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Musique et patrimoine de Carcassonne - Page 199

  • Jean-François Jeanjean (1877-1956), un historien Carcassonnais oublié

    Jean-François Jeanjean consacra sa vie entière à l'étude historique et plus particulièrement celle de notre département. Erudit doté d'un grand talent littéraire, il se distingue d'abord grâce à la biographie d'Armand Barbès qui sera récompensée par la Société de l'Histoire de la Révolution de 1848. Un premier tome paraîtra en 1909 aux éditions Comely à Paris ; le second, chez Gabelle à Carcassonne en 1947. Jean-François Jeanjean est alors Correspondant du ministère de l'Instruction publique, lorsqu'il est admis en 1912 au sein de l'Académie des Arts et des Sciences de Carcassonne. Il en deviendra le président en 1922, en même temps qu'il occupe les fonctions de conseiller municipal de la majorité Radicale-socialiste du Docteur Albert Tomey. Cet homme très apprécié de ses pairs prononcera l'éloge funèbre du compositeur Paul Lacombe en 1927. Pour un autre Lacombe prénommé Edouard, il avait écrit les paroles occitanes de la chanson "La Carcasssouneso" interprétée par l'Union vocale en 1923. 

    Parmi ses publications

    Armand Barbès Tome 1 / Editions Comely, 1909

    Armand Barbès Tome 2 / Imprimerie Gabelle, 1947

    La dénomination des rues de Carcassonne / CM, 8 juin 1920

    Les étreintes, poésies / Imprimerie Gabelle, 1939

    La guerre de Cent ans en pays audois / Imprimerie Gabelle, 1946

    Guizot et Mahul dans leurs relations politiques / Imprimerie Gabelle, 1916

    Proclamation de la République dans le département de l'Aude / Gabelle, 1920

    Le roman d'amour de Lamartine / Gabelle, 1912

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     En 1927, Jean-François Jeanjean ouvre une librairie-bouquiniste dans la rue de la mairie (Aimé Ramond). C'est d'abord une bibliothèque de location, mais on y trouve également des livres d'occasion à la vente. Quand vient la période de la rentrée scolaire, le magasin connaît une belle affluence. Dans des rayons bien agencés se sont pas moins de 20 000 ouvrages sur des thèmes différents qui sont exposés.

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    Après la mort de M. Jeanjean en 1956, la librairie passera entre les mains de Claude Guillemin en 1963. Les Carcassonnais s'y retrouvent pour acquérir les nouveaux romans primés par le Renaudot, ou le Goncourt. Les amateurs, un peu plus fleur bleue, sont attirés par ceux de Magali ou de Delly. Il y en a pour tous les goûts. Les 2000 abonnés pour 2 francs par an et un droit de location, ne se privent pas. Aux vieux livres a fermé depuis ; elle se trouvait juste en face de l'entrée de l'Hôtel de Rolland (actuelle mairie).

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  • Une pierre bien mystérieuse dans la rue Cros-Mayrevieille

    Les mystères de la Cité médiévale de Carcassonne ne se trouvent pas que dans ses antiques remparts. Au mois de février 1970, des ouvriers de M. François Stacchetti travaillent à la rénovation de la boulangerie de M. Bacharan dans la rue Cros-Mayrevieille.

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    L'ancienne boulangerie Bacharan

    Cette vieille demeure avait appartenue auparavant à la famille Magnou, puis à celle de M. Vidal. Il est question avec l'accord de M. Bourrely, architecte des Bâtiments de France, de donner à son magasin un aspect médiéval. Ceci répond aux efforts des différents organismes souhaitant rendre à la Cité son lustre d'antan. Au cours de cette opération de rajeunissement, il est découvert une traverse d'époque Renaissance datée de 1549. Elle sera placée au-dessus de la porte d'entrée.

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    © Los ciutadins

    La boulangerie Bancharan avant les travaux 

    Par nécessité d'extension et d'unité, M. Bacharan décida d'aménager également un salon de thé. Cette nouvelle transformation permit de découvrir sous un épaisse couche de ciment et de crépi, une inscription portant la date de 1768. Les Bâtiments de France décidèrent d'accorder une subvention à M. Bacharan, ainsi qu'aux commerçants qui animés d'un tel état d'esprit voudront donner à leur magasin et à leur maison, un aspect médiéval.

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    La pierre placée dans le linteau de la porte découverte en 1970

    Cet esprit aurait-il disparu ? C'est ce que l'on croit voir depuis une vingtaine d'années, avec les nombreuses transformations de maisons en magasins ou restaurants. 

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  • Dénoncés à la Gestapo pour avoir écouté Radio-Londres, rue Laraignon

    Les époux Vinsani menaient une existence ordinaire et discrète à Carcassonne pendant l’Occupation. Ni la Milice française, ni la police allemande n’étaient au courant que le mari avait durant la guerre civile espagnole, soigné des Républicains et partageait des idées communistes. Ce couple aurait bien pu ne pas être inquiété s’il n’avait pas été dénoncé par Madame Marguerite S, habitant rue Laraignon et serveuse de son état ; la voisine d’à côté, qui ayant la cuisse légère s’amusait à recevoir des soldats allemands chez elle. Madame Vinsani excédée par le vacarme quasi quotidien engendré par ce remue-ménage, eut le malheur de se plaindre auprès de cette sans-gêne. Se sentant sans doute protégée par sa collaboration horizontale, la voisine lui répondit alors : "Et vous ? Lorsque vous faites marcher Londres jusqu’à une heure du matin… Je vous dénoncerai à la Police allemande !"

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    © Pinterest / Un village français

    Le 4 juillet 1944 vers 19h45, deux allemands en civil se présentent au domicile des époux Vinsani alors que ceux-ci sont en train d’écouter Radio-Londres en langue italienne. Inutile de préciser qu’il était formellement déconseillé de se livrer à ce type d’activité, au risque d’être dénoncé. C’est sans aucun doute ce qu’il arriva après que la voisine eut prévenu la Gestapo. Sans aucun ménagement, les agents perquisitionnent la maison et amènent Monsieur Vinsani dans une des geôles de la caserne Lapérine. Son épouse l’accompagne, mais il lui est signifié de se rendre le lendemain dans les locaux de la Gestapo, au numéro 67 route de Toulouse.

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    © Pinterest / Un village français

    Après avoir pris soin de faire brûler chez elle les documents qui pouvaient compromettre son mari, madame Vinsani se rend à 9 heures du matin au rendez-vous. Elle est accueillie fraîchement par deux allemands : le chef est brun, c’est Eckfellner ; l’autre est blond et lui sert d’interprète sans toutefois parler correctement le français, c’est Schiffner. On lui pose alors tout un tas de question. Elles s’enchaînent les unes après les autres sans que parfois l’on prenne même le temps de la laisser y répondre : "Où avez-vous connu votre mari ? Depuis quand êtes-vous mariée ? S’est-il rendu en Espagne ? Est-il Communiste ?" A ce flot d’interrogations, madame Vinsani répond qu’elle a connu son futur époux à Perpignan, qu’elle s’est mariée avec lui voilà cinq ans à Maureillas (Pyrénées-Orientales). Elle nie ses déplacements en Espagne et ses idées Communistes.

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    © Pinterest / Un village français

    Préparée à l’avance, on cherche à lui faire signer une déposition rédigée en langue allemande. Elle comprend que les perquisitions chez elle n’ayant rien données, la police allemande use d’un subterfuge pour obtenir des aveux. Elle refuse donc d’apposer sa signature sur un document dont elle ne comprend pas le sens. On la fait descendre au rez-de-chaussée dans une pièce où elle reste un moment sans que l’on s’occupe d’elle. Au bout d’un instant, madame Vinsani est invitée à passer dans une autre pièce où l’attendent Schiffner et René Bach. Ce dernier, interprète Alsacien de la Gestapo de Carcassonne, lui indique qu’elle est folle et qu’on allait la faire interner à Limoux. Refusant à nouveau de signer, le tortionnaire lui dit alors : "On fera votre maman prisonnière !" Elle bondit de sa chaise : "Vous ne ferez pas une chose comme celle-là !" Eckfellner, le chef de la Gestapo, lui adresse alors un violent coup de poing dans la poitrine qui la fait asseoir sur son siège.
    Vers 13 heures, nouvelle demande :

    "Voulez-vous signer ?"

    "Non"  

    "Alors vous prison."

    Elle est alors conduite à la caserne Laperrine.

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    L'ancienne villa de la Gestapo, avenue F. Roosevelt

    Le lendemain, la Gestapo ramène Philippine Vinsani dans ses locaux de la route de Toulouse pour un nouvel interrogatoire. Nouvelle insistance pour la faire signer et nouveau refus. Notons que pour si terrible que furent les autorités allemandes envers leurs prisonniers, jamais elles n’agissaient en dehors des règles du droit dictées par le Reich. Il fallait toujours des aveux signés.

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    La cheminée de la villa avant sa destruction en 2016

    "Dans la pièce où je me trouvais, se trouvait au coin de la cheminée, un fusil mitrailleur. Le chef de la Gestapo l’a pris en main et s’est mis à parler en allemand avec Bach qui se trouvait assis à un bureau, dont il avait tiré dans le tiroir un révolver qu’il chargeait avec des balles. Toute cette mise en scène a certainement été faite pour m’intimider et me faire croire qu’ils allaient m’exécuter. Ayant eu réellement peur et pris d’envie de vomir. Bach m’a dit : "Vous n’allez pas rendre ici, allez aux WC au fond du couloir." Lorsque je revins, Bach me dit : "Vous allez rester 15 jours sans manger ici." Comme je ne voulais pas signer, il m’a dit qu’on allait contrefaire ma signature. Au bout d’un moment, le chef est revenu porteur de mon sac à main, qui m’avait été retiré au cours de mon incarcération. Bach m’a dit : "Vous êtes en liberté, gardez pour vous tout ce qui a été dit et fait ici, car vous êtes en surveillance, vous ne vous en sortirez pas comme aujourd’hui. Je suis sortie sans signer la fiche et mon mari a été libéré au bout de quinze jours."

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    Le couloir de la villa avant sa destruction

    Les époux Vinsani ont jugé plus prudent de quitter Carcassonne et de n’y revenir qu’après la libération de la ville. Quant à leur dénonciatrice, elle a arrêtée avec sa sœur puis tondue. Elle écopa de la peine d’Indignité nationale avec confiscation de 20 % de ses biens.

    Sources

    Procès de René Bach / ADA 11

    Jugements de la chambre civique de l'Aude

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