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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 175

  • La nouvelle région Occitanie, un vieux rêve Pétainiste de 78 ans ?

    Lorsqu'on étudie avec attention les archives du gouvernement de Vichy, on s'aperçoit d'une chose assez troublante... Les félibres et autres défenseurs de la culture occitane s'étaient presque tous rangés dès 1940 derrière l'étendard de Philippe Pétain, maréchal de France. Dans l'Aude, ils prirent même une place de choix au sein des conseils municipaux nommés par Vichy. La révocation des maires républicains ayant refusé de prêter allégeance à Pétain, suffit à satisfaire les nostalgiques des anciennes provinces de l'Ancien Régime. Il souffla du côté de l'Etat-Français comme un esprit de revanche contre une Révolution française, responsable de tous les maux du pays. Alors, sur son passage, on applaudit à tout rompre ce vieillard avec sa Révolution nationale accrochée au cœur. Il incarnerait, paraît-il, la renaissance de l'idéal de nos provinces d'autrefois avec leurs langues et leurs beaux pâturages. Comme l'écrivit Jean Cassou, l'Occitanie devint : "Ce petit royaume pétainiste avec ses saluts aux couleurs et ses allumages de flamme." Pas si étonnant que la classe politique majoritairement Radical-socialiste dans l'Aude, soutienne les vertus du maréchal au moins jusqu'en 1942.

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    Les provinces de France en 1788

    D'où vient, me direz-vous, cet amour soudain des Occitanistes pour Philippe Pétain ? En vérité, il est moins le fruit d'un concours de circonstances politiques, que d'une filiation dans laquelle les deux parties trouvèrent les alliés. Qui sont-ils ? Charles Maurras et Frédéric Mistral ! Charles Maurras, doctrinaire du mouvement "La ligue d'Action Française" créée en 1905, préconisait le retour à la monarchie héréditaire et au catholicisme. Il concevait une décentralisation inspirée de l'Ancien Régime, laissant aux corporations, aux villes et aux régions la possibilité de s'administrer elles-mêmes. Rêve également de la Grande Europe du IIIe Reich qui planifiera tout cela... Antiparlementaire, Maurras écrivit que "le député reçoit de ses électeurs un mandat d'entrepreneur de crises ministérielles". Autrement dit, il ne sert à rien. Aujourd'hui encore les actuels pourfendeurs idéologiques du parlementarisme, inondent les réseaux sociaux de slogans (fake news) dénonçant les supposés fainéants de l'Assemblée nationale, grassement rémunérés et forcément inutiles. Sur ce point et tant d'autres, le régime de Vichy s'était aligné sur les positions de Maurras, c'est-à-dire le culte du chef plutôt que la démocratie parlementaire. Citons-le tout de même : "La démocratie c'est le mal, c'est la mort." Avec Léon Daudet, Maurras fonde en 1908 "l'Action Française" et s'attire les faveurs de tous les penseurs de l'extrême-droite française. En vérité, le talent littéraire et journalistique de ces deux réactionnaires a plus éloigné par sa virulence les sympathisants, qu'ils ne les a rapprochés. Aussi, l'emprise maurassienne se trouva t-elle réduite en Occitanie à la partie orientale du Languedoc avec un centre de force à Marseille. Dans le département de l'Aude, l'influence de Maurras fut bien ancrée dans les vieilles familles de propriétaires vignerons. En 1937, le journaliste sera même reçu à la table d'un comte - Président local de l'Action Française - dans un très beau château près de Carcassonne. Cette influence se retrouvait dans l'admiration que tous portèrent à Frédéric Mistral. L'idéologue du "nationalisme intégral" vouait un culte au félibre majoral et écrivit lui-même en languedocien. Lorsque le maréchal Pétain adressa son message à la veuve Mistral qui vivait retirée à Maillane, Maurras écrivit dans le Petit Marseillais : "Or, je vous prie de me dire si un seul chef d'état français a pris garde à cette haute vertu du mistralisme." Dans un autre texte de Maurras, on lit ceci : "La France réduite à l'Occitanie est placée sous le patronage lumineux... de notre Mistral".

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    Le gouvernement de Vichy tentera d'ailleurs, à travers deux lois en 41 et 42, d’introduire pour la première fois l'enseignement des langues régionales à l'école (Breton et Occitan). Pétain entérina une recomposition territoriale régionale par la publication du décret du 30 juin 1941 attribuant à certains préfets les pouvoirs des préfets régionaux et portant division du territoire pour l'exercice de ces pouvoirs portant application de la loi du 19 avril 1941 réorganisant certaines anciennes provinces de France en groupant des départements entre eux. Toute cette politique sera source d'espoirs pour les occitanistes réclamant davantage d'autonomie. Elle sera désavouée à la Libération par le gouvernement provisoire de la République.

    "La population du Midi ne constatait pas sans quelque satisfaction que les limites de France "non occupée" coïncidaient avec celle de son propre domaine. En tout cas, quiconque a séjourné en "zone non-occupée", ne fût-ce que quelques semaines, n'a pas pu ne pas être frappé par la fierté qu'éprouvaient les méridionaux à l'idée qu'ils constituaient à eux seuls ou presque, la France inviolée et, à l'idée que le gouvernement se trouvait désormais en Auvergne et non à Paris." (Paul Sérant / La France des minorités)

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  • Des erreurs et des oublis sur le nouveau Monument aux morts, parvis de la Cathédrale

    Au mois de février dernier, les autorités municipales et nationales inauguraient le nouveau parvis de la cathédrale Saint-Michel. On constatait que le monument des enfants de Carcassonne morts pour la patrie réalisé en 1919 avait été déposé. Sur le nouveau monument on retrouve les soldats de la Première guerre mondiale, de la Seconde guerre mondiale avec ses victimes civiles, d'Indochine et d'Afrique du Nord. Or, en se penchant dans le détail sur cette longue liste, on s'aperçoit au moins d'un oubli de taille.

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    © Ville de Carcassonne

    La ville de Carcassonne à ses enfants, morts pour la patrie

    Le nom du jeune Résistant Marceau Perrutel (1908-1944) ne figure pas dans la liste. Né à Castelnaudary, mais ayant toute sa famille à Carcassonne et encore aujourd'hui, il fut assassiné par la Gestapo. Une rue dans le quartier des Capucins porte même son nom... On pourrait se dire, c'est peut-être parce qu'il n'était pas né dans la capitale audoise. Certes, mais alors pourquoi y trouverait-on Jean Bringer et Aimé Ramond qui l'un et l'autre sont nés respectivement à Vincennes (94) et à Montgeard (31) ? 

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    Le nom de Marceau Perrutel est absent

    Ci-dessus, on remarque le nom de Pheloup Roger dans la liste des victimes de 39-45. Or, il s'agit très probablement de Pheloup Robert, mort en août 1951 à Dong Khé Cao Bang (Tonkin) durant la guerre d'Indochine. Son décès est bien enregistré à Carcassonne. Notons qu'il ne figure pas dans la liste du monument des morts d'Indochine. Non seulement le prénom est inexact, mais l'emplacement est erroné.  

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    © Ville de Carcassonne

    Le nouveau parvis

    Je n'ai révélé que ces deux cas, mais il serait souhaitable de vérifier sérieusement l'ensemble du panneau. J'ignore si cette vérification a été exécutée sous les auspices du Souvenir français, avant la réalisation du monument. Il est tout de même impensable que de tels oublis se produisent, compte tenu du coût important des travaux financés majoritairement par l'état. Sans compter que le système d'alimentation en eau ne fonctionne toujours pas, pour alimenter le bassin et l'arrosage des plantations.

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  • Histoire de l'ancienne clinique Cathala, avenue F. Roosevelt

    A Carcassonne, on a semble t-il l'art et la manière d'enlaidir ou de détruire les bâtiments anciens. Le Carcassonnais qui emprunte chaque jour l'avenue Roosevelt - anciennement route de Toulouse - se souvient-il qu'il y a avait à côté de feu la "Villa de la Gestapo", la clinique Cathala ? Tout ce quartier construit au XIXe siècle possédait des demeures bourgeoises que petit à petit l'on fait disparaître. Les architectes de chez Légo s'en donnent à cœur joie...

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    L'immeuble cachant la clinique Cathala

    Cet immeuble du plus bel effet fut construit au milieu des années 1980, sur l'emprise du parc de la clinique Cathala. Où est donc passé le bâtiment ancien ? Il n'a pas été détruit, mais il est masqué et se trouve derrière l'emplâtre bétonné.

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    Ainsi qu'on le voit sur ce cliché aérien, le bâtiment de la clinique se trouve au centre des structures modernes. L'une donne sur la voie ferrée, l'autre sur l'avenue Roosevelt.

    Un peu d'histoire...

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    © Dr Robinet

    La clinique Cathala dans les années 1970

    En 1922, Maurice Cathala fait l'acquisition de l'ancienne propriété de Napoléon Jacques Alexandre Salières-Roumens. L'année suivante, il ouvre à cet endroit une clinique - le Dr Delteil en fait de même dans le centre-ville de Carcassonne. Une extension est réalisée dans les années 1930, puis le docteur décède en 1947. Plusieurs médecins se succèderont avant que Charles Cathala ne reprennent en 1956 la direction, laissée vacante suite au décès de son père. Destin tragique que celui de la famille Cathala ! Charles et son épouse Marie se tuent au volant de leur véhicule en 1963.

    "Le Dr Cathala était l'une des personnalités les plus marquantes de Carcassonne. Il avait fait ses études au lycée de la ville, puis à la Faculté de médecine de Montpellier. Après avoir été interne des hôpitaux d'Avignon, il prit la direction il y a environ quatre ans de la clinique créée par son père. En octobre 1962, il s'était adjoint le docteur Robinet, chirurgien. Il laisse le souvenir d'un praticien de talent et d'un homme de cœur qui ne savait rien refuser et que sa clientèle tenait en grande estime. Il laisse trois enfants : Pierre (7 ans), Sophie (4 ans) et Henri (2 ans). La porsche qui roulait à vive allure en direction de Béziers  a raté un virage sur la N610 à la hauteur du village de Tourouzelle dans la commune de La Redorte."(Extrait du Midi-Libre - 19.04.1963)

    Cette maison de maître était occupé au rez-de-chaussée par la famille Cathala ; les premiers et seconds étages avaient été aménagés pour le chambre de la clinique. Sur le devant - précisément où se trouve la résidence en béton - un parc arboré avec un massif floral en son centre faisait office de rond-point pour la circulation des véhicules entrant et sortant de l'établissement. En 1962, une extension des bâtiments permit la réalisation d'un bloc opératoire complet ; la clinique compta jusqu'à 40 chambres. A cette époque, Carcassonne possédait 4 cliniques : Héran, Delteil, Saint-Vincent et donc Cathala. Six mois avant le tragique accident, Charles Cathala s'était associé avec Jacques Robinet. Ce dernier dut prendre ensuite la direction de l'établissement jusqu'en 1980, date à laquelle il intégra l'hôpital Antoine Gayraud. La clinique Cathala ferma l'année suivante et fut vendue par les trois enfants de Charles Cathala. Destin tragique également pour deux d'entre-eux : Pierre décéda à Toulouse à l'âge de 39 ans en faisant son jogging, Sophie à l'âge de 40 ans dans un accident de moto. Seul le dernier est encore pilote d'hélicoptère aux Etats-Unis.

    Sources

    H. Alaux

    Merci à Jacques Robinet

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