Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

- Page 7

  • La place de la Bourse avec sa galerie couverte de type Haussmannien

    Vous rêvez... Vous êtes à Carcassonne. Ne rêvez pas, vous n'y êtes pas ! C'est une galerie semblable que se proposait de réaliser Léopold Petit dans notre ville. Voici comment...

    Lors du conseil municipal du 5 juillet 1888, l’architecte Léopold Petit, diplômé de l’Ecole des Beaux-arts de Paris et ancien inspecteur des travaux du Palais du Trocadéro, propose en sa qualité d’élu de donner de l’air aux vieux murs de la Ville Basse. Cette idée ne l’avait visiblement pas quittée depuis son arrivée à Carcassonne comme architecte de la commune. Au début des années 1870, Léopold Petit se promenant dans les rues étroites et peu sures de ce que l’on nomme aujourd’hui Bastide Saint-Louis, s’était résolu à vouloir tout casser à la mode Haussmannienne. Certaines consciences de l’administration l’en avaient vite dissuadé et notre architecte avait dû remiser ses convictions dans un placard. Libéré de sa charge de fonctionnaire et ayant repris sa liberté, Léopold Petit pensa sans doute qu’en faisant de la politique il aurait davantage l’opportunité de faire avancer ses projets.

    Capture d’écran 2019-11-05 à 10.43.48.png

    L'église des Cordeliers pendant sa destruction

    L’actuelle place du maréchal de Lattre de Tassigny était occupée en 1888 par la maison Grassalio du XIVe siècle et par l’église des Cordeliers, unique vestige du couvent du même nom. Ces vieux bâtiments logeaient la Manutention militaire avec ses bureaux, ses remises pour les fourgons de la cavalerie du 15e régiment de ligne, ses baraques pour la fabrication du pain, etc. Le maire Calvet considéra alors que d’un point de vue hygiénique, la ville avait les mêmes places qu’il y a un siècle, alors que la population avait augmenté de plus d’un tiers. Cet ensemble de bâtiments insalubres et vétustes donnait un triste aspect de la capitale audoise. C’est à ce titre que Léopold Petit souhaita faire entrer Carcassonne dans la modernité architecturale à l’instar de la plupart des communes de France. Il n’était pas au bout de ses peines…

    « Enfin, il est temps que Carcassonne se mette à l’œuvre. Tout y manque : mairie, théâtre, salle de concert, hôtel des postes, bourse, avenue de gare… tout est à faire. On croupit littéralement dans ce chef lieu, et pourtant il y a des éléments d’intelligence et de bonne volonté, des artistes, des savants, des poètes, des littérateurs, des millionnaires, d’excellents ouvriers et de solides journalistes. »

    164076499.jpg

    Petit invite la municipalité, au sein de la commission qu’il préside, à racheter l’usufruit qu’elle possède de l’ancien Couvent des Cordeliers occupé par la manutention militaire. A ce stade, son projet consisterait à organiser le départ de l’armée quitte à la reloger ailleurs, afin de créer une place à ce endroit. Dans l’ancienne église qui serait restaurée, on aménagerait une bourse aux vins avec salle de concerts et de bals. Dans le clocher du XVIIe siècle, on insérerait un bourdon pour prévenir des incendies et une horloge monumentale. La pierre d’achoppement reste le coût de l’opération, mais l’architecte s’appuie sur les prétentions du génie au rachat de l’usufruit. Il l’estime à 45 000 francs. Après quoi, la commune revendrait une partie des terrains à des propriétaires qui bâtiraient avec belles façades autour de la place pour 75 000 francs environ. 

    Le 23 juillet 1888, le maire Calvet dépose au conseil municipal un projet de place de 2000 m2. Sur  un côté, une halle aux vins avec café-Restaurant. De l’autre, de belles façades réalisées par des riverains sur un plan uniforme. Quant à la manutention avec laquelle il faut encore s’entendre sur le prix, elle serait prête à partir à condition que la ville lui construise de nouveaux bâtiments. Elle a d’ailleurs en vue le terrain Maynadier dont elle a demandé le bornage, derrière la caserne Iéna. Au mois d’octobre, les plans du projet Petit exécutés par son élève Philippon sont exposés dans la vitrine du galeriste Caselli, rue Courtejaire. 

    Le 7 juin 1889, le maire propose aux élus d’inscrire au budget primitif un emprunt d’un million de francs pour la future place de la Bourse et d’en voter le principe. Afin de ne pas alourdir les impôts, la municipalité s’engage à renoncer au pavage. Le commandant Dugommier, chef du génie à Castres en visite à Carcassonne le 18 juillet, entérine le choix de l’enclos Maynadier pour le déplacement de la manutention. La transaction avec le Ministère de la guerre s’effectue sur la base de l’achat des terrains et de la construction pour un coût total de 226 421 francs. La convention passée avec l’armée stipule que celle-ci remet l’immeuble des Cordeliers à la ville, charge à cette dernière d’acquérir les terrains et de bâtir une manutention avec dépendances, magasin à farine et denrées, hangar pour les voitures, logement de garde et bureaux du génie.

    bourse.jpg

    Ce qui aurait dû être la place de la Bourse avec son passage couvert

    Après plusieurs ajournements faute de quorum suffisant, le conseil municipal vote l’emprunt et le projet de place le 3 août 1889. La veille des élections cantonales, après avoir fait placarder à tous les carrefours : « L’ouvrier aura du pain cet hiver, tandis que les réactionnaires l’affament ! Vive la République ! » A défaut d’avoir pu faire aboutir le projet de la manutention avant les élections municipales de juillet 1890, le conseil municipal se trouva confronté aux arguments de l’opposition. Le maire Calvet fut accusé d’avoir trompé les ouvriers et de s’être servi du projet de la manutention comme d’un argument électoral pour attirer leurs votes. Celui qui avait été mis en place par le préfet suite à la fraude électorale de l’ancien maire Gaston Jourdanne, dut céder sa place à la liste Opportuniste menée par Antoine Durand. Le nouveau premier magistrat de la ville renvoya le projet de Léopold Petit aux calendes grecques, non sans avoir été confronté au recours engagé contre la ville par l’architecte Siguier de Castres. Ce dernier avait été chargé d’étudier le déplacement de la manutention pour le compte du génie et réclamait 2528 francs d’honoraires. On ne manqua pas d’en rejeter la responsabilité sur l’équipe municipale précédente et notamment, Léopold Petit qui s’en défendit dans la presse.

    « J’aurais été trop heureux et suffisamment récompensé, si pendant ma part d’administration à la mairie, j’avais vu enfin se construire quelque chose de propre à Carcassonne, voir disparaître ces sales constructions qui occupent l’un des plus beaux emplacements de la ville, pour faire place à un quartier qui fut devenu rapidement luxueux et dont la ville toute entière eut été fière ! »

    On n’en entendit plus parler du projet Petit jusqu’en 1896 ; l’année où Jules Sauzède et les Radicaux-socialistes reprirent la mairie. L’architecte continua a agiter les consciences dans la presse locale sur la nécessité de voir aboutir la place de la Bourse. Il exposa une nouvelle mouture de son plan le mercredi 11 mars 1896 à la Société des Beaux-arts.

    place paln.jpg

    © Martial Andrieu

    Le projet de Léopold Petit

    Une galerie couverte percerait depuis la place Carnot, les rues Pinel et de la Préfecture (J. Bringer), la place de la Bourse et la rue de la Grille (Coste-Reboulh) jusqu’au boulevard. Le futur théâtre municipal serait construit sur l’emplacement de l’ancienne prison (actuel Groupe scolaire J. Jaurès) et les spectateurs en sortant de celui-ci, verraient la fontaine de Nepture dans l’axe du boulevard. Sur le côté Sud de la place de la Bourse, les propriétaires s’engageraient à élever à leurs frais de belles façades dans le style Haussmannien. Léopold Petit s’était déjà entendu avec Théophile Cazanave, marchand de meubles, pour qu’une importante maison en rotonde soit bâtie selon ses plans à cet endroit. L’église des Cordeliers d’une longueur de 43 m sur 13 m de large et 12 m de hauteur, serait transformée en Bourse du commerce, tout en conservant son architecture d’origine. Divisée en huit travées, séparées entre elles par de beaux arcs-doubleaux en pierre de taille. Les arcs-doubleaux sont supportés par des piliers carrés et sur le murs du Sud, des arcs en plein cintre. Ces arcs confronteront la nouvelle place, formant ainsi des arcades uniformes. Côté rue Barbès, le mur sera placé d’ouvertures pareilles à celles de la place tout comme rue de la Préfecture. Dans l’église des Cordeliers, la grande salle pourra accueillir 2000 personnes assises pour des fêtes, concerts et réunions publiques.

    Bordeaux.jpg

    Exemple de Galerie couverte à Bordeaux

    Lorsque Conseil municipal du 29 septembre 1896, M. Hyvert en tant que président de la commission des travaux et rapporteur de l’affaire de la manutention, prend position pour le projet Petit. Quatre mois plus tard, la municipalité vote en faveur de la place de la Bourse. Il faut croire que la mariée était trop belle pour Carcassonne, car dès lors on ne parle plus que du départ de la manutention. Les propriétaires qui allaient débourser près de 600 000 francs pour refaire leurs maisons durent se faire une raison : la place de la Bourse, après dix ans de gesticulations, ne se ferait pas. Les atermoiements et surtout le manque d’ambition des mairies successives plus promptes à discourir en débats sectaires, ont eu raison des plans de Léopold Petit. Tout n’est qu’une question de mentalité…

    "Tous les projets que nous avons eu l’honneur d’exposer aux yeux du public, ont été éteints par les porteurs de cascamèches. Nous connaissons, tous, ces inspecteurs désœuvrés qui, divisés par groupes, parcourent nos rues et nos boulevards dans tous les sens, afin de se rendre bien compte de tous les travaux qui s’y font et de les critiquer principalement et systématiquement. Leur rôle est bien marqué. Ils dressent des rapports verbaux qui se transmettent de bouche en bouche et dont le résultat est toujours défavorable à toute idée de progrès ; la critique avant tout."

    En 1902, une nouvelle manutention est édifiée pour l’armée sur le terrain Maynadier à l’arrière de la caserne d’Iéna. L’année suivante, la municipalité Sauzède fait raser l’église des Cordeliers et la maison Grassalio du XIVe siècle. Pour cette dernière, nous avons trouvé un descriptif rédigé par le baron Jules de Verneuil, lors du Congrès archéologique de France qui s’est tenu à Carcassonne le 21 novembre 1868.

    974100310.jpg

    © ADA 11

    Avant la destruction en 1903

    "Elle a d’autant plus de prix qu’elle est à-peu-près la seule en Ville Basse. Neuf arcades en plein cintre s’ouvrent au rez-de-chaussée ; au-dessus un bandeau d’un excellent profil, finement sculpté de feuillages, supporte un nombre égal de baies ogivales à meneaux et à roses trilobées, divisés par des colonnettes à chapiteaux et à bases, comme des fenêtres de cathédrale, et accompagnées d’archivoltes qui retombent sur des culs-de-lampes ou des mascarons. Il va sans dire que cette belle façade, d’une ordonnance si simple et si riche en même temps, a été fort remaniée ; on a beaucoup bouché grossièrement ses fenêtres et on en a percé d’autres à diverses époques ; mais il est facile de la restaurer par la pensée, et une fois rétablie dans son état primitif, nous ne craignons pas d’affirmer qu’elle ne déparerait pas la haie de palais gothique qui font le Grand canal de Venise, une si magnifique bordure."

    3209455618.png

    Il fallait un grand bâtiment pour la Poste à Carcassonne et après avoir choisi l’emplacement de l’ancienne prison (Ecole Jean Jaurès), la ville se résolut finalement à l’édifier en lieu et place de l’église des Cordeliers. Ainsi s’acheva le projet de la Place de la Bourse ; Dieu seul sait ce que serait notre ville aujourd’hui, si ce projet avait été réalisé. A n’en pas douter, son abandon a dû écorner la capacité de notre ville à accueillir des projets, des investisseurs et des architectes. Une image qui colle encore à la peau de Carcassonne, dont la mentalité n’a guère évolué sur ce point depuis bien longtemps… Le patrimoine de la Ville basse ne méritait pas qu’on le restaure, puisque selon Gaston Jourdanne, érudit et ancien maire :

    « Quand on a une Cité comme celle que nous possédons, c’est vers elle que doivent se concentrer tous les efforts. » Aussi la porte ci-dessous - jugeant qu'il serait trop coûteux de la restaurer - on la mit au pilon.

    183022712.jpg

    © ADA 11

    Sources

    Cet article inédit a nécessité deux journées de recherches et de synthèse. L'ensemble des sources proviennent de la presse locale ancienne, des délibérations des conseils municipaux et de documents annexes.

    Photo à la une

    architecturepatrimoine.fr

    __________________________________

    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2019

  • Joseph Roques, organiste et professeur de musique Carcassonnais

    Joseph Marie Laurent Roques fait partie de cette phalange de musiciens Carcassonnais formés dans la prestigieuse Ecole Niedermeyer à Paris. Né le 9 août 1864 d'un père voyer-municipal à Carcassonne originaire de Lagrasse, le jeune Roques effectue d'abord ses premières études auprès de Charles Scheurer, avant d'être admis chez Niedermeyer. Il en sortira avec un Premier prix d'harmonie et de composition. En 1887, le Ministère des Beaux-arts lui octroie un 1er prix d'orgue. Comme un bon nombre de ses pairs, Joseph Roques songe à revenir au pays et s'installe comme professeur de musique dans sa ville natale. Il enseigne au Grand séminaire et prodigue des cours particuliers dans sa maison de la rue Victor-Hugo. C'est là qu'il compose également un certain nombre d'œuvres musicales, dont la plus remarquée fut un Final de Toccata pour Grand orgue, édité chez Lemoine en 1901.

    Capture d’écran 2019-11-04 à 09.39.13.png

    Final de Toccata de Joseph Roques

    C'est sur la recommandation du compositeur Toulousain Henri Büsser (1872-1973), élève de Niedermeyer, qu'Henri Lemoine édita la partition de Joseph Roques.

    Capture d’écran 2019-11-04 à 10.44.30.png

    "Cher Monsieur, Je viendrai vous voir demain jeudi à 2h avec un de mes amis Mr Roques organiste à Carcassonne qui a écrit une Toccata très intéressante, qu’il voudrait vous faire entendre. Si vous ne devez pas être au bureau ni l’un ni l’autre veuillez m’en avertir." (24 avril 1901)

    Joseph Roques participa aux nombreuses manifestations culturelles et religieuses, dans lesquelles il accompagna à l'orgue les chanteurs lors des offices dans la cathédrale Saint-Michel. Officier d'académie en 1902, puis Chevalier des Palmes Académiques en 1913, Joseph Roques n'a cessé de consacrer sa vie à la musique même si, aujourd'hui, sa mémoire est tombée dans l'oubli de notre patrimoine artistique local.

    Autres oeuvres de J. Roques

    Ave Maria / 1903

    Offertoire de Noël / 1903

    ____________________________

    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2019

  • Une flèche gothique sur la Tour de l'église Saint-Vincent ?

    "Carcassonne qui possède dans ses murs l’antique Cité (monument unique au monde), doit-elle laisser en ruine le seul monument qu’elle possède dans la Ville basse ?"

    Église_Saint-Vincent_de_Carcassonne_2014-09-26_-_i3097.jpg

    C’est en ces termes que l’architecte Léopold Petit alerte la population dans une lettre adressée au Courrier de l’Aude, le 4 janvier 1896. Il fait l’amer constat que toutes les villes d’Europe entretiennent « avec un soin jaloux », leurs édifices civils et religieux sans distinction. Les monuments sont les témoins de notre civilisation : « Dis-moi comment tu bâtis, je te dirai quel peuple tu es. »

    Louant le génie de l’architecte de la Tour Saint-Vincent, Léopold Petit qui s’est rendu tout en haut de l’édifice a constaté que les siècles ont épaufré les pierres. Il convient sans attendre d’engager les restaurations qui s’imposent si l’on veut éviter des drames. Plusieurs pierres sont déjà tombées dans la rue épargnant de très peu les passants et les riverains. Certaines épaufrures atteignent 8 mètres de longueur et 4 mètres de largeur et tiennent par l’opération du Saint-Esprit.

    Travaux 4.jpg

    © Fondation du patrimoine

    Etat des gargouilles avant 2018

    Capture d’écran 2019-11-03 à 12.12.07.png

    Nouvelles gargouilles en 2019

    Léopold Petit rappelle que la question revint à plusieurs reprises à l’ordre du jour du conseil municipal et indique comment la mairie songeait à la restauration. « On suspendrait au sommet de la tour une cage mobile que l’on monterait et descendrait à volonté, et des ouvriers, perchés là-dedans, racleraient la tour, détruiraient toute la partie artistique qui, à mon avis, est superbe, et remplaceraient le tout par du ciment, tout ce qu’il y a de plus bonhomme. Ah ! par exemple, ça serait du propre, et nous serions la risée de tous."

     Il suffirait que la ville, l’Etat, le Conseil général, la fabrique et les particuliers constituent la somme nécessaire estimée à 200 000 francs pour restaurer la Tour Saint-Vincent. L’architecte Léopold Petit à qui l’on doit d’avoir participé à l’érection du Palais du Trocadéro pendant l’Exposition Universelle, dessina un projet ambitieux pour la Tour Saint-Vincent. Les plans dessinés en collaboration avec son élève Adolphe Phillipon, furent exposés dans la vitrine de la galerie Caselli, rue Courtejaire.

    exemple.png

    Exemple : Flèche de la cathédrale de Chartres

    Selon lui, la Tour Saint-Vincent du haut de ses 52 mètres n’a pas pu être achevée. Il se propose donc d’y élever une flèche de style gothique ce qui porterait l’ensemble de la tour à 96 mètres. de hauteur. Soit, 28 mètres de plus que les tours de Notre-Dame de Paris. « Vous verrez nos charpentiers grimper comme des singes pour la construction des échafaudages, nos serruriers pour les armatures, nos tailleurs de pierre, employer les plus beaux matériaux de France, les maçons pour les remplissages, etc. Il faut vouloir faire bien, faire grand. Vous verrez un peu si notre classe ouvrière de Carcassonne a besoin d’aller chercher les voisins pour faire ses grands travaux, j’allais dire aussi les architectes, mais je m’arrête là. A l’œuvre, on connaît l’artisan."

    Travaux 5.jpg

    Ni les lamentations du Courrier de l’Aude, ni les solutions préconisées par Léopold Petit ne firent avancer la restauration. Des pierres de parement continuaient inexorablement à tomber sur la chaussée. L’ancien architecte de la ville proposa au moins de placer un échafaudage à encorbellement autour de la tour, afin d’éviter les drames. Le problème c’est que la ville en charge de l’église ne voulait pas dépenser un centime pour sa restauration. Elle eut alors l’idée de solliciter auprès de l’Etat, le classement de l’édifice au titre des Monuments historiques. Petit confirma que l’urgence était telle que l’on ne pouvait espérer une réponse avant plusieurs décennies. 

    La tour Saint-Vincent se compose de deux parties bien distinctes. La partie carrée et la partie octogonale. La partie carrée - de la base à la toiture - se compose de gros moellons sans ornementation, et en assez bien état, n’offrant aucun danger, ou du moins peu de danger. La partie octogonale - de la toiture au sommet - est ouvragée d’une architecture flamboyante très caractérisée, très hardie, très belle, et c’est dans cette partie principalement que le temps a exercé des ravages indescriptibles. Les parties nord et Est n’ont pas beaucoup souffert.

    Au mois de septembre 1897, la municipalité envoya le dossier pour obtenir le classement de l’église Saint-Vincent. Toujours dans un seul but, celui que l’Etat voudra bien assumer à lui seul la dépense des travaux de restauration. Le conseil municipal réunit le 31 mars 1898 renvoie à la commission des travaux, la question de la restauration de la Tour Saint-Vincent.

    travaux 2.jpg

    © www2.sele.fr

    Tailleur de pierre en 2018 à l'église Saint-Vincent

    La flèche dessinée par Léopold Petit ne vit jamais le jour. Quant au classement de l’église comme Monument historique, il n’intervient que le 19 décembre 1907. Soit dix ans après la demande, mais rien n’indique que l'on ait entrepris des réparations pendant ce laps de temps. Au contraire, la question des restaurations à l’église Saint-Vincent agita les débats des conseils municipaux pendant tout le XXe siècle. Il a fallu attendre la municipalité actuelle pour que l’impérieuse nécessité de préserver l’édifice de la ruine, en dégageant les financements pour sa restauration fut prise en compte. Si l’église Saint-Vincent avait été la propriété de l’Etat comme la cathédrale Saint-Michel, elle aurait alors subi une cure de jouvence au cours des décennies précédentes.

    Travaux 3.jpg

    © www2.sele.fr

    Sources

    Le courrier de l'Aude de 1894 à 1898

    Délibérations Conseil municipal

    _____________________________________

    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2019