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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 142

  • Le chef-d'oeuvre de Louis Lacombe, artisan plâtrier Carcassonnais

    Les plus humbles sont très souvent les plus méritants, il conviendrait ne pas l'oublier... C'est l'histoire d'un Carcassonnais né le 12 mai 1856 dans une famille miséreuse, comme il en existe tant dans la Cité médiévale à cette époque. Guillaume et Julie Lacombe exercent la profession de tisserand et habitent dans une vieille demeure accrochée à la Barbacane près du château comtal. C'est pour ainsi dire une espèce de bidonville dans lequel on subsiste grâce aux manufactures de draps pour un salaire de misère. Là, a vu le jour Louis Lacombe.

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    Louis Lacombe dans son atelier

    Cet homme singulier n'a pas suivi le métier de ses parents ; il s'est formé pour devenir artisan maçon. Plus exactement, plâtrier. Après son mariage avec Marie-Elisabeth Lannes en 1879, il a installé son atelier dans le faubourg de la Trivalle, numéro 138. Cigalet - c'est son sobriquet - voue une véritable admiration pour sa Cité à tel point qu'il envisage d'en faire une maquette. Chaque jour que Dieu fait, il monte chez la vieille dame de pierre. A l'aide d'un mètre ruban, il mesure lui-même la largeur des créneaux. Avec une corde, il pointe sa mesure afin de relever la hauteur des tours. Pas question d'être dans l'à-peu-près, car Cigalet veut que sa maquette soit parfaitement à l'échelle de 1/100e. Les remparts font deux kilomètres de long... Les cinquante tours et les cinq portes d'entrées sont d'une fidélité qui défie l'imagination. On y reconnaît chaque fenêtre, chaque mâchicoulis, chaque tuile. La maquette fait 20 mètres de périmètre et 4,50 mètres de diamètre.

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    © Monuments nationaux

    Détail de la maquette

    Ce qui impressionne, c'est le temps qu'à mis notre artisan pour réaliser cette œuvre : 40 années ! Tout son loisir y passa et quand on voit la beauté de sa Basilique Saint-Nazaire, on ne peut être qu'admiratif. Quand son travail fut achevé, Louis Lacombe en fit don à la Cité et on l'exposa dans une des salles du château. Jusqu'à sa mort en 1933, le petit plâtrier de la Trivalle faisait lui-même visiter son œuvre en noyer au touristes. Il reconstituait l'embrasement de la Cité avec des ampoules rouges... 

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    La basilique Saint-Nazaire et Saint-Celse

    La consécration suprême vint après sa mort, le 4 avril 1961, lorsque le Ministère de la culture classa la maquette à l'inventaire des Monuments historiques. Si vous visitez l'intérieur du château comtal vous verrez encore la sublime Cité de Carcassonne de Louis Lacombe. Le petit plâtrier devenu architecte miniaturiste.

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  • Léon Noubel (1908-1967) a donné son nom à une cité H.L.M

    Dans le quartier de la Trivalle sur l'emplacement de l'ancienne brasserie Fritz Lauer, on a construit une cité H.L.M qui porte le nom de Léon Noubel. Les anciens se souviendront de la haute cheminée qui dominait à cet endroit, dernièr vestige du passé industriel de Carcassonne. On peut imaginer aujourd'hui, le nom de Léon Noubel étant devenu éponyme, qu'aucun des locataires de cet ensemble d'appartements ne connaît la vie de cet illustre concitoyen. Nous avons donc souhaité lui rendre hommage et rappeler ce qu'il fut.

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    La Cité Léon Noubel, rue Flandres-Dunkerque

    Léon, Pierre Noubel naît le 10 novembre 1908 à Carcassonne. Comme beaucoup d'enfants de cette époque, il perdra son père lors du conflit mondial de 1914-1918. Adopté par la Nation, il réussit son certificat d'études primaires à l'école de la Cité. Toute sa carrière professionnelle se fera dans les Postes d'abord comme porteur de dépêches et de télégrammes, puis en tant que contrôleur des P.T.T au tri postal. Avec son épouse Irène et son fils unique Claude Noubel né en 1931, le couple vit dans la demeure familiale au 95, rue Barbacane. Sous l'Occupation allemande, Léon Noubel fait de la résistance Carcassonnaise au sein du N.A.P (Noyautage des Administrations Publiques) des Postes. C'est donc naturellement qu'il se retrouve en 1945 au Conseil municipal de la ville présidé par Henri Gout. Il y sera rappelé plus tard par le maire socialiste Jules Fil. "Pierrou" comme aimaient à l'appeler ses amis, avait toujours sa porte ouverte et se montrait d'une grande serviabilité. On le voyait au stade Domec en train d'encourager les vedettes de l'ASC XIII, mais on plus grand plaisir sur trouvait à l'Oun. Qu'est-ce que cela ? C'est le nom que les anciens donnaient à la place Saint-Gimer lors de fête du quartier. Une époque où les gens se retrouvaient pour déguster les escargots... 

    Léon Noubel était fier de ses trois petits-enfants dont l'aînée, France-Hélène née en 1957. Son fils Claude a sans doute aujourd'hui achevé sa carrière d'inspecteur des impôts à Châteauroux. Que dire de ses arrière petits-enfants Dorian et Alman ? Espérons désormais que la Cité Léon Noubel inaugurée après la mort de celui dont elle porte le nom, emporté par une embolie pulmonaire le 16 février 1967, ne vous soit plus totalement plus inconnue. 

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  • Les prisonniers de guerre allemands dans l'Aude

    On estime à près d’un million le nombre de prisonniers de guerre Allemands en France entre 1945 et 1948. Après la capitulation de l’Allemagne nazie, les anciens soldats de l’Axe sont répartis dans  différents camps, comme par exemple celui de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales) qui servit à interner autrefois les réfugiés espagnols. A Carcassonne, ils sont parqués derrière le stade de la pépinière (Albert Domec) ; il y a même des italiens. 

    Le bureau des Prisonniers de Guerre de l’Axe se trouve dans la caserne Iéna sous le commandement du capitaine Marchand, chef du bureau de l’Aude. Une commission départementale examine et attribue selon les besoins les candidatures ; elle a également la possibilité de retirer la garde d’un prisonnier à son employeur à cause d’un manquement grave. 

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    © ADA 11

    Gincla (4), Villarzel-Cabardès (10), Marseillette (30), Conques-sur-Orbiel (15), Puichéric (10), Laure-Minervois (10), La Redorte (12), Moux (10), Quintillan (20), Rieux-Minervois (20), Villerouge-Termenes (20), Pépieux (10), La Pomarède (10), Montmaur (10, La Nouvelle (40), Carcassonne (68), Ladern-sur-Lauquet (30), Narbonne (67), VInassan (20), Villemoustaussou (8), Lasbordes (10), Cascastel (12), Mas-Sainte-Puelle (8), Balcaire (10), Alet (4), Fitou (6)

    Certains prisonniers vont servir de main d’œuvre afin de remettre en état les routes, les ponts, les plages endommagées par quatre années de guerre. Un commando installé à la caserne de la Justice (actuel parc au matériel municipal, avenue Henri Gout) comprend 195 prisonniers dont 175 chargés du comblement des tranchées de la défense passive. Au Quai Riquet ravagé le 20 août 1944 par une horde de barbares teutons, ils sont une vingtaine à déblayer les ruines. Au château de Baudrigues près de Roullens, ces anciens fanatiques déminent le parc à leurs risques et périls. Au square Gambetta, sous la conduite de M. Salette, jardinier de la ville, ils sont huit à faire des travaux de terrassement. Dans l’ensemble du département, on trouve des prisonniers de guerre à Lézignan (30 au comblement des tranchées), Castelnaudary (30 au déblaiement du domaine des Cheminières), Puginier (10 au déblaiement du domaine du Castellet), Puivert (30 à la récupération des matériaux), Narbonne (105 au comblement et déblaiement). Les dépenses avancées pour ses travaux se montent à 1 440 000 francs.

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    D’autres seront employés dans des propriétés agricoles, des exploitations forestières, des mines, etc. A tout employeur qui en fera la demande pourra être confié un ou plusieurs anciens soldats allemands, à condition de n’avoir pas été condamné par la Chambre civique pour collaboration. Prenons pour exemple, le cas de Pierre Arnaud, propriétaire viticole à Laure-Minervois. Il emploie quatre prisonniers allemands depuis le 27 octobre 1945, en provenance du camp de Rivesaltes : Zapke Walter (2e classe), Zapke Otto (Caporal chef), Setzler Hermann (Sergent) et Wunch Anton (Sergent). Ces hommes touchent chaque mois 125 francs en argent de poche et M. Arnaud s’acquitte en plus des indemnités compensatrices au Ministère du travail, s’élevant à près de 4000 francs trimestriellement. 

    En août 1947, l’ensemble des prisonniers de guerre allemands peuvent être transformés en travailleurs libres par la Commission départementale. C’est-à-dire qu’ils peuvent faire le choix de rester en France pour y travailler ou repartir chez eux. Sur 1502 prisonniers dont 502 sous-officiers, 352 solliciteront leur transformation, 651 seront rapatriés en Allemagne et 505 resteront prisonniers sous le contrôle de l’autorité militaire. La majorité des prisonniers transformés se sont adaptés à nos mœurs et à nos coutumes. Parmi eux, 22 se sont mariés avec des audoises. En général, les prisonniers transformés, surtout ceux affectés à l’agriculture, qui logent dans des fermes éloignées, vivent et ont peu de relations avec la population française. Le dimanche, ils se rendent au café, assistent aux fêtes locales et mènent une vie calme et régulière. Lorsqu’ils sont plusieurs dans une localité, ils se réunissent et, avec l’assentiment des régisseurs, passent leurs soirées à jouer aux cartes ou à causer. La population, si elle ne leur témoigne aucun élan affectueux, elle observe à leur égard une indifférence polie.

    Il y a néanmoins des exceptions pour lesquelles certains prisonniers se sont fait remarquer défavorablement. Zapke Otto, né le 6 octobre 1906 et employé chez Pierre Arnaud à Laure-Minervois, a donné deux coups de poings au fils du propriétaire. Au square Gambetta, Berthold Binder s’en est pris au jardinier Salette. Les relations intimes que d’autres peuvent avoir avec les filles de leurs employeurs s’avèrent compliquées… A Ventenac-Cabardès, Knopp Otto, né le 18 mars 1924 à Wollin, pris de boisson, s’est disputé avec les jeunes du village à l’occasion de la fête locale. Une bagarre a fait intervenir la gendarmerie d’Alzonne.

    Peu se livrent à une activité politique ou syndicale, toutefois relevons qu’à Pezens, Witte Henri, né le 12 août 1912 à Leipzig, ouvrier agricole chez Arnal, a adhéré avec trois compatriotes au syndicat agricole local. Idem, pour Zapke Otto et Räder Otto, tous deux mêlés aux grèves de  novembre 1947.

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    © La dépêche 

    Josef Braun (au centre) avec ses amis Terrolais

    Si nous terminions sur une note positive, symbole de l’amitié Franco-Allemande née avec le traité de l’Elysée, signé entre le général de Gaulle et le Chancelier Konrad Adenauer ? Nous parlerions de Josef Braun qui fut envoyé dans l’exploitation forestière de Maître Pallot à Terroles (Aude), comme prisonnier de guerre. En provenance du camp de Rivesaltes, il était chargé du reboisement de la forêt de la Courbatière avec neuf autres compatriotes. Josef alias Zep s’était fait beaucoup d’amis au village et revint chaque année depuis 1962 pour les retrouver. En 2016, à l’âge de 95 ans ce papy figurait encore sur la photographie au milieu des 17 habitants de cette commune. Une belle preuve de réconciliation dans une Europe en paix.

    Sources

    ADA 11

    Archives personnelles / Martial Andrieu

    La dépêche / 2016

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