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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 52

  • L'orchestre "Les lynx", la jeunesse Carcassonnaise des années 60

    Que font les jeunes ? C’est l’un des très nombreuses questions posées par Jacques Olive dans sa chronique « Entre nous… Les jeunes » publiée chaque semaine dans l’Indépendant. « Salut les copains » ! A 17 ans, celui qui allait côtoyer plus tard Johnny Hallyday, Adamo ou encore Claude François, balançait sur le papier journal les échos de cette jeunesse en mal d’activités. Combien de rues de la gare, tous les samedis à mater les demoiselles en jupes courtes et chaussettes blanches ? Un regard, un arrêt, un bécot en cachette des parents sur la piste de bal du Païcherou. Bien cravatés et gominés, nos pères d’aujourd’hui n’avaient pas l’esprit grunge de leurs rejetons. « Retour vers le futur » de Zemmeckis et son bal des sirènes, c’était leur Païcherou du samedi soir. La guitare électrique, inaccessible objet de convoitise d’une époque d’infortune, glissait sous les doigts de jeunes rêveurs. La MJC venait d’ouvrir, face à l’église Saint-Vincent. Lieu d’aventures et de possibles, la jeunesse s’y donnait rendez-vous tous les jeudis ; elle jouait à s’inventer des héros locaux de la musique nouvelle.

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    Grabarsky, Sénégas, Grasa et Bigou

    Les Lynx, espèces en voie d’extinction, naquirent ainsi dans un quartier de la ville, près de la place Paul Valéry. Dans le quartier Pasteur, pour se soigner de l’ennui, deux jeunes copains cherchaient à imiter les sons des Chats sauvages. Encore leur fallait-il l’indispensable instrument. Lorsqu’on n’a pas les moyens de se payer une Fender, que fait-on ? On en fabrique une, tiens pardi ! Passe-moi le contre-plaqué et les barrettes achetées chez Daraud, rue Courtejaire. Le manche, j’en fais mon affaire. « Dans les années 60, on se débrouillait, se souvient Jacques-Henri Bigou. Pas question de solliciter des parents, nous faisions les coups en douce. Notre ampli avait été même fabriqué en démontant les postes radio de la maison. »

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    Chez JC Grabarsky avec Jacques Olive, Robert Baby, Jacques-Henri Bigou, JP Samitier

    L’ami Jean-Claude Grabarsky, dont le grenier de la maison servit tant de fois aux tentatives d’harmonisation rythmique, prêtait également son concours aux surprises parties organisées chez lui. Nos deux compères allaient bientôt susciter des vocations auprès des autres copains du quartier. Ignorant comme eux la croche et le demi-soupir, ces musiciens de la feuille s’enhardirent avec l’arrivée de Christian Sénégas, puis de Daniel Grasa, le batteur. Quatre garçons dans le vent, pour lesquels les voisins n’avaient guère de compassion, quand depuis le garage de Bigou, frémissait le son des guitares. Fort heureusement, un autre copain pianiste et camarade de Saint-Stanislas devait apporter un peu de rigueur musicale car lui, lisait la musique. Il s’agit de Pierre Ruffié, le fils du célèbre chercheur Jacques Ruffié. 

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    A la M.J.C de Carcassonne

    Dans ce Carcassonne du milieu des années 60, la musique battait son plein. Les nombreuses fêtes de quartier associaient bien souvent les nouvelles formations de gratteurs. A Grazaille pour le feu de la Saint-Jean, sur le boulevard Marcou Teddy Rambaud faisait danser 3000 personnes, au Théâtre des Capucins, à la MJC et bien sûr, au Païcherou. Sans compter les concours de guitare électrique entre les Lynx, Les Tigers et les Stan’s. On n’oubliera pas les Anges, les Tweeters et mêmes les Blood Sucker’s au sein desquels jouait un certain Jean-Michel Signoles, le futur patron de Chipie. Alors certes tous ces groupes n’étaient pas de valeur égale, mais certains de leurs musiciens tenaient la baraque : Guy Mazières, Christian Lalanne, André Bénet, Raymond Capdevilla, Robert Baby et surtout Jean-Lou Peter à la basse. N’avait-il pas accompagné le célèbre Rocky Volcano dans ses tournées ? Il viendra apporter son aide aux Lynx.

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    Ruffié, Virgil, Grasa, Grabarsky, Bigou, Gaich

    Le premier bal de ces chats sauvages Carcassonnais allait avoir lieu à Cavanac. Comment donc transporter le matériel quand on n’a ni permis de conduire, ni véhicule ? Ce gaillard de Minou Cros nageait déjà en eau vive auprès de la sœur de Bigou ; Il possédait surtout une Ford Taunus et une remorque. Jean-Claude Grabarsky se remémore ce moment : « Lorsque nous sommes arrivés à Cavanac, le Comité des Fêtes dut nous procurer un piano. Nous n’avions pas encore le Farfisa qui nous permettra d’avoir le son des Animals. Je me souviens que Pierre Ruffié était en colère parce que l’instrument était tout désaccordé".

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    » Le véritable succès, la renommée n’allait pas tarder pas à venir… « On s’est aperçu que le Païcherou faisait passer des orchestres traditionnels avec du musette. Nous avons proposé à Roger Quintilla, de jouer chez lui notre musique. Pensant sans doute que nous ferions un bide, ils n’a pas souhaité prendre à son compte les entrées, juste le bar. Mal lui en a pris ! Ce soir là toute la jeunesse Carcassonnaise s’est donnée rendez-vous au Païch ; ce fut de la folie. Aussi, le lendemain Quintilla a voulu absolument s’occuper des entrées. Nous venions d’entrer dans la cour des grands, souligne Jean-Claude. »  Ceci fera dire à Roger Quintilla : « Vous détenez le record d’entrée, mieux que Coll ». Voilà une sentence qui, nous le verrons, ne sera pas sans conséquences. 

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    A partir de 1968, le pianiste Pierre Ruffié quittait les Lynx pour entrer à la faculté. Il leur fallait trouver un remplaçant qu’ils allaient débaucher d’un petit groupe, « Les Black Widows », un soir au théâtre municipal. Son nom : Paul Escourrou. Popo, fils d’un entrepreneur en bâtiment de la ville avait appris la musique chez Madame Raynaud-Millet, place Marcou à la Cité. Autre recrutement de luxe, celui du chanteur Virgil qui fera plus tard le bonheur de René Coll. Nous nommerons également Michel Gaich (Basse), Gérard Moulis (Saxo), Maurice Mouisset (Trompette) et son remplaçant Francis Tedesco. A cette époque, le groupe prenait de l’ampleur et s’orientait vers d’autres styles : La soul et le Rythm and blues. A grand frais, un orgue Hammond fut acquis et transporté grâce à un fourgon vendu par Quintilla. Jean-Claude Grabarsky, le grand argentier, signale que les trois-quart des cachets passaient dans l’achat de matériel. Quant à Paul Escourrou, il se souvient qu’il gagnait en quatre week-end, le salaire d’un ouvrier qualifié faisant les 48 heures chez son père. 

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    L’année suivante, M. Marty venait d’acheter l’ancien cinéma Le Paris. Tous les sièges avaient été enlevés afin d’y organiser un bal, et les Lynx devaient assurer la partie musicale. "Comme des idiots, s’exclame Jean-Claude, nous avions négocié des cachets forfaitaires. Il y a eu tellement de monde que personne ne put danser et l’ensemble de la recette alla à l’organisateur. Ce n’est pas tout… Des jeunes que nous connaissions vinrent nous informer que le bal au Païcherou avec René Coll était quasiment vide."

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    Le moment le plus attendu c’était les slows. La piste était envahie. Quand le rythme reprenait, elle se vidait aussi sec.

    Le lendemain, nous recevions un appel du boss. René Coll nous proposa de « s’occuper de nous. Le 6 avril 1969, il nous organisa un déplacement à Biarritz avec deux autres groupes N’abonnais, les Diabolic system et les Wood lose. C’est à partir de là que nous sommes allés jouer dans les boites de nuit.  Au dancing de La Franqui et surtout au Ranch de Mirepoix ; les jeunes nous suivaient ! » 

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    Les lynx avec Jean-Loup Peters au Païchérou

    Au mois de juin, Johnny Hallyday passe dans l’émission de Guy Lux, Le palmarès des chansons. C’est la première fois que l’on entend un titre inconnu qui va faire un tabac : « Que je t’aime ». Jean-Claude Grabarsky saisit alors son magnétophone, écrit la grille de la chanson pour le groupe qui répète le soir même. Le lendemain, au Païcherou, les Carcassonnais seront les premiers à entendre « Que je t’aime » interprété par Virgil. « Ce fut du délire sur la piste, s’exclame Paul Escourrou ».

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    René Coll et les Lynx

    Le 21 juillet 1969, les lynx donnent un concert à Arcambal près de Cahors. Sur une vieille charrette ! « A l’époque nous dormions chez l’habitant, raconte Paul Escourrou. Ces gens n’avaient pas la télévision mais nous ne voulions pas rater le premier pas de l’homme sur la lune. Nous avons donc loué discrètement un hôtel. A trois heures du matin, tout le groupe a pu voir les images en direct de Neil Armstrong sur la lune. Inoubliable ! »

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    En revenant de Canet, ce 14 juillet 1969, un véhicule s’arrête à leur portée. L’homme à l’intérieur leur propose de discuter. Il s’agissait de Patty, le patron de La Casa située dans la station des Deux Alpes. L’hiver suivant, les Lynx allèrent jouer dans cette station de ski.

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    Il y connurent Michel Gaillard qui les invita ensuite à se produite à Courchevel, au Top Hat Morrisson à Madrid puis l’été d’après à Cannes. Un mois sur la croisette au Play Girl payés 3000 francs chacun.

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    Le Play Girl à Cannes en septembre 1970. Louis Forner à l'orgue qui avait remplacé Paul Escourrou. Tedesco à la trompette et Moulis au saxophone.

    « En ce mois de septembre 1970, nous faisions deux sets par jour dans cette discothèque face à celle de Régine, se rappelle J-H Bigou. Un soir, nous vîmes Ringo Star descendre de sa belle rolls-royce. Il entra au Play Girl pendant que Daniel Grasa chantait du Joe Cocker. Il s’avança vers le podium avec son verre en main. Dommage que nous n’ayons pas pu immortaliser cet instant. »

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    Au Top hat Morrisson à Madrid 

    L’aventure des Lynx s’est achevée durant l’année 1970. Virgil avait quitté depuis plusieurs mois le groupe, pour l’orchestre Paul Selmer où il était mieux rémunéré. Il fera la carrière qu’on lui connaît chez René Coll. Chacun partit ensuite de son côté, jusqu’à cette soirée de 2006 à la Fiesta Bodéga de Nobert Serres. Invité pour un anniversaire sans plus de précisions, Paul Escourrou eut la grande surprise de retrouver presque tous ses anciens amis. Et tout se finit bien sûr en chansons.

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    Un grand merci à Paul Escourrou, JC Grabarsky, J-H Bigou, Daniel Grasa et Jacques Olive pour avoir accepté de me confier leurs souvenirs avec autant de gentillesse

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  • Les chevaliers de la Désœuvrance, d'Honoré de Balzac à Carcassonne...

    Avant la Révolution nul ne pouvait aller chercher sa fiancée au-delà du Pont vieux sans avoir, au préalable, indemnisé les jeunes gens de ce faubourg de la perte qu’ils allaient faire. Cette indemnité une fois payée vous donnait le droit d’aller fringuer, c’est-à-dire fréquenter des filles, à la Barbacane et à la Cité. La Trivalle était donc un lieu consacré par l’usage, elle était une limite qui ne pouvait se franchir qu’au son de quelques pistoles. En 1780, de jeunes et nobles officiers du régiment de Vermandois tenaient garnison à Carcassonne. Pensant que les filles de la Trivalle étaient gens taillable et corvéable à merci, franchirent un jour la zone sans payer le droit et firent admirer, dans la large rue Trivalle, leurs moustaches et leurs éperons. Injonction de payer d’une part, refus de l’autre ; les officiers voulurent s’affranchir de cet ordre arbitraire.

    Les jeunes gens de la Trivalle plantèrent à l’extrémité du pont un des leurs, qui, bâton à la main, barra le passage aux galants. Ces derniers tentèrent de forcer la barricade, mais le colosse la défendit si bien qu’il blessa les plus hardis. Sans l’intervention du colonel et du premier consul, l’issue aurait pu devenir sanglante. Quel colosse avait pu ainsi s’opposer à toute une armée ? C’était un jeune homme de 18 ans, ratineur de draps de son état, futur dignitaire de l’Empire : Le général Gros. Cet illustre militaire est un enfant du pays ; il a été l’un des plus fameux soldats de Napoléon 1er. Il a combattu à Eylau et fut blessé à de nombreuses reprises avec les grenadiers de la Garde à cheval. Gros savait à peine lire et parlait mal le français. « C’est à coup de sabre qu’il parle bien à l’ennemi, disait de lui Napoléon. » A 15 ans, il se mouchait encore avec la manche.

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    Portrait du général Jean-Louis Gros

    Au début de la Restauration, quelques jeunes gens, retirés du service, voulurent rééditer le tribut en question et donnèrent, sous le nom de Désœuvrance, bien du fil à retordre aux régiments en garnison à Carcassonne. Ce tribut est fort heureusement tombé en désuétude, mais il alla de pair avec les querelles entre habitants de la Trivalle et militaires à propos des jeunes filles délaissées. C’est l’histoire des duels…

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    Le tir Vidal sur des terrains en friche, face à la statue Barbès

    Il y avait dans le collège un professeur spécial qui apprenait, disait-il, à tuer proprement. Le terrain vague qui se trouvait au sud de l’emplacement de la statue Barbès était une école. Une bicoque en planches la figurait, une cible l’ornementait, partout des fusils et des mousquets. C’était le tir Vidal. Cet homme, surnommé Parpaillol, était très adroit au pistolet. A dix pas, il faisait sauter une pipe de la bouche d’un fumeur, et la confiance qu’il inspirait était si grande que l'on voyait des amis vouloir lui servir de cible. Un Carcassonnais raconte que c’est chez lui qu’il connut Vassal, vers 1830 :

    « Béteille et Daressy, deux noms connus en escrime, complétaient notre éducation des armes et nous mettaient à même, sans nous rendre querelleurs, de ne jamais refuser une partie d’honneur ; je dis honneur, parce que je suis convaincu que les duels ont contribué à la civilisation et au respect des convenances. Ce fut le cas de Marcou. Au début de sa carrière, il se mesura avec un autre journaliste, à l’épée, et le blessa. Un peu plus tard, vers 1848, il cassa la jambe à un adversaire qui lui faisait des misères. 

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    En 1825, le 17e régiment de chasseurs tenait garnison à Carcassonne. Alors régnait aussi en maîtresse dans la ville cette Désœuvrance qui n’ayant pu, grâce à la paix, jeter son ardeur sur les champs de bataille, s’entretenait la main par des duels. C’étaient des rencontres journalières avec les maîtres ou prévôts dudit régiment et toujours nos compatriotes avaient le dessus ; de là, cette réputation à l’adresse des Carcassonnais, d’avoir mauvaise tête et bon poignet. L’oeil faisait aussi son office, comme vous allez le voir. Parmi les jeunes gens de la Désœuvrance se faisait remarquer un officier licencié, nommé Vassal, celui-là même que j’avais remarqué chez Vidal. Il était beau garçon, généreux, plein de qualités et n’avait d’autres défauts que ceux d’aimer bien sa famille et de faire sauter au tir le grenadier douze fois sur douze. Un brillant officier du 17e, le capitaine-adjudant-major de Cernay, issu d’une aristocratique famille du Nord, fit la cour à la sœur aînée de Vassal et la rendit mère. Désespoir des parents, intervention de Vassal, arrangement impossible, duel, duel au pistolet. Le capitaine était de première force à cette arme. Le lieu du combat fut l’Île, alors en friche et plantée seulement d’arbres séculaires. Le sort favorisa de Cernay qui tira le premier, Vassal eut son chapeau emporté par la balle.

    • Capitaine, cria Vassal, sans être ému voulez-vous épouser ma sœur ?
    • Non, répondit le capitaine.
    • Voyez-vous cette feuille de platane, reprit Vassal, elle va tomber sous ma balle. Voulez-vous épouser ma sœur ?
    • Non
    • Alors vous êtes mort, mugit Vassal en prenant un autre pistolet des mains d’un témoin, et le malheureux de Cernay tomba foudroyé par une balle en plein front.

    Ce duel fit grand bruit et occasionna beaucoup de rencontres, on fut obligé de faire partir le régiment dont la Désœuvrance décimait les officiers.

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    « Les chevaliers de la Désœuvrance » se retrouvent dans le roman de Balzac La Rabouilleuse. L’auteur évoque le cas de jeunes désœuvrés dont la déchéance est le fruit de la Révolution et des guerres bonapartistes. En 1816, après la fin de l’Empire, ces jeunes oisifs formèrent une bande réalisant des farces plus ou moins douteuses. A Carcassonne, cette Désœuvrance exista donc et amena dans la ville bien des tracas avec les militaires. Il n’y a rien d’extraordinaire à ce qu’un ancien bonapartiste ait exécuté un aristocrate au pistolet. C’est l’absence de perspectives et de valeurs qui entraînaient ces gens vers « la somnolence sociale », telle que la définit Honoré de Balzac. Les époques changent, les mœurs demeurent.

  • Les fourches patibulaires de Carcassonne, lieu de supplice

    Connaissez-vous les Fourches patibulaires ? C’est pourtant à cet endroit qu’au Moyen-âge et même après, les condamnés à mort terminaient leur existence. Regardons d’abord l’étymologie du mot « patibulaire » ; il provient du latin « patibulum » qui signifie croix, potence ou encore perche. Pourquoi donc les fourches, me direz-vous ? L’origine du terme est fort ancienne ; elle date de l’époque romaine. Après avoir dépouillé le condamné à mort de tous ses habits, on lui faisait passer la tête dans une fourche, et son corps attaché au même morceau de bois était battu à coup de verges jusqu'à ce que mort s’ensuive. Au fil du temps, la pratique s’humanisa davantage. A la sortie des villes et en bordure de la route afin que tout le monde puisse les voir, trois piliers appelés fourches encadraient un gibet. Le corps des condamnés, après avoir été pendus, demeurait ainsi pendant des jours jusqu’à que les corneilles n’en fassent leur affaire.

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    Les fourches patibulaires de Kergroadez (Finistère)

    A Carcassonne, les fourches patibulaires se trouvaient à la sortie de la ville sur la route de Montréal. Exactement, face à la gendarmerie située dans le quartier Saint-Jacques. De l’autre côté de la chaussée, sur la colline on avait installé la fameuse potence. A cet endroit a été construit au XIXe siècle, une propriété arborée appelée « La Justice » appartenant au chirurgien Héran. En fait, tout ce coin a été dénommé ainsi. Le parc au matériel de la mairie c’est l’ancienne caserne de la Justice. Il y avait également la croix de la Justice en bordure de cette route. Ce s’explique aisément par la présence des anciennes fourches patibulaires, aujourd’hui disparues. Nous avons recherché et trouvé dans la Revue historique, scientifique et littéraire du département du Tarn parue en 1895, un témoignage de l’utilisation  de ce lieu dans notre ville.

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    © B.N.F

    Il y avait à Lavaur dans le Tarn, au cours de la seconde moitié du XVI siècle, un notaire nommé Jean de Avinhone. Il ne se gênait pas pour raturer et falsifier des actes pour le compte de certains de ses clients, en contre-partie de pièces de monnaie sonnantes et trébuchantes. Bien mal acquis ne profite jamais et notre notaire, dénoncé, fut arrêté en 1463. Incarcéré au château de Lavaur, son procès ne dura pas longtemps. Le juge Arnaud de Ripparic lui infligea une amende de dix livres tournois au profit du trésor du Comte de Candale et de Lavaur. Ses livres furent saisis et on lui interdit la pratique du notariat. Il fut condamné également au pilori pendant son jugement. Après cette sentence, l’ancien notaire se trouva oisif et démuni. Il alla reprendre néanmoins ses activités de l’autre côté du l’Agout, à Saint-Georges-des-Marès, pensant ne plus être dans la juridiction de Candale. Le Sénéchal de Carcassonne veillait. Lors de l’une de ses incursions à Lavaur, le notaire fut pris par un sergent royal, amené à Carcassonne et emprisonné. Sa récidive lui fut fatale et quelques jours après son cadavre se balançait aux au centre des fourches patibulaires de la Justice. Son chien, son seul et dernier ami, demeura près de huit jours près du gibet, aboyant et hurlant à la mort.

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    Voici ce que l'on pouvait voir depuis la route de Montréal, comme à Nîmes

    Quand vous passerez par la route de Montréal, actuellement avenue Henri Gout, levez donc les yeux vers la colline. On ne sait jamais si le spectre de l’un de ces condamnés ne s’y promène pas la nuit….

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