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Souvenirs de carcassonnais - Page 3

  • L'ambiance d'autrefois dans les cafés de Carcassonne...

    Que faisait-on autrefois à Carcassonne quand il n'y avait pas la télévision, ni internet ? Comment faisait-on pour rencontrer des gens d'horizons sociaux différents lorsque Facebook n'existait pas ? Si ces questions pourraient paraître comme futiles à ceux dont l'âge dépasse la quarantaine, leurs réponses aideront sans doute les plus jeunes à comprendre les tourments de notre époque. Sans vouloir être passéiste en affirmant que c'était mieux avant, force est de constater que l'enfermement et isolement actuel de la population dans les réseaux sociaux est le miroir aux alouettes de la communication. La société pour exister a besoin de contacts physiques et verbaux. Ils nourrissent la compréhension de l'autre, creusent des tombes aux préjugés et sont moteurs de la solidarité. La superficialité du réseau social facebookien favorise la vanité, l'égocentrisme, la délation, le voyeurisme et les fausses informations.  

    Au XXe siècle, les Carcassonnais fréquentaient les bistrots à une époque, où il n'était pas déconseillé de fumer, de boire, de draguer et de bien manger. Tout un univers favorable à la fraternisation, n'est-ce pas ? Ce pouvoir alchimique de l'émulation entre les humains, était favorisé par divers évènements organisés par les cafetiers. Aujourd'hui, les Français deviennent frigides d'un pouvoir castrateur. A force d'interdire, on infantilise et on déresponsabilise la société pour mieux la dominer.

    Les lotos dits "A la volaille"

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    René Lapasset dans son café

    Oseriez-vous imaginer aujourd'hui des pintades, poulardes, canards gras, oies grasses ou des longes de porc mises en exposition sur une table le temps d'un loto ? Bien sûr que non, les services de l'hygiène sont passés par là pour tout interdire. Sans compter que vous auriez peut-être quelques extrémistes végétariens pour perturber la manifestation. Pourtant, il y a encore quelques décennies de cela dans ce Carcassonne d'aujourd'hui à l'âme fraternelle déchue, les Biscans, Lapasset, Quintilla rassemblaient la population avec leurs lotos. On appelait cela "A la volaille". Cette joyeuse basse-cour était escortée de gibier : lièvres, lapins forains et même de sangliers, biches et porcelets. Tous ces lots étaient présentés, les soirées ou matinées de Noël ou du Jour de l'An, aux fils de fer ourlant l'intérieur des vitrines des cafés-loteurs. Les habitués faisaient ainsi le tour des vitrines afin de choisir l'endroit où ils iraient loter en fonction de ce qui était mis en jeu. Monsieur Toulzet relate en 1998 une anedocte assez croustillante ; nous la transcrivons ci-dessous :

    Tout voisin du café Biscans, le célèbre Café Not, dirigé par les époux Guy, aidés par leur beau-frère Léonce, faisaient bien entendu, loter. Lors d'une de ces soirées, la direction de ce célèbre établissement avait prévu, comme lot, quelque chose de jamais vu à l'époque. En effet, un superbe cochon de près de cent kilos était mis en jeu ! L'animal, au matin du grand jour, fut mis en exposition entre quatre barrières sur la place Carnot. L'admiration était grande chez les badauds qui se pressaient autour de ce superbe premier loto exceptionnel. Le soir arriva. La salle du Not du rez-de-chaussée était comble, tout comme la salle du premier étage qui servait de salon pour noces et banquets. Après les lots habituels annoncés par le "nommeur" officiel M. Léonce, un habitué du café fit carton plein ! Carton vérifié, l'heureux gagnant se vit face-à-face au cochon que la chance lui attribuait ! Que faire de cette bête ? Il parlementa avec les propriétaires du Not. Les patrons, aussi distingués que beaux joueurs, proposèrent l'achat du goret au gagnant et remirent en jeu l'animal. Annoncée, cette remise en jeu par les microns installés par les soins de M. Bouichou, rue du Marché, la nouvelle souleva de longs applaudissements. Et voilà le loto reparti avec entrain. Quelques minutes passèrent et soudain, une voix étranglée par l'émotion, un client cria "Quine". Tous les yeux se portèrent sur le gagnant qui, vous l'avez peut-être deviné, n'était autre que les premier chanceux qui devenait l'heureux propriétaire pour la seconde fois de ce cochon aussi rose que dodu. Cette fois-ci notre ami fit retirer ce lot encombrant par un charcutier Carcassonais, qui, nous l'apprîmes plus tard, offrit un jambon à ce champion toutes catégories du loto de Noël du Café Not !

    Le jeu de la Poule

    Pratiquement tous les cafés de la ville étaient équipés d'un billard, car c'était avant les flippers la distraction des clients. Le jeu de la Poule semble avoir été très pratiqué dans l'Aude. Les problèmes rhumatismaux chez les hommes se situent au niveau du coude... Les clients misaient l'apéritif au 109. Il fallait faire tomber dix petites quilles posées sur le billard et effectuer neuf carambolages. Autant de carambolages en trop, autant de levées du coude en plus ! Aux coins d'un table, les autres clients préféraient jouer au Bézi, l'ancêtre du Rami, ou la Belote, la Bourre, la Manille.

    Le P.MU

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    Lucien Biscans et son épouse

    Le premier bureau du P.M.U apparaît en 1950 au café Biscans, rue Victor Hugo. Les Carcassonnais montaient à l'assaut des guichets les dimanches. Lors du Prix de l'Arc de Triomphe en 1964, l'engouement fut si grand que les barrières prêtées par la mairie et installées depuis le trottoir de la place Carnot jusqu'au café, furent nécessaires pour canaliser le flot des turfistes. Dans ce petit troquet, on partageait les pronostics autour d'un pastis bien tassé. Au café Biscans, c'est Albert Atal qui enregistrait les paris et continua lorsque le Longchamp reprit le P.M.U.

    La télévision

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    Just Fontaine en 1958

    Lors de la Coupe du monde de football en Suède, aucun Carcassonnais n'avait la télévision. Pendant le mois de juin 1958, Lucien Biscans installa dans son café l'un des premiers téléviseurs. C'était un Clarville, en noir-et-blanc bien sûr. Les hauts parleurs avaient été installés sur la façade et de tant de monde, la circulation avait dû être coupée dans les rue Victor Hugo et du Marché (Tomey), pendant toute la durée du match. 

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  • De l'ancien café Sallen à la Bulle, rue Barbacane

    Au mois de février 1966, Albert Sallen surnommé Bébert fait l'acquisition de l'ancien café Azéma (Chez Paulin) situé rue Barbacane. A cette époque, le café Calmet placé entre les deux ponts (Vieux et Neuf) vient d'être rasé. On y fera la place Gaston Jourdanne avec son parking faisant face à l'actuel Centre des Impôts. Bébert est un étranger dans ce quartier, puisqu'il vient de la route de Toulouse, mais son passé de marchand de volailles l'avait fait connaître dans toute la ville. Outre les lotos de fin d'années qui sont toujours complets, le café Sallen se fait une réputation en raison de la qualité de la volaille préparée et surtout, du filet de bœuf aux cèpes que le patron cuisine mieux que personne. Les habitués ne s'y trompent pas : Georges Bès, Jeannot Canal, les frères Cano, les frères Chésa, les frères Franck, Rouby, Momon Sautel, Delampie, Vaissière, etc.

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    © Bruno Courrière

    Albert Sallen et son chien Porthos

     Au mois de mai, c'était la fête de la Barbacane. Il n'était pas question de manger autre chose que des escargots que l'on dégustait chez Bébert, évidemment. Après le tour de l'âne organisée par Gaby Fort, les tournées se faisaient chez Sallen. Le chef d'orchestre était aux fourneaux mais ses aides servaient en salle : Dany, Paulette et Geneviève. Dans le jardin à l'arrière du café, les Italiens jouaient aux boules confectionnées à partir de bois et de terre cuite. Doit-on évoquer les parties de cartes et comment on refaisait le monde devant l'établissement attablé avec un petit Pernod ?

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    © Alain Machelidon

    Albert Sallen vendra en 1976 son café pour des raisons de santé. La discothèque La Bulle a succédé au Café Sallen dans lequel retentissait la musique de José Marson et la voix d'un certain Gualdo. Luc Raucoules transforma le vieux bistrot en boite avant de le céder à André Garcia en 1981.

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    © Google maps

    Le Jardin d'été occupe les lieux

    Le poète avait écrit que "les feuilles mortes se ramassent à la pelle", nous avons donc essayé d'en attraper quelques une au vol avant que "la nuit noire de l'oubli" ne fasse son œuvre.

    Source

    La dépêche / 14 novembre 1992

    Une histoire de photographies / Martial Andrieu / Tome 3

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  • La librairie Breithaupt conserve en ses murs un secret historique...

    Trop peu de Carcassonnais savent aujourd'hui, le secret que renferme la librairie Breithaupt, 33 rue Courtejaire. Le temps fait sont œuvre d'érosion sur la mémoire collective, laissant aux fossoyeurs de l'histoire toute liberté pour agir à ses dépens. Aussi, essayons-nous autant que nous le pouvons, de rétablir ou d'approfondir certaines vérités que la modestie des héros d'hier, a complètement absorbée. Les vrais, ceux qui ont pris des risques, n'ont jamais fait valoir autre chose que leur sens du devoir. 

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     Monsieur Jules Breithaupt, né le 10 juillet 1910 à Carcassonne, mit sa librairie à la disposition de la Résistance pendant toute la durée de la guerre. Comme boîte à lettre "officielle" de l'armée des ombres, elle servit à faire transiter des messages entre les différents responsables et les maquis. Ces lettres se trouvaient placées en haut de la dernière étagère et lorsqu'un Résistant se présentait, il n'avait qu'à dire le mot de passe suivant : "Je recherche un livre de..." L'auteur, bien entendu, n'existait pas ! Jules Breithaupt recevait également dans son magasin le gratin de la Résistance régionale : Gilbert de Chambrun, Jean Graille, Jean Bringer, Lucien Roubaud, etc. Un bon endroit pour ne pas se faire remarquer ? Pas tant que cela... Louis Amiel, le bras droit de Bringer, faillit être confondu par la Gestapo alors qu'il avait acheté des cartes d'Etat-major chez Breithaupt. Par chance, lorsqu'il fut arrêté par elle, les agents de la sinistre police secrète Allemande allèrent à deux magasins de là chez Roudière, afin de prouver qu'Amiel s'était fourni chez eux. La Kommandantur était cliente de Roudière pour ses imprimés, mais aucun employé ne reconnut le futur Président du Comité Local de Libération. Quelque temps après, Amiel fut relâché.

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    A la libération, Jules Breithaupt obtint sa carte de Résistant. Sans exagérer, on peut dire que sa librairie n'est pas qu'un lieu de culture, c'est aussi un lieu de mémoire de la Seconde guerre mondiale. 

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