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  • Le parvis de la cathédrale St-Michel révèle un épisode méconnu de l'histoire

    Nous avons appris cette semaine que d'ici à l'été 2016, la ville de Carcassonne va restaurer en profondeur le jardin attenant au parvis de la cathédrale Saint-Michel. Il est évident qu'à la suite des travaux menés par l'état sur l'édifice religieux, on ne pouvait difficilement faire l'économie de ce chantier. Le square de l'armistice de 1918 et de la capitulation nazie - nom peu poétique s'il en est - va donc se transformer. Très certainement, on prendra soin des vestiges de la maison Grassialo et de la statue de Jeanne d'arc, dont la fonte est attaquée en surface par la rouille. 

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    Selon les recherches entreprises par Jacques Blanco et communiquées dans le bulletin de la SESA en 2011, cette statue de Jeanne d'arc se trouvait dans un enfeu situé sur le boulevard Barbès à partir de 1914.

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    © Collection J. Blanco

    Elle se tenait sur un socle à l'arrière de la chapelle des Frères des écoles chrétiennes, comprise entre la rue neuve du mail (rue Marceau Perrutel) et le numéro 53 du boulevard.

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    C'est en 1972 que la statue a été déposée et placée dans le jardin attenant à la cathédrale, suite à l'installation du lycée Saint-François dans les anciens locaux des Frères des écoles chrétiennes. Elle a été sauvée grâce à l'intervention de M. Antoine Labarre, historien amateur dont nous sommes fiers d'être les héritiers. La chapelle a été désacralisée et transformée en gymnase.

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    Nous apercevons encore aujourd'hui l'enfeu, sans la statue

     Le 9 mai 1945

    C'est en trouvant une vieille photographie dans une brocante que j'ai pu dérouler le fil d'une pelote constituant un épisode oublié de l'histoire. Je ne disposais que peu d'indices, sinon une mention manuscrite au dos : Fête de Jeanne d'arc - 9 mai 45 - Carcassonne. Grâce à un peu de perspicacité et à l'aide de J. Blanco, nous avons pu conclure qu'il s'agissait bien du même endroit. Le numéro 53 à droite du cliché correspond à une maison qui s'est écroulée dans les années 90 et à droite, on aperçoit une partie du socle de la statue. Restait à savoir pour quelle occasion précise, cet évènement s'est produit.

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    Sur cette photographie prise sur le boulevard Barbès le 9 mai 45, on distingue les musiciens de la Société lyrique Sainte-Cécile et - en bas, à droite - Louis Amiel, le maire provisoire de Carcassonne à la Libération. Ce qui a attiré mon oeil, c'est la plaque en dessous du socle, car sur la photo de la statue dans l'enfeu elle n'apparaît pas. Bingo ! C'est précisément à cette occasion que la plaque a été dévoilée. Quel texte contenait t-elle ? Il suffit pour cela d'aller au pied de la statue située désormais dans le jardin du parvis de la cathédrale.

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    1940 - 1945

    Témoignage de reconnaissance

    au département de l'Aude des

    Lorrains et des Alsaciens

    expulsés de leurs foyers

    en raison

    de leur attachement à la 

    FRANCE

    Renseignement pris auprès de l'abbé Didier Escoupérié, les habitants de Carcassonne ont accueilli chez eux de nombreux réfugiés d'Alsace-Lorraine à partir de 1940. C'était surtout des Lorrains de Metz et des villages alentours. Ils avaient fait le choix d'être Français et avaient fui l'annexion de l'Alsace-Lorraine par les Allemands. Certains de ces réfugiés logeaient dans la rue Chartran et entretiennent encore des relations avec certaines familles Carcassonnaises. En remerciement, une souscription a été levée par eux pour édifier une plaque en la mémoire de cet évènement tragique de leur histoire.

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    La plaque ne pouvait alors qu'être placée sous Jeanne d'arc - la Lorraine - symbolisant la résistance et le combat face à l'envahisseur. Chose étrange, le 8 mai 45 coïncide avec l'entrée de Jeanne d'arc dans Orléans libérée des Anglais en 1429. Par contre, la fête de Sainte Jeanne d'arc (canonisée en 1920) n'est pas le 1er mai... mais le 30 mai, jour de son martyre sur le bûcher de Rouen, en 1431.

    Espérons que lors des travaux dans ce jardin, on prendra soin de cette plaque maintenant que nous en connaissons l'histoire. On pourrait même envisager d'inviter les famille des réfugiés Lorrains ; une bonne occasion pour resserrer des liens. Il faudrait alors refaire une plaque et protéger celle-ci qui est en bien mauvais état.

    Mise à jour de l'article au 21 février 2017

    jeanne d'arc

    Après avoir inauguré le parvis de la Cathédrale Saint-Michel, les services de l'état ont déposé la statue de Jeanne d'Arc. On se demandait bien où elle avait bien passer. Hier, nous avons découvert la statue dans cet état. Elle se trouve dans le jardin du presbytère de la cathédrale attenant à l'hôtel de police. Cet espace appartient à l'évêché. C'est là normalement que la statue devait retrouver un emplacement. Qu'est-il advenu du socle et de la plaque des Lorrains ? Le jardin mal entretenu et au milieu de saletés, laisse entrevoir la pucelle de Lorraine posée comme un vulgaire sac de ciment. Par qui ???

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    © Tous droits réservés/ Musique et patrimoine/ 2015

  • 1939 : L'exode de 450 000 réfugiés espagnols en France

    La guerre civile espagnole remportée par les troupes phalangistes du général Franco sur les Républicains, a poussé plus de 450 000 espagnols sur les routes de l'exode en février 1939. Après la chute de Barcelone, l'afflux de réfugiés n'a cessé de progresser vers la frontière française.

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    Les réfugiés à la frontière du Perthus en 1939

    Le gouvernement français de Daladier refuse d'en premier temps toute intrusion par la frontière, propose ensuite une zone neutre à Franco. Celui-ci décline l'offre indiquant qu'il s'agit de prisonniers de guerre. Le 27 janvier 1939, la France complètement débordée par les événements ouvre ses frontières, uniquement aux civils. Les gardes mobiles et les militaires sont chargés de faire le tri et repoussent par la force ceux jugés à-priori comme des combattants Républicains. Les autres sont fouillés et dépossédés de leurs armes, bijoux, argent liquide...etc. Le lendemain, ordre est donné de les accueillir mais leur nombre (45 000) déjà parqués sur les plage d'Argelès-sur-mer incite le gouvernement français à fermer à nouveau la frontière. À partir du 5 février, le reste de l'armée Républicaine de 250 000 hommes est autorisée à venir en France. Elle s'ajoute aux 250 000 civils déjà sur place. Des avions républicains atterrissent à Carcassonne. On estime à 500 000 le nombre de réfugiés dont un tiers de femmes, enfants et vieillards.

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    Le camp d'Argelès-sur-mer

    La France est débordée et complètement dépassée par les évènements. Les premiers réfugiés sont obligés de construire eux-mêmes des baraquements. En plein hiver, les espagnols ne disposent pas de chauffage, de médicaments, de nourriture et ce n'est qu'au bout d'un moment que l'armée consent à donner des couvertures. Saint-Cyprien est déclaré "zone paludique" ; entre février et juillet 1939, 15 000 personnes mourront de plusieurs épidémies. Il faudra attendre le printemps pour que d'autres camps soient créés au-delà des Pyrénées-Orientales, à Agde et Bram.

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    Le gouvernement parle de "Camp de concentration", comme celui de Bram à 25 kilomètres de Carcassonne. Il est entouré de barbelés et gardé par des policiers français. Ce n'est pas le seul dans l'Aude, il faut ajouter notamment celui de Montolieu ou de Couiza.

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    L'arrivée des réfugiés au camp de concentration de Bram

    On ne peut pas dire que la France fut très glorieuse dans l'accueil des réfugiés espagnols, même si elle fut dépassée par l'ampleur du problème. Ils venaient des régions frontalières telles que la Catalogne ou l'Aragon. L'arrivée au pouvoir du gouvernement de Vichy en 1940 va sérieusement détériorer la condition de ces étrangers. 200 000 seront enrôlés de force des les groupements de travailleurs étrangers fondés par Vichy. Dans l'Aude, ils construiront des routes ou seront employés à la mine de Salsigne. Certains seront déportés dans des camps d'extermination.

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    N'oublions pas que des centaines d'entre-eux ont rejoint les rangs de la Résistance et ont libéré la France des nazis. A Carcassonne, citons la 5e brigade de guérilleros espagnols qui logeait dans la rue Fabre d'Églantine. Ils seront arrêtés par la Gestapo, torturés dans la maison de la route de Toulouse et déportés. Il serait bien que la ville de Carcassonne leur rende hommage dans l'édification d'une plaque en leur mémoire.

    Communication de Marieh Melendez, historienne :

    Pour retracer la chronologie de ces évènements dans le département, les premiers réfugiés de la Guerre d'Espagne à parvenir dans l'Aude arrivent par la mer; ces (déjà)boat-people débarquent dans le Port de la Nouvelle en janvier 1939. La plupart ont embarqué sur des bateaux de fortune et ont été mitraillés par l'aviation nazie et fasciste italienne, sur leur trajet depuis la Catalogne; ces réfugiés qui ont tout quitté, au péril de leur vie, sont épuisés à leur arrivée et demandent asile à la France. Pour ceux qui souhaiteraient poursuivre l'Histoire de ces réfugiés, je vous invite à lire mon article paru récemment dans les mémoires de "l'Académie des Arts et Sciences de Carcassonne". Il y est question d'aspects assez méconnus: des Colonies d'enfants réfugiés, implantées dans la Montagne noire ou au Lac à Sigean, œuvre des Humanitaires suisses, mais aussi des colonies basque et britannique qui s'installent à Narbonne, grâce à la mobilisation d'associations humanitaires. 

    Mais le plus grand nombre de ces réfugiés de la Guerre d'Espagne a été reçu comme "indésirables", dans des camps-casernes, y compris quand il s'agissait de femmes et d'enfants comme dans le camp de Couiza-Montazels, de sinistre mémoire. Faim, épidémies, privation de liberté, barbelés, mortalité infantile très élevée, on est bien loin d'un accueil idyllique. Il s'agit de le reconnaitre pour ne pas renouveler les erreurs du passé. 

    Si en 1939, avec la censure de la presse,la majorité des Français était tenue à l'écart de la réelle situation dramatique des réfugiés d'Espagne, ce n'est pas le cas actuellement, avec les images qui sont diffusées, personne ne pourra plus dire qu'il n'était pas au courant. Il existe depuis ces évènements un statut de "réfugié" (Genève 1950), souhaitons qu'il puisse être appliqué au présent pour toute personne dont la vie est menacée.

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  • Michel Briguet (1918-1997), pianiste concertiste et musicologue

    Michel Briguet naît à Bordeaux le 23 août 1918 et fait ses études de piano au conservatoire de cette ville où il commence à donner des concerts.

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    Il est alors appelé sous les drapeaux comme sous-officier à la caserne Laperrine de Carcassonne le temps de son service militaire ; il a alors une vingtaine d'années. Comme tout militaire de son rang, il peut loger en dehors de la caserne et s'installe dans chambre située chez madame Sigé, rue Andrieu. Il a sans doute fait amener son piano puisqu'il donne quelques conseils à Isabelle Alay, une toute jeune pianiste qui enseignera plus tard cet instrument à de nombreux Carcassonnais. C'est dans la capitale audoise que Michel Briguet fait la connaissance de sa future épouse, Jeannine Mons qui habite cette ville avec sa famille. Pendant la guerre, il est réfugié en Creuse avec sa femme Jeanne et son fils Bernard.

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    A partir de 1949, Michel Briguet entame une longue collaboration avec les Jeunesses Musicales de France. Il présente plus de 2000 concerts, intervient à la radio, écrit des ouvrages pédagogiques.

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    Il organise des visites musicales dans les entreprises, les centres de loisirs, les villages... Partout où l'on peut faire connaître la musique classique. À ce sujet, le compositeur Carcassonnais Jacques Charpentier que j'ai interrogé se souvient parfaitement de Michel Briguet :

    "Cela devait être en 1958, quand je participais avec Michel Briguet dans le cadre des J.M.F à des concerts de piano à la ferme. Nous arrivions en train, mais le piano à queue avec l'accordeur était acheminé en camion ; c'est alors que nous donnions des concerts en milieu rural, dans des fermes pour exporter la musique classique."

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    C'est également un conférencier hors de pair qui vulgarise la musique et la rend familière aux oreilles des auditeurs les plus profanes.

    Et ce fut la révélation : il existait donc une musique capable de convaincre, de combler, de soulever ceux-là même qui en ignorent tout ! Michel Briguet n’allait pas par quatre chemins, il ne parlait que de musique mais il en parlait comme on parle des choses de la vie. Bref, il parlait d’évidence et il jouait de même. Avec lui, tout devenait si naturel, si profondément nécessaire ! Aujourd’hui, à quelque trente ans de distance, je salue en Michel Briguet un prédicateur, un musicien apôtre comme il y en a peu et qui met tout son talent à faire partager sa passion. Car on ne sait ce qu’il faut admirer le plus, de ses qualités d’interprète ou de son pouvoir de persuasion. Sans doute, dans tout le pays, sont-ils nombreux ceux qui, comme moi, lui doivent ce qui a donné sens et richesse à leur vie. (Maurice Fleuret - Directeur de la musique au Ministère de la Culture)

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    En sa qualité de pianiste concertiste, Michel Briguet vouait une admiration sans bornes à Frédéric Chopin dont il enregistrera sur disque plusieurs de ses Polonaises. Il apparaît même dans un film de Robert Bresson ayant pour titre "L'argent" en 1983, dans lequel il joue la "Fantaisie chromatique et fugue" de J.S Bach.

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    Olivier Messiaen et Michel Briguet

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    Michel Briguet et Marcel Landowski

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    Michel Briguet repose au cimetière Saint-Michel de Carcassonne dans le caveau de sa belle-famille avec son épouse. Il est décédé à Paris le 5 mai 1997.

    Sources

    Je remercie M. Christian Briguet (son fils) et ma tante Isabelle Alay.

    Wikipédia

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