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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 237

  • Où est passée la donation "Ferdinand Alquié" à la ville de Carcassonne ?

    Dans le discours qu'Henri Tort-Nouguès prononça le 27 février 1989 à l'occasion de l'inauguration de la plaque apposée sur la façade de l'illustre philosophe Carcassonnais, on apprend qu'il a été fait donation à la ville de Carcassonne de l'ensemble de ses archives. Renseignements pris auprès de témoins de l'époque, c'est M. Tort lui-même qui aurait convaincu Denise Alquié - la veuve du philosophe - de céder l'ensemble des livres, discours, correspondances, manuscrits à la la commune. Cette transaction se serait faite dans les règles et devant notaire ; après quoi, l'ancienne Bibliothèque municipale en aurait reçu l'inventaire. Or, depuis le déménagement de celle-ci en 2010 vers les locaux de Montquier, nous ignorons ce qu'il est advenu de cette donation. Nous ne doutons pas qu'elle ait été bien conservée. Toutefois, il est dommage que les universitaires n'aient pas connaissance de ce dépôt, qui n'est en l'état accessible que sur demande. En effet, depuis sept ans Carcassonne n'a plus de Bibliothèque. Cela peut paraître extraordinaire pour une capitale départementale, mais c'est ainsi.

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    Raymond Aron, Ferdinand Alquié, Vahl et Maurice Merleau-Ponty

    Nous voici donc réunis ce soir du 27 février 1989 à Carcassonne pour rendre hommage à notre compatriote Ferdinand Alquié, professeur à la Sorbonne et membre de l'Académie des Sciences Morales et Politiques, décédé il y a de cela quatre ans le 28 février 1985, après une implacable maladie.

    Tous ceux qui sont ici ce soir et parmi eux des anciens élèves, et de très vieux amis, savent les liens anciens et profonds  qui m'unissaient à Ferdinand et à Denise Alquié, à travers Pierre Marie Sire dont il était l'ami le plus fidèle, et connaissent l'attachement que celui-ci et son épouse avaient gardé pour la terre languedocienne où ils aimaient retrouver leurs vieux amis et les souvenirs d'un lointain passé. Et ce soir, nous sommes réunis pour évoquer sa mémoire mais aussi pour une autre raison.

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    Henri Tort-Nouguès et Ferdinand Alquié

    En effet, Madame Ferdinand Alquié vient de faire don à la ville de Carcassonne, à la Bibliothèque municipale d'un lot exceptionnel de manuscrits, d'oeuvres de notre maître, d'ouvrages et de Revues de philosophie et de littérature, d'une correspondance importante et des cours enregistrés lors de son séjour aux Etats-Unis à l'université de Yale.

    Aussi je veux tout de suite, au nom des élèves, des étudiants, des amis, de tous ceux qui l'ont connu, admiré et aimé, apporter le témoignage de notre gratitude et de notre reconnaissance à Madame Alquié : un grand merci, ma chère Denise, empreint d'affection car je ne pourrai poursuivre ce discours. Mais je veux aussi, au nom de tous ses amis, et me faisant l'interprète de Madame Alquié, adresser, cette fois à Monsieur Raymond Chésa, Maire de Carcassonne, le témoignage de notre gratitude. Lorsque je suis venu vous parler de ce projet, vous avez tout de suite accepté de recueillir ce lot de manuscrits et de livres qui viendront enrichir le patrimoine culturel de notre ville. Vous avez compris, à l'heure où l'on parle tant de décentralisation culturelle, quel intérêt majeur il y avait pour la ville de Carcassonne et sa Bibliothèque Municipale, de posséder cet ensemble d'oeuvres philosophiques, littéraires et artistiques.

    Un grand merci au nom de ceux qui sont présents, au nom des Carcassonnais, merci au nom de tous ceux pour qui la culture authentique est une composante et une valeur essentielle de l'homme. Et merci aussi de servir ainsi la mémoire d'une de nos compatriotes les éminents.

    Merci aussi à Madame Eychenne, à René Piniès, au fidèle entre les fidèles J-P Amiel de l'aide précieuse qu'ils m'ont apporté dans cette difficile entreprise. Car Ferdinand Alquié était né à Carcassonne le 18 décembre 1906, au 2 rue Omer sarraus, à l'endroit où s'élève aujourd'hui Le Terminus et avait résidé longtemps au 2 boulevard de Varsovie.

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    Son père, Joseph Alquié était professeur de physique au vieux lycée de la rue de Verdun. Et c'est dans cet établissement que Ferdinand Alquié accomplit sa scolarité avec comme condisciples Jean-Paul Amiel, René Nelli, Maurice Nogué, Henri Ferraud et tant d'autres que je ne peux citer. Il eut, comme professeur de philosophie, Claude Louis Estève, qui eut une influence déterminante dans le choix de sa carrière et lui fit connaître Joë Bousquet. Très rapidement, il deviendra un élément des plus importants parmi ceux qui se réunissaient autour du grand poète blessé, avec Claude Louis Estève, René Nelli, François-Paul Alibert, Pierre et Maria Sire, Molino, Jean Ballard.... Avec eux, il créa la revue "Chantiers" et comme eux, il sera un des fidèles collaborateurs des "Cahiers du sud".

    Elève exceptionnellement brillant, après le baccalauréat, il montera à Paris poursuivre des études de philosophie, licences, diplômes d'études supérieures, et sera reçu 1er à l'agrégation de philosophie en 1931. Il passera un an à Mont-de-Marsan, puis reviendra comme professeur au lycée de Carcassonne de 1932 à 1937. Nommé à Paris, il enseignera dans différents lycées (St-Louis, Rollin, Condorcet) dans les classes de première supérieure, à Henri IV, et à Louis-le-Grand, jusqu'en 1947. Docteur es lettres, il reviendra dans le midi comme professeur à la Faculté des lettres de Montpellier de 1947 à 1952, puis comme professeur à la Sorbonne jusqu'en 1976, date de sa retraite. Il sera élu à l'Académie des Sciences Morales et Politiques en 1975 et partagera sa retraite entre Paris, Montpellier et Carcassonne où il revenait assez souvent. Et comme je le disais tout à l'heure, il s'éteindra à Montpellier le 28 février 1985.

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    Pierre Clarac remet l'épée d'Académicien à Ferdinand Alquié

    C'est là, tracée à grands traits, résumée et schématisée, une carrière universitaire exceptionnelle. Alquié fut un homme de grand savoir et de réflexion. Il fut aussi homme d'action, et un professeur admirable, un philosophe authentique, mais il ne fut pas que cela. A une époque particulièrement sombre de notre histoire, alors que certains se faisaient les théoriciens de l'engagement et du risque (sans s'engager et rien risquer), Ferdinand Alquié rejoignait à Paris les rangs de la Résistance. Membre du réseau "Darius", il échappa même de justesse, avec son épouse Denise, à une souricière de la Gestapo, dans cette rue de Levis que je connais si bien.

    Titulaire de la médaille de la Résistance et de la Croix du combattant volontaire, à la Libération il reprit simplement ses cours de philosophie dans son lycée avec sa modestie, sa scrupuleuse conscience, ce dévouement total qu'il mettait dans l'exercice de son métier. Il continue d'élaborer et d'échafauder une ouvre dont je crois pouvoir dire qu'elle est une des plus importantes, la plus marquante de notre siècle. Il n'est pas possible, dans le temps qui nous est imparti, d'énumérer et les titres de ses oeuvres et ceux de ses conférences et de ses communications innombrables. 

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  • Georges Guille (1909-1985), député SFIO de l'Aude et opposant à François Mitterrand

    Le 18 juin 1971, le député socialiste de l'Aude Georges Guille, écrit une lettre aux militants du PS, nouvellement fondé, dans laquelle il leur indique qu'il quitte le parti. N'ayant pas réussi à sauver l'ancienne S.F.I.O (Section Française de l'Internationale Socialiste) auprès de laquelle il fut un des plus vaillants représentants, Guille s'oppose à François Mitterrand et à son OPA sur le vieux parti ouvrier.

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    © Assemblée nationale

    Georges Guille

    La seule chose qui le rapproche du futur Président de la République c'est son combat contre De Gaulle et la Ve République.  Pour le reste, Guille ne considère pas Mitterrand comme un vrai socialiste : "C'est un aventurier de la politique." Une espèce d'opportuniste, en quelque sorte. Or, le député de la Nièvre s'était imposé dans les esprits après l'élection présidentielle de 1965 où il avait réussi à mettre en ballotage le général de Gaulle. Guille malgré ses talents d'orateurs n'arrivera pas à ses fins ; le parti socialiste naît en 1969. En juin 1971, le nouvel adhérent François Mitterrand en prend la direction au Congrès d'Epinay. Le député de l'Aude déclare alors : "Il ne nous reste plus qu'à recréer un parti". 

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    Son amertume Georges Guille l'exprimera en 1970 dans ce livre

    La gauche la plus bête ..?

    Ce fils de viticulteurs adhéra à la SFIO dès 1927 durant son séjour à l'Ecole normale de Carcassonne. Il sera instituteur. A 25 ans, c'est le plus jeune Conseiller Général (Canton de Capendu) de France. Opposant à Pétain, il est déplacé par le gouvernement de Vichy dans le Gard en 1940. Malgré cela, Guille occupe des fonctions clandestines dans l'Aude au sein de la SFIO. Au printemps 1944, le Comité Régional de Libération est constitué secrètement. Le Comité Départemental prendra ses fonctions à la préfecture de l'Aude le 22 août 1944. En son sein, figurent Félix Roquefort, Auguste, Germain, Lucien Milhau et Georges Guille. Francis Vals en est le président.

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    © Assemblée nationale

    Charles de Gaulle le 9 novembre 1945

    Elu député en 1945, Georges Guille défend les intérêts de la viticulture. Il est l'auteur de la loi sur les VDQS (Vins Délimités de Qualité Supérieure) du 18 décembre 1949. De janvier 1956 à mai 1957, il participe au gouvernement de Guy Mollet en qualité de Secrétaire d'état chargé des relations avec le parlement, chargé de l'énergie atomique. C'est l'un des fondateurs de l'Institut National des Sciences et Techniques Nucléaires et obtient la création d'une usine de raffinage de l'uranium à Malvesi, près de Narbonne. Aujourd'hui, Usine Aréva Malvési.

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    Le gouvernement Guy Mollet

    En 1958, le maintien du communiste Félix Roquefort fait échouer Georges Guille qui perd son mandat de député, au profit de Louis Raymond Clergue (MRP). Un an après, il devient sénateur de l'Aude jusqu'en 1967. Il présida le Conseil général de l'Aude de 1945 à 1948 et de 1951 à 1976. Si son élection à la députation en 1967 faut aisée grâce, cette fois, au désistement du candidat communiste, il n'en sera pas de même en 1968. La dissolution de l'Assemblée nationale après les évènements de mai 1968, ne profitera pas à la gauche. Georges Guille ne dut son élection qu'à quelques voix contre Vié (UDR). 

    georges guille

    En 1973, après s'être retiré de la vie politique, Georges Guille écrira "Des vies de chiens". Ce livre est illustré par Jean Camberoque. Un récit autour de son village de Badens, des vignes et de la chasse que l'ancien député de l'Aude aimait particulièrement. Georges Guille est décédé le 16 novembre 1985 et repose au cimetière de Badens. Le 10 juillet 1986, la municipalité de Raymond Chésa (RPR) décide d'attribuer le nom d'une avenue à Georges Guille ; elle part du rond-point de Grazailles jusqu'au Pont rouge.

    georges guille

     Le nom de Georges Guille n'est guère plus cité par les socialistes Audois. Pourtant l'opposant à l'ascension de François Mitterrand, reste encore dans la mémoire collective comme un homme de conviction, droit et humain. Des valeurs éculées sans doute dans la politique d'aujourd'hui...

    Georges Guille est co-fondateur du Festival de la Cité

    Sources 

    La tête haute / Edouard Boeglin / 1983

    Ils sont entrés dans la légende / Félix Roquefort

    Histoire de Carcassonne / Privat / 1984

    Les Audois / 1990

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  • Les photos exceptionnelles et inédites du carnaval de 1955

    C'est en 1951 qu'un chef d'entreprise, marchand de matériaux de construction, se lance avec quelques amis dans l'organisation du carnaval de Carcassonne. Lucien Geynes fonde le Comité pour les Fêtes du Carnaval en faisant appel aux commerçants, particuliers et aux villages voisins. Cette entreprise philanthropique est entièrement financée par le mécénat local ; au sortir de la guerre, la ville de Carcassonne n'a pas d'argent à consacrer au carnaval. Hélas, c'est précisément à cause d'un manque d'argent qu'en 1962, les festivités cesseront. Plus exactement, on aurait cherché des poux à M. Geynes, dont la générosité faisait de lui un danger politique pour les échéances électorales à venir. 

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    Carcassus V, Roi fainéant

    Les carnavals d'avant-guerre consacraient une partie de leur recette, au profit des oeuvres de charité de la ville. Malgré leur disparition progressive, le Comité des Fêtes du Carnaval reversait des sommes à l'orphelinat "Le nid joyeux", aux "Petites soeurs des pauvres" et à l'Hospice des vieux. Les boeufs gras prêtés par les bouchers tirent Carcassus. Une promotion commerciale pour leurs produits.

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    Place Davilla, devant le marchand de bois Canavy

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    Les petits lutins

    Le Comité du carnaval invite en 1954 l'ensemble des comités de quartiers, les villages, les groupes, les sociétés de Carcassonne à se joindre à la fête et confectionner des chars. M. Geynes a fait ressortir les groupes de Pandores et Bigophones, typiquement Carcassonnais accompagnés en musique par les fanfares, comme celle du Réveil Carcassonnais.

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    Le char de Chalabre

    Entre 1951 et 1962, jamais le carnaval ne fut financé par la mairie. Ce sont les particuliers qui fabriquaient les chars ; une compétition entre elles pour gagner le prix de la plus belle réalisation. On achète des grosses têtes, des masques... Le Comité passe des contrats avec les plus beaux orchestres du moment : Maravella, Raymond Legrand, Hot-Club de jazz, Jacques Hélian... Tout ceci coûte un prix fou et va pousser l'organisation pour rentabiliser à faire payer les entrées, un grand loto, la décade commerciale en centre ville avec l'Union des commerçants. Tout génère de l'activité et des rentrées d'argent ; en 1960, la ville accueille près de 50 000 personnes. Hôtels, restaurants, cafés, tabacs sont pris d'assaut.

    carnaval 1995

    Les inscriptions au concours de Reine de Carcassonne sont prises "Aux dames de France" chez Ramond, rue de Verdun. Ce magasin habillait la gagnante et profitait de sa réputation pour vendre ses articles. En 1955, les commerçants annoncent qu'ils offriront chacun un lot à la future reine.

    carnaval 1995

    En 1955, Carcassus V est accueilli à St-Gimer dans le quartier de la Barbacane. A la fin du carnaval, il sera jugé par le Vénérable Inquisiteur, l'assesseur-sourd, l'assesseur-poète, le Grand Réquisiteur, le bourreau Ridevaux, le bourreau Dequeur, le bourreau Crassie et le héraut. Carcassus V condamné au bûcher se consume pendant que la foule entonne en occitan

    Adiu paure (bis)

    Adiu paure Carnaval

    Tu t'envas e ieu demori

    Per manjar la sopa a l'oli

    Traduction

    Adieu pauvre 

    Adieu pauvre carnaval

    Tu t'en vas et moi je reste

    Pour manger la soupe à l'huile.

    carnaval 1995

    La fabrication des fleurs en papier prenaient beaucoup de temps. Trois millions dans le corso fleuri en 1960 ! Un seul char pouvait en posséder 70 000 mille.

    carnaval 1995

    Le corsaire

    Le carnaval faisait le tour de tous les boulevards de la ville jusqu'à la place Davilla, en passant par l'allée d'Iéna. C'est dire le nombre de chars et de participants à travers Carcassonne.

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    La Reine du Carnaval 1955

    Tout s'est arrêté en 1962... M. Geynes et ses amis auront beaucoup donné de leur personne et leurs efforts restent encore dans la mémoire collective. 

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    Sources

    Fêtes et Carnaval dans la ville / Jacques Marrot / 1987

    Un grand merci à Pascal Hyvert pour ses photos

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