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Seconde guerre mondiale - Page 71

  • Un poignant témoignage... 70 ans après !

    J'avais écrit un article le 15 décembre 2009 avec le peu d'éléments que j'avais alors, sur la plaque apposée sur la façade du n°3 de la rue Bellevue. Elle avait attisé ma curiosité. Quelques mois après, je recevais un courriel d'une lectrice vivant en Angleterre me remerciant de raviver la mémoire de son grand père, mort en déportation. Grâce à la magie d'internet et de ce blog, je suis en mesure aujourd'hui de vous présenter un nouvel article complet avec les photos et les documents inédits qu'elle m'a fournis.

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    Au mois de mai 1940, les troupes allemandes sont entrées en Belgique. Le roi Léopold III ordonne la reddition de ses soldats. Joseph et Andrée Britte quittent alors Bruxelles le 13 mai 1940 avec leurs quatre enfants (Mizette, Pierre, Hélène et Jozette), direction Carcassonne où ils sont attendus par un ami de la famille.

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    Andrée Britte (Née Starck) et Joseph Britte en 1925

    A Carcassonne le 17 mai, Léon Crémer les héberge dans une de ses propriétés du domaine d'Aribaud près de Saissac; ils y resteront jusqu'en septembre.

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    Début septembre, ils s'installent dans l'appartement du second étage de l'immeuble n°3, rue Bellevue à Carcassonne. Joseph Britte fait équiper d'un gazogène une fourgonnette et obtient une autorisation de transport. Il effectue pour le compte d'un tiers, la livraison de produits chimiques destinés à la vigne. Il entre, au cours de ses déplacements avec un certain Paul Cartigny, belge, qui a travaillé pendant la guerre pour le 2e bureau français. Il retrouve à Toulouse un de ses amis Richard Stappers qui y fait fonction de Consul de Belgique. A Limoux, il fera la connaissance du Commandant Van de Vloet et du Capitaine Doyen qui s'occupent de la liquidation des dépôts de matériels qui y sont amenés par l'école Royale Militaire Belge lors du repli des troupes. Ces deux officiers s'efforcent à faire évacuer leurs hommes vers l'Angleterre, via l'Espagne et le Portugal. ils ont créé un embryon de service sous le de Benoît.

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    Ancien Consulat de Belgique, 20 rue des Arts à Toulouse.

    Joseph Britte est contacté par le juge consulaire Georges Van de Velde qui habite à Grenoble, pour assurer la responsabilité du service belge d'assistance aux belges de l'Aude. Il prendra l'intiative de chercher des passeurs vers l'Espagne. Début 1941, Toulouse commence à envoyer des "colis" (entendez, des clandestins) . A cette époque, la famille Britte héberge Edmond Desnerk, agent de renseignement parachuté sur la Belgique dans la nuit du 12 au 13 octobre 1941.

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    Plaque sur la maison, 3 rue Bellevue

    Le 3 octobre 1941 débarque dans cette maison, deux agents parachutés en zone libre: Le major Pierre Bouriez dit "Sabot"(chef de mission), Le lieutenant Albert Deweer dit "Speed" (radio) et un officier polonais du nom de Detko (radio). Sabot repartira le jour même pour se fixer à Montpellier au 21 bis rue de la Garenne, et à Carnon plage à la villa "Sam Suffit". Les deux autres radios resteront là et commenceront à émettre. Detko rejoindra Limoux au bout d'un mois et sera évacué sur Londres le 13 mars 1942. Speed restera chez Britte jusqu'au début de 1942, car dès février des colis vont succéder de plus en plus. En moyenne, deux équipes de cinq hommes par semaine. Du 25 février 1942 au 16 juin 1942, 125 hommes passeront par le 3, rue Bellevue. Le 3 février 1943, Joseph Britte est arrêté à Montpellier au 21 bis, rue de la Garenne. Il restait deux colis à Carcassonne que l'abbé Gau se chargera d'évacuer.

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    21 bis, rue de la Garenne à Montpellier (à droite)

    Ce réseau avait une activité sur toute la France et vers la Belgique.

    Ses missions étaient de:

    Centraliser tous les services de renseignements belges en France

    Reprendre en main toutes les filières d'évasion

    Organiser la fourniture de faux passeports

    Assurer l'hébergement des colis

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    Pierre Bouriez (1906-1964) alias Sabot

    (Photo: françaislibres.net)

    Liste des membres du réseau arrêtés, le 2 février 1943:

    Pierre Bouriez, Georges Oreel, Max Lacomblez, J. Dopchie, Joseph Britte, M. Flamandturck, Jules Wolf, Pierre de Stexhe, Kermarec, Chahay

    Albert Deweer (Speed) sera arrêté le 5 décembre 1942 à Narbonne par la police de Vichy et transféré au camp de Vernet. Il s'évadera avec la complicité de deux gardiens du camp et sera aidé par madame Montagné de Limoux et Andrée Britte qui l'hébergera.

    Que sont-ils devenus?

    Albert Deweer, rejoindra l'Angleterre sain et sauf. Pierre Bouriez (Sabot) reviendra de déportation gravement malade, il mourra en 1964. J. Dopchie, Max Lacomblez et Joseph Britte ne reviendront pas des camps de la mort.

    Dénoncés par qui?

    Le réseau Sabot a été donné à la Gestapo, début 1943, par une taupe qui s'y était introduite. Il s'agit d'un belge nommé Manet, alias Adolphe Toulouse. Il sera arrêté à la libération. Condamné à mort par le conseil de guerre, il ne sera pas exécuté et sera libéré vers 1980.

    Note de Pierre Britte, fils de Joseph Britte:

    Il est à noter que malgré l'environnement de la rue Bellevue (un milicien à l'étage en dessous de nous, un milicien au N°1, des miliciens dans la rue des châlets), nous n'avons jamais été dénoncés par le voisinage. Nous avons même été aidés par les locataires du rez-de-chaussée de notre immeuble, monsieur et madame Caulet qui hébergèrent souvent des colis, quand on manquait de place. Un voisin, militaire à la Force aérienne française, M. Djan nous a également aidé. Monsieur et madame Roques, voisin du n°1, aussi comme madame Léger qui nous approvisionnait en poisson.

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    Portait de Joseph Britte réalisé à la prison de Fresnes, juste avant sa déportation à Bergen-Belsen.

    Epilogue

    Andrée Britte, son épouse, a été arrêtée à Carcassonne par la Gestapo avec son fils aîné et sa fille. Ils ont été relâchés, mais elle a continué à recevoir des agents de la résistance dans la rue Bellevue. Une fois la guerre terminée, elle est retournée en Belgique avec ses enfants. Les bagages qui les suivaient furent volés, leur maison qu'ils louaient à Bruxelles avait été pillée. Celle qui leur appartenait dans les Ardennes avait été vendue sans leur consentement. Andrée Britte avait déjà à Carcassonne vendu tout ses bijoux pour survivre. Elle avait 51 ans. Un document de volontaire datant de la première guerre, lui permit de travailler comme infirmière. Le Gouvernement provisoire de Bruxelles lui laissa la jouissance d'un appartement réquisitionné à un collaborateur. Elle continua, malgré l'absence d'un mari qui ne revint pas de déportation, d'élever ses enfants. Sa fille a aujourd'hui 83 ans. dans sa cuisine pend une vue de la cité de Carcassonne et le dernier portrait de son père.

    Concernant la famille carcassonnaise Roques, évoquée plus haut, qui a aidé les Britte. Ils avaient une fille nommée Josette qui doit avoir 80 ans et vivrait à Carcassonne. Son époux avait une entreprise de peinture. Voilà un appel lancée par la petite fille de Joseph Britte (Andrée d'Ambrumenil) qui aimerait bien avoir de leur nouvelles et qui pourrait nous apprendre bien de choses.

    Un grand merci à madame Andrée d'Ambrumenil pour ce témoignage inédit

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    © Tous droits réservés/ Musique et patrimoine/ 2013

  • Charles Mas: Héros oublié de la libération de Carcassonne.

    Georges Mas n'avait que trop peu de mois pour se souvenir de ce père que la barbarie nazie lui a enlevée. C'était le 20 août 1944... Fusillé par une colonne allemande à la sortie de Carcassonne. Là, il ne reste qu'une stèle oubliée du passant et encore, ce n'est pas celle d'origine... Dans l'indifférence, le propriétaire du bâtiment sur lequel elle avait été fixée après guerre, l'avait enlevée pour refaire sa façade et mise à la benne à ordures. Georges Mas ne dut compter que sur lui-même et sur l'aide de Raymond Chésa, maire à cette époque, pour faire refaire et poser une nouvelle plaque au même endroit.

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    Charles Mas, ici avec son épouse Pierette, était né le 2 décembre 1913 dans les Pyrénées-Orientales. Comme employé communal, il travaillait et habitait à l'île dans la maison d'alimentation des eaux de la Cité. Ce jour de la libération de Carcassonne, il est touché par plusieurs balles ennemies, route de Narbonne (avenue du général Leclerc). Selon son fils Georges et d'après les propos recueillis par sa mère, Charles est d'abord transporté au café Azéma (ancienne discothèque La bulle, pour le situer) dans la rue Barbacane. Il est sérieusement blessé aux jambes et est transporté d'urgence à la clinique Delteil. Pris en charge, il décèdera peu de temps après dans des conditions méconnues, mais suspectes selon son épouse. Il est inhumé au cimetière St-Michel, puis transféré à la Conte.

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    Ce n'est que 50 ans après cette triste histoire qu'on ramena à son fils, ce brassard FFI que Charles Mas avait dans sa poche le jour de sa mort. La famille dut quitter le logement de fonction qu'elle occupait. Pierrette se retrouva sans emploi avec une pension de veuve de guerre et deux enfants de quatre et un an.

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    La plaque remplacée par la municipalité dans les années 1990.

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    La plaque vue de l'avenue du général Leclerc, à la hauteur du magasin Husqvarna

    Souvenez-vous!

    Merci à Georges Mas pour ce témoignage

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  • 1943-1944: La vérité par les chiffres

    Puisque de nombreuses personnes s'interrogent à juste titre de savoir pour quelles raisons a t-on cherché à éluder le passé de la maison de la Gestapo depuis 1944, nous avons choisi simplement de faire sortir les chiffres. Ceux-ci parlent sans laisser de noms, mais témoignent d'une réalité peu flatteuse pour notre ville et notre département que certains auraient intérêt à vouloir étouffer. A la lecture de ses chiffres recueillis de source sûre, il appartiendra à chacun de les commenter... ou pas.

    Amis de la légion des combattants et de la révolution nationale

    Carcassonne en 1943:

    827

    Nombre de signataires du registre de condoléances de Philippe Henriot

    Aude juillet 1944:

    1060

    Miliciens arrêtés en septembre

    Aude 1944

    77

    Collaborateurs arrêtés

    Carcassonne 1944

    29

    Personnes internées à la prison de Carcassonne

    21 août 1944 au 19 novembre 1944

    700 environ

    Audois frappés d'indignité nationale

    1945

    600 environ

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