andrieu naît à Carcassonne le 26 avril 1839 dans une famille de la bourgeoisie locale. Son père Jean est propriétaire et s’est marié avec Mélanie Besaucèle issue d’une lignée de personnages connus, dont le plus célèbre fut l’évêque constitutionnel de l’Aude Guillaume Besaucèle entre 1791 et 1801. Le jeune Henri possède de grandes dispositions pour le dessin et on l’envoie naturellement chez le maître Jean Jalabert, 12 boulevard Barbès. C’est son meilleur élève, dit-on. Toutefois, les parents qui n’ont pas dut tout l’intention d’en faire un artiste sans le sou, tentent de modérer les ardeurs de ce fils qu’ils destinent aux affaires commerciales. Qu’importe ! A vingt-ans, Andrieu file à Paris et se fait admettre à l’atelier de François Edouard Picot. Ses qualités étaient telles qu’il fut reçu l’un des premiers à l’Ecole des Beaux-Arts. Il y rencontre le languedocien Alexandre Cabanel qui lui prodigue ses conseils - un de ses tableaux « Martyr chrétien » est conservé au Musée des Beaux-Arts de Carcassonne. Autour de lui, Vibert, Bellecour et Guillaumet se sont tous fait un nom. Qu’est-il donc arrivé à Henri Andrieu pour que son œuvre tombe dans l’oubli ? La paresse, l’éloignement ? Peut-être, mais surtout sa famille qui, pour le forcer à rentrer à Carcassonne, lui coupa les vivres. Andrieu n’eut pas d’autre choix que d’abandonner l’Ecole des Beaux-Arts et un avenir artistique prometteur.

    Andrieu Henri

    Nature morte aux faunes

    Il revint donc chez lui et fit de la peinture l’un de ses passe-temps. Au mariage de sa sœur - future épouse du cousin banquier Arnaud Antoine Louis Marie Besaucèle - il officie en tant que parrain : « Henri Andrieu, vingt-six ans, sans profession. » C’est certainement plus chic qu’artiste peintre… Le vieux garçon se met au chevalet en dilettante et avec son ami Edouard Vié, envoie ses toiles au Salon de Paris.

    Andrieu Henri

    Une rue d'Alet

    En 1877, un étude « l’Oiseleur » fut très remarquée. L’année suivante, « Une rue d’Alet » gagne son billet pour l’Exposition Universelle au Palais des Champs-Elysées. Cette toile sera achetée chez Drouot récemment pour 8000 euros par un amateur d’art.

    Andrieu Henri

    © Drouot

    "Nature morte aux alouettes, gibecière et miroir aux alouettes"

    Cette toile de 1884 proviendrait des collections du château du Chesnay à Courcemont (Drouot)

    A l’instar de son contemporain Narcisse Salières dont nous avons évoqué le souvenir hier, Henri Andrieu finira sa vie à Marseille. Dans la cité phocéenne, il décède le 25 octobre 1908 à son domicile 9, Quai du Canal. C’est aujourd’hui, le Cours Jean Ballard. Le Carcassonnais Henri Andrieu ne s’est pas marié et n’a pas eu d’enfants. Ses toiles sont vendues aux enchères publiques, mais on ne sait pas ce que fut la vie de cet artiste. Espérons désormais qu’à la lueur de cet article, un crédit plus grand sera apporté à l’ensemble de ses œuvres.

    Sources

    Cet article a été surtout réalisé à partir d'une recherche généalogique. Les informations sur l'activité artistique du peintre proviennent du journal La Cité, publié en 1880. Les photographies ont été recherchées sur internet. Aucun renseignement n'a été puisé chez les historiens locaux contemporains, qui n'ont certainement jamais écrit sur Henri Andrieu. Ceci constitue donc un article inédit.

    Photo en Une

    Paysanne sur un chemin. Huile sur toile d'Henri Andrieu acquise pour 200 € sur un site d'enchères.

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  • Narcisse Salières, un grand peintre Carcassonnais oublié

    Narcisse Salières naît à Carcassonne le 7 octobre 1818 dans le quartier de la Barbacane où son père exerce le métier de retordeur de laine. Ses premières leçons de dessin lui sont données par Gamelin fils, avant que le jeune peintre ne soit admis en 1840 à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris dans la classe de Paul Delaroche. Conscient de l’énorme potentiel de son élève, le maître adresse une lettre au Conseil général de l’Aude afin que Salières obtienne une bourse d’études. Il précise qu’il pourrait ainsi poursuivre à l’Ecole des Beaux-Arts et concourir pour le Prix de Rome. L’administration départementale préfèrera apporter son aide à un autre élève plutôt qu’au fils d’un pauvre artisan misérable de la ville. Faute de moyens, Salières dut revenir à Carcassonne et renoncer à la carrière qu’il était en droit d’attendre. De 1845 à 1847, il fit de nombreux portraits aux crayons de familles carcassonnaises : Mlle Peyrusse, Mme Carayon-Latour, M. Pellet, la famille Tesseyre, les enfants Bosc, etc.

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    © institutdugrenat.com

    Portrait de femme à l'éventail

    En 1847, Narcisse Salières est nommé comme professeur de dessin au lycée de Montpellier et se marie l’année suivante avec Emma Robert à Carcassonne. Le couple s’installe 22, boulevard du Jeu de paume. Leur unique enfant Jean Jacques Henri naîtra le 27 janvier 1849.

    Salières reste dans la capitale héraultaise dix ans pendant lesquels, sa production s’enrichit de nombreuses œuvres primées aux salons de Paris et dans les expositions de province.

    1847 : Jesus et la Samaritaine (Acquis par l’Etat)

    1848 : Le raccomodeur de faïence (Médaille d’argent à Montpellier et tiré en loterie)

    1849 : Une mendiante

    1850 : Les orphelines

    1851 : Le marchand de complaintes (Acquis par la Société des Amis des Arts, il se trouve au Musée Fabre à Montpellier)

    1852 : Paysanne de l’Ariège

    1854 : A moitié chemin

    1859 : Moissonneuse des bords de l’Arac (Ariège)

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    © artnet.fr

    L’avare surpris (1856)

    1857 : Théâtre de Polichinelle

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    © Metropolitan Museum of New-York

    "Le raccomodeur de faïence" fut vendu par Camille Renault à l'Hôtel Drouot le 9 avril 1986. M. Whitney en fit l'acquisition. La toile partit à New-York. En 2003, les époux Mac Veigh en firent don au Metropolitan muséum où elle se trouve actuellement.

    Narcisse Salières invente en 1853 un nouveau procédé de gravure diaphane dont le mémoire est présenté à l’Académie des lettres des Sciences de Montpellier. Il renoncera à déposer les droits d’auteurs. Malgré son talent, le peintre Carcassonnais sera remplacé dans ses fonctions d’enseignant et reviendra dans sa ville natale. Dans son atelier du 8, boulevard du Jardin des plantes (actuel boulevard O. Sarraut), situé dans le grand immeuble de la Brasserie Lauth, Salières  réalise ses plus belles toiles. Son ami Achille Rouquet, nous décrit cet univers dans « Le vigneron Narbonnais » en 1887 :

    « Vêtu d’un veston court, les cheveux à peine grisonnants emprisonnés sous une sorte de béret qui donne à sa physionomie fine et expressive un cachet tout particulier, l’artiste vous tend la main, en vous montrant une figure souriante et avenante, malgré les quelques rides que l’âge et le travail ont plissé sur ses joues teintées de brique.

    L’atelier est encombré de chevalets garnis de tableaux, et surtout de portraits, qui attendent le dernier coup de pinceau avant d’être livrés aux nombreux clients de l’artiste. Devant moi, se dresse la plantureuse beauté d’une splendide jeune fille de dix-huit ans à vingt ans. Ce portrait presque terminé semble sortir du cadre. C’est devant lui, devant cette poitrine superbe, d’un modèle si puissant et d’une si éclatante blancheur, que le félibre Achille Mir s’écriera demain : « Biétazé ! qu’un pilot de caulado !… Les murs sont couverts de pochades, d’ébauches d’études. dans un coin une petite bibliothèque, et, sur des rayons, quelques bas-reliefs et quelques plâtres. »

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    © Musée des Beaux-Arts de Carcassonne

    Portrait de Charles Portal de Moux

    Parmi les toiles réalisées à Carcassonne, on peut citer : « Portrait de M. Perrens » (1861) qui fut professeur de rhétorique au lycée Bonaparte,  « Le naufragé (1869), « Le déjeuner d’une écolière » (1870), « Le déjeuner de l’écolière » (1872), « Un intérieur d’écurie » (1873).

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    © Musée des Beaux-Arts de Carcassonne

    Cimabuë rencontrant Giotto

    Surtout, n’oublions pas « Cimabuë rencontrant Giotto » (1876) qui se trouve dans les collections du Musée des Beaux-Arts de Carcassonne, suite à l’exposition artistique de la ville où il obtint une médaille d’or, « Portrait de M. Portal de Moux », « Marchand de sucreries » (1877), « Jeune Hongroise endormie » (1880), « Vue prise sur les bords de l’Orbieu » (1880), « Portrait d’un garçonnet » (1900) fils d’un négociant et ami de la famille, etc.

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    © Musée des Beaux-Arts de Carcassonne

    Portrait de Paul Carbou

    A Carcassonne où Narcisse Salières prépare également l’avenir de son fils dans les affaires industrielles, le peintre a peint le portrait de son ami Achille Mir en 1879. Ce dernier l’a conservé chez lui ; aujourd’hui, il se trouve au Musée des Beaux-Arts de Carcassonne.

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    © Musée des Beaux-Arts de Carcassonne

    Portrait d'Achille Mir, Félibre Majoral

    Il pourrait nous paraître curieux que Salières se soit mis à illustrer les livres du félibre Mir ; de truculentes caricatures, comme dans Le lutrin de Ladern ou le Curé de Cucugnan. Pas tant que cela, puisque le peintre, bien moins connu qu’Honoré Daumier, travailla pour les revues suivantes : Le Monde illustré, Le musée des familles et Le magasin pittoresque.

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    A l’occasion du feu d’artifice du 14 août 1898, Narcisse Salières avait peint l’Embrasement de la Cité depuis le Pont neuf. Ce tableau fut exposé en juillet 1899 dans la vitrine de l’encadreur Caselli, 23 rue Courtejaire. Pour les anciens, l’ancien doreur Ratto et pour les nouveaux, l’actuelle boutique de bijoux fantaisies, Cécile. Cette toile allait être acquise immédiatement par l’industriel Michel Sabatier, patron de la distillerie du même nom. Il lui fit faire le tour des principales villes de France à chaque fois que Sabatier y présentait ses liqueurs, et surtout à l’Exposition Universelle de Paris en 1900. Le but de l’industriel et mécène consistait à faire la promotion touristique de notre merveilleuse cité médiévale. Le tableau a été acquis récemment par la ville de Carcassonne.

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    © Musée des Beaux-Arts de Carcassonne

    Autoportrait. Narcisse Salières en 1894

    Parmi les autres œuvres de Salières, notons un tableau dont il fit don à l’église Saint-Gimer. Il représente l’évêque du même nom distribuant les aumônes. Dans le chœur de l’église de Mouthoumet, se trouvent trois toiles du peintre Carcassonnais. Nous espérons avoir contribué à rendre à Narcisse Salières la réputation dont il jouissait en son temps. Après une longue existence de 90 ans, le peintre s’éteignit le 28 mars 1908 à Marseille où s’était retiré avec son fils et sa belle-fille, 21 rue Perrin Solliers.

    Sources

    Le Rappel de l'Aude, La Cité, Le vigneron Narbonnais

    Annuaire de l'Aude / 1897

    Filae, Généanet, Etat-civil (ADA 11)

    Aucune source n'a été puisée chez des historiens locaux contemporains. Cet article a nécessité six heures de travail.

    Photo en Une

    Narcisse Salières par lui-même en 1860

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