Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

- Page 4

  • La taverne des besogneux à l'épreuve de la vertu

    Chers lecteurs,

    Je voudrais remercier les personnes - toujours les mêmes - qui de temps en temps laissent en commentaire un mot gentil et d’encouragement à l’adresse de votre serviteur. Je ne doute pas que dans la conscience des autres - les silencieux - se manifeste parfois une pensée de considération ou d’estime pour l’ensemble du travail accompli sur ce blog. J’ai longtemps essayé de comprendre les raisons pour lesquelles les historiens, les sociétés savantes  ou encore peut être des universitaires s’abstiennent de commenter alors même qu’ils pourraient apporter des éléments complémentaires aux sujets. La seule réponse que j’ai pu me figurer c’est leur timidité, leur humilité ou la peur que leur signature ne devienne un objet ostentatoire. Alors, je dis à tous ces vertueux de la conférence et de la thèse : Osez ! 

    Hélas, nous ne pouvons vous garantir ici, une coupe de blanquette accompagnée de petits fours autour d’une compagnie de notabilités ou de vedettes à photographier. Celles que nous vous présentons ne sont plus de ce monde, mais nous les tirons du fond de l’oubli afin que vous puissiez les rencontrer. Dans vos prochains écrits, vous ne manquerez sans doute pas à la lecture de nos modestes productions, de vous en faire de grands amis. Tirez donc une santé en leur mémoire dans vos cénacles parfumées où l’on se pâme de gloire la boutonnière en fleur et la rosette au revers de la veste. Ici, c’est la taverne des besogneux qui, à défaut de gloire, s’enorgueillissent du savoir qu’ils reçoivent, avec le mérite des pauvres. Les classes laborieuses doivent être vertueuses, sinon qu’est-ce qu’il leur reste ? Eh ! bien, c’est cette vertu qui libère les esprits étroits dans lesquels, le sectarisme plonge dans les ténèbres les partisans de la culture entre soi. L’étude historique mérite autre chose que son embrigadement dans une chapelle politique, une caste idéologique ou encore, une miséricordieuse bénédiction religieuse. La vérité se regarde par le prisme subjectif de notre conscience, dépouillée des dogmes.

    Martial Andrieu

  • Joseph Baichère (1856-1939), organiste et compositeur Carcassonnais

    L’Ecole de musique religieuse fondée par Niedermeyer à Paris puis dirigée par son gendre Gustave Lefèvre, forma un grand nombre de musiciens et compositeurs Carcassonnais au cours du XIXe siècle. C’est à l’âge de 18 ans que Joseph Antoine Eugène Baichère y fait son entrée après l’obtention d’une bourse de 300 francs octroyée par le Conseil général de l’Aude. Né le 14 février 1856 à Carcassonne (5, près du pont de la paix), ce fils de marchand de chevaux, passera trois années à apprendre le solfège et l’harmonie avant de retourner à Carcassonne. Le 28 octobre 1879, il se marie avec Jeanne Marie Thérèse Labatut, originaire du quartier de la Trivalle, et fonde une famille de quatre enfants : Irma (1881), Jeanne (1883), Charles (1886) et Clément (1891). Au cours de la même année, Baichère devient titulaire du Grand orgue de la basilique Saint-Nazaire à la Cité. Il partage alors son temps entre les leçons qu’il donne aux élèves de l’école Saint-Stanilas, ses compositions et la création de l’Union orphéonique qu’il dirige en 1884. Aidé dans sa tâche par Joseph Bardou, il organise au sein de cette phalange musicale de 80 membres, des concerts aux bénéfice des pauvres. Au mois de décembre 1884, dans la grande salle de la mairie on entend le Chœur des soldats de Faust (Gloire immortelle de nos aïeux) chantée par l’Union chorale, la Danse Hongroise à quatre mains par les frères Escaffre, etc. Deux ans plus tard, cette manifestation se fait de concert avec la Société lyrique Sainte-Cécile et avec le concours des frères Escaffre, Pierre Germain, Gaston Barbot, Justin Scheurer et Joseph Bardou, au théâtre municipal.

    Capture d’écran 2019-11-18 à 11.46.13.png

    Joseph Baichère

    Cet éminent musicien, membre de la Société des Compositeurs et Editeurs de musique, compose un très grand nombre de partitions vocales pour piano et pour orchestre. Ses œuvres sont régulièrement remarquées par la critique dans le journal « Le Ménestrel » qui, avec la Gazette musicale de Paris », font référence à cette époque. En 1891, il créé une opérette en un acte au théâtre municipal de Carcassonne. Il s’agit de « Changement de garnison » sur des paroles de Maiffredy. En 1907, son drame lyrique en deux parties et quatre tableaux rencontre le succès. Il s’agit de Hannibal sur un poème de Victor Gastilleur, avec pour rôle titre Aubert, Cayssial, Ventoux et Mesdemoiselles Lassara et Mazonelli : « Les accents d’amour se mêlent à ceux des trompettes guerrières dans une polyphonie magistrale d’un clavier de grand maître ! »

    Capture d’écran 2019-11-18 à 11.51.27.png

    Joseph Baichère sera nommé le 2 avril 1909, après concours, organiste de l’église Saint-Vincent suite au décès de M. Escaffre. Il poursuivra l’enseignement de la musique à son domicile, 30 rue Pierre Germain et mourra le 28 juillet 1939 à Carcassonne à l’âge de 83 ans. Il repose au cimetière de la Cité.

    Mélodies pour chant

    L’Angelus, C’est toi que j’aime, Stances à Marie, Fol espoir, Dernier vœu, Le poète, La vierge dort, A Carcassonne, L’ange du souvenir, Si j’étais papillon, Ave Maria, Chanson de la Samaritaine, Soldedad, Les bords de l’Aude, Amour secret, etc.

    Pour piano

    Belle fleur, Paris Vienne, Sur les flots, Pensée d’amour, Confetti, Marche des troubadours, Ranavalo, Lilas blanc, Vers Nice, Valse amère, Nuage de belles, L’ange du souvenir, Fleur des champs, Alcazar-Polka, etc.

    Sources

    Le Ménestrel

    Le courrier de l'Aude, La Fraternité

    Etat-civil / ADA 11

    ____________________________________

    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2019

  • Pierre Thoron de Lamée (1740-1804), Maire de Carcassonne et franc-maçon

    Né le 29 octobre 1740 à Carcassonne, Pierre Thoron de Lamée appartenait à la branche anoblie de bourgeois, marchands fabricants de draps. Lamée étant un hameau de la commune de Villalier où les Thoron possédaient un château, son nom fut accroché par la particule au patronyme de la famille. Ainsi depuis quelques générations, en était-il des Thoron de Lamée, dont le père Pierre Antoine (1708-1773) avait épousé Françoise Pinel (1709-1774), fille d’un négociant dont une de nos rues porte le nom au cœur de la Bastide Saint-Louis. Il possédait également des parts de la Manufacture royale de Montolieu, dirigée son oncle et ses cousins, et avait été Consul de Carcassonne en 1755.

    thoron de lamée

    © Google maps

    Hameau de Lamée à Villalier (D101)

    Enrichi d’un titre de noblesse gagné par ses aïeux sur les comptoirs du textile, le jeune Pierre Thoron de Lamée entra au service du Comte d’Artois - le frère de Louis XVI et futur Charles X sous la Restauration - comme Officier des Suisses et de la Garde personnelle de Monsieur. Il y fit grands services et ne tarda point à être récompensé de l’honorifique titre de Chevalier de l’Ordre royal et militaire de Saint-Louis.

    thoron de lamée

    © mvmm.org

    Sceau de la loge à l'Orient de la Cour

    A l’Orient de Versailles, il s’était créé en 1775 une loge maçonnique au sein de laquelle figuraient des membres de la famille royale, de la Cour et de la garde du comte d’Artois : « Les trois frères Unis ». Contrairement à ce qu’affirment les détracteurs de la Franc-maçonnerie, celle-ci avait été fondée au milieu du XVIIIe siècle en Ecosse avec uniquement des gens de la noblesse ; seuls autorisés à porter l’épée. Ce fut le cas également en France jusqu’à la Révolution et l’on voit mal comment les loges auraient pu se fonder, sans l’autorisation du roi. C’est donc que Louis XV et son petit-fils à sa suite, avaient toléré les idées des Lumières qui mèneront à la fin de la Monarchie absolue et de Droit divin. On a prétendu que le ci-devant Louis Capet et ses fils faisaient partie des « Trois frères Unis » à l’Orient de Versailles. Nous n’en possédons aucune preuve, mais son cousin Orléans dit Philippe Egalité fils du futur Louis-Philippe 1er, aurait-il envoyé à l’échafaud son royal Frère, s’il l’avait été ? Nonobstant, devait-il en avoir les principes pour que l’abbé Klein chantât ce couplet au banquet rituel de la loge « Le Conseil des Elus » de Carcassonne en 1784 :

    Pour le plus chéri des Bourbons

    Notre âme se dilate

    Qu’au triple feu de nos canons

    Notre plaisir éclate

     

    Sans tablier, Louis a les mœurs

    De tout maçon, bon frère

    Tirons avec tous les honneurs

    Une santé si chère

    Notons que la loge « Les trois frères unis » allume ses feux en septembre 1775, quelques mois après le sacre du nouveau souverain, Louis le XVIe. Certains parmi vous n’y verrons qu’une coïncidence, sans doute. Trois ans plus tard, Pierre Thoron de Lamée - au service du comte d’Artois, lui-même sans doute Franc-maçon - sera initié dans cette fameuse loge militaire. A son retour à Carcassonne, le lieutenant-colonel s’affilie à « La parfaite amitié » qu’il dirigera en 1785 et achète l’année suivante, la charge de Major au gouvernement de Narbonne en remplacement de Monsieur de Saint-Affrique, démissionnaire de sa fonction. Dans cette ville, il est le vénérable de la loge "Les philadelphes" en 1790. 

    thoron de lamée

    Signature de Thoron Lamée

    Lorsque survint la Révolution française, Pierre Thoron de Lamée resta en dehors de l’agitation politique et sauva sa tête pendant la Terreur. Quand le Consulat rétablit les fonctions de maire en 1800, Carcassonne s’administra un court moment sous la présidence provisoire de Pierre Germa. Puis, le 27 Germinal de l’An VIII (17 avril 1800), Bonaparte nomma Pierre Thoron Lamée - qui avait entre-temps fait choir sa particule - au poste de Premier magistrat de la commune. Ses adjoints furent Arnaud Besaucèle et Georges Degrand. Ce dernier avait participé à la tourmente révolutionnaire. D’abord comme agent national en l’An II (1794) puis en qualité d’administrateur du département en l’An IV (1796), tout en échappant à l’accusation de terrorisme. Protégé par Fabre de l’Aude, il s’illustrera comme maire de Carcassonne à partir de 1807 puis dans les fonctions de Sous-préfet de Castelnaudary (nommé le 24 juillet 1811). 

    Pierre Thoron de Lamée mourra à Carcassonne le 29 fructidor An XIII (16 septembre 1804) à l’âge de 64 ans. Son successeur fut Castel, aîné en 1805 avant une période de transition sous l’administration provisoire de Degrand et de Besaucèle. Pierre Thoron de Lamée s'était marié le 11 septembre 1786 dans la chapelle du château de Lasbordes (Aude) avec Claire de Foucault, sœur d'Henriette d'Hautpoul.

    thoron de lamée

    Le château de Lasbordes

    Cet illustre Carcassonnais dont ne nous savions que peu de choses jusqu’à aujourd’hui, méritait toute notre attention et nos meilleures recherches. Il a été enseveli, comme on l’écrivait autrefois, au cimetière Saint-Michel de Carcassonne et a laissé par testament olographe du 4 Thermidor An XII, un lèg de 500 francs pour les Hospices et de 300 francs au bureau de bienfaisance de la ville.

    Sources

    Archives communales de Narbonne / 1877

    Les Franc-maçons et le pouvoir / Ed. Perrin / 1986

    Franc-maçons parisiens du Grand Orient / A. le Bihan / 1966

    Du Directoire au Consulat / Colloque / Univ. de Lille / 1999

    Délibérations du Conseil municipal de Carcassonne

    _______________________________

    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2019