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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 130

  • Carcasso : Le vermouth de Carcassonne !

    Le fondateur de la distillerie de l'Or-kina, Michel Sabatier, déclina sous diverses formes publicitaires les produits de sa marque : éventails, verres, affiches... Et même, des disques en cire 78 tours qui vantaient les bienfaits de ses liqueurs et apéritifs. Enregistrés à Paris par un orchestre renommé, ils reprenaient la musique d'une chanson du moment en remplaçant les paroles. Nous avons récemment mis la main sur l'un de ses disques et par un miracle de la technique, nous avons pu restituer le son d'origine afin de vous le faire entendre. Il s'agit d'une publicité pour le "Carcasso", un vermouth fabriqué autrefois par la distillerie de la route de Narbonne. Les commerciaux le vendaient partout en France à partir du siège parisien, 26 rue de la pépinière dans le VIIIe arrondissement.

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    Le carton ci-dessus - issu de notre collection - était suspendu dans les cafés afin d'inciter les clients à consommer le précieux breuvage. Il donnait parait-il vigueur et santé... La publicité de Deruffe montre un athlète aux couleurs de la France, en train de presser le raisin indispensable à la fabrication du Carcasso. Le vermouth dont le nom provient d'une dénomination germanique est un vin aromatisé à l'aide de plantes. Nous pouvons citer les plus connus : Lillet et Byrrh. Il se pourrait bien que l'affiche ait été réalisée au moment des Jeux olympiques de 1928. Sur ce point, nous avons trouvé un indice.

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    La chanson "Bilbao" dont est extraite la musique du disque, a été créée en 1928 par Charles et Philippon. Michel Sabatier fit alors appel à l'orchestre d'Emile Noblot (1908-1965), accordéoniste et compositeur. A cette époque, on détournait beaucoup les paroles des chansons en vogue. C'est ce que Gualdo fera pour "Aquella Trivalla", l'hymne du quartier en dessous de la Cité.

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    Un pichet avec la marque "Carcasso" imprimée sur le verre.

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    Un éventail de la distillerie offert aux patrons des cafés

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    © Géraldine Deveau

    Depuis peu de temps, l'ancienne distillerie de Michel Sabatier a été entièrement réhabilitée par les vins Foncalieu. Elle se trouve sur l'avenue du général Leclerc à Carcassonne. C'est à cet endroit que l'on fabriquait le "Carcasso", avant que son concurrent Cabanel ne rachète les brevets de Michel Sabatier. On ne fabrique plus le vermouth, mais Cabanel garda le nom "Carcasso" et en fit la marque de son vin de noix.

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    Vendu chez Cabanel, allée Iéna à Carcassonne

    Si vous voulez écouter la chanson du Carcasso, nous l'avons enregistrée et postée sur youtube. Vous n'avez qu'à cliquer sur le lien ci-dessous

    https://www.youtube.com/watch?v=PaxMH__opzI

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  • A qui appartient le squelette du logis de l'Inquisition ?

    Ce logis de l'Inquisition jouxtant la tour du même nom dans la Cité médiévale fut en son temps le lieu des interrogatoires des hérétiques. Après bien des acquisitions, il devint la propriété de la famille Julien qui exerçait la profession d'antiquaire dans la vieille ville à deux pas de là. Antoine Sarraute qui s'était marié avec la fille du marchand d'art, hérita du logis en 1911 qu'il aménagea avec du mobilier Renaissance. C'est précisément au cours de cette réhabilitation que les ouvriers découvrirent le mardi 13 avril 1913 vers 10 heures, un squelette d'une "envergure colossale". Trouvé dans une position à- peu-près verticale et la main droite à hauteur du côté gauche de la cage thoracique, il semblerait qu'il était en était de défense avant son trépas. Aucune trace de sépulture, seules quelques pierres le recouvraient. La terre passée au crible ne fit apparaître qu'une cheville en fer.

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    Le squelette exposé en 1913 dans le logis de l'Inquisition

    Le journal anglais, le Daily Mail, informe ses lecteurs le 6 mai 1913 :

    "Une découvert à Carcassonne. Tout récemment on a pratiqué des fouilles dans une de ces anciennes et intéressantes maisons de Carcassonne. C'est un manoir féodal, à deux étages, avec des murs d'une immense épaisseur, qui était autrefois relié aux remparts par un passage couvert. Cette maison était le quartier principal de l'Inquisition, dans cette partie de la France, depuis le commencement du XIIIe siècle jusque environ 1705, époque à laquelle mourut le dernier survivant de l'Inquisition. L'immeuble fut acheté par M. Julien qui résolut de faire des fouilles dans les souterrains, et, il y a quelques jours, on a découvert un squelette sous le plancher d'une salle sombre et sépulcrale, dans laquelle les Inquisiteurs interrogeaient les infortunés prisonniers, soupçonnés d'hérésie. 

    Le squelette est celui d'un homme de deux mètres et qui pouvait avoir quarante ans à l'époque de sa mort. Les os sont intacts, à l'exception des orteils qui ont été enlevés par le pic du terrassier, et il ne manque pas une seule dent. On a trouvé une énorme cheville rouillée tout près, et comme en ces temps-là pour donner la mort, on traversait le crâne par un clou, il est probable que les restes sont ceux d'une des premières victimes de l'Inquisition. Une autre version dit que le squelette est celui du dernier inquisiteur lui-même. Les fouilles continuent..."

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    La délivrance des emmurés de Carcassonne

    (Jean-Paul Laurens)

    Aujourd'hui encore le mystère reste entier... A qui appartient le squelette du logis de l'Inquisition ? Voilà une réponse à laquelle il sera bien difficile de répondre. Le plus embarrassant dans l'histoire, c'est d'abord de savoir ce qu'on en a fait. 

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  • Le stade nautique de Carcassonne, au Païchérou vers 1930

     On avait entendu parler vaguement les anciens au sujet d’une piscine naturelle au Païchérou dans laquelle une société de natation organisait des compétitions, mais à ce jour personne ne s’était penché sur le sujet. Nous avons donc souhaité combler une lacune en effectuant des recherches, afin de préciser ce qui, jusqu’à présent, restait de l’ordre du on-dit. A l’aide de la presse spécialisée de l’époque et des journaux locaux, il nous a été possible de retracer depuis sa création en 1927, l’histoire du stade nautique du Païchérou.

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    La plage 

    A cet endroit depuis le XIXe siècle, il existe une plage comprise entre le barrage élevé par l’ingénieur Henry Bouffet et la propriété de M. Charry, très prisée des Carcassonnais à la belle saison. A l’extrémité de la païchère, l’endroit est passé dans la légende populaire sous le nom « les enfers » en raison du remous et des tourbillons d’eau qui entraînèrent subitement de nombreux nageurs vers le fond du fleuve. Comment en l’espace de quelques secondes, la plage située en contre-bas pouvait-elle se retrouver sous plusieurs mètres d’eau et causer bien des noyades ?

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    © Martial Andrieu

    Baignade près du barrage du Païchérou vers 1900

    Il n’y a pas plus de monstre dans le Loch-Ness en Ecosse que de diable dans l’Aude… Tous les ans pour la réparations de ses usines, l’industriel propriétaire des Moulins du roi ouvrait les vannes de la digue du Païchérou, sans prévenir personne. Aussitôt, la plage se creusait de trous de trois mètres d’eau et tous les ans on enregistrait des noyades. Jusqu’au jour où la société de natation qui, nous le verrons, s’entraînait au-dessus du barrage découvrit par hasard les modifications dans le lit du fleuve. A ces frais, elle fit poser une pancarte qui évita aux baigneurs d’être surpris par la montée des eaux. Il fallut quand même attendre l’été 1935…

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    © Martial Andrieu

    Devant la piscine des Tritons de la Cité

    Les premiers balbutiements d’un club de natation à Carcassonne remontent à 1928 avec le "Sauvetage de l'avenir", mais il faudra attendre le 25 avril 1934 (Journal Officiel) pour que le premier club structuré voit le jour. Il s’agit des « Tritons de la Cité » placés sous la présidence de l’architecte départemental M. Bourely et la vice-présidence du Dr Lauze. L’association siège au Café de la comédie (rue Courtejaire) et à la guinguette du Païchérou.

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    © Martial Andrieu

    La piscine des Tritons de la Cité

    Un colosse de 2,02 mètres pour 155 kg, ancien seconde ligne de l’ASC à XV, est le capitaine de l’équipe de Water-polo des Tritons de la Cité. Il s’agit de René Galou (1909-1978) dit Babache qui avait pied dans l’Aude, là où les autres s’évertuaient à tenter de rester à flot. Il fut recordman régional du 200 mètres brasse en 3 minutes 8 secondes. Pour mémoire, le recordman du monde en 1936, l'américain Jack Kasley, nage en 2 minutes 37 secondes. Dans un bassin, pas dans un fleuve avec le courant ; c'est dire la performance de Galou.

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    Dans cette formation on relève également les noms de Fournier, Miquel, Garridou, Fages, Andrieu et Guilhem. Elle s’illustra en 1936 au cours de nombreuses rencontres régionales, non seulement au Païchérou mais également à Sète, Perpignan, Cerbère, etc. Notons le passage d’un article du Languedoc sportif qui illustre la mentalité de l’époque : « Cette partie ne produit pas l’impression des matchs joués la semaine précédente, lors des championnats. Sans doute, parce que les équipes étaient mixtes. »

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    © Martial Andrieu

    Dans cette piscine naturelle aménagée dans le fleuve faute d’infrastructure adaptée, nageurs et dirigeants avaient créé de toutes pièces leurs installations : ligne d’eau, plongeoir, planches de virages… Au début des années 1930, l’ouvrier n’avait guère l’occasion ni les moyens d’aller à la mer. Il fallut attendre les premiers congés payés le 20 juin 1936, votés grâce au Front populaire. C’est dire si bien peu de gens avaient appris à nager, néanmoins grâce aux Tritons de la Cité les écoliers de moins de seize ans purent passer le brevet de nageur scolaire. L’épreuve comprenait un départ plongé sur une distance de 25 mètres sans limite de temps.

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    Au moment des compétitions dont certaines avaient lieu en nocturne, une vaste tribune en bois et trois rangées de chaises étaient disposées au bord de l’Aude en face de la guinguette. Le 14 août 1939, on assista à la traversée de Carcassonne sur une distance de 2,5 km avec Thierry, Quintilla, Cadenac (Juniors) et Nunez, Ribes, Saurel, Garridou et Sampiétro (Séniors). Les Tritons de la Cité comptaient également les nageurs suivants : Lespinasse, Mario, Lambert, Cau, Vordy, Grossetête, Saunière, Huc, Colombier, Ressiguier, Reynès dit "Souplard" et Molinier.. Mario, qui fit office d’entraîneur, quitta le club en 1941 pour Cannes où il devint moniteur.

    Malgré les efforts des dirigeants du club, l’engouement pour les compétitions de natation à Carcassonne restait encore marginal après guerre. La municipalité préférait investir pour le rugby à XIII bien plus populaire, plutôt que construire une piscine. Les promesses ne manquaient pourtant pas… Dans les souvenirs de Jacques Blanco, les membres du club qui avaient quitté le fleuve depuis la fin de la guerre s’entraînèrent dans le Canal du midi, puis dans un bassin industriel de la zone de l’Estagnol en 1958.

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    © Nathalie Amen-Vals / L'Indépendant

    La piscine du Païchérou

    Il faudra attendre 1959 pour que la mairie daigne bâtir la première piscine de la ville au Païchérou. Et encore… Parce que M. Quintilla s’engagea à donner le terrain jouxtant sa guinguette. L’inauguration aura lieu l’année suivante, sous l’égide de la municipalité de Jules Fil dans laquelle Henri Gastou était adjoint au maire. Membre des « Dauphins de la Cité » qui venait de fusionner avec la section natation de l’ASC, M. Gastou occupait les fonctions de président du Comité du Languedoc. La fusion donna naissance au Club Nautique Carcassonnais dans lequel on retrouvait des pionniers comme Germain Lamy et Paul Vordy.

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    Dans quelques mois la piscine du Païchérou sera détruite. Le Pôle aqualudique de la ville de Carcassonne viendra prendre sa place. Ouverture prévue : novembre 2020.

    Sources

    Le courrier de l'Aude, L'express du midi, Languedoc sportif, l'Auto

    Recherches, synthèse et rédaction / Martial Andrieu

    Remerciements pour leur aide

    Serge Galou, Jacques Blanco

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