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Portraits de carcassonnais - Page 59

  • Lettre autographe de Maurice Sarraut, sénateur de l'Aude

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    Maurice Sarraut (1869-1943) fut d'abord un homme politique, membre du Parti Radical Socialiste, élu comme sénateur de l'Aude entre 1913 et 1932. Il démissionnera pour devenir le propriétaire du quotiden La Dépêche. Après l'armistice de 1940, il approuve le gouvernement de Vichy et soutien Pétain. Ce n'est qu'en 1943 qu'il prendra ses distances avec Laval; au moment de la création de la Milice. Il sera assassiné le 2 décembre 1943 par des Miliciens. Il repose au cimetière Saint-Vincent de Carcassonne.

    Lettre du 2 septembre 1894

    Mon cher Alboize,

    Je suis désolé et vexé à la fois du facheux effet produit sur l'organisme délicat de mon bon ami Édouard par le climat de Carcassonne, ma seconde patrie. J'imagine que sa maladie n'offre aucun caractère de gravité et je souhaite de mon tout coeur que la mer répare promptement la santé ébranlée de notre cher gamin. Oserai-je vous demander, en grâce, de ne pas dire, à votre retour ici, que Carcassonne l'ût rendu malade?

    Je me suis imposé la tâche ardue de réhabiliter, dans l'esprit de ceux qui m'entourent, notre ville d'origine; Nadaud (1) l'a ridiculisée. Mais le ridicule, ce n'est rien. Quantité de gens– voire du meileur monde– s'en accomodent au point de le considérer comme une des conditions nécessaires de l'existence. mais cumuler le ridicule et l'odieux, c'est vraiment trop; que voulez-vous répondre aux malveillants qui nous diront: "Carcassonne est non seulement la ville la plus bête de France, mais encore la plus pernicieuse. On y attrape les fièvres, la jaunisse, etc..." Hélas! nous ne pourrons que rougir– silencieusement!

    Épargnez-nous ce nouvel avatar.

    Je regretterai infiniment de ne pas vous voir, à mon arrivée à Carcassonne: Je me proposais de passer, en votre agréable compagnie, quelques bonnes heures dans l'atelier de Laugé (2). Enfin! l'important est qu'Édouard guérisse vite. Nous aurons tout le temps de causer impressionisme cet hiver à Paris.

    Je vois Raynaud assez souvent; il m'a fait l'amitié de donner le service le service de l'artiste, pas la 2e représentation de Sereno Torelli, à la Comédie Française. Vous voyez que, même pendant votre absence, je trouve le moyen d'être votre obligé!

    Présentez, je vous prie, à madame Alboize mes respectueuses amitiés et embrassez mon ami Édouard– j'y tiens– L'air salin le remettra vite, sans doute.

    Croyez-moi votre bien dévoué, Maurice Sarraut.

    Le bonjour à Laugé et à notre ennemi intime A. Rouquet (3)

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    (1) Gustave Nadaud (1820-1893), auteur de la chanson "Carcassonne" dans laquelle est tirée la célèbre phrase "Il ne faut pas mourir, sans avoir vu Carcassonne". Cette chanson sera reprise par Georges Brassens

    (2) Achille Laugé (1861-1944), peintre pointilliste né à Arzens (Aude). Un musée est consacré à ces oeuvres à Limoux.

    (3) Achille Rouquet (1851-1928), félibre, graveur et fondateur de "La revue méridionale". On lui doit le premier embrasement de la Cité de Carcassonne.

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  • Ginette Bastien, professeur de danse

    La première école de danse a été fondée à Carcassonne par Madeleine Chausson, en 1940. Elle dispensait ses cours près de la place Davilla.

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    Ginette Bastien, qui fut d'abord son élève, puis son assistante, passe très jeune le premier degré (classée 1ère, mention très bien), puis l'année suivante le second degré de son professorat (classée 1ère de France en mouvements Popard et interprétation musicale). Aussitôt, la regrettée Irène Popard lui propose une magnifique situation à Lyon. Mais Ginette Bastien décline cette offre et abandonne même ses études de piano au Conservatoire de Toulouse pour se consacrer entièrement à l'enseignement de la danse dans son Languedoc natal. Elle rachète alors le fonds de Madeleine Chausson, et Irène Popard lui écrit: "Je sais que tu as tous les atouts nécessaires pour tenir dignement la succursale de Carcassonne". Effectivement, le succès est rapide et les locaux deviennent insuffisants. Ginette Bastien inaugure alors en 1949 sa nouvelle école, admirablement située, et qui par son cachet, ses vastes proportions, son confort, était certainement une des plus belles. Cette salle se trouvait à l'intérieur de la chapelle de la rue de Verdun qui sert aujourd'hui de lieu d'exposition.

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    Entre temps, avec beaucoup de dévouement, elle prépare et présente avec succès à l'examen: Hélène Fruhauf-Fatoux, Josiane Pintavy-Fraysse, Janine Robert-Astric, Janette Pidoux-Pujol, Cécile Pailhès-Tailhan. Puis elle forme ses aides-monitrices et monitrices particulières: Janette Empociello, Paulette Guiguet, Simone Puel, Françoise Tailhades, Janette Gibert, Phiphi Saunié et son professeur-adjoint: Christiane Sylvestre. Ainsi, sous son impulsion, de nouvelles écoles de danse s'établissent à Béziers, Narbonne, Limoux, Quillan, Castelnaudary, Lézignan et Montauban. Elle fonde aussi le cours municipal de danse de Carcassonne. Ginette Bastien ne cessera de se perfectionner et ira travailler avec les meilleurs maîtres de son époque à Paris: Saulnier (acrobate), Jacques Besse (Champion du monde de claquettes), Odette Courtiade (Danse libre), Madeleine Lafon (Danseuse étoile de l'Opéra), Janine Solane (danse classique), Les soeurs Foatelli (Danse religieuse), Nana de Herrera (Danse espagnole), Andrée Joly (Education rythmique) et Malkowsky (Gymnastique synthétique).

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    A la fin de sa carrière, elle fonda sa propre compagnie.

    Fabienne Dupuy (Cie Kissipik) témoigne:

    "Ma rencontre avec Ginette Bastein en 1983 a été déterminante, elle a effet modifié le sens et les valeurs que je donnais à cet art; le but généreux que s'est fixée cette chorégraphe, est de considérer que sa mission est "mettre, à la portée des masses, l'art le plus luxueux et le plus inaccessible."

    Voici donc une carcassonnaise de valeur bien oubliée... C'était le fille de Charles Lespinasse (1885-1959), grand résistant déporté à Buchenwald. Une avenue porte son nom à Carcassonne.

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  • Le pensionnat de Mlle Sèbe

    Mlle Sèbe fonde un pensionnat vers 1880 dans la rue de Verdun dont les bâtiments se trouvaient à côté de la chapelle des dominicains (ex N°13). Elle achète l'établissement à madame Maure, épouse d'un professeur de philosophie du lycée.

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    La directrice (au centre) était une femme corpulente. Le pensionnat comptait en 1905, près de 40 internes et 205 externes. L'enseignement était dispensé par madame Pomiès (Histoire-géographie), monsieur Vergé (Sciences), mesdames Latché et Valette (Français), mademoiselle May Byrne (Anglais) et madame Webfter (Musique). Les petites classes étaient dévolues à madame Bonnafous aidée par Mlle Adèle Oustric (soeur d'Antoinette et d'Albert Oustric). La journée se passait de la sorte: Lever à 7 heures, toilette, demi-heure d'étude avant le petit déjeuner servi à 8 heures, déjeuner à midi avec vin à volonté, goûter, dîner avec potage toute la semaine sauf le vendredi. Le dimanche on mangeait du poulet garni avec des légumes de saison et le soir, rôti de porc avec des frites. A noter que la cuisinière, Eugénie, était forte et un peu sale. Elle possédait un gros chien noir, poilu et plein de puces qu'elle gardait dans sa chambre.

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    Au moment de la distribution des prix, les élèves construisaient une estrade dans la cour. On y jouait ensuite des pièces de théâtre avec les accessoires prêtés par l'antiquaire Lambrigot.

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    La maison d'antiquités Lambrigot occupait la chapelle. Après la guerre de 1914, l'ancienne pension Cèbe devint "Institution Jeanne d'Arc".Les élèves portèrent alors un uniforme bleu-marine avec veste tailleur, jupe plissée et chapeau rond à rebord. Ils étaient tenus de porter des gants blancs, comme d'ailleurs les externes (même pour traverser la rue). Malgré un enseignement dispensé par des laïques, il fallait que tous les élèves sans exceptions se rendent à la messe le dimanche et aux vêpres. Pour la fête de sainte Jeanne d'Arc, les rebords des fenêtres étaient décorés de lampions multicolores.

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    A l'époque de la pension Sèbe, on accédait par un couloir dallé donnant sur une cour carrée pavée de galets. Au fond, un autre couloir conduisait à la cour principale entourée par les classes et le préau. Au premier étage, il y avait le réfectoire, le parloir avec un grand clavecin et une partie des dortoirs. A sa suite, l'institutions Jeanne d'Arc fit l'acquisition de l'ensemble de l'immeuble de la rue de Verdun. Elle eut ainsi deux sorties, l'une rue Aimé Ramond et l'autre dans la rue Coste-Reboulh. Sur cette photo, à l'emplacement de l'agence immobilière il y avait deux fenêtres à barreaux (voir gravure Lambrigot). L'une était le logement des concièrges, deux femmes assez agées avec un chignon sur la tête. L'autre, le parloir dont la porte donnant sur le couloir a été murée était au départ le bureau du quincaillier Pouchelon. Cet artisan était sur cette photo d'aujourd'hui, à droite du porche.

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    L'Institution Jeanne d'Arc quitta les lieux en 1929 et alla s'installer dans la rue Victor Hugo où elle est encore. La chapelle des dominicains devint alors, la mercerie-bonneterie de Joseph Fourès. Les bâtiments de l'école devinrent en majorité des appartements. A l'ancien parloir s'installa l'herboriste Alexandre Renaud qui jouait à l'ASC. L'ensemble de l'immeuble au rez de chaussée fut modifié. D'abord en 1933 par Robert Ducos. A droite du couloir, il fit un bar à café (Café Biec et biscuits Curat-Dop) et à gauche, une épicerie. La devanture resta en l'état jusqu'aux années 1960 puis, il céda l'épicerie à madame Lauze. Nous reviendrons prochainement sur ces transformations avec l'actuel hôtel de la poste.

    Source: A. Raucoules

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