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Seconde guerre mondiale - Page 61

  • L'action résistante de Robert Tauziès dans le secteur de Lézignan-Corbières

    Je voudrais vous faire partager un document dactylographié inédit, émanant des Archives de l'Aude datant de la Libération. Il a été rédigé par le Comité Local de Libération Nationale de Lézignan. Ce texte évoque les actions de Robert Tauziès au service de la France Libre.

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    Le cours de la République à Lézignan

    Nommé à la direction du Crédit Lyonnais de Lézignan, en août 1940, après sa démobilisation, il fait de son agence une succursale Gaulliste ; ainsi baptisée par des membres influents de la Légion. Il entre ouvertement en conflit avec les légionnaires, ainsi qu'avec toute personne attaquant directement ou indirectement l'action du général de Gaulle ; il transmet ou fait transmettre par son personnel, qui lui est entièrement dévoué, toutes les nouvelles ou instructions de la Radio Française de Londres.

    Au point de vue professionnel, il refuse de participer au financement du marché allemand, conclu par le syndicat des vins, alors que certaines banques de la place proposent leur concours. Il aide à la formation d'un clan Gaulliste, à la tête duquel se trouve Oswald, pour saper l'influence de la Légion au sein du Conseil municipal, pour aboutir finalement à la désagragation de cet organisme Vichyssois. Il insiste particulièrement pour que des Gaullistes notoires soient inclus au Conseil municipal, et plus particulièrement Tallieu et Oswald.

    Le champ était ainsi libre pour lui permettre avec Oswald de fabriquer de fausses cartes d'identité (50 à 60). De nombreuses cartes d'alimentation, dérobées par Oswald étaient distribuées aux réfractaires, et Tauziès remit des jeux entier à Graille pour les maquis.

    Dès 1941, Oswad avait envisagé, avec le colonel Picard, la possibilité de créer des mouvement de résistance ; peu de temps après, étant rentré en contact avec Jean-Paul Léry, Tauziès fut désigné comme agent de liaison, transportant des documents importants à Carcassonne ; lesquels parvenaient au commandement allié. Léry était reçu chez lui et ce travail dura jusqu'au 22 septembre 1943, date de l'arrestation de ce grand français qui fut fusillé le 5 novembre 1943.

    Afin de coordonner l'action de résistance, son chef de secteur lui demande d'essayer de se mettre en contact avec les chefs de la Résistance de l'Aude. Après de nombreuses démarches, il parvient à déceler Sablé, et le fait toucher par M. Claustres, son beau-frère. Il obtint un rendez-vous au Crédit-Lyonnais de Carcassonne, auquel il se rend avec Oswald. Dès cette époque, il se tient en contact avec Sablé, Graille, Myriel [Jean Bringer, NDLR], Georges... et transporte à Lézignan toutes les circulaires et instructions qui lui étaient remises à la suite des réunions tenues au Café du Nord [actuel, café du Dôme. NDLR], et auxquelles il assistait.

    Recevant des ordres de Carcassonne pour organiser des réunions clandestines à Lézignan, soit dans son bureau, soit chez Oswald, ou chez Vidal, instituteur, il s'acquitte merveilleusement de sa tâche et tout se passe bien.

    En juillet 1944, Sablé lui remet un bon de 500.000 francs parachuté d'Alger, et place ce bon chez un de ses clients, accompagné de son chef de secteur. L'argent fut remis à Graille par fraction.

    Quelques temps après, Sablé lui demande de s'assurer de la police ; il rend compte à son chef de secteur, et convoque à la mairie le chef de brigade Chabbal ; celui-ci paraissant hésiter de se mettre à la disposition de la Résistance au jour indiqué. Tauziès et Oswald menacent de le descendre au cas où il n'accepterait pas ; l'accord fut conclu pour qu'il obéisse aux ordres insurrectionnels qui lui seraient donnés le jour J.

    Georges et Sablé convoquent Tauziès à Carcassonne pour lui remettre le plan du cable téléphonique reliant Narbonne-Carcassonne ; avec ordre de le faire sauter ; il emporte ce plan à Lézignan, où les membres du Comité actif l'étudient. Huit jours après le cable sautait à la borne 222.

    Les évènements se précipitèrent et le 19 août 1944, le capitaine Oswald lui ordonna de faire la liaison avec Carcassonne par n'importe quel moyen.  Toutes les communications étant coupées, il réquisitionne d'ordre de la Résistance, un garde-voie avec sa moto et muni d'un faux ordre de mission, il part vers Carcassonne. Plusieurs fois arrêté par les troupes allemandes en retraite, il est retenu à Trèbes où s'agit de traverser les lignes allemandes. De nouveau arrêté, adossé contre un arbre, il doit son salut à la confusion soudaine apportée par une autre colonne allemande se dirigeant sur Béziers.

    Il arrive à Carcassonne, trouve Sablé dans la cour de la mairie, recueille ses conseils et ses ordres, puis se rend au Comité départemental qui siégeait clandestinement rue de la préfecture ; il y rencontre Guille [Georges Guille sera député de l'Aude. NDLR] et Milhaud au moment où la fusillade crépite dans la rue.

    Il repart à Lézignan, rejoint son chef de secteur Oswald et organise avec lui la direction de tous les services de la ville. Il participe aux arrestations, interrogatoires, travaillant nuit et jour pour seconder son chef, dont la charge est écrasante.

    Il organise des patrouilles, aide à la capture de prisonniers et demande à participer à la bataille de Rieux-Minervois, où il part avec la section de Lézignan. Le commandant Bousquet fit connaître , le lendemain, comment s'était comportée cette section.

    Actuellement, les pouvoirs publics prenant peu à peu la direction des affaires, M. Tauziès, membre du Comité local actif de Libération, continue à servir son pays dans la Résistance.

    Fait à Lézignan, le 17 novembre 1944.

    robert tauziès

    Note du blog

    D'après mes recherches, il n'y a pas de rue Robert Tauziès à Lézignan-Corbières. Une lacune fort dommageable... Je ne possède pas de photographie de Robert Tauziès, hélas.

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  • Ce lourd passé qu'on voudrait taire...

    Je suis convaincu que mes articles sur l'occupation captivent ou agacent, sans jamais laisser indifférent ceux qui les lisent. Le but que je poursuis n'est pas — comme j'ai pu le lire — d'assouvir une quelconque vengence. Au nom de quoi et au bénéfice de qui ? Soyons sérieux ! Je souhaite simplement démontrer grâce aux recherches que je mène, que Carcassonne n'a pas été la ville résistante que l'on voudrait nous vendre. Un article du journal La dépêche paru il y a quelques années, titrait au-dessus d'un article consacré aux commémorations de Baudrigues : "Carcassonne, la résistante". Cela a dû en faire bondir quelques-uns, mais quelques-uns seulement ; les autres, sont morts dans la grotte de Trassanel ou à Baudrigues. Les vrais résistants de la première heure — bien qu'avant l'invasion de la zone sud, on ne puisse pas parler de réseau organisé — ce sont la poignée de courageux meneurs qui sont allés défiler pour la République en chantant la Marseillaise à la statue de Barbès. Ceci au nez et à la barbe du Service d'Ordre Légionnaire, contre l'échange de coup de poings et d'arrestations.

    Bien sûr qu'il y a eu des résistants dans Carcassonne, mais combien au milieu d'une population de 35000 habitants dont 800 faisaient partie des Amis de la Légion ? Une population dans laquelle les commerçants étaient majoritairement impliqués dans les associations maréchalistes. Une épuration à nulle autre pareille à partir d'août 1944 avec des centaines d'arrestations dans tous les milieux, et 600 individus frappés d'une peine d'Indignité Nationale avec confiscation des biens et amendes.

    N'oublions pas également les résistants de la dernière heure, si prompts à tondre de pauvres filles sur l'autel de la rumeur publique. Là, en haut de la rue de la liberté sur le boulevard Jean Jaurès...

    Pourtant, le vendredi 12 juin 1942...

     Le théâtre municipal avait fait le plein

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    Ce jour-là, l'écho de Carcassonne s'énorgueillait de la venue du Dr Grimm au théâtre pour une conférence. Ce grand ami de la France ! Mais de quelle France, parlez-vous ?

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    Friedrich Grimm

    (1888-1959)

    Agent de propagande du régime nazi en France et accessoirement, bras droit de Josef Goebbels. Rien que ça ! Ses conférences rassemblent jusqu'à mille personnes. Il publie des livres et ses discours de propagande sont diffusés sur Radio Paris. Mais si, Radio Paris... la radio sur laquelle parlait Philippe Henriot de sa haine des juifs et de la victoire du Reich, avant qu'il ne se fasse tuer par un groupe de résistants en juillet 1944. D'ailleurs, 400 Carcassonnais ont porté leur signature sur le registre de condoléances placé devant le siège de la Milice.

    Quand je lis certains scores aux élections et que je vois des croix gammées dessinées dans Carcassonne, je me dis que rien n'est vraiment mort dans certaines familles, mais seulement en sommeil...

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  • François Pastour, procureur au procès de René Bach, agent du SD

    Le 13 mai 1948 disparaissait en pleine Cour d'assises de l'Aude, François Pastour, Procureur de la République de Carcassonne. Au moment où il pronoçait ses réquisitions lors d'un procés, le magistrat s'effondrait sur sa chaise sans qu'il fut possible de le ramener à la vie. François Pastour avait succédé à A.E Morelli, procureur de Carcassonne envoyé en déportation et mort à Dachau le 17 février 1945 (le jardin à l'entrée du Palais de justice porte son nom).

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    François Pastour

    naît le 16 avril 1899 à Antibes dans un milieu d'universitaires. Après de brillantes études secondaires, il s'inscrit à la faculté de droit d'Aix en provence. Le 9 mars 1923, il est membre du barreau de Nice puis deux ans plus tard, il est reçu parmi les premiers au concours d'entrée de la magistrature. Il est nommé comme juge suppléant du ressort d'Aix le 10 mai 1925, puis est affecté au tribunal de Tarascon. Substitut à Perpignan le 9 août 1931 et à Bordeaux le 30 mai 1935, il participe ensuite à la guerre avec le grade de Capitaine. Ses faits d'armes lui vaudront deux citations à l'ordre de son régiment. Ce n'est qu'après l'armistice qu'il prendra ses fonctions le 22 janvier 1941, à la cour d'assises de l'Aude comme procureur.

     C'est grâce à lui que furent organisés dans le département des centres pour mineurs, afin que ceux-ci n'aillent pas en prison avec de dangereux malfrats.

    Il est décédé dans l'exercice de ses fonctions le 13 mai 1948. De nombreux hommages lui firent rendus par ses pairs en la cathédrale Saint-Michel. Parmi eux: René Pech (Président la chambre des huissiers de l'Aude), Me Frontil (Bâtonnier de l'ordre des avocats), M. Barradat (Président de la cour d'assises), M. Rouvière (Président du tribunal civil) et M. Hugues (Procureur général). Il est inhumé à Antibes.

     Il y a tout de même une question qui me hante... Pourquoi ce même procureur a t-il honoré de sa présence, la soirée inaugurale de la Milice Française le 28 février 1943 au théâtre municipal ? Pourquoi a t-il signé de son nom le registre de condoléances de Philippe Henriot en juillet 1944 ?

    Procès Bach à Carcassonne 27.07.1945 Archives Pablo Iglesias Núñez .jpg

    Le 27 juillet 1945, c'est pourtant le procureur Pastour qui jugea en qualité de commissaire du gouvernement, l'agent français du SD (Gestapo) René Bach.

    Tout ceci est fort étrange et révèle l'extrème complexité de cette période.

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