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  • La visite du poète provençal Frédéric Mistral à Carcassonne

    La première fois que le célèbre poète provençal vint à Carcassonne ce fut le 11 mai 1893 à l’occasion de la Sainte-Estelle. Frédéric Mistal avait mis le mouvement félibrige sous le patronage de la sainte dont il avait latinisé le nom. D’après lui, « tels les rois mages reconnaissant par là l’influx mystérieux de quelque haute conjoncture, nous saluâmes l’Etoile qui présidait au berceau de notre rédemption. (Mémoires et récits, 1919) »

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    Sous les vivats de la foule massée depuis la mairie jusqu’au pont Marengo, apparurent à 14h45 Frédéric Mistral et Félix Gras, fraîchement descendus du train. La délégation qui accompagnait le Grand-maître du félibrige et le Capoulié n’en était pas moins impressionnante : Paul Mariéton (Grand Chancelier), Amairetti, Valère Bernard, Huot, Joseph Gauthier, Jean Mouné, Charles André, Marius André, Alexis Mouzin, Bouvet, de Baroncelli, Jouveau, Rochetin, Mlle Marie Girard, Marius Girard, Chausroux, Blavet, Chabrier, Sarran, d’Alard, Henri Bigot, Rémy Marcelin, de Valette, Redonnel, Augé, Mlle Fournel, Messine, Fernand Troubat, Georges Troubat, Bécanne, Marsal, Fournel, Dezeuze, Combalat, Roche, Carlier, Aymar, Pourquier, Loubet, Mme Redonnel, Mme Souques, Clément Auzière, Artozoul, Chabal, Hilarion de Roux, Pascal Borel, Constans, Rodolphe Martin, Xavier de Fourvières, Mme Périer, Gabriel Perrier, Maurice Raimbault, Joseph de Valette, Euclide de Carli, Joseph Soulet, Rottner, Brissaut, Court, de Malafosse, Jean Castelar, Prospère L’Eté, Junior Sans, Donadieu, Antonin Perbosc, Charles Ratier, Damton, Cazelles.

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    La gare et le pont Marengo

    Parmi ces personnes, il faut ajouter la présence de Charles Maurras qui à cette époque ne faisait pas encore de politique sous la bannière de son journal royaliste « L’Action française ». Si parmi les félibres, quelques exceptions républicaines comme Félix Gras émergeaient, une majorité vouait une certaine nostalgie - pour ne pas dire plus - en faveur de la monarchie. Beaucoup de ces familles se rangeront, au moins au début, derrière le maréchal Pétain, sa Révolution nationale et le rétablissement des anciennes provinces d’avant 1789. Tout ceci avec comme carotte, la reconnaissance de la langue et des coutumes languedociennes. Ceci est un autre débat…

    Les représentants des associations savantes de Carcassonne furent les premières à saluer Mistral : Germain Sicard, président de la Société d’Etudes Scientifiques de l’Aude ; MM. Desmarest et Coste pour la Société des Arts et des Sciences de Carcassonne et enfin, l’Escola Audenca avec MM. Jourdanne et Gourdon, pharmacien à Alzonne.

    Tout ce monde défila derrière une bannière au son de la musique du 15e de ligne vers l’Hôtel de ville, où devaient être rendus les honneurs à Mistral et à sa délégation. En l’absence du maire Antoine Durand retenu chez lui par la maladie, c’est son premier adjoint M. Maure qui prit la parole. Un vin d’honneur arrosé de Blanquette de Limoux clôtura les discours.

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    Ancien café Maymou, aujourd'hui Brasserie Putelat

    Un premier concert donné par la musique du 15e régiment de ligne fut exécuté en présence de Mistral à la terrasse du café Maymou, près du portail des Jacobins. On joua la Marche Chinoise du compositeur Carcassonnais Armand Raynaud, alors chef d’orchestre au Capitole de Toulouse. 

    Le soir à 20h30 c’est l’Harmonie Sainte-Cécile qui interpréta au kiosque du square Gambetta, des extraits de Mireille de l’opéra Charles Gounod, d’après l’œuvre de Frédéric Mistral.

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    Gaston Jourdanne

    Une conférence sur l’histoire de la Cité depuis sa fondation jusqu’à aujourd’hui attira un grand nombre de personnes de la belle société aristocratique. C’est l’ancien maire Gaston Jourdanne devenu historien qui officia avec grand talent. La rappel de l’Aude regratta néanmoins que l’érudit « ait dû pour se concilier les sympathies des organistes et des réactionnaires des deux sexes fort nombreux dans la salle, a cru devoir faire une incursion politique et exprimer quelques regrets à la louange de l’Ancien Régime ; il a même essayé d’innocenter le pauvre Innocent III des massacres de l’Inquisition ! »

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    Vestige de l'ancien cloître

    Dans l’ancien cloître attenant à l’actuel Grand théâtre, sous une immense tente richement décorée, se tint le banquet auquel prirent place 150 convives. Tout à la gloire du félibrige et de son éminent représentant, des écussons entouraient des inscriptions comme celle-ci, au milieu du buste de Mistral.

    Un pople que laisse toumba

    La lego et les us de si paire

    Nous merito que de creba

    Drin-drin coumo los reirès

    Lou soulel nous fa canta

    (Un peuple qui laisse tomber la langue, ne mérite que de crever. Drin-drin comme les rires, le soleil nous fait chanter)

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    Mistral par Charpentier

    Plus loin, une inscription patriotique disait ceci :

    Ame moun vilage mai que tout vilage

    Ame ma proubenço mai que ta provinço

    Ame la Franço mai que tout

    (Aime mon village plus que ton village. Aime ma Provence plus que ta province. Aime la France plus que tout.)

    Cette manifestation culturelle se termina par la représentation de l’opéra Mireille de Gounod au théâtre de la Cité, comble pour l’occasion. Au lever du rideau, on entendit M. Noé Cadeau chanter « Lé poutou », chanson languedocienne bien connue en son temps. Madame Vaillant-Couturier et M. Bellordre, furent très convaincant dans le rôle de Mireille et de Vincent. Ainsi se termina cette journée de la fête annuelle de Sainte-Estelle.

    Frédéric Mistral reviendra à Carcassonne incognito les 18 et 19 octobre 1893 pour visiter son ami Achille Mir chez lui, à la Manufacture de la Trivalle. La rue Frédéric Mistral fut dénommée ainsi en 1934, après l'ouverture d'une voie entre les rues Clémenceau et Armagnac. C'est à M. Toulzet père que nous devons cette idée.

    Sources

    Le rappel de l'Aude / 12 mai 1893

    Autour du centenaire Mistral / Jean d'Atax (J. Amiel)

    La revue méridionale / Novembre 1893

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