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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 130

  • Les "têtes brûlées" dans le ciel de l'Aude

    Peut-être vous souvenez-vous de ce téléfilm américain ayant pour titre « Les têtes brûlées » mettant en scène des aviateurs américains chassant les appareils Japonais au-dessus du pacifique. Sachez que nous avons eu ces mêmes héros dans le ciel de l’Aude à partir du 15 août 1944, juste après le débarquement des alliés en Provence. Leurs missions périlleuses avaient pour objectifs d’anéantir les convois de troupes et de matériels allemands faisant mouvement vers la vallée du Rhône. Afin d’atteindre leur but, les aviateurs américains s’étaient entraînés pendant un mois en mer Méditerranée. Nom de code : Preface-Dragoon.

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    Hellcat F6F-5 

    Dès le 18 août 1944, les escadres VF-74 et VOF-1 décollèrent respectivement depuis les porte-avions Kasaan Bay et Tulagi, mouillant au large des côtes méditerranéennes. Deux divisions reçurent l’ordre d’attaquer un train en direction de l’Ouest de Carcassonne et à environ 40 miles au Sud-Est de Toulouse. Celui-ci avait été signalé par reconnaissance. Après le décollage, les avions suivirent le cap à une altitude de 2000 pieds (609 mètres d’altitude) directement vers la tête du convoi, situé à 4 miles de Castelnaudary et en dehors du Mas-Sainte-Puelle. Vingt-deux wagons plats dont vingt transportaient des camions furent dénombrés à l’arrière de la locomotive. Une fois à portée de tir, les pilotes mitraillèrent à basse altitude, chacun effectuant sept à huit passages. La seule riposte provint des hommes au sol armés de fusils légers. La locomotive fort endommagée n’explosa pas, mais vingt camions furent détruits dont huit entièrement brûlés. Le retour à la base se fit sans problèmes.

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    The USS Kasaan Bay

    Le 20 août 1944, à 355 miles de la côte, huit avions décollèrent vers Arles, au Nord-Ouest de Nîmes, puis au Sud-Ouest de Montpellier. A l’extérieur de cette ville, quatre wagons rangés au bord de la route dans une gare de triage furent repérés et mitraillés. L’un d’eux a explosé, projetant des débris dans les airs à une altitude de 250 pieds et faisant tomber des pans du stabilisateur d’un avion. Le pilote n’étant pas au courant de la gravité des dommages sur son appareil, a poursuivi sa mission. En continuant vers le Sud-Ouest en direction de Balaruc, le vol permit de localiser des transports de troupes ennemis, du chargement, des camions-citerne et une voiture de commandement. Dans l’incendie, tous les hommes ont dû périr.

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    Mitraillage d'un convoi

    Après ces raids, le pilote de l’avion endommagé par l’explosion du camion de munitions, a demandé au leader de l’escadre, le lieutenant Harry Brinkley Bass, d’inspecter son appareil. Ce dernier ordonna au pilote de rentrer à la base et désigna un de ces camarades pour l’escorter. Les deux appareils rejoignirent le porte-avion en toute sécurité.

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    © usnamememorialhall.org

    Lt William Nathan Arburckle

    (1918-1944)

    Immédiatement après leur départ, le leader s’aperçut de l’absence de l’avion du lieutenant William Nathan Arbuckle. Malgré des appels radios, le pilote ne répondait pas. Les trois aviateurs restant firent le tour de la zone pendant dix minutes à sa recherche avant de poursuivre leur mission. On apprendra plus tard que Arbruckle s’étant perdu à cause du manque de visibilité avait attaqué seul un convoi au-dessus de Mèze. Abattu par la Flak (Défense antiaérienne allemande), son appareil heurta la cime des platanes au lieu-dit « L’aigues vaques ». Le malheureux pilote mourut ainsi carbonisé. Son corps fut inhumé à Mèze puis transféré au cimetière d’Epinal.

    Les trois autres rescapés poursuivirent au-dessus de la voie de chemin de fer vers Béziers, mais durent basculer vers le sud de Carcassonne pour éviter la zone montagneuse. Ils remontèrent la voie ferrée en direction de Villefranche-de-Lauragais. Juste au Nord-Ouest de ce village, un convoi de vingt-cinq à trente camions fut aperçu. L’un des pilotes a immédiatement attaqué et a été touché par de nombreux tirs d’armes légères. Ceci ne l’a pas empêché de mettre hors d’état une dizaine de camions.

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    Charles Wilburn Scott Hulland

    (1918-1945)

    Après que les trois avions se soient dirigés vers le Nord-Ouest, une fumée noire a commencé à s’échapper du moteur de l’appareil piloté par l’Enseigne Charles Wilburn Scott Hulland. Ce dernier a appelé le leader pour lui annoncer que la pression d’huile était tombée à zéro. Le lieutenant Brinkley Bass a pris un virage à 180° et a dirigé l’escadrille sur Sud-Sud-Est pour nettoyer le territoire ennemi le plus rapidement possible. Quelques minutes plus tard, Hulland annonça par radio que le moteur tournait à 3500 tours ; il ne pensait pas que l’avion pourrait continuer ainsi. Il était 11H40 lorsque Hulland s’éjecta de l’appareil au-dessus de Saint-Julien de Briola (Aude) à 1600 pieds. Son parachute s’ouvrit à 800 pieds et on le vit atterri en toute sécurité et rentrer son parachute. Hulland séjournera dans une ferme et rejoindra Bordeaux, l’Angleterre, l’Irlande et les Etats-Unis grâce à la Résistance. Il mourra en mission en mer des Philippines le 23 avril 1945. Son corps et son appareil ne seront jamais retrouvés. Les deux pilotes restant en vol, John. H. Shroff et Thomas. F. Kendrick, encerclèrent la zone suffisamment longtemps pour s’assurer que Hulland était en sécurité. Ils repartirent pour éviter de révéler la position à l’ennemi. L’avion de Hulland s’écrasa et explosa à cent mètres de lui. L'autre aviateur de l'escadrille était le lieutenant Gérald. G. Hogan.

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    Lieutenant Harry Brinkley Bass

    (1916-1944)

    Le leader de l'escadrille fut abattu le 20 août 1944 près de Vanosc (Ardèche) par la défense antiaérienne allemande (Flak). Inhumé à Vanosc, il  fut ensuite transféré au Roselaw Mémorial Park à Little Rock (Arkansas). Son nom a été donné à un navire, le USS Brinkley Bass. 

    Sources

    Nous devons cet excellent travail de recherche à Marcel Ertel qui ne compta pas ses heures pour retrouver la trace de ces pilotes. Il fit élever des stèles commémoratives et retrouva les familles américaines. Nous n'avons fait que synthétiser et rédiger à partir des documents contenus dans les archives historiques d'Alfred Raucoules. Si quelqu'un à une information sur le lieu précis où fut abattu l'aviateur Hulland au-dessus de St-Julien de Briola, nous sommes preneur.

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  • Félicité Pradher, une grande cantatrice française née à Carcassonne

    Thérèse « Félicité » More naît le 18 Nivôse de l’An VI (7 janvier 1798) à Carcassonne dans la Section de l’Egalité. Son père, Guillaume Raymond More, est l’un des comédiens les plus distingués du midi et possède une voix de Basse-taille. Il deviendra le directeur des théâtres de Carcassonne, Nîmes, Avignon, Perpignan… C’est au sein de ce creuset artistique qu’évolue la petite Thérèse qui déjà à l’âge de cinq ans se fait remarquer sur les planches du théâtre de Nîmes. Elle y interprète le rôle de la jeune paysanne Jeannette dans « Le déserteur », opéra-comique de Monsigny, créé en 1769 à l’Hôtel de Bourgogne à Paris. On la verra ensuite dans « La servante maîtresse » de Pergolèse et « Le devin du village » de Jean-Jacques Rousseau.

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    A dix ans, Thérèse More devient l’idole du public de l’Athénée à Montpellier où elle restera jusqu’à ses seize ans avant de partir rejoindre la capitale. Après plusieurs appels du pied de l’Intendant des Menus-Plaisirs, elle se décide à quitter le midi faute de n’avoir pas pu obtenir une augmentation de ses cachets. C’est en 1816 qu’elle fait son entrée à l’Opéra-Comique dans une reprise du « Calife de Bagdad » de Boieldieu, puis de « Une folie » de Méhul. A cette époque, elle fait la rencontre de Louis Pradher, lui-même élève de Méhul. Il est diplômé du Conservatoire de Paris et compose des œuvres d’opéra-comique et des romances. Thérèse, l’épouse à Paris le 9 novembre 1820 et devient Madame Félicité Pradher, Sociétaire de l’Opéra-Comique.

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    Costume de Mme Pradher dans "Le chalet"

    A ce titre, la Carcassonnaise créé consécutivement les rôles titres du « Chalet » de Adam (1834), de « L’éclair de Halévy (1835), de « Le cheval de bronze » de Auber (1835), de « Actéon » de Auber (1836), etc.

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    Le nom de la soprano Félicité Pradher, figure en très bonne place dans les critiques de la Gazette musicale de Paris et de bien d’autres revues spécialisées, comme l’une des voix les plus remarquables. Elle est la contemporaine de Mademoiselle Mars, originaire également de Carcassonne, à laquelle nous avons consacré un article.

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    Félicité Pradher en 1860

    En 1840, Félicité se retire avec son mari à Gray dans la Haute-Saône où ce dernier décède trois ans plus tard. Elle lui survivra trente-trois ans et mourra à un âge très avancé pour l’époque, le 12 novembre 1876. L’ensemble des ses partitions, des dédicaces de compositeurs furent léguées à son neveu Jules More. Elles sont aujourd’hui rassemblées dans un fonds conservé dans la bibliothèque du Conservatoire du Pays de Montbéliard. 

    Voici donc le nom d’une Carcassonnaise, inconnue chez nous, à rajouter à la liste des personnages célèbres de notre ville. Elle fut une très grande cantatrice française…

    Sources

    Recherches, synthèse et rédaction / Martial Andrieu

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  • Lettres inédites de vrais résistants audois, censurées par l'armée

    Après la Libération du département de l’Aude, une période d’euphorie et d’anarchie succéda aux heures sombres de l’Occupation. Les maquisards, vainqueurs d’un combat acharné contre les troupes nazies et les collaborateurs issus de l’extrême droite française maréchaliste, prirent en main les préfectures ainsi que les administrations locales. Pendant qu’une nouvelle gouvernance rétablissant la République tentait de se mettre en place, des groupes chargés du maintien de l’ordre traquaient les traitres, les délateurs et les femmes ayant pratiqué la collaboration horizontale avec l’ennemi. Ces interventions se firent très souvent au prix d’une sauvagerie revancharde dont les acteurs eurent à répondre devant la justice quelques années après, lorsque l’état de droit fut rétabli. Parmi eux, on trouvait surtout des résistants de la dernière heure et d’anciens collaborateurs tentant de se faire oublier.

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    Brassard FFI à la Croix de Lorraine

    Si le département de l’Aude en avait fini avec l’envahisseur, il n’en était pas de même sur l’ensemble du territoire français. Les maquisards furent donc invités à poursuivre la guerre à l’Est et s’engagèrent dans les trois bataillons formant le 81e régiment d’infanterie. Dans cette formation, on trouvait également des résistants de la dernière heure et d’anciens collabos convertis (5e colonne) pour sauver leur peau. Ajoutons à cela, les chefs militaires giraudistes issus de l’armée d’armistice dont beaucoup ne s’étaient guère mouillés dans le maquis et qui, désormais devaient commander les troupes FFI et FTP.

    Les lettres inédites que nous publions ci-dessous ont été interceptées par la censure militaire, au moment où ces maquisards étaient transformés pour passer dans l’armée régulière. Ils expriment leurs doutes, leur dégoût et le mépris avec lequel ils sont traités alors même que cette armée leur doit la liberté. Au cours du premier trimestre 1945, on ne parlera plus de maquisards mais de l’Armée Rhin et Danube du général de Lattre de Tassigny. Les gradés de la Résistance devront rendre leurs galons et certains ne l’accepteront pas. Quand on a été capitaine FFI, difficile de redescendre sergent dans l’armée d’active, commandé par ceux qui en juin 1940 avaient mené la France vers la débâcle.

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    Insigne de la 1ère armée Rhin et Danube

    15 Novembre 1944 (d’Espéraza)

    Nous avons eu beaucoup de maquisards ou plutôt des FFI et FTP dont la plupart étaient de la dernière heure, qui y sont venus quand le danger était disparu. Aussi, cela dégoûte même les purs. Je le répète, s’il n’y a pas un balayage là-dedans, cela n’amènera rien de bon. Aussi ce sont toujours les mêmes que l’on voit par ici. Ils ignorent certainement où se trouvent les Vosges, mais enfin il faudrait leur rafraîchir la mémoire et leur indiquer où se trouve le front…

    15 novembre 1944 (de Nîmes)

    Lorsque nous descendîmes à Nîmes, je ne fus jamais autant, excusez moi du mot, dégoûté de voir ce que nous fûmes alors, à ce que nous étions auparavant. Parmi nous régnait une pagaille et une mentalité effroyable et qui venaient de tous ces maquisards de la dernière heure et de quelques salopards qui profitèrent de cet état pour dégrader la valeur de tous ceux qui souffrirent pendant des mois ou des années, loin des leurs. Combien de ceux qui furent les pionniers de la Résistance sont maintenant dans l’obscurité ? D’autres sont venus les remplacer, d’autres qui ne furent rien pendant cette longue et douloureuse occupation et qui pour peut-être, ce qui est vrai pour quelques cas, ont collaboré avec l’ennemi et qui firent un trafic ignoble sur le malheur de ceux qui maintenant sont dans l’oubli. Ne pouvant rester davantage parmi tant de fausseté, je me suis engagé dans un bataillon de marche. Je veux finir ce que j’ai commencé c’est-à-dire délivrer la France complètement car maintenant, nous atteignons le plus dur…J’ai toujours gardé mon grade de sergent et je m’en trouve heureux, car il m’exempte de bien des corvées. Jean, Dudule, Emile, Marcel, le grand Louis, et d’autres sont dans le même régiment et tous regrettent amèrement le bon temps du maquis. Très souvent votre nom nous revient pour nous rappeler les bons et mauvais moments.

    Vraiment il faudrait que cet esprit maquis règne dans l’armée. Au fond, tout militaire si peu gradé soit-il devient égoïste. Il règne une jalousie qui n’existe pas dans le civil. Nous avons eu récemment la visite de grandes personnalités étrangères qui provoqua bien des discussions pour des riens. Ce qui prouve que la mentalité militaire n’est guère changée.

    15 novembre 1944 (de Narbonne)

    Mon capitaine, 

    Je voudrais bien avoir des nouvelles de la compagnie qui, je le suppose, doit être un peu dispersée. Pauvre compagnie… comme je suis fier d’en parler ; c’était une véritable famille. Il y avait une fraternité disciplinée qui pourrait servir de modèle à l’armée nouvelle, car à Toulouse, c’est vraiment triste de voir la mentalité des FFI. Chacun y affiche ses opinions politiques en oubliant facilement que les boches sont encore là et l’opinion publique s’en émeut. Mauvaise publicité que celle d’individus débraillés qui se promènent à longueur de journée en chantant des airs plus ou moins révolutionnaires ou de mauvais goût. A par cela, je n’ai pas eu le temps de me faire une idée de ce qui se passe dans l’armée de l’air, mais malgré tout je regrette un peu le maquis et la vie d’aventure que nous avons partagée pendant quelques courts mois. (Paul Billeau. 1 rue Réaumur à Narbonne)

    24 novembre 1944 (de Montpellier)

    Notre situation est toujours la même, c’est-à-dire assez confuse. Voici ce qu’il en est : Nous sommes toujours pas dans l’armée régulière. Il est beaucoup plus dur que tu crois d’y entrer, car, qui dit FFI, dit FTP pour les trois quarts, et qui dit FTP dit communistes. Or, ceux-là

    1. l’Armée régulière n’en veut pas.
    2. Les Américains ne veulent pas les équiper, avec juste raison d’ailleurs : on équipe une armée mais pas des bandes politiques, d’ailleurs tout cela va être bazardé un de ces jours.

    De toute façon FFI, je ne le reste plus. Tu penses bien que nos officiers, qui sont d’active ne demandant qu’à devenir chasseurs. Ils ne sont pas comme ces petits mer… de capitaine de 20 ans FFI, ou FTP qui veulent garder leurs galons à tout prix. Or dans l’armée, on les enverrait paître, eux et leurs galons… (Pierre Defranchi, à Montpellier)

    24 novembre 1944 (de Bourg-Madame)

    Ici c’est lamentable, à part les collaborateurs les plus froussards qui sont partis en Espagne, le reste se promène gentiment et continue son déplorable travail ; la Milice et les boches (Gestapo) font encore de leurs coups, aidés par les espagnols. Dans la nuit de dimanche à lundi, on a eu une fusillade dans les rues et les grenades, et je t’assure que ça a craché pendant 20 minutes. Ce sont les espagnols surtout qui ont tiré et s’ils avaient voulu, ce n’est pas les 15 FFI qui sont ici qui les auraient empêchés de venir nous escagasser. Il y a quinze jours, ils ont mitraillé les FFI. Il y a eu 2 blessés et eux, ils sont repartis sans être inquiétés. (Jean Héraut, monteur PTT à Bourg-Madame).

    11 décembre 1944 (de Castelnaudary)

    Nous montons le 20 sur le Rhin où nous devons être fondus dans l’armée « De Lattre de Tassigny », sous le nom de 81e régiment d’infanterie. Tout cela est bien beau, mais nous montons en ligne dans des conditions déplorables, mal équipés, c’est-à-dire sans casques et sans capotes (on ne va avoir chaud). Quant à l’armement, nous devons nous contenter de celui que nous avons actuellement et je vous assure qu’il n’est pas des plus brillant.

    Que voulez-vous ? C’est une façon comme une autre d’envoyer les gens à la boucherie. En définitive, les Américains ne font pas grand chose pour nous et du côté de Marseille, ils se passent la dérouillée avec les Forces Françaises… (Adjudant d’Artagnan)

    30 novembre 1944 (de Castelnaudary)

    Chers parents,

    Suis en bonne santé, pour vous mes meilleurs souhaits. Je vous assure que la vie nous a changés depuis que nous sommes ici. Hier soir, pour souper nous avons mangé pire que des cochons, une boite de singe à dix et quelques pommes de terre, bouillies comme à « l’escouadou », sans sel. Aussi, il ne faudra pas que je dépense tout comme j’ai fait jusqu’à présent, à aller me promener au café. Il faudra que je pense à manger. Mais je crois qu’à présent ils vont nous obliger d’aller manger au mess des officiers. Là, au moins, on mangera mieux, mais si les fameux résistants de la dernière heure croient de remonter la France avec leur fameux système en divisant le chef du soldat, je crois bien qu’ils vont se tromper, mais ça, ils le sentiront passer avant peu de temps, sitôt que nous serons à la bagarre. Je ne crois pas qu’ils aient tous ces beaux messieurs leur cuisine à part, mais à ce moment-là ce sera pour eux un peut tard, et peut-être que le début de la guerre de 1914 ne sera pas oublié.

    Toi papa, tu comprends très bien ce que je veux dire. Tu sais que ton fils ne ratera pas les agents que nous avons parmi nous. Les fameux de la cinquième colonne, car je suis toujours le même question d’idéal.

    Je vais terminer pour ce soir car j’ai une colère folle de voir tout ce qu’ils veulent nous mener comme avant. Recevez, chers parents, de votre fils qui vous aime, ses meilleurs baisers. (Marius Saunier, à ses parents à Monfort sur Boulzane dans l’Aude. Marius Saunier alias Matteo était né le 21 mai 1924)

    29 novembre 1944 (de Carcassonne)

    Moi, je suis toujours en caserne et je crois que nous ne sommes pas prêts de partir. Le matériel n’est pas encore arrivé, et surtout, nous ne sommes pas entraînés. (Soldat Deixonne, résidant à Perpignan)

    Pujol, secrétaire de l’Etat-Major. Bataillon Myriel à Narbonne

    Pour moi, je continue la lutte parmi les copains qui connaissaient mes origines de résistant et tout ce que j’ai pu faire pour eux. Nous pouvons à l’heure actuelle respirer la liberté, mais de grosses fautes ont été commises par le manque de liaisons et de gens capables. Comme je te l’avais dit, après la guerre commencera le procès de ceux qui étaient responsables de la Résistance et là, j’ai un mot à dire à certains. Les millions parachutés, les produits comestibles devront sortir, et ceux qui malheureusement étaient là pour nous guider répondront de leurs faits et actes.

    Je rassemble mes vieux souvenirs et je pense qu’un jour nous serons d’accord pour faire payer ceux qui s’amusaient de nous. Ici, je suis secrétaire de l’E-M et dans quelques jours nous partirons à Besançon.

    FFI à la caserne Lapasset, Castelnaudary

    Le 5 décembre 1944, plusieurs soldats FFI du Corps Franc Lorraine (Ancien maquis de Villebazy), expriment à la caserne Lapasset de Castelnaudary, leur dégoût pour la vie militaire et souhaitent être démobilisés. Ils manifestent leurs regrets d’être dans une caserne où « leur enthousiasme croupit ». Leur intention est de rejoindre une formation qui monte en ligne car ils estiment ’s’être engagés pour se battre ».

    Source

    S.H.D Vincennes

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