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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 165

  • L'ambiance d'autrefois dans les cafés de Carcassonne...

    Que faisait-on autrefois à Carcassonne quand il n'y avait pas la télévision, ni internet ? Comment faisait-on pour rencontrer des gens d'horizons sociaux différents lorsque Facebook n'existait pas ? Si ces questions pourraient paraître comme futiles à ceux dont l'âge dépasse la quarantaine, leurs réponses aideront sans doute les plus jeunes à comprendre les tourments de notre époque. Sans vouloir être passéiste en affirmant que c'était mieux avant, force est de constater que l'enfermement et isolement actuel de la population dans les réseaux sociaux est le miroir aux alouettes de la communication. La société pour exister a besoin de contacts physiques et verbaux. Ils nourrissent la compréhension de l'autre, creusent des tombes aux préjugés et sont moteurs de la solidarité. La superficialité du réseau social facebookien favorise la vanité, l'égocentrisme, la délation, le voyeurisme et les fausses informations.  

    Au XXe siècle, les Carcassonnais fréquentaient les bistrots à une époque, où il n'était pas déconseillé de fumer, de boire, de draguer et de bien manger. Tout un univers favorable à la fraternisation, n'est-ce pas ? Ce pouvoir alchimique de l'émulation entre les humains, était favorisé par divers évènements organisés par les cafetiers. Aujourd'hui, les Français deviennent frigides d'un pouvoir castrateur. A force d'interdire, on infantilise et on déresponsabilise la société pour mieux la dominer.

    Les lotos dits "A la volaille"

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    René Lapasset dans son café

    Oseriez-vous imaginer aujourd'hui des pintades, poulardes, canards gras, oies grasses ou des longes de porc mises en exposition sur une table le temps d'un loto ? Bien sûr que non, les services de l'hygiène sont passés par là pour tout interdire. Sans compter que vous auriez peut-être quelques extrémistes végétariens pour perturber la manifestation. Pourtant, il y a encore quelques décennies de cela dans ce Carcassonne d'aujourd'hui à l'âme fraternelle déchue, les Biscans, Lapasset, Quintilla rassemblaient la population avec leurs lotos. On appelait cela "A la volaille". Cette joyeuse basse-cour était escortée de gibier : lièvres, lapins forains et même de sangliers, biches et porcelets. Tous ces lots étaient présentés, les soirées ou matinées de Noël ou du Jour de l'An, aux fils de fer ourlant l'intérieur des vitrines des cafés-loteurs. Les habitués faisaient ainsi le tour des vitrines afin de choisir l'endroit où ils iraient loter en fonction de ce qui était mis en jeu. Monsieur Toulzet relate en 1998 une anedocte assez croustillante ; nous la transcrivons ci-dessous :

    Tout voisin du café Biscans, le célèbre Café Not, dirigé par les époux Guy, aidés par leur beau-frère Léonce, faisaient bien entendu, loter. Lors d'une de ces soirées, la direction de ce célèbre établissement avait prévu, comme lot, quelque chose de jamais vu à l'époque. En effet, un superbe cochon de près de cent kilos était mis en jeu ! L'animal, au matin du grand jour, fut mis en exposition entre quatre barrières sur la place Carnot. L'admiration était grande chez les badauds qui se pressaient autour de ce superbe premier loto exceptionnel. Le soir arriva. La salle du Not du rez-de-chaussée était comble, tout comme la salle du premier étage qui servait de salon pour noces et banquets. Après les lots habituels annoncés par le "nommeur" officiel M. Léonce, un habitué du café fit carton plein ! Carton vérifié, l'heureux gagnant se vit face-à-face au cochon que la chance lui attribuait ! Que faire de cette bête ? Il parlementa avec les propriétaires du Not. Les patrons, aussi distingués que beaux joueurs, proposèrent l'achat du goret au gagnant et remirent en jeu l'animal. Annoncée, cette remise en jeu par les microns installés par les soins de M. Bouichou, rue du Marché, la nouvelle souleva de longs applaudissements. Et voilà le loto reparti avec entrain. Quelques minutes passèrent et soudain, une voix étranglée par l'émotion, un client cria "Quine". Tous les yeux se portèrent sur le gagnant qui, vous l'avez peut-être deviné, n'était autre que les premier chanceux qui devenait l'heureux propriétaire pour la seconde fois de ce cochon aussi rose que dodu. Cette fois-ci notre ami fit retirer ce lot encombrant par un charcutier Carcassonais, qui, nous l'apprîmes plus tard, offrit un jambon à ce champion toutes catégories du loto de Noël du Café Not !

    Le jeu de la Poule

    Pratiquement tous les cafés de la ville étaient équipés d'un billard, car c'était avant les flippers la distraction des clients. Le jeu de la Poule semble avoir été très pratiqué dans l'Aude. Les problèmes rhumatismaux chez les hommes se situent au niveau du coude... Les clients misaient l'apéritif au 109. Il fallait faire tomber dix petites quilles posées sur le billard et effectuer neuf carambolages. Autant de carambolages en trop, autant de levées du coude en plus ! Aux coins d'un table, les autres clients préféraient jouer au Bézi, l'ancêtre du Rami, ou la Belote, la Bourre, la Manille.

    Le P.MU

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    Lucien Biscans et son épouse

    Le premier bureau du P.M.U apparaît en 1950 au café Biscans, rue Victor Hugo. Les Carcassonnais montaient à l'assaut des guichets les dimanches. Lors du Prix de l'Arc de Triomphe en 1964, l'engouement fut si grand que les barrières prêtées par la mairie et installées depuis le trottoir de la place Carnot jusqu'au café, furent nécessaires pour canaliser le flot des turfistes. Dans ce petit troquet, on partageait les pronostics autour d'un pastis bien tassé. Au café Biscans, c'est Albert Atal qui enregistrait les paris et continua lorsque le Longchamp reprit le P.M.U.

    La télévision

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    Just Fontaine en 1958

    Lors de la Coupe du monde de football en Suède, aucun Carcassonnais n'avait la télévision. Pendant le mois de juin 1958, Lucien Biscans installa dans son café l'un des premiers téléviseurs. C'était un Clarville, en noir-et-blanc bien sûr. Les hauts parleurs avaient été installés sur la façade et de tant de monde, la circulation avait dû être coupée dans les rue Victor Hugo et du Marché (Tomey), pendant toute la durée du match. 

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  • Quand la Croix-rouge vint à Trassanel le lendemain du 8 août 1944

    Nous avons retrouvé les écrits de la sœur du poète Joë Bousquet, dans lesquels elle consigne ses souvenirs familiaux. Elle évoque notamment les jours qui suivirent la tragédie de Trassanel, où un grand nombre de maquisards furent assassinés par les nazis. Henriette Patau était à cette époque membre de la Croix-rouge française...

    Des trahisons, des imprudences ? alertèrent les Allemands et un jour, la Croix-rouge reçut l'ordre d'aller dans la Montagne noire ramasser les morts laissés dans les trois villages où ils avaient abattu des maquisards. Ordre était donné de jeter sur les cadavres un tas de chaux et de les brûler. Le soir, nous avons délibéré au Comité et pris nos dispositions pour le lendemain. A six heures du matin, nous partions. Une plateforme contenait deux infirmières, un chef, des secouristes et deux prêtres. La seconde plateforme portait trente cercueils. Nous sommes arrivés à Cabrespine, dans un coin paisible : sur l'herbe foulée reposaient sept hommes jeunes, des parachutistes. Il fallut les retourner, fermer leurs yeux, et chercher sur eux des pièces d'identité, tous n'en avaient pas... Nous avons accompli notre tâche. Les secouristes les ont placé dans leur cercueil et sont descendus au village pour creuser leurs sept tombes, et inscrire un nom sur une croix afin qu'on puisse les retrouver. Nous sommes repartis pour Trassanel.

    Dans une garrigue, un cercle de jeunes morts était couché. Ils n'avaient pas plus de 16 ou 17 ans ; leurs yeux étaient ouverts, leurs mains crispées, mais leur visage était calme. Nous nous sommes mis au pied de ce groupe de martyrs ; le prêtre catholique a dit les prières des morts, puis le pasteur protestant a prié pour les protestants et les juifs, dans l'ignorance de leur religion. Et la triste cérémonie a recommencé comme à Cabrespine. Tout a été fait pour leur toilette funèbre, et leur propre dépouille a été remise au cimetière avec leur nom. Et, toujours pris dans notre émotion apitoyée, nous sommes allés au 3e champ d'exécution, au Mas-Cabardès.

    En arrivant au village, nous avons entendu le glas. Nous étions attendus ; on nous a conduits à la grande salle de la mairie. Tout autour d'un reposoir et appuyée contre les murs, vingt cercueils pareils s'alignaient. Ils n'étaient pas fermés encore. Près d'être aussi jeunes que ceux que nous venions de quitter, les parents, agenouillés le visage touchant le bois qui allait recouvrir le corps de l'être qu'il avaient perdu, ils pleuraient, les mêmes hurlaient. La douleur de cette foule était insoutenable, la vue du prêtre a paru les toucher. Ils lui ont demandé de bénir les corps... Nous étions tous à genoux et nous répondions aux prières. Puis le maire s'est levé. Il est allé d'un enfant à l'autre, touchant les petites mains glacées, parlant aux parents avec amitié et les appelant par leur nom, il pleurait avec eux, comme eux, et j'ai su ce jour-là que la seule façon de secourir une douleur trop grande est de la partager avec son cœur.

    Ce soir-là, nous sommes rentrés après avoir recommandé à tous de garder le silence sur cette journée, et rien de cette affreuse journée ne s'est raconté nulle part.

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  • La confiserie Georges Larène, rue Clémenceau

    Né en 1874 à Agen, Jean Georges Larène est le fils de Jean Nelson Larène, pâtissier de son état dans la capitale du Lot-et-Garonne. C'est après la Première guerre mondiale qu'il ouvre avec son épouse Elise Emilie née Labourot, une confiserie-chocolaterie de luxe dans la rue de la gare à Carcassonne. Ainsi que nous pouvons le voir sur la photographie ci-dessus, cette boutique avait été réalisée selon les codes architecturaux de l'époque, dans le style Art-Déco. 

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    La confiserie Larène vendait des bonbons, des fantaisies artistiques, des sucreries pour les baptêmes, des liqueurs, des vins fins et du champagne. Elle se trouvait au n°10 de l'actuelle rue Georges Clémenceau. La belle devanture Art-Déco ne résista pas à la modernité, car en 1955 elle fut entièrement refaite. Elle n'a d'ailleurs pas changé depuis. Un souhait sûrement du gendre de M. Larène, Joseph Rivière, qui reprit l'affaire avec Blanche, la fille du fondateur. 

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    Dans les années 1960, sur l'emplacement de la confiserie, le chapelier Alexandre Castel originaire de Lézignan, ouvrira un magasin de chapeaux. L'enseigne s'appellera Alexandra ; elle fera les beaux jours des élégants et élégantes de la ville. Depuis le début des années 2000, le magasin de vêtements pour adolescentes Jennyfer a remplacé la confiserie Larène et le chapelier Alexandra. 

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    La devanture de 1955 n'a pas changé depuis cette époque. Si l'on compare le bas de l'entrée actuelle avec la photographie en tête de cet article, c'est très parlant.

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