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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 61

  • Un réseau de tramways électriques dans Carcassonne ?

    Le maire de Carcassonne qui avait mis en adjudication la concession d’un service de voitures-tramways, sans toutefois obtenir de résultats, autorisa en 1883 le Conseil municipal à traiter avec Hippolyte Dardé. L’entrepreneur Perpignanais devait ainsi obtenir pour une période de cinq ans, le droit d’exploiter un service de tramways par traction hippomobile appelé Car-Ripert. Malheureusement, les espoirs mis en M. Dardé ne tardèrent pas à être déçus lorsque, quelques mois plus tard, l’entrepreneur demanda la résiliation du contrat le liant avec la commune. Le concessionnaire s’était brutalement retrouvé dans l’impossibilité financière de faire face à ses engagements. 

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    Il faudra attendre quinze années avant qu’à nouveau, la municipalité se mette en quête d’un service de transports moderne et adapté au développement touristique de sa ville. Les travaux de restauration de la Cité médiévale arrivant à leur terme, plusieurs initiatives afin d’attirer des visiteurs devaient voir le jour. On considérait alors comme nécessaire de rechercher un concessionnaire pour la construction d’un réseau de tramways dans Carcassonne. Les candidats ne tardèrent pas à répondre à l’appel d’offre lancé par la municipalité Sauzède dès 1898. Au mois de juillet, un industriel de Lyon - M. Bideau père - se propose d’établir dans la ville une ligne de tramways électriques par câble aérien. 

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    Voitures type Buffalo

    Le Parisien Georges Dubost envoie un projet détaillé de tramway sans fil, électrifié par des rails enfouis dans le sol au niveau de la chaussée. Il expose que la force électrique nécessaire au réseau sera fournie par une usine génératrice, établie sur la rive droite du Canal du midi. La voiture motrice tractera d’autres voiture dites Buffalos dans lesquelles prendront place des voyageurs. Dans la Première classe, dix places assises capitonnées ; dans la Seconde classe, vingt places debout sur deux plates-formes et dix places assises en intérieur. Le service, ouvert tous les jours à partir de 6 heures du matin, s’organiserait autour de deux sections principales : Gare - Cité et Gare - École Normale d’Instituteurs.

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    Tracé du tramway

    L’ingénieur Aveyronnais Edmond Vergnes de Castelpers (1870-1963), qui deviendra plus tard concessionnaire des tramways de Rodez et de Blois, se présente avec un avant-projet réunissant les meilleurs garanties pour la ville. Elle n’aura rien à débourser et la main d’œuvre sera recrutée localement. Le concessionnaire construira à ses frais et exploitera la ligne. Les tramways seront mus par la force électrique au moyen d’un fil dissimulé dans les rails d’un mètre de largeur. Ce sont treize lignes que le promoteur s’engage à réaliser à travers Carcassonne, dont trois en direction des hameaux. Le projet, s’il veut être mené à bien, a besoin du décret d’utilité publique ; les travaux pourraient alors être lancés dans les trois mois suivant et les premières lignes, livrées dans les six mois. La présentation du projet et son adoption au Conseil municipal de novembre 1898 ne se fit pas sans un long débat passionné et animé. Les cochets de la ville, installés dans la salle du conseil, ne manquèrent pas de se moquer des informations données par M. Vergnes de Castelpers. Les membres de l’opposition municipale s’enfermèrent dans des débats visant à faire capoter l’affaire. Jules Sauzède s’éleva alors avec force contre ces préjugés :

    « Le département va dépenser neuf millions pour son réseau ; nous autres, pas un sou ! Voilà comment nous comprenons la politique. Notre ville étouffe dans son étroite centre ; il faut élargir nos voies et respirer à l’aise, au souffle généreux du progrès et de la civilisation ».

    Que faire des propos du maire, quand l’entrepreneur a choisi de faire passer son tramway dans les rues étroites de la Ville basse ? Le problème ne tarda à arriver sur la table des ingénieurs des Pont et chaussées qui, d’abord suggérèrent de supprimer quatre lignes sur les 18747 mètres du réseau. En février 1900, leur constat fut sans appel : « L’utilité du réseau de tramways paraît assez justifiée et la réalisation du projet est très désirable d’autant que son auteur ne demande pas le concours financier de la ville et de l’État. Mais, sur les 18 kilomètres de voie projetée, le rapport en supprime 10 et sur ces 10, MM. les ingénieurs de l’État sursoient à statuer jusqu’à une enquête ordonnée." ».

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    Le tramway électrique de Rodez

    Par arrêté en date du 28 mai 1900, le préfet ordonne le dépôt des pièces de l’avant-projet prescrivant l’ouverture d’une enquête d’utilité publique et de nommer une commission pour donner son avis sur l’établissement des tramways électriques à Carcassonne. Tout ça pour ça, deux ans après… Quand on veut enterrer un projet à Carcassonne, il n’y a pas meilleur moyen que la nomination d’une commission. En 1901, la ville ne devant concéder l’électricité à la Société Méridionale de Transport de Force que pour an, le promoteur des tramways ne voulut sans doute pas s’engager dans une voie incertaine. La ville de Carcassonne avait mis tant de temps à se décider ; le département venait de mettre sur pied son réseau de tramways à vapeur. Ainsi, s’acheva le doux rêve de voir passer des tramways électriques dans la ville. Une fois encore, Carcassonne et son lot de diviseurs, venaient d’avoir eu raison du progrès et de l’intérêt général. Un nouveau mauvais signal venait d’être envoyer à tout entrepreneur étranger désireux d’investir son argent pour le développement de cette ville. Carcassonne put ainsi conserver longtemps un service de transport obsolète, celui des cochers. Quant à l'urbanisation de la ville, si l'on avait écouté l'architecte Léopold Petit... Depuis son arrivée en 1872, il préconisait l'agrandissement de la rue de la Gare en avenue et l'élargissement des voies. Son malheur, c'est de n'avoir pas été natif de Carcassonne. Si on avait écouté son côté visionnaire, la ville de Sauzède aurait pu construire son réseau de tramway.

    Sources

    ADA 11 / 4E69

    Le courrier de l'Aude

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  • Sortie de livre ! Les maires de la Révolution française à aujourd'hui

    J'ai le plaisir de vous annoncer la sortie imminente de mon nouvel ouvrage consacré à Carcassonne. Il sera disponible à la vente au cours de la deuxième quinzaine d'avril et vous pouvez déjà vous en faire mettre un, ou plusieurs de côté. Comment ? Il vous suffit de m'écrire par courriel à cette adresse : andrieu-martial@wanadoo.fr. Si vous habitez à Carcassonne ou à proximité, je pourrai même venir vous le livrer à domicile. 

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    De quoi s'agit-il ? Jusqu'à présent, aucun recensement précis n'avait été entrepris concernant les 58 maires de Carcassonne. Aucune biographie n'avait mis en perspective leur dévouement au service des citoyens de notre ville. Depuis plusieurs mois, je me suis donc lancé dans ce travail de recherche afin de palier à cette lacune historique. L'ouvrage dont j'espère vous ferez bientôt l'acquisition, vous transportera à travers les époques et les régimes politiques dans lesquels ces hommes ont évolués. Il s'agit d'un livre à compte d'auteur dont j'ai moi-même réalisé la composition et la maquette ; il ne sera tiré qu'à 300 exemplaires, à moins que ses ventes ne m'obligent à le faire réimprimer.

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    Carcassonne,

    Ses maires de la Révolution française à aujourd'hui

    164pp, 160x240 mm

    20 €

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  • Lucien Allibau (1908-2004), résistant et libérateur de l'Aude

    Nous allons laisser parler dans cette chronique, la voix d'un témoin qui fut un ami très proche de Lucien Allibau. Tout simplement parce que dans peu d'années, les témoignages sur ces maquisards ne se retrouveront plus que dans des livres. Y trouvera t-on celui de cet homme ? 

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    Comme tous les communistes, Lucien Allibau disait que "les colons n'avaient rien à faire en Algérie" et qu'il fallait laisser le pays aux Agériens. Je lui dis un jour : "tu parles comme un Fellagha". Il me répondit : "Tu sais  ce que ça veut dire Fellagha ? C'est un homme de la terre. Oui, moi aussi je suis un homme de la terre." Voilà l'origine de son surnom qui lui restera au hameau de Maquens jusque'à la fin de sa vie. 

    L'homme fils de travailleur comme son père qui mourut jeune, vécut avec sa mère et resta un célibataire endurci. Il était occupé à la voirie avant la guerre, mais comme il était communiste, quelqu'un se chargea de le faire renvoyer. Il retourna travailler la terre et remplaça un prisonnier de guerre dans une ferme. Pourchassé par la police de Vichy et la Milice française, il leur échappa et rejoint le maquis FTP (Francs Tireurs et Partisans) dans les forêts de Salvezine et plus tard, à Chalabre, il faisait partie d'une petite unité de sabotages.

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    Il y avait deux types de maquis : l'un FFI (Forces Françaises de l'Intérieur) qui était sous la direction de Londres avec pour chef le général de Gaulle qui lui, bénéficiait de parachutage d'armes ; l'autre, FTP, qui était communiste. Bien qu'il n'aimait pas trop en parler, il me raconta quelques péripéties que je vous livre.

    Son groupe au début n'était pas structuré. Un jour, pour se ravitailler, il demandaient à un fermier de lui vendre une vache. Le fermier refusa - et pour cause, les maquis payaient avec des bons remboursables à la fin de la guerre. Il tuèrent une vache à la hache et l'emportèrent. A six, ils dormaient sous un rocher. L'hiver, il fallait pour sortir couper les stalactites de glace avec le souci principal d'échapper aux Allemands. Ils étaient ravitaillés par la famille Cathala de Montjardin, un petit bourg à côté de Chalabre. Dénoncé par qui ? Il ne le surent pas avec certitude, mais toute la famille fut torturée et un de leur fils, fusillé.

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    Auguste Cathala n'avait que 16 ans

    Puisque les Anglais et les Américains ne leur parachutaient pas des armes, tout était bon pour s'en procurer. Attaques de gendarmeries et même simulations d'attaques Allemandes contre les FFI, qui eux bénéficiaient de parachutages. Pourtant les Américains avaient parachuté des hommes qui, ils le surent plus tard, étaient des agents de l'OSS qui deviendra plus tard la CIA. Ces sic agents parlaient toute la journée à la radio en américain. Quand Lucien leur demandait de quoi ils parlaient, ils lui répondaient : "On commande des armes". Ils n'en ont jamais reçu et pour cause, les Américains n'allaient pas fournir des armes, au maquis communiste. Ce n'est qu'après la fin de la guerre, qu'ils comprirent leur rôle qui était d'infiltrer les maquis communistes. Malheureusement, au cours d'une opération dans les gorges d'Alet contre une colonne Allemande, le lieutenant Paul Swank fut tué. Un monument rappelle cet épisode. Il y fut enterré.

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    La tombe de Paul Swank - Officier OSS - à Alet-les-bains

     Au cours d'un engagement à côté de Puivert, ils firent prisonniers trois soldats Allemands. Dans la nuit, l'un d'eux tente de s'évader. Lucien qui s'en était aperçu, lui dit : "La prochaine fois tu sera tué". Il l'aurait fait. Ils furent remis à la Libération aux structures qui se mettaient en place. 

    Une fois, comme un camarade lui proposait de se servir avec l'argent de la caisse qu'ils avaient récupérée, il lui dit : "Si tu la touches. Attention !" Dans sa vie, bien que braconnier dans l'âme, il fut l'honnêteté même en toutes circonstances.

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    Un jour, je vais au petit village de Pauligne près de Limoux. Je rencontre un vieux monsieur. En parlant, je lui dis que j'étais de Maquens. Il me dit avoir fait des expéditions quand il était au maquis avec un gars de ce village. Il me précisa que c'était lui qui avait tué lie maire qui à cette époque était milicien. Quand je lui ai rappelé ces faits, il me dit de n'en parler à personne. Ils me mettraient en prison encore. C'était ce que l'on appellera plus tard, un règlement de compte du maquis. Ce milicien avait été impliqué lors de la torture et de l'assassinat du fils Cathala.

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    Lucien Allibau

    (1908-2004)

    Pendant plusieurs années, au cours des cérémonies au Monument aux morts de Maquens, un habitant d'origine italienne faisait partie des personnes chargées de déposer une gerbe. Quand "Le Fellagha" s'en aperçut, il signala aux anciens combattants que cet individu avait servi dans les milices fascistes de Mussolini. On ne le revit plus durant les cérémonies. Aujourd'hui tous ces résistants sont presque tous morts ou trop âgés, désormais n'importe qui peut donc écrire ou faire ce qu'il veut avec l'histoire. "L'habit ne fait pas le moine"...

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