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Patrimoine en danger

  • Affaire Saint-Vincent : ITE MISSA EST ?

    Faisant suite à l’affaire du projet immersif, voté au cours du dernier conseil municipal, on nous a envoyé une note de François Amigues, Conservateur des Antiquités et Objets d’art de l’Aude, en date du 26 mars dernier. Adressée au préfet de région ainsi qu’à l’évêque de l’Aude, elle définit la position officielle du Conservateur quant à ce son et lumière à l’intérieur de l’église. Veuillez en prendre lecture ci-dessous.

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    Une affaire fait actuellement grand bruit à Carcassonne, c’est le projet de son et lumière à l’église Saint-Vincent. J’en ai été averti que par ouï-dire, mais pas officiellement. Si j’interviens à ce sujet, c’est que mes fonctions de Conservateur des Antiquités et Objets d’Art de l’Aude m’obligent à prendre position au sujet de la sécurité des oeuvres d’art que contient cet édifice.

    Il faut avant tout rappeler que si ces oeuvres sont propriété de la commune, dans la mesure où elles sont protégées au titre des Monuments historiques (Classées ou inscrites MH), elles font alors partie du patrimoine national et l’administration des MH doit veiller sur elles, en tant que « trésor national ». Le conservateur que je suis et les deux collègues « conservateurs délégués » sommes nommés pour cela.

    Le projet dont il est question présente un réel danger en particulier pour toutes les oeuvres d’art peintes, dont les tableaux du célèbre peintre carcassonnais, Jacques Gamelin. D’après ce que l’on sait du projet, dont on se garde de donner les détails, exposer ces oeuvres pendant dix ans et quasiment sept jours tout au long de l’année, la projection de brumes (brouillards, projetés par des brumisateurs et des fumigènes), tout cela est néfaste pour les oeuvres exposées. Ces oeuvres sont affectées au culte catholique et doivent donc rester à Saint-Vincent. On ne peut les déplacer.

    Il est donc assez ahurissant qu’il ne soit pas venu à l’esprit des concepteurs cette notion de protection des oeuvres d’art. Notre service ne peut rien faire d’autre que d’alerter les autorités sur l’extrême danger dans lequel on va placer ces trésors nationaux, dont on trouvera la liste jointe. 

    Il en est de même pour l’orgue, un des plus beaux de la province. Un tel instrument est d’une grande fragilité de par même les matériaux utilisés (Bois, étain…), toutes composantes éminemment périssables et qui nécessitent un entretien et un contrôle de l’humidité et en particulier en évitant projections de produits volatiles.

    On ne peut donc pas être d’accord avec un tel projet, qui met à ce point en danger les oeuvres d’art et l’orgue, il témoigne du peu d’intérêt de ceux qui l’on conçu pour le patrimoine carcassonnais. Je mets personnellement en garde ses auteurs contre la dégradation ou le dépérissement progressif des oeuvres d’art conservées dans l’église Saint-Vincent de Carcassonne, confinée et aux vitraux aveuglés, pour une si longue période de dix ans.

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    Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2025

  • Les progrès du patrimoine historique Carcassonnais ?

    Il m'arrive certaines fois de songer qu'il vaudrait mieux que je ne sache rien, à défaut de fermer les yeux sur l'inexorable détérioration de notre patrimoine historique. En vérité, c'est plus fort que moi. Mon oeil, attiré par une porte entrouverte, ne peut s'empêcher d'encourager mon pied à en pousser l'accès. Une fois dans la place, il n'est pas rare que l'engouement se trouve ébranlé par une bien triste découverte. Pénétrons par le porche d'un ancien hôtel particulier du XVIIIe siècle situé dans la rue Victor Hugo n°14. Il s'agit de l'hôtel Boulhonnac, photographié par Jean-Louis Bonnet dans son livre La bastide en poche, publié en 2007.

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    Depuis la cour intérieure, on accédait par un superbe escalier aux appartements d'un riche marchand drapier. Monsieur Bonnet indique qu'il date du XVIIe siècle.

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    Voici donc l'escalier photographié en 2007, mais depuis... Depuis des squatters sont passés par là. Le derrière d'une maison de la rue Tomey donnant dans la cour menace de s'effondrer ; la ville a dû prendre un arrêté de péril imminent à l'encontre du propriétaire. La commune a acquis l'ancien hôtel particulier.

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    Voici le résultat en 2025, soit 18 ans après. Les entrées des trois grands arcs ouvrant sur l'escalier ont été murés avec des briques. On vient d'installer des tirants afin que le mur d'en face ne s'écroule pas. Que fait donc la commune de l'ancien hôtel particulier, à deux pas de la place Carnot ? Ce n'est hélas pas un cas isolé à l'intérieur d'une bastide classée en secteur sauvegardé depuis 1995.

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  • Que devient le plus grand mausolée romain découvert en France ?

    Au début de l'année 2008, lors d'un sondage archéologique préventif sur un terrain de 2ha situé sur le hameau de Montredon destiné à être transformé en zone pavillonnaire, les chercheurs firent une extraordinaire découverte. Il s'agit de l'unique mausolée de l'Empire romain en grand appareil (16m2) découvert en Gaule jusqu'à aujourd'hui. Selon l'INRAP (Institut National de Recherches Archéologiques Préventives), il aurait été édifié pour servir de sépulture au premier colon envoyé par Rome pour administrer Carcassonne entre 50 et 40 avant J-C. La pierre verticale servait à obstruer l'entrée du temple.

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    Il ne s'agit pas seulement d'un mausolée, mais aussi d'une voie romaine ainsi que des vestiges d'une villa. On construisit tout autour un lotissement en écrasant la voie romaine sur le site fouillé par l'INRAP. Le mausolée fut conservé, mais enterré afin de le préserver le temps que la ville ait un projet pour lui. La parcelle devint communale et fut gelée en 2012 afin qu'aucune construction ne puisse s'y élever. Depuis quinze ans, le plus grand mausolée romain découvert en France dort sous terre et tout le monde semble l'avoir oublié. Nous avons voulu savoir ce que devenait le champ, mais sans plan nous eûmes peine à le retrouver. Usant d'artifices en comparant des photographies, nous sommes parvenus à le localiser précisément au moyen d'images satellites. 

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    En 2025, sur cette parcelle on observe que le champ est creusé par les sillons d'une charrue. C'est très commode pour conserver un site archéologique que l'on dit préserver. Si le terrain est communal, comment se fait-il qu'il soit travaillé ? La ville l'a t-elle loué à quelque agriculteur, ou bien l'a-t-elle vendu ? En tous cas, il semble qu'elle n'ait cure d'un trésor archéologique dont personne ne sait plus vraiment où il se situe.

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    Le champ est à l'état de labour actuellement. Il est grand temps de donner un musée archéologique à Carcassonne, précisément sur cette parcelle en y intégrant le mausolée, sans le déplacer. Je crains fort, hélas, que cela n'intéresse pas nos décideurs. Ils préfèrent céder les parcelles à des promoteurs de logements sociaux ou de centres commerciaux, quitte à détruire les vestiges de notre civilisation.

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