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Evènements - Page 8

  • "Splendeur et mort de Joaquin Murieta" de Pablo Néruda, au Festival de Carcassonne 1976

    Trois ans après l'arrivée au pouvoir de la dictature au Chili, l'adaptation française de l'unique pièce de Pablo Néruda donne la tonalité du Festival de Carcassonne 1976. Ecrite en 1967, "Fulgor y muette de Joaquin Murieta" est une pièce éminemment politique. Depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, le monde avait eu la naïveté de penser qu'il s'était débarrassé de toute nouvelle incursion fasciste au sein d'un état. Hélas, la bête immonde venait de ressusciter en Amérique latine, sous les traits du général Augusto Pinochet. Pour le héros de la pièce, Joaquin Murieta, l'or de la californie se transforme en bataille contre l'injustice, le racisme, l'esclavagisme et l'exploitation de l'homme dans le travail. Autant de plaies et de ressentiments qui n'inspirent chez lui que vengeance et révolte. Joaquin Murieta le Chilien part alors en quête de l'or, suivi de tout un peuple qui affrontera l'Amérique des nantis.

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    © Charles Camberoque

    Festival de Carcassonne 1976

    Entre 1968 et 1975, le Centre dramatique National du Languedoc-Roussillon présidé par Jean Deschamps résidait à Carcassonne. Il faisait toute la programmation du Festival de la Cité dont la notoriété dépassait de loin les frontières de notre département. À cette époque, Carcassonne se trouvait presque sur le même pied d'égalité, en terme de programmation théâtrale, que le Festival d'Avignon. En 1975, Jean Deschamps décida de passer la main au comédien Jacques Echantillon. Le Théâtre du midi changea de nom pour Les tréteaux du midi, domiciliés cette fois à Béziers. La compagnie assurera également la programmation de la saison du théâtre municipal. Jacques Echantillon réalise la programmation en collaboration étroite avec les associations culturelles de la ville, les techniciens de la culture, les élus municipaux et les grandes organisations syndicales. L'adjoint à la culture de l'époque cite cette phrase de Paul Langevin : "La culture est ce qui permet à l'individu de sentir pleinement sa solidarité avec les autres hommes".

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    "Certains réclamaient, dans notre programmation , une œuvre classique : pourquoi la chercher par-delà les siècles, quand elle est là, présente et bien vivante. Ecrit bien avant les évènements qui secouèrent les assises démocratiques du Chili et permirent au fascisme de récupérer cette énorme hacienda, cet hymne à la liberté réveille aujourd'hui en chacun de nous des résonances profondes. Ce flot tumultueux qui jaillit de la terre chilienne et du cœur de Néruda, on ne l'endigue pas derrière des montagnes de dollars. On ne passe pas de menottes à un torrent. Mais à ces eaux rouges de sang chilien, se mêle le sang de tous les peuples opprimés et meurtris.

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    A ce chant des émigrés chiliens, se mêlent les voix de tous les émigrés du monde. A cette nostalgie de la terre chilienne, se mêle la nostalgie de tous ceux qui ont quitté leur famille et leur toit. La voix de Néruda, comme celle de tous les grands poètes, est entendue par-delà les océans, restera présente par-delà les années.

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    © Charles Camberoque

    Le dessinateur Tono Salazar a représenté, la tête de Néruda à fleur de terre, agrippée au sol par des racines, une branche sur le front. On ne peut comprendre le poète si l'on n'est pas comme lui, pétri de sable et de limon. Ce sera le premier visage de la pièce : un cate de naissance. La dernière sera un visage de mort : celle de la tête coupée de Murieta, la tête jonchée de toutes les têtes de tous les Murieta du monde. Entre ce deux visages est une longue marche, généreuse, joyeuse, naïve, passionnée, cocasse ou tragique, celle de tous les peuples qui se battent pour leur droit à la vie."

    (Jacques Echantillon)

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    © Charles Camberoque

     C'est le 8 juillet 1976 qu'est présentée l'adaptation française de Guy Suarès d'après la pièce de Néruda, au Festival de la Cité de Carcassonne. Les décors et costumes sont de Alain Tenenbaum, la chorégraphie de Paul Bogossian, la musique de Claude Marti, Michel Lebret, Jean Michel Mariou, Gilles Cardon, Vincent Lespagnol et Zilonca. La pièce est mise en scène par Jacques Échantillon.

    Distribution

    Avec Gil Baladou (Alberto Reyes), Jacques Echantillon (Juan Trois-doigts), Elsa Wolliaston (Chanteuse Noire), Zilouca (Chanteuse Brune), Elisabeth Mortensen (La Puce d’or), Jean-Jacques Lagarde (Le Chevalier Escroc), Michel Lebret (Le Bâteleur, Un Mexicain), Robert Bousquet (La Voix de Murieta, Un Chilien), Ariane Ario (Une Chilienne, Une Coriphée), Alain Tenenbaum (L’Indien), Daniel Jegou (Le Ranger), Edouard Kan, Jérôme Cartier, Paul Bogossian (Les Rangers, Les Encapuchonnés), France Darry (Coriphée), Vincent Lespagnol (Percussionniste), Paul Ville (Le Poète). Enfants des Tréteaux du Midi.

    Splendeur et Mort de Joaquin Murieta est l'unique pièce de Pablo Neruda discution après la représentation avec la femme de P Neruda Festival cite carca278.jpg

    © Charles Camberoque

    La représentation initialement prévue le 7 juillet se jouera le lendemain en raison de la pluie. Parmi le public se trouve une invitée de marque, en la personne de Matilde Néruda (1912-1985), l'épouse du poète Chilien (photo ci-dessus). S'en suivra à l'issue du spectacle, une rencontre débat en sa présence.murietta 3.jpg

    Il existe un enregistrement de ce spectacle qui a été mis en ligne sur Youtube. 

    https://www.youtube.com/watch?v=a99fp76-_EU

    Je remercie vivement le photographe Charles Camberoque pour ses photographies prises entre 1970 et 1980 au Festival de Carcassonne. Elle furent l'objet d'une exposition en juillet 1980 dans le foyer du Théâtre municipal. Plusieurs de ces clichés illustrèrent le magazine l'Avant-Scène. Toute utilisation est soumise à des droits photographiques et ne peut se faire sans le consentement de l'auteur.

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  • Le voyage de l'agronome anglais Arthur Young à Carcassonne en 1787

    Ce n'est pas n'importe quel sujet de la couronne britannique qui effectue durant l'été 1787, un voyage d'étude en notre Languedoc. La renommée d'Arthur Young (1741-1820) en matière d'agronomie et d'agriculture dépasse les frontières. De son passage dans la région, il nous a légué en 1794 un ouvrage en langue anglaise intitulé : Travels during the years 1787, 1788 et 1789 of the Kingdom of France. 

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    © National Gallery

    Arthur Young par John Russel

    Venant de Béziers, Arthur Young se dirige vers Carcassonne le 31 juillet 1787 et l'atteindra le lendemain.

    "Traverser une montagne par une route misérable, et atteindre Beg de Rieux, qui partage avec Carcassonne, le tissu de Londrins, pour le commerce du Levant. Traverser beaucoup de déchets à Béziers. J'ai rencontré aujourd'hui un exemple d'ignorance chez un marchand français bien habillé, cela m'a surpris. Il m'avait affligé de nombreuses questions insensées, puis il m'avait demandé pour la troisième ou la quatrième fois de quel pays j’étais. Je lui ai dit que j'étais un Chinois. À quelle distance se trouve ce pays ? J'ai répondu, 200 lieux. "Dieu cents lieues ! Diable ! C'est un grand chemin !" L'autre jour, un Français m'a demandé, après lui avoir dit que j'étais Anglais, si nous avions des arbres en Angleterre ? J'ai répondu, que nous en avions quelques-uns. Avions-nous des rivières ? Oh, pas du tout. "Ah, ma foi c'est bien triste !" Cette incroyable ignorance, comparée à la connaissance universellement disséminée en Angleterre, doit être attribuée, comme tout le reste, au gouvernement."

    La perfide Albion ne s'est-elle jamais positionnée au-dessus des Français ? Deux années après le début de la Révolution française, il tombe à-propos de critiquer le changement de régime dans un pays que l'on tient pour ennemi héréditaire depuis le Moyen-âge. Le 1er août 1787, Young arrive enfin à Carcassonne.

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    "Quitter Béziers, pour aller à Capestang par la montagne percée. Traverser le canal du Languedoc plusieurs fois; et sur beaucoup de déchets à Pleraville. Les Pyrénées maintenant à gauche, et leurs racines à quelques lieues. A Carcassonne ils m'ont porté à une fontaine d'eau boueuse, et à une porte de la caserne; mais j'étais plus heureux de voir plusieurs grandes maisons de fabricants, qui montraient la richesse.

     A cette époque, la renommée de l'actuelle capitale audoise dépasse les frontières grâce à son production de draps qu'elle exporte vers le Levant. En 1698, l'Intendant Lamoignon de Basville indique que "La ville de Carcassonne n'est à proprement parler qu'une Manufacture. Tous les habitants sont occupés les uns à filer, les autres à carder, ceux-là à faire des étoffes. Demurat en 1731 précise que "Dans la ville de Carcassonne et dans toutes les paroisses du diocèse, on ne fait autre chose que de donner les façons nécessaires aux draps, ce qui occupe même le peuple dans quatre ou cinq diocèses voisins. Déjà avant la Révolution, Young avait écrit que "Carcassonne est une des places manufacturières les plus considérables en France." 

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    Carcassonne au XVIIIe siècle

    Quand il est admis que cet endroit est l'une des plus importantes villes manufacturières de France, contenant 15 000 personnes, pourtant pas une voiture d'aucune sorte, comment un Anglais dont les commodités universelles sont répandues dans son propre pays, où je crois qu'il n'y a pas une ville de 1500 personnes dans le royaume dans laquelle les chaises de poste et les chevaux ne doivent pas être pris lorsqu'on les sollicite ! Quel contraste ! Ceci confirme le fait déductible du peu de circulation sur les routes même autour de Paris. La circulation est flagrante en France. La chaleur était si grande que je laissai Mirepoix en désordre: c'était de loin le jour le plus chaud que j'aie jamais quitté. L'hémisphère semblait presque dans une flamme avec des rayons brûlants qui rendaient impossible de tourner les yeux à plusieurs degrés de l'orbe radieux qui flambait maintenant dans le ciel.

    En effet, après avoir quitté Carcassonne, Young se rendit à Mirepoix en passant par Fanjeaux et Notre-Dame de Prouille.

    "A Mirepoix, il y a un magnifique pont de sept arches plates de 64 travées, qui coûtent 1 800 000 livres; il a été douze années érigeant, et sera fini dans deux autres. Le temps pendant plusieurs jours a été aussi beau que possible, mais très chaud; aujourd'hui la chaleur était si désagréable, que je me reposai de midi à trois heures à Mirepoix; et l'a trouvé si brûlant, que c'était un effort d'aller un demi-quart de mile pour voir le pont. Les myriades de mouches étaient prêtes à me dévorer, et je pouvais difficilement supporter la moindre lumière dans la pièce."

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    Le Président de la Chambre des Communes profite également de son séjour pour faire un certain nombre d'observations sur l'agriculture de notre région. A Carcassonne, la luzerne est coupée 4 à 6 fois, selon la pluie.

    "Le sétier de blé est de 150 livres et ils ont une bonne terre six par setterée. le setterée étant ici 1024 de huit pavés, cela fait 25000 pieds; Le produit est donc de 23 boisseaux. Les récoltes extraordinaires s'élèvent à dix sétiers. La province a un caractère beaucoup plus grand pour la fertilité qu'elle ne le mérite. Monsieur Astruc en dit: «Je ne prétends point parler de blé ou de laine: ces articles sont portés dans le Languedoc à peu près au plus haut point où ils se dirigeaient. Une jolie raison pour que l'historien naturel d'une province n'en dise plus rien! A Narbonne, il y a de la bonne laine, mais la culture du blé a peu de mérite. Un autre écrivain est proche de la vérité lorsqu'il dit: «Si l'on excepte ce qu'on appelle la plaine du Languedoc, les terres basses et les basses cévenoles, le reft, qui fait la moitié de la province, est, de tous les pays que je connais, le plus ingrat et le moins fertile."

    Sources

    Notes, synthèse et recherches / Martial Andrieu

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  • L'évêque de Carcassonne intervint auprès du pape pour faire sacrer Napoléon III

    Napoléon III avait souhaité, à l'exemple de son oncle, être sacré empereur à Paris par le pape. Nous savons grâce aux archives publiées sous le pontificat de Paul VI, le fin mot de cette histoire assez rocambolesque. Dès le mois d'août 1852, Louis-Napoléon Bonaparte engagea des négociations auprès de Pie IX et envoya deux émissaires à Rome : son aide de camp, Jules Comway de Cotte, et l'abbé Louis-Gaston de Ségur, fils de la célèbre comtesse. L'un comme l'autre s'en revinrent bredouille du Saint-Siège.

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    Napoléon III

    Élu en 1846, Pie IX avait dû s'enfuir de Rome pour se réfugier à Gaète. C'est grâce à la campagne d'Italie de l'armée française qu'il put revenir dans la ville éternelle. Ce que la grande histoire n'a pas retenu c'est l'intervention en octobre 1852 de Mgr de Bonnechose, évêque de Carcassonne. Il n'obtint pas davantage de succès... Pie IX fit traîner sa réponse, tenta de l'éluder, puis opposa un "Non possumus" invoquant l'impossibilité de transporter les saintes huiles à l'étranger : "Les papes ne vont pas porter le Saint-Chrême hors de chez eux. L'exception faite pour Napoléon 1er ne sera pas renouvelée", fit savoir Pie IX.

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    Mgr de Bonnechose dans son habit de cardinal

    (1800-1883)

    L'évêque de Carcassonne revint malgré tout à la charge auprès du Saint-Père, mais celui-ci plus entêté que lui répondit :

    "Eh bien ! Qu'il vienne à Rome comme Charlemagne et nous le sacrerons."

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    Pie IX

    Napoléon III refusa cette proposition. Il eut peur du ridicule car en 1832, il avait participé avec les "Carbonari" à l'envahissement des Etats pontificaux. Il avait fait le coup de feu contre les soldats du pape. Aller à Rome serait faire jaser l'Europe entière ! D'ailleurs, Mgr de Bonnechose comprit fort bien qu'il ne fallait pas insister davantage : "Je comprends qu'il redoute les souvenirs de jeunesse qu'il a laissés à Rome. Il dit qu'il a abjuré tout cela, qu'il est un autre homme. Eh bien, qu'il le prouve..." Napoléon le petit resta droit dans ses bottes et son sacre n'eut jamais lieu. Napoléon III fit sa demande de sacre auprès de Pie IX, mais celui-ci n'était prêt à en disposer qu'à condition que l'empereur abrogeât "tout disposition contraire au concordat".

    N'oubliez pas si le cœur vous en dit de commenter les articles...

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