Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Portraits de carcassonnais - Page 62

  • Une affiche de la distillerie Sabatier vaut-elle de l'or?

    L'ancienne distillerie de Michel Sabatier située sur l'avenue du général Leclerc n'a pas encore livré tous ses secrets architecturaux et artistiques, comme nous l'avons découvert la semaine dernière. Nous allons nous intéresser aujourd'hui à une affiche publicitaire, dessinée pour vanter les bienfaits du produit phare de la distillerie: La liqueur de la Micheline.

    15014.jpg

    Cette affiche a été réalisée pour l'Exposition universelle de Paris en 1900. La majestueuse Cité de Carcassonne veille sur le Palais de la Micheline et sur la distillerie de l'Or-Kina. Vous remarquerez dans cette mise-en-scène, qu'on a volontairement agrandi l'ensemble des bâtiments de l'usine afin de leur donner davantage d'importance. La distillerie est presque aussi imposante que l'antique cité médiévale. Et pour cause... Tout le génie publicitaire de La Micheline repose sur une légende probablement inventée par Sabatier lui-même, selon laquelle il aurait retrouvé dans une des tours de la Cité en 1856 (la tour de l'Inquisition) un vieux parchemin. Celui-ci revélait la recette d'un antique breuvage dont lui seul connaisait désormais le secret de fabrication. Pourquoi Micheline? Tout simplement parce que l'inventeur en aurait été Michelin Boato au IVe siècle.

    Une égérie de l'antiquité romaine, présente sur un plateau en or s'élevant au dessus de Carcassonne, les deux produits de la distillerie: La Micheline et l'Or-kina. Une femme à ses pieds en vénère le culte. N'oublions pas que Carcassonne dès le IIIe siècle était occupée par les romains. Sabatier triche sur l'origine ancestrale de son breuvage. Pour montrer qu'il a su traverser les âges, il n'hésite pas à se mettre en scène avec ses belles bacchantes, dans un costume théâtralisé de la comédie italienne du XVIe siècle. D'une main, il tient une coupe et de l'autre, un clairon de fanfare. Peut-être a t-il voulu également signifier ses origines limouxines, en référence au carnaval et à la Blanquette?

    Sabatier, le mécène et le bienfaiteur de la ville, souhaite ainsi symboliser l'emprise de son pouvoir économique sur Carcassonne. A la fin du XIXe siècle, début XXe siècle, les industriels mettaient leur argent dans l'essor culturel de leur ville. Sabatier a financé le premier embrasement de la Cité en 1898, la venue des Cadets de Gascogne, les orchestres et orphéons de Carcassonne, le théâtre de la Cité...etc. Une rue porte son nom, entre la rue Trivalle et l'avenue Leclerc.

    Léon-Louis Oury

    Cette affiche a été dessinée par Louis Oury (1846-1929) qui n'est autre, s'il vous plaît, que le décorateur des plafonds du Grand-Escalier de l'Opéra Garnier.

    800px-Paris_Opera_Garnier_Plafond_Escalier_01.jpg

    Nous pouvons aisément comparer le style utilisé par cet élève d'Isidore Pils avec celui de l'affiche de Sabatier. Le choix d'Oury n'est sans conteste, pas l'oeuvre du hasard. En effet, le patron de la distillerie était un féru d'opéra et s'y rendait régulièrement lors de ses séjours parisiens. Il avait même fondé avec son frère Jacques, une harmonie dans son usine.

    P1010414.JPG

    Nous avons retrouvé la bannière de l'Harmonie de la Micheline.

    affiche sabatier.jpg

    Les employés de l'établissement formaient la phalange de musiciens de cet orchestre. Dès 1851, François Teysseyre avait créé la première école municipale de musique gratuite de Carcassonne.

    ets sabatier0001.jpg

    Le Palais de la Micheline à ses heures de gloire

    __________________________

    © Tous droits réservés/ Musique et patrimoine/ 2013

  • Le 24e régiment d'infanterie coloniale de Carcassonne.

    Au sortir de la seconde guerre mondiale (1er mai 1948), le 24e régiment de tirailleurs sénégalais est reconstitué en deux bataillons à Carcassonne, afin de préparer sa participation à la guerre d'Indochine (Tonkin). Le régiment embarque à Marseille le 1er septembre et débarque à Haïphong, pour être ensuite engagé le 30 au Tonkin. Les deux bataillons participent aux opérations de pacification des secteurs de Sontay, Hoa Binh, Haïduong, Hadong et Kie-Nan. En 1951, ils fournissent les garnisons des postes de béton dont le Général de Lattre de Tassigny a ordonné la construction, véritable petite ligne Maginot pour la protection du "Delta utile". Ces taches sans gloire mais nécessaires seront meurtrières, et la compagnie sera citée à l'ordre de l'armée. Les deux bataillons seront dissous en 1954, après l'évacuation du Tonkin avant leur retour en métropole. Le 3e bataillon resté en France constituera lui, le nouveau noyau du 24e régiment d'infanterie coloniale.

    3818304518.jpg

    La pucelle de la compagnie d'instruction du 24e RIC de Carcassonne. Le régiment fera la campagne d'AFN; le 1er bataillon dans le Constantinois en novembre 1954 et le second en Tunisie. En juin 1955, ils sont regroupés dans la région de Biskra. Le 1er décembre 1958, l'interdit qui frappe le nom "Colonial" fait changer la dénomination du régiment qui devient le 24e régiment d'infanterie de Marine. Il sera dissous à la fin de la guerre d'Algérie, puis reconstitué en 1964 à Perpignan. C'est en 1962 que le 3e RPIMA remplace le 24e RIC à Carcassonne jusqu'à aujourd'hui.

    1534069566.JPG

    A l'intérieur de ce régiment, il y avait un orchestre militaire constitué d'appelés du contingent. Le chef de musique était le capitaine Camille Marcel Delzenne (1907-1967), qui forma bon nombre de jeunes musiciens carcassonnais.

    1712333454.JPG

    Il est inhumé au cimetière Saint-Vincent de Carcassonne

    ___________________________

    © Tous droits réservés/ Musique et patrimoine/ 2013

  • Gualdo, l'amuseur de la Trivalle

    J'étais bien trop petit pour avoir connu Gualdo mais j'en ai toujours entendu parlé autour de moi comme si: "longtemps, longtemps après que les poètes ont disparu leurs chansons courent encore dans les rues..." Et quelle chanson, puisqu'il s'agit de l'hymne de tout un quartier fier autrefois de sa diversité sociale et ethnique! Oui, "Aquela Trivala" a été écrite et chantée par Gualdo sur l'air de "Beaux soirs d'Espagne". Ne pouvait-il pas en être autrement quand on sait que notre héros était né aux pays des castagnettes et du Xérès ?

    430492359.jpg

    Ubaldo Moyano dit Gualdo, était né en 1914 à La Séco dans la province de Valladolid. A l'âge de dix ans, il débarque de son Espagne natale avec ses parents au pied de la cité à la Trivalle. Le quartier est constitué essentiellement de pauvres hères qui travaillent la vigne. Certes des français, mais aussi des espagnols qui sont venus chercher meilleure fortune dans notre pays et des Gitans qui vivent du chiffon. Toute cette misère cosmopolite génère une fraternité, bien éloignée de l'opulence égoiste dans laquelle nous vivons aujourd'hui. Là, point de racisme ! Les "Baraquets" (espagnols) que l'on surnomme ainsi en raison de leur goût prononcé pour le haricot plat, baragouinent un langage mêlé d'espagnol, de catalan et d'occitan. Les Gitans, quant à eux, habitent à l'entrée de la rue de la Gaffe et possèdent leur langue et une façon bien particulière de vivre en société. Le soir, les communautés animent le café Roldan pendant que les plus anciens restent devant leurs portes à bavarder. Parmi tous ces gens, un homme sort de l'ordinaire, c'est Gualdo ! Il a un sens inné de la farce, de la fête et de la mise en scène.
    Il travaille d'abord comme maçon mais une grave maladie lui interdit à l'avenir tout travail pénible. Il se tourne alors vers la cordonnerie qu'il apprend chez Martin au 8 de la rue Trivalle. Grâce à ça, il va suivre tous les match de l'ASC car il sera sollicité pour réparer les crampons des rugbymen qui en feront leur mascotte.
    Gualdo va devenir au fil des ans l'amuseur public, une espèce de clown dont le but sera de donner de la joie autour de lui. Il a quitté notre monde à l'âge de 63 ans et est inhumé au cimetière La Conte de Carcassonne. Seuls ceux qui l'ont cotoyé, pourront mieux que moi vous le décrire.
     
    Source
     
    Gualdo, le troubadour de la Trivalle / R. Gougaud
     
    _______________________________
     
    © Tous droits réservés/ Musique et patrimoine/ 2013