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Evènements - Page 9

  • L'ouverture de la route touristique Luchon-Carcassonne par les Pyrénées en 1939

    Depuis 1935, la SNCF avait rétabli la liaison touristique par autocars entre Biarritz et Luchon. Réalisant un vœu émis par les municipalités et les sociétés d’exploitation des stations thermales de l’Ariège et de l’Aude, la nouvelle ligne Luchon-Carcassonne était inaugurée le 24 juillet 1939. Cette liaison, qui fit de Carcassonne la plate-forme d’accès aux Pyrénées fut assurée en deux étapes par un service bihebdomadaire. Un mois après, la Seconde guerre mondiale éclatait... Ces excursions furent d'ailleurs interrompues à partir du 6 septembre 1939.

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    Réunis samedi 22 juillet au matin à Luchon, les journalistes, après un petit déjeuner à l’hôtel d’Angleterre, commencèrent leur périple en direction de Carcassonne. Ce sont les cars Sors-Redonnet de Luchon qui embarquèrent tout ce beau monde.

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    "De Luchon, coquette ville d’eau à 630 mètres d’altitude - la Reine des Pyrénées, comme l’appellent les guides - un funiculaire conduit à Superbagnères. L’excursion en vaut la peine : à 1800 mètres, une solitude grandiose, le silence majestueux des grandes altitudes…

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    Au sortir de Luchon, on descend la grande vallée de la Pique, puis on traverse la Garonne, dont on suit quelque temps la rive droite. Mais, dès Fronsac, on quitte la vallée pour s’élever graduellement par une impressionnante montée en lacets, jusqu’au col des Ares, d’où l’on aperçoit au sud, les cimes neigeuses qui marquent la frontière espagnole.

    On se laisse ensuite mollement descendre vers la vallée du Job pour remonter cette fois à travers bois, vers le col d’Aspet, qui atteint 1074 mètres d’altitude. Et voici Saint-Girons, capitale du Conserans, au triple confluent du Salas, du Les et du Baup. Calme Conserans aux frais paysages de pelouses vertes et d’eaux vives, véritable oasis de sérénité dans le chaos tourmenté des Pyrénées… Son ancienne capitale, Saint-Lizier, offre d’authentiques joyaux d’architecture romane, avec son cloître, son palais épiscopal et sa cathédrale où abonde le marbre, car la région en est riche.

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    Audinac-les-bains, où les voyageurs de l’autocar font halte pour déjeuner, est une calme et reposante station dont les eaux chargées en sel font merveille dans certaines caves.

    La seconde étape comporte une curiosité : les grottes de Labouiche et ses merveilles souterraines. A quelques kilomètres de là, voici Foix, dont le château célèbre, qui abrita les fastes de la Cour de Gaston Phœbus, évoque sur son socle de rocher, dans son décor sauvage, l’art d’un Gustave Doré…
    Plus loin, la traversée de l’Ariège, à Tarascon, nous transporte soudain dans un paysage nouveau et curieusement méditerranéen, bien qu’il nous faille rouler longtemps encore avant de découvrir, comme nous le ferons au-delà des Gorges de l’Aude, le panorama méditerranéen type, à quelques nuances près. Mais déjà l’on perçoit une influence maritime, dans ce bourg coloré, aux tons rudes, aux rocs pelés, aux vieilles portes d’enceintes admirablement conservées…

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    Mais c’est la journée du lendemain qui offre sans doute la large variété de panoramas et de sites, puisqu’elle conduit de près de 2000 mètres, pour le ramener au niveau de la mer ou presque, en traversant tour à tour les défilés vertigineux des gorges de l’Aude et les vallées verdoyantes que coupe la frontière espagnole à Bourg-Madame. La matinée se passe en ascensions et en descentes, aussi raides les unes que les autres. A la splendeur désolée du panorama qu’on embrasse du haut du col de Puymorens, à 1918 mètres, succède la promenade en lacets à travers la brûlante Cerdagne, puis la descente sur la vallée du Carol, avec sa fameuse tour dont le nom évoque les heures dramatiques de la guerre d’Espagne…

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    Une courte halte à Bourg-Madame pour contempler, à l’autre bout du pont international, les carabiniers espagnols, et l’on recommence une nouvelle ascension, celle de Font-Romeu, brillante station de sports d’hiver qui mérite mieux qu’un court passage. Et l’on redescend, à travers bois, vers Mont-Louis aux remparts inexpugnables qui rappellent le souvenir de Vauban.

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    Un nouveau col, celui de la Quillane, et c’est la descente, fertile en émotions, sur l’Aude et ses défilés sinueux qu’il fallut bien souvent gagner sur la montagne elle-même, à coups de mine.

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    Enfin, la vallée d’élargit, la campagne prend soudain - transformation d’autant plus saisissante après la sauvagerie du décor que l’on vient de traverser - l’aspect débonnaire des vignobles et des vergers méridionaux. Bientôt, à un détour de la route, la Cité de Carcassonne dressera ses remparts intacts au-dessus de la plaine, comme sur une enluminure des « très riches heures du duc de Berry… » (Le petit journal)

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     Ce périple inaugural se termina par une réception à la mairie de Carcassonne, avant une dernière visite de la Cité médiévale. Dans la salle des fêtes, M. Sigé (adjoint au maire) représentant le Dr Tomey reçut les nombreuses personnalités : MM. Hyvert (Président de la Société d'Etudes Scientifiques) ; Embry (Conservateur du musée) représentant le Syndicat d'Initiative en l'absence du Dr Girou; Sorel (Délégué du Touring-Club de France), Colonel Cros-Mayrevieille (Président du folklore Audois) ; Génie (Chambre de Commerce) ; Lasserre (Syndicat des hôteliers) ; Brun (Chef de gare) ; Sablayrolles (Inspecteur de la SNCF) ; Doubrère (Chef de publicité SNCF), etc.

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    Stand du Syndicat d'initiative 

    Cette manifestation avait amené à Carcassonne un très grand nombre de journaliste régionaux et nationaux qui ne tarit pas d'éloges sur la Cité médiévale. Surtout après le somptueux dîner donné à l'Hôtel de la Cité par son patron, M. Jordy. Parmi eux on put apercevoir : MM. Toulet (La dépêche) ; A. Praviel (La Garonne), Cep (La petite Gironde) ; Paul-Emile Cadilhac (L'illustration) ; Bruni (Le jour) ; Codur (Le petit Marseillais) ; Delhi-Cluzaux (Paris-Midi) ; Forestier (Paris Soir) ; Gardet (Agence Havas) ; Gouin (La France) ; Herpin (Journal des débats) ; Kuyper (Maasbode de Rotterdam) ; Lavedan (La journée industrielle) ; Mommarche (Les guides bleus) ; Perrin (La populaire) ; Pichon (L'époque) ; Georges Pernot (Le petit journal) ; Ranc (L'œuvre) ; Sangle-Ferrière (L'émancipation nationale) ; Mme Claude Sézanne (La République) ; Mme Gude (La presse américaine) ; Mme Léon (New-York Hérald) ; Mme Pernoud (L'intransigeant) ; Mme Vincent (Les pages de la femme) ; Guiter (Rummelspacher), etc.

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    La salle à manger de l'Hôtel de la Cité vers 1930

    Menu

    Filets de sole à la sauce méditerranéenne

    Poulardes du Languedoc aux Rousillous

    Foies gras du pays

    Sorbets

    Corbières, Picpoul et Blanquette de Limoux

    Tous ces convives repartirent en direction de Paris en fin de soirée avec le rapide Port-Bou-Paris. Ils emportèrent le meilleur souvenir des richesses touristiques de notre région. Leurs échos résonnèrent chez les lecteurs du monde entier, contribuant ainsi à la renommée de notre ville.

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    Hôtel de la Cité vers 1930

    Sources

    La dépêche / 24 juillet 1939

    Le petit journal

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2017

  • L'arrivée du chemin de fer à Carcassonne sur la ligne de Toulouse à Cette.

    La loi de 1842 détermina les lignes principales des chemins de fer français, mais le réseau n’était tracé que sur le papier. En 1845, on discuta sur l’importante question de savoir sir le chemin de fer de Bordeaux à Sète suivrait la vallée de l’Aude ou bien traverserait le Tarn. A cette époque, le département de l’Aude jouissait d’une bonne sphère d’influence au sein du gouvernement. Une commission fut instituée à Carcassonne, dont les membres durent faire ressortir les avantages d’un tracé suivant la vallée de l’Aude. Au mois d’août, M. Mandoul-Detroyat rendit un rapport au nom de la commission qui ne fut pas sans conséquences sur la décision finale. La loi du 21 juin 1846 concédait à la Compagnie Ezpeleta le réseau reliant la Méditerranée à l’Atlantique, passant par le département de l’Aude ; l’ordonnance du 1er juillet lui concédait l’embranchement de Castres. Hélas, le concessionnaire ne tint pas ses engagements et en 1849, la déchéance de la concession fut encourue. 

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    © Archives de Toulouse

    Inauguration de la gare Matabiau

    Fort heureusement, l’avènement de Napoléon III devait imprimer aux grands travaux publics un essor jusqu’alors jamais observé. Le Midi encore oublié fit valoir ses droits, et sa juste réclamation trouva un écho auprès de l’Empereur. La compagnie Pereire recueillit la succession en déshérence de la compagnie Ezpeleta et les travaux de la ligne Bordeaux-Cette débutèrent au début de l’année 1853. Le tracé entre Bram et Carcassonne ne sera prouvé qu'en 1854 par une administration locale qui n'acceptait pas que le chemin de fer traverse la Bastide, située entre le Canal du midi et l'Aude ; la station est donc établie au-delà du canal, éloignée aussi de plus d'un kilomètre de la Cité médiévale. Nous avions déjà vu cela lorsque les Consuls de la ville avaient refusé le passage du Canal du midi dans la ville au XVIIe siècle.

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    Locomotive de la Cie du Midi

    "Le dimanche 21 décembre 1856, une locomotive apparaissait pour la première fois à Carcassonne, et son arrivée était accueillir avec joie par la population. On venait saluer, comme un symbole de la civilisation moderne pénétrant dans la contrée, cette puissante machine où l'eau et le feu, ces redoutables ennemis de l'homme, vaincus et humiliés, célèbrent le triomphe de l'intelligence sur la force, de l'esprit sur la matière. La curiosité était aussi un attrait, beaucoup de personnes ne connaissant que de nom ce monstre de fer et d'airain, qui secoue un panache de fumée, pousse des sifflements aigus et franchit rapidement les distances, entraînant à sa suite des centaines de voyageurs étonnés. Beaucoup ignorent encore les détails du mécanisme qui produit ces merveilles et il ne sera pas hors de propos d'en donner quelques idées." (M. Dupain, professeur de mathématiques au lycée / 3 janvier 1857)

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    La ligne fut inaugurée le 2 avril 1857 sur 476 kilomètres. La traversée du département de l’Aude fut triomphale pour le convoi d’honneur. En traînés par deux locomotives, les wagons circulaient au milieu d’une foule en liesse ayant mis ses habits de fête. Les Audois avaient tant redouté que le chemin de fer ne passe pas chez eux, qu’ils lui firent une véritable ovation. Les maires, les conseillers municipaux saluaient au passage la vapeur qui s’échappait des locomotives. Les drapeaux et les banderoles fouettés par le vent se mêlaient aux musiques et aux salves tirées depuis les gares. De toutes les gares entre Toulouse et Cette, celle de Carcassonne est la plus avantageusement située.

    "Le 2 et le 3 avril, elle avait provisoirement revêtu la plus coquette parure. Des panneaux peints en détrempe simulait les parties de la construction non encore terminées. Des mâts vénitiens aux brillants gonfanons et des faisceaux de drapeaux tricolores formaient les avenues ou décoraient les quatre faces de l’édifice que festonnaient d’immenses guirlandes de feulillage. La grande salle d’attente des voyageurs était intérieurement ornée avec le meilleur goût. De brillantes tentures, des massifs de feuillage et de fleurs lui donnaient un aspect d’un charme indescriptible. M. Endrès, ingénieur ordinaire de la section, et les ingénieurs sous ses ordres, à qui était due cette gracieuse décoration, ont droit aux éloges les plus justement mérités."

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    © histoire-image.org

    Le train d'honneur parti de Cette, entra à midi et demi dans la gare de Carcassonne, au milieu des salves de l'artillerie municipale, des sons de la musique et des acclamations de la foule jusque sur les hauteurs de Gougens. Imaginez que Gougens se trouve au-delà du plateau de Grazailles, près de l'actuel Conseil général de l'Aude. Des dames élégamment habillées s'étaient placées en avant de la gare des voyageurs. Douze minutes plus tard, le convoi se lançant dans la tranchée à l'ouest de la gare, disparut avec à son bord M. le préfet, Mgr l'Evêque et le général de la caserne. Le parcours de Carcassonne à Toulouse mit 1h40 et arriva à l'heure...

    "Les villageois émerveillés voyaient passer les voitures glissant sur le rail et le reporter Séguevesse, penché à la portière distinguait dans la plaine de Castelnaudary des groupes de femmes à genoux et en prières, dont les sifflements de la locomotive accéléraient les nombreux signes de croix. Nous avons vu un paysan naïf prendre ses sabots à la main et se livrer, en concurrence avec la vapeur, à un steeple-chase effréné, mais qui ne fut pas long. Au retour à Carcassonne dans la soirée, on servir un repas froid."

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    La gare de Carcassonne

    En 1875, la gare sera agrandie et l'on effectuera des travaux de raccordement pour la ligne de Carcassonne à Quillan.

    Sources

    Le Courrier de l'Aude / 3 et 8 avril 1857

    Le rail en France / François et Maguy Palau / Tome 1

    Recherches et synthèse / Martial Andrieu

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2017

  • La visite de S.A.R Monseigneur le duc d'Angoulême, neveu de Louis XVIII

    Privé de courrier de Paris entre le 29 mars et le 19 avril 1814, le département de l'Aude se trouva dans une situation politique difficile. Nul avis de ce qui s'était passé dans la capitale ; l'information ne circulait que par voie publique. La ville de Narbonne était devenue le quartier général du maréchal duc d'Albuféra et de son armée. Après le maréchal duc de Dalmatie s'était retiré à Castelnaudary avec ses troupes. Une proclamation adressée par le maréchal Suchet à ses soldats, le 18 avril, un ordre du jour donné le lendemain par le maréchal Soult, manifestèrent leur adhésion au rétablissement de S.M le roi Louis XVIII sur le trône des Capétiens. Le 20 avril, toutes les autorités, tous les fonctionnaires de Carcassonne se réunirent pour exprimer le même sentiment. Par un mouvement spontané toute la ville fut illuminée. L'avènement de Louis XVIII le 6 avril mettait fin au règne de l'empereur Napoléon Ier. Cette information mettra deux semaines à arriver à Carcassonne.

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    Louis-Antoine d'Artois, duc d'Angoulême

    (1775-1844)

    Informé que Mgr le duc d'Angoulême devait se rendre de Bordeaux à Toulouse, le préfet de l'Aude s'empressa d'aller dans cette dernière ville, afin de présenter à S.A.R l'hommage de son respect et de sa fidélité. Il fut suivi de plusieurs membres du Conseil général et des conseillers municipaux des villes du département. Le Baron Trouvé, préfet de l'Aude sous le Second Empire et dont l'épouse avait été reçue par Joséphine en 1811 au château de la Malmaison, ne mit pas beaucoup de temps à tourner sa veste.

    Le prince arriva le 27 avril 1814 et ce jour-là, le préfet de l'Aude eut l'honneur de dîner avec S.G Lord Wellington. Admis le lendemain avec les députations à l'audience du prince, le préfet lui adressa le discours suivant :

    J'ai l'honneur de présenter à Vôtre Altesse Royale, les députations du Conseil général et des conseils municipaux des villes du département de l'Aude. Nos vœux les plus ardents, le besoin de nos cœurs sont aussi de posséder un prince si cher à tous les Français ; n'osant encore, malgré la proximité de Toulouse, nous livrer à cette flatteuse espérance, nous venons déposer aux pieds de V.A.R l'expression de notre joie, l'hommage de notre respect et de notre fidélité. Oui, Monseigneur, tous mes administrés ont vu, avec autant d'attendrissement que d'enthousiasme, les descendants de Saint-Louis remonter au trône de leurs ancêtres, à ce trône illustre par la bonté paternelle de Louis XIII, par la loyauté chevaleresque de François Ier, par l'héroïque et touchante popularité de Henri IV. 

    Au milieu de la grande réconciliation de tous les peuples qui ne rivalisent plus que d'amour pour la paix et pour le bonheur du monde, qu'il m'est doux, Monseigneur, d'être auprès de V.A.R, l'interprète des sentiments d'une nombreuse et intéressante population, heureux moi-même, si l'époux de l'auguste fille de Louis XVI daigne agréer le serment que je fais de servir avec un dévouement sans bornes S.M le roi Louis XVIII et la famille des Bourbons.

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    Louis XVIII

    MM. Pech-Palajanel, maire de Carcassonne, et Galabert, maire de Castelnaudary, eurent l'honneur de complimenter aussi S.A.R qui témoigna sa satisfaction pour les sentiments qu'on venait de lui exprimer, et promit d'en rendre compte au roi. Le lendemain, le préfet fut informé que Mgr duc d'Angoulême était disposé à venir dans le département de l'Aude pour y passer la revue des armées. Le soir, au cercle du prince, il en obtint la certitude de S.A.R elle-même.

    Le 3 mai 1814, le duc d'Angoulême arriva à une heure de l'après-midi à Castelnaudary, accompagné seulement de MM. le duc de Guiche et le vicomte d'Escars, ses aides-de-camp. Il trouva les maréchaux Suchet et Soult, passa les troupes en revue et fut complimentés par les autorités. A une lieue de la ville, il rejoignit le préfet avec la garde d'honneur à cheval. Celui-ci s'adressa au prince :

    Les vœux du département de l'Aude sont comblés. V.A.R nous accorde une faveur à laquelle nous aspirions. Depuis près de 40 ans, ce pays n'avait été visité par aucun membre de la famille régnante ; aucun ne s'était arrêté dans la ville de Carcassonne, depuis le séjour que daigna y faire l'auguste prince qui, par de si longues et si rudes épreuves, mûri dans l'art de gouverner, promet à la France un règne de paix, de justice et de bonheur. 

    Le bonheur ! Déjà votre présence en est le gage ; elle est l'aurore des jours fortunés qui vont prospères, longtemps négligés, et dont V.A.R vient réparer l'abandon. Monseigneur, le département de l'Aude vous offre une physionomie particulière et peut-être unique en France. Il n'a point été ensanglanté par les fureurs de l'anarchie ; il n'a point été la proie des ressentiments, des réactions et de, vengeances ; il était impatient de faire éclater son respect, sa fidélité, son amour pour la famille des Bourbons. Si la ville de Castelnaudary a jouit la première de la vue d'un prince qui fait l'espoir, qui fera les délices de la patrie, les villes de Carcassonne et de Narbonne brûlent aussi de partager cette heureuse jouissance et de prouver leur enthousiasme et leur dévouement à V.A.R et au souterrain que la main de la providence a replacé sur le trône de Saint-Louis et de Henri IV.

    Cent coups de canons annoncèrent l'arrivée de S.A.R. Elle monta à cheval et traversa, ayant a ses côtés MM. les maréchaux Soult et Suchet, les lignes de troupes qui bordaient son passage, et qui défilèrent devant elle aux cris de "Vive le Roi !". Le maire à la tête du conseil municipal, attendait le prince à la porte dite de Toulouse (place Davilla) ; il le complimenta, lui remit les clefs de la ville, lui offrit un dais, que S.A.R refusa. Son entrée dans Carcassonne se fit à cheval ; elle fut signalée par des acclamations à chaque pas. Un arc de triomphe avait été élevé, toutes les rues, toutes les maisons étaient décorées de tapisseries, de drapeaux blancs et de guirlandes ; toutes les fenêtres étaient remplies de dames élégantes ; de toutes parts, on entendait les applaudissements et les mêmes cris longtemps prolongés de Vive le Roi, vive le duc d'Angoulême. La garde royale l'escorta et la garde nationale à pied formait la haie.

    C'est ainsi que S.A.R fut conduite à l'hôtel de la préfecture, préparé pour le recevoir. Au haut de l'escalier, la fille du préfet, à la tête des demoiselles de la ville, toutes vêtues de blanc, s'avança un bouquet de lys à la main. Le prince admit toutes les députations qui se présentèrent, et fut conduit dans le même appartement qu'avait occupé, en 1777, Le frère de Louis XVI (Louis XVIII). Après le souper, S.A.R voulut bien honorer de sa présence le bal qui était préparé à l'hôtel de ville. Le lendemain à cinq heures et demi du matin, le prince se rendit à la cathédrale  ; le clergé l'attendait à la porte avec un dais, sous lequel il fut conduit à un prie-dieu. La messe fut célébrée par M. de Laporte, évêque de Carcassonne. Le prince partit ensuite pour Narbonne avec le maréchal duc d'Albuféra.

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    © Musée des beaux-arts de Carcassonne

    Claude-Joseph Trouvé, par Roque fils

    En janvier 1815, le Baron Trouvé et son épouse sont présentés au roi et à la famille royale. Au mois de mars, retour de Napoléon de l'île de d'Elbe ; le préfet Trouvé s'entretient avec Fouché, chef de la police. Après le Cent jours mettant définitivement fin à la tentative de retour de Napoléon, le préfet est admis à Saint-Denis le 8 juillet 1814 et renvoyé à Carcassonne. Le 15 novembre 1815, le duc et la duchesse d'Angoulême font un nouveau séjour à Carcassonne et dormiront à la préfecture. Le baron Trouvé sera destitué par ordonnance royale le 5 septembre 1816.

    Sources

    Description générale et statistique du département de l'Aude / Baron Trouvé / 1818

    Souvenirs d'un octogénaire / Baron Trouvé

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