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Bâtiments privés - Page 5

  • L'histoire d'un immeuble oublié, 52 rue de la République

    Située au cœur du Carron de Montlaur dessiné sur le plan de Bonnelevay en 1729, se trouvait dans la rue Sainte-Eulalie la maison du Sieur Raymond Montlaur, marchand fabricant. A cette époque, point de rue de la République bien évidemment, mais une artère qui changera d’appellation en fonction des régimes politiques : Lafayette, Sainte-Lucie puis République à paris de 1870. Intéressons-nous au n°52 (autrefois, n°50) dans lequel depuis la première moitié du XIXe siècle, un établissement de bains d’abord dénommé « Bains Montlaur » offrait toutes les commodités modernes. Sur le recensement de 1851, un certain Jacques Dardé (1791-1862), baigneur de son état, gérait à cet endroit les Bains Sainte-Lucie. On y prend des douches en lance, en pluie ou en lames, des fumigations, des bains vapeurs et des bains russes.

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    Cet immeuble accueille à ce moment-là le premier musée des Beaux-arts de la ville, initié par la Société des Arts et des Sciences de Carcassonne qui, bien qu’organisée en 1836, venait tout juste d’être officialisée. Ouvert au public tous les dimanches et jours de fête, visible tous les jours pour les étrangers, il expose tableaux, dessins, aquarelles, gravures, bas-reliefs, plâtres, mosaïques, statues, bustes, chapiteaux, tombeaux, urnes, vases, armures, monnaies, etc. Au total, pas de moins de 181 tableaux ou dessins y sont conservés.

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    © Famille Bru-Millet / Généanet

    Le docteur Jacques Jean Baptiste Carbou, Chevalier de la Légion d'honneur en 1928

    En 1874, l’immeuble est reconstruit à neuf et mis en vente avec ses magasins, remises, écuries, son grand jardin et son établissement de bains. Il revient dans les giron de la famille Salières. Paul Narcisse (1818-1908), artiste peintre, y réside ; il y réalisera le portrait de la famille Carbou dont le père Jacques Jean Baptiste (1857-1939), médecin chef des hôpitaux de Carcassonne, a repris l’établissement des bains. Narcisse Salières n’est autre que son oncle ; Antoinette (1822-1886), la mère de Jacques Jean Baptiste Carbou, est la sœur du peintre. L’immeuble des Carbou abrite également un autre artiste de grand talent en la personne de Jean Jalabert (1815-1900), conservateur du Musée des Beaux-arts.

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    © Musée des Beaux-arts

    Paul Carbou à l'âge de 5 ans par Salières

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    © Famille Bru-Millet / Généanet

    Paul Carbou à l'âge de 5 ans en photographie

    Le docteur Carbou fait procéder en 1903 à de nouveaux aménagements dans le but de moderniser l’établissement.

    « Nous savons en effet, que les Bains Sainte-Lucie possèdent un jardin ombragé et charmant, sur lequel donnent toutes les cabines et un appareil hydrothérapique des plus complets. Une partie des loges, dont l’intérieur est entièrement refait de frais, sont meublées d’une jolie baignoire émaillée, toute neuve, d’une glace superbe, avec étagère en marbre blanc et de deux chaises coquettes. Le vieux système de cloche d’appel est remplacé par une sonnerie électrique ; il suffit d’appuyer sur le bouton posé près de la baignoire, pour que le baigneur, M. Nouvel apparaisse pour répondre. Les anciennes baignoires en cuivre étamé, offraient un aspect peu engageant, tandis qu’aujourd’hui, ces baignoires émaillées et toutes neuves, dans leurs cabines toutes pimpantes de frais, vous invitent aux ablutions. »

    Le Bains Sainte-Lucie fermèrent leurs portes au début des années 1930. Jacques Jean Baptiste Carbou mourra neuf ans plus tard. Il est inhumé dans le caveau familial Carbou-Martrou au cimetière Saint-Vincent. Il nous semblait important en ces Journées européennes du patrimoine de signaler la présence de cet établissement oublié et de toute son histoire. On regrettera que ce blog, malgré son millier d’article rédigé depuis 2010, constituant la plus grande médiathèque numérique privée à vocation historique, n’ait bénéficié d’aucune publicité dans la presse, ni dans les annonces officielles du programme de ce week-end. Vous qui nous lisez, vous le savez.

    Sources

    Etat-civil et recensement  / ADA 11

    De Bordeaux à Toulouse... / Adolphe Laurent Joane / 1858

    Presse locale ancienne

    Cartulaire / Mahul

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  • Le lotissement du Moulin d'autan par l'architecte Henri Castella

    Le long de l’avenue du général Leclerc s’étend sur une centaine de mètres, le lotissement du Moulin d’Autan. Bien que sa dénomination ait quelque peu disparu du langage usuel, c’est ainsi que fut baptisé en 1953 cet immeuble de logements à loyers modérés. Le moulin d’autan, aujourd’hui cerné par les nombreuses maisons bâties sur la colline de la Gravette, surplombait l’ancienne R.N 113. En bordure de celle-ci, un terrain dépourvu de constructions allait, après la Seconde guerre mondiale, susciter l’intérêt des investisseurs à une époque où la France connaissait une grave crise du logement.

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    Le lotissement du Moulin d'autan, avenue Leclerc

    Le 9 décembre 1953, MM. Romersa et Reynès, respectivement présidents du C.I.L.D.A (Comité Interprofessionnel du Logement de l’Aude) et de la Société Coopérative Départementale d’H.L.M, présentaient à la presse la maquette du lotissement du Moulin d’Autan. Dans les plans du bâtiment, dressés par l’architecte Henri Castella, dont la réalisation devait être confiée à l’entreprise Deville, figurait la construction de vingt-deux maisons mitoyennes de type F4 et F5 pour deux d’entre-elles. Ce qui pourrait paraître banal de nos jours en terme de confort, offrait à ces logements, au début des années 50, toutes les commodités indispensables à la vie d’aujourd’hui : douche, cabinet de toilette, penderies et placards, chauffage à air chaud, etc. A l’intérieur des vieilles masures du quartier populaire de la Trivalle, situé de l’autre côté de l’avenue, certaines familles vivaient encore comme à la fin du XIXe siècle. C’est peu dire de l’état du logement dans cet ancien faubourg de la Cité où désormais, s’achètent à prix d’or des maisons transformées en chambre d’hôtes.

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    Financé par le Crédit Foncier de France, avec un prêt à la Caisse d’Allocations Familiales et grâce au 1000 francs par M2 subventionnés par l’état, ce projet voit le jour dès le mois de juillet 1953. Il sera renforcé par le décret du 9 août qui oblige les entreprises à participer à l’effort de construction par une contribution de 1 % de la masse salariale pour financer le logement social. La C.A.F se charge ensuite de trouver les heureux bénéficiaires parmi les familles dans le besoin rencontrant des difficultés pour se loger. Il s’agit pour elles d’accéder à la propriété en payant un loyer en fonction de leurs revenus en échelonnant l’emprunt sur cinq à dix ans. Pour exemple, un couple avec trois enfants dont le salaire n’excède pas 30 000 francs, paiera 10 000 francs de loyer, moins 7200 francs d’allocations logement, soit 2800 francs mensuels. Tout ceci exonéré d’impôts pendant vingt-cinq ans ! Le coût de chaque maison varie selon le type : 1 750 000 francs (F4) et 2 000 000 francs (F5).

    Les travaux préparatoire du terrain débutèrent le premier décembre 1953. Le terrassement s’acheva fin janvier 1954 et l’immeuble fut livré durant l’été de la même année. Henri Castella réalisa un ensemble harmonieux dans le style contemporain de l’après-guerre qui garde encore aujourd’hui toute sa valeur architecturale. Il s’entoura de l’artiste Carcassonnais Jean Camberoque qui exécuta des tuiles en céramique peinte pour la façade de chaque maison, financées par le 1% artistique. Cette obligation inscrite dans la loi du 18 mai 1951 et toujours en vigueur, est due à un Audois : le sculpteur René Iché (1897-1954) qui exécuta notamment le monument à la Résistance dans notre ville.

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    Avenue Jules Guesde, quartier St-Jacques

    On doit également à Henri Castella et au C.I.L.D.A, la construction des maisons de l’avenue Jules Guesde dans le quartier Saint-Jacques et celles de la rue Joseph Bara, bâties avant 1953. Elles portent toutes le style du plus grand architecte contemporain de Carcassonne à qui il faudra bien jour rendre un hommage biographique. Là encore, sur chaque maison… une tuile de Camberoque.

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    Constructions d'Henri Castella, rue Bara

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  • Aux origines de l'Hôtel de police de Carcassonne, boulevard Barbès

    Dans quelques mois, un nouveau Hôtel de police entrera en service au lieu-dit « Prat Mary » situé près de la route de Limoux. Ainsi en ont décidé nos responsables politiques ! Il faudra alors que nos policiers déménagent et laissent un bâtiment jugé comme insalubre, dans lequel ils ont officié depuis les années 1950. Grâce à nos recherches, nous sommes désormais en mesure de retracer les origines de cet immeuble bourgeois, au cœur du boulevard Barbès.

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    © La dépêche

    C’est en 1887 que débutent les travaux de construction de ce bel hôtel particulier érigé pour le compte de Charles Salaman (1830-1916), sur l’emplacement des anciens remparts de la Ville basse. Administrateur de la Caisse d’Epargne et président du Comité des courses de l’Aude, M. Salaman avait d’abord fait carrière dans l’armée comme officier de cavalerie. Il démissionna en 1860 afin de s’occuper de son domaine de Moussoulens et s’installa à Carcassonne dans la rue de la gare avec son épouse Louise Lamarque et ses trois enfants. Son seul fils, Henri, mourra en opération en 1910 avec le grade de capitaine d’artillerie coloniale. Ses filles, Claire et Marie-Claire épouseront respectivement Edmond Alègre de la Soujeole et Gaston de Rolland. Charles Salaman était également apparenté aux Laperrine d’Hautpoul par sa mère Jeanne Laperrine (1802-1879). Cette famille bourgeoise très aisée qui s’était alliée par filiation avec l’aristocratie audoise, fréquentait les partisans de l’Action française et prenait ses vacances d’été à l’hôtel Victoria de Biarritz. L’entrée de l’hôtel Salaman - c’est ainsi qu’on l’appelait - se faisait par le n°31 de la rue Voltaire et s’ouvrait par un grand porche par lequel entraient les voitures. Un cocher et deux domestiques constituaient le personnel de la maison.

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    Entrée de l'ancien commissariat

    Jusqu’après la Seconde guerre mondiale, l’hôtel de police se trouvait rue Aimé Ramond dans ce que l’on nomme de nos jours, l’ancienne mairie. Très bientôt donc, le nouveau commissariat va ouvrir une nouvelle page de l’histoire de Carcassonne. Que va devenir l’hôtel Salaman ? Espérons qu’il ne restera pas trop longtemps fermé et qu’un acquéreur lancera les travaux nécessaires. Il le mérite !

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    © La dépêche 

    Maquette du futur Hôtel de police

    Sources

    Le courrier de l'Aude, L'Action française

    Etat-civil / ADA 11

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