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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 62

  • Le bâtiment Art-Déco des Archives départementales de l'Aude

    Autrefois fort mal installé dans les bureaux de la Préfecture, le service des Archives départementales de l’Aude va enfin se doter d’un bâtiment moderne à la hauteur de ses besoins à partir de 1941. Joseph Poux (1876-1938) qui avait passé toute la fin de sa carrière à Carcassonne à dépoussiérer, inventorier et classer le fonds d’archive prit sa retraite en janvier 1937 et ne put profiter des commodités d’un immeuble dont il avait initié la construction. Emporté par la maladie un an plus tard, il n’en verra même pas l’achèvement. C’est son successeur Henri Blaquière qui mènera le projet jusqu’à son terme en accord avec le préfet Voizard.

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    © ADA 11

    À l'angle de la rue des Tanneurs, la Maison Bousquet avant sa démolition.

    En 1937, la préfecture de l’Aude, en quête d’un site pour la construction des Archives départementales, s’intéresse de près à un immeuble vétuste situé non loin de ses bureaux, à l’angle de la rue des Tanneurs. Il s’agit de l’ancienne demeure de Jean Bousquet, marchand-fabricant de draps, dont sa fille (1844-1930) avait hérité et qu’elle donna en dot à son époux Marie Alfred Rousseau, chef de division de la préfecture du Rhône. Le choix de cet immeuble ne semble pas être le fruit du hasard, puisqu’Alfred Rousseau était connu à Carcassonne pour y avoir résidé avec son frère Théodore. Ce dernier fut un éminent fonctionnaire des Eaux et forêts du département reconnu pour ses nombreux travaux au sein des sociétés savantes de la ville. Les deux frères avaient épousé les deux sœurs Bousquet : Rose et Nelly. 

    Issu du mariage entre Marie Alfred Rousseau et sa mère Rose, Gabriel Rousseau devait ensuite hériter de l’imposant hôtel particulier, à l’angle de la rue des tanneurs. Artiste peintre vivant à Paris, il ne voyait aucun problème à céder son bien pourvu que l’on lui en donnât un prix convenable. Un accord pour 200 000 francs fut trouvé, mais un locataire récalcitrant retarda la signature de l’acte de vente. L’homme ne se disposait pas à quitter les lieux sans avoir lancer quelques procédures judiciaires contre son logeur ; il tirera d’ailleurs bénéfice. Finalement, la préfecture parviendra le 17 juillet 1937 à acquérir la maison Bousquet, destinée à la démolition. 

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    © ADA 11

    Gabriel Rousseau

    (1876-1951)

    Avant de poursuivre plus en avant, nous avons souhaité nous intéresser à la personnalité de Gabriel Rousseau, le fils de Rose Bousquet. Sa qualité d’artiste peintre a attiré notre curiosité… En cherchant dans de vieux journaux et magazines, nous avons appris que cet homme né à Lyon le 18 novembre 1876, bien qu’oublié de nos jours, avait eu une brillante carrière. C’est même l’un des peintres orientalistes parmi les plus remarqué de sa génération.

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    Élève de Gustave Moreau à l’École des Beaux-arts de Paris, Gabriel Rousseau que l’on confond à tort avec le verrier Gabriel Argy-Rousseau, a bénéficié d’une bourse de voyage en 1912 pour le Maroc.

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    Dans cette colonie française où il exerça le métier de professeur de dessin, il réalisa de très nombreuses aquarelles. En 1925, il fut à l’origine du Pavillon Nord-Africain à l’Exposition Internationale des Arts décoratifs de Paris. Il exposa au Salon de la Société Nationale des Beaux-arts, dessina des affiches pour le tourisme marocain et publié plusieurs ouvrages : L’art décoratif marocain (1934), Le costume au Maroc (1938). Le Musée Carnavalet conserve l’une de ses aquarelles.

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    Chose sans doute bien moins connue, le Musée des Beaux-arts de Carcassonne doit avoir quatre de ses tableaux dans ses réserves. Trois représentent des visions impressionnistes de Paris et le quatrième, un paysage quasi nocturne de clair-obscur en Savoie réalisé en 1902. Gabriel Rousseau décéda à Issy-les-Moulineaux le 8 août 1951.

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    Ce bâtiment Art-Déco est l'œuvre de Jules Reverdy. À gauche, se trouvait le logement du concierge. À droite, le bureau de l'archiviste.

    La mairie obligea Jules Reverdy, architecte du département, à mettre le futur bâtiment des archives en pan coupé, à l’angle de la rue des Tanneurs. L’adjudication des travaux fut accordée le 2 avril 1938 à l’entreprise de maçonnerie de Noël Cazanave, avenue Achille Mir. Les nouvelles Archives départementales furent livrées le 15 novembre 1941, soit quatre ans après le début de travaux retardés par la guerre. Le service des archives a déménagé au début des années 2000 à côté du Conseil départemental. L'ancien bâtiment entièrement restauré par le cabinet Chevillard-Falandry a été transformé en logements H.L.M

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  • Les vestiges du port et du Pont de Foucaud sur le Canal du Midi à Carcassonne

    Les anciens quais, la Chapelle et les bâtiments du Port de Foucaud

    Jusqu’en 1810, le Canal du Midi ne traversait pas la ville car, au moment de sa mise en œuvre, les Consuls de Carcassonne avaient refusé de participer financièrement à sa construction. Le Conseil général jugea lui-même que « le Canal ne serait pas avantageux, qu’au contraire il causerait de notables frais et dépenses à la ville, qui se trouvait dans une extrême pauvreté. » L’abbé Sabarthès nous raconte qu’un port d’embarquement des marchandises fut construit à trois kilomètres du centre de Carcassonne et que depuis l’ouverture du canal en 1684, une voiture faisait matin et soir, le service entre ce lieu et la ville.

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    Plan du Canal Royal du Languedoc à Foucaud

    Un témoignage de 1807 nous éclaire sur ce trajet : « Je m’oblige encore à tenir à la disposition des voyageurs soir et matin au poste de Foucaud, une bonne voiture à quatre places, suspendue, qui servira à porter à Carcassonne ceux des voyageurs venant de Castelanudary ou qui vont de cette première ville à la dernière, qui ne voudraient point faire le trajet à pied moyennant le prix particulier qui sera réglé à l’amiable entre les dits voyageurs et moi. »

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    Vue aérienne de 1930 sur laquelle on distingue encore l'ancien tracé.

    1. La discothèque Le privé

    2. Le domaine de Foucaud avec La Chapelle et les bâtiments

    3. L'ancien tracé du Canal du midi

    4. Le Pont de Foucaud

    5. L'actuel Canal du Midi

    Le port de Foucaud avec ses bâtiments administratifs et sa chapelle Saint-Louis se trouvaient entre la route de Toulouse et l’actuelle rue Pierre Pavanetto. Pendant la Révolution française, ils furent mis aux enchères publiques comme Bien national mais ne trouvèrent pas preneur. Il s’en fallut de très peu en 1817 pour qu’ils ne soient définitivement rasés, mais aujourd’hui il est encore possible de les voir dans le domaine de Foucaud. La Chapelle Saint-Louis, bénite le 4 novembre 1717 et à l’image de celle du Somail, a été désacralisée et transformée en magasin à fourrage. 

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    © Collection Antoine Labarre

    La Chapelle Saint-Louis photographiée dans les années 1970

    Au centre du port, s’écoulaient les eaux du canal en direction du domaine de Pouilhariez. Afin de leur faire traverser la route nationale, on fit bâtir un pont en pierre qui prit le nom de « Pont de Foucaud ». Son utilité se trouvait renforcée par l’indispensable nécessité de ne pas couper la circulation des véhicules en direction de Pezens. Ce qui doit retenir notre attention désormais ce sont les vestiges de ce pont qui, hélas, n’existe plus. La municipalité avait fini par solliciter à la fin du XVIIIe siècle que l’on détournât le Canal pour cette fois lui faire traverser la ville. L’ancien tracé fut donc abandonné mais le chantier, retardé par l’épisode révolutionnaire, ne s’acheva qu’en 1810. On construisit le nouveau port au bas de la colline de Grazaille ; c’est celui que nous connaissons tous.

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    Entrée de la Capitainerie du Port du Canal du Midi à Carcassonne

    En promenant dans Carcassonne, mon œil fut récemment attiré par un blason accroché à l’entrée de la capitainerie du port du Canal. J’en fis la remarque à mon ami Jacques Blanco qui m’informa alors de ce que feu Francis Teisseire, spécialiste de l’histoire du Canal di Midi, lui avait révélé à ce propos.

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    Il s’agit du blason des Etats du Languedoc ; lui et son jumeau se trouvaient autrefois fixés à l’entrée et à la sortie du Pont de Foucaud, au-dessus de l’arche. Francis Teisseire l’ayant découvert dans les réserves des Voies Navigables de France, on trouva à ce vestige un emplacement idéal à l’entrée de la capitainerie.

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    Blason des Etats du Languedoc

    Mais alors, où se trouve donc son jumeau ? C’est à ce moment-là que les yeux malicieux et plein d’enthousiasme de Jacques Blanco s’émerveillent à l’idée d’être l’unique détenteur d’une histoire. L’autre blason, me dit-il très simplement ? Eh ! Bien, il se trouve dans le parc de Macao. C’est la direction de l’agriculture et de la pêche qui occupe l’ancien domaine, en bordure du boulevard Barbès.

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    © Jacques Blanco

    On pourrait peut-être demander à l'administration qui détient désormais ce blason dans le parc de Macao, de le rendre aux Voies Navigables de France afin qu'il retrouve son jumeau à l'entrée de la Capitainerie.

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    Ce relevé n'est pas très scientifique mais il vous permet de mieux situer le Port de Foucaud

    Sources

    Chanoine Sabarthès / La Paroisse de Gougens / Bull. SESA 1905

    Remerciements appuyés à J. Blanco pour ses enquêtes sur le terrain

    Photo au domaine de Foucaud : M-F Pauly

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  • Tout savoir sur la salle du Chapeau rouge, d'hier à aujourd'hui

    Le chapeau rouge évoque aux Carcassonnais les plus anciens un cinéma puis une salle de concert ;  il est toutefois de notre devoir de rappeler ce qu'il fut à ses débuts. A l'époque des carrioles, carrosses et autres camions, Le Chapeau rouge était une maison de roulage avec un affenage. Il tire son nom de la couleur du couvre-chef des postillons au temps des calèches.

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    Le Chapeau rouge avec son enseigne en 1900

    En occitan "Afénaje", signifie "Nourriture en fourrage donnée au bétail, sans peser toutefois le foin. Sorte de pension pour bêtes". L'affenage était donc un lieu où l'on hébergeait les bêtes de somme, les chevaux de trait principalement. On donnait le foin aux chevaux, mis en pension parfois pour quelques jours. Ce gîte d'étape pour les attelages se payait à l'afénaïre (M. Blanc en 1904), chargé de l'hébergement et de la nourriture des bêtes. La traction animale était le seul moyen de locomotion et de communication. Les voituriers transportaient des voyageurs, les rouliers avec leurs longues charrettes faisaient le charroi des barriques de vin, des demi-muids dans notre région. Il y avait également une quantité de transporteurs de fourrage, de paille, de balles de blé, de farine et de bien d'autres marchandises. Tous accomplissaient souvent de longs trajets qui les obligeaient à faire escale dans une ville. Ils se servaient alors de l'affenage pour faire reposer leurs bêtes. L’auberge était très souvent attenante.

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    Affenage dans la rue Voltaire

    Toute une législation avait été édictée au sujet du roulage. Jusqu'en 1724, on peut penser que les transports par la route jouissait d'une liberté absolue. Seul Colbert en 1670 prit des mesures pour garantir les routes des dégradations auxquelles les exposaient la liberté du roulage. La réglementation débuta donc en 1724 et se poursuivit jusqu'en 1785 avec les nouvelles dispositions permettant aux voituriers d'atteler à leurs véhicules, un nombre illimité de chevaux. Ceci à la condition d'employer des bandes de roues avec largeur déterminée. Vers 1851, toutes ces lois sur le roulage et la police de la route seront abrogées.

    Petit à petit au cours du XXe siècle, la mécanisation fit disparaître les affenages. En 1891, on en comptait plus de vingt dans Carcassonne, dont Le chapeau rouge dans la rue Trivalle. Le plus fréquenté étant "L'affenage des trois mulets", place Davilla. En 1914, le nombre tomba à quinze puis à dix en 1921. A la veille de la Seconde guerre mondiale, seuls ceux de la rue Tourtel et la route Minervoise fonctionnaient. Le dernier affenage de la ville fut rasé dans les années 1970 ; on y construisit à la place, la Mutualité Sociale Agricole.

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    Hôtel du Chapeau rouge - Faubourg de la Trivalle, n°112


    Prix à partir du 1er septembre 1881 :
    Affenage : Vente du foin, le quintal : 10 francs ; vente de la paille, le quintal : 5 francs ; vente du fourrage, le quintal : 10 francs ; vente de la lotte : 0,50 francs.
    Attache : par bœuf, pour un jour ou fraction de jour : 0,20 franc ; par cheval ou mulet par ou par fraction de jour : 0,20 franc ; par âne : 0,15 franc ; par mouton enremisé : 0,10 franc
    Repas pour les marchands et meneurs seulement : 2 francs par repas. On sert à la portion selon la carte.
    « Couchée » pour les marchands et meneurs seulement : un chambre 1,15 francs ; un lit 1 franc

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    Le chanoine Léopold Verguet

    L’hôtel du Chapeau rouge qui se trouvait en face de l'affenage eut son heure de célébrité, à laquelle se rattache le souvenir du chanoine Verguet, dont le Dr Girou a rappelé l’existence aventureuse dans sa « Vie des personnages célèbres de l’Aude ». Né à Carcassonne en 1818, ce prêtre se consacra longtemps aux missions des îles lointaines et les plus dangereuses. Quand il revint de ces pays, il fut tour à tour curé de Montredon et de Pomas.

    Devenu chanoine titulaire en 1901, il avait grand allure. Il combattit les élections faites sous le ministère du « petit père Combes ». Le siège épiscopal devenu vacant par la mort de Mgr Billard, il s’institua lui-même vicaire capitulaire et se décernant les honneurs épiscopaux, il devint, Mgr Verguet. L’évêché de la Trivalle eut pour siège l’hôtel du Chapeau rouge. Dès son arrivée Mgr de Beauséjour mit de l’ordre à cette fantaisie et cette indiscipline. Le chanoine Verguet termina sa longue vie dans une indépendance pittoresque. Artiste et lettré, il assura longtemps le secrétariat de la Société des Arts et des Sciences. Il mourut dans sa ville natale, en 1914, à l’âge de 96 ans.

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    En 1938, le Chapeau rouge devint un garage puis un cinéma grâce à Jacques Cau qui s’en porta acquéreur en 1954. L’architecte Henri Castella fut chargé de la transformation. ; sur les murs, figuraient des dessins du peintre Jean Camberoque. Le 15 décembre 1954, le rideau se leva sur la première séance du Chapeau rouge, dont le nom fut conservé, par « Pain, amour et jalousie » avec Gina Lollobrigida et Vittorio de Sica.

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    Jacques Cau (à gauche), fondateur et directeur du Chapeau-rouge de 1954 à 1975. Cette salle de cinéma a projeté dans les années 80 des films à caractère pornographiques.

    La salle avait une capacité de 517 place assises. Le personnel faisant tourner cette entreprise artisanale était composé d'un opérateur, d'une caissière, d'un contrôleur, d'une femme de ménage, d'un gardien et de trois ouvreuses. Parmi les films les plus plébiscités  :  "Il était une fois dans l'Ouest", "La strada" et "Johnny guitare". Il n'y avait pas pour ce cinéma de spécialisation et l'on pouvait très bien y voir des films art et essais et des films interdits aux mineurs. La dernière séance, ce fut hélas un triste jour de l'année 1987.

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    © www.audetourisme.com

    En 2006, à l’initiative du maire Gérard Larrat, le chapeau rouge devint une salle de résidence et de concert pour les groupes musicaux locaux. Une succès jamais démenti depuis.

    https://www.chapeaurouge.carcassonne.fr

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