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Patrimoine disparu - Page 6

  • A l'origine du Grand Hôtel Terminus...

    Dans quelques mois, le Grand Hôtel Terminus aura cessé définitivement ses fonctions pour accueillir en ses lieux prestigieux, un résidence pour séniors. Ainsi en a décidé son propriétaire, le groupement hôtelier « Le soleil » qui, ayant fait bâtir un hôtel de luxe à l’ancienne maison de retraite du Pont vieux, n’a plus intérêt à conserver le vieil Grand Hôtel Terminus comme tel. Au moins aura-t-il pu fêter dignement son centième anniversaire en 2014 ! A l’heure où nous écrivons, il nous est impossible de savoir si la résidence en question gardera le nom de Terminus. Avouez qu’il s’agirait là d’une plaisanterie dont le mauvais goût n’aurait d’égal, que la transformation de ce bâtiment autrefois destiné à accueillir les touristes dans notre ville. Toutefois, on voit mal comment il serait possible de buriner le fronton du « Grand Hôtel Terminus », puisqu’il est classé et à l’intérieur du périmètre sauvegardé de la Bastide. Donc, Terminus pour les personnes âgées. C’est à Carcassonne et nulle part ailleurs !

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    Le grand escalier du grand salon

    Bien avant l’édification du Terminus en 1914, plusieurs porteurs de projets avaient frappé à la porte de Carcassonne afin de réaliser à cet endroit un hôtel offrant toutes les commodités de son temps. L’express du midi nous informe qu’à « différentes reprises déjà, des tentatives dans le même sens avaient été faites. On avait depuis longtemps compris l’utilité d’avoir, à Carcassonne, un grand hôtel installé avec tout le confort moderne pouvant retenir, dans notre ville, les visiteurs qui ne font que la traverser aujourd’hui. Mais tous les essais effectués avaient piteusement échoué. Dernièrement encore, un groupe de financiers parisiens avait annoncé son intention d’acquérir l’hôtel Saint-Jean-Baptiste. Hélas ! le projet ne put recevoir le moindre commencement d’exécution car - les journaux nous l’annoncèrent - dame justice vint leur mettre des bâtons dans les roues. Si toutes ces tentatives ont ainsi échouées, c’est qu’elles étaient faites par des étrangers. Dès que l’idée a été reprise par des Carcassonnais, elle a obtenu auprès des capitalistes un accueil chaleureusement favorable, de sorte que la Société du Terminus-Cité, na pas rencontré, à sa naissance, les difficultés qui avaient arrêté les autres. » Parmi les projets qui n’aboutirent pas, la construction d’un hôtel Terminus à l’intérieur de la gare des voyageurs et en bordure du quai.

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    Hôtel Saint-Jean-Baptiste avant 1912

    Le banquier Raoul Motte, administrateur de la Société des marbres de Caunes-Minervois, possédait également plusieurs affaires dans Carcassonne comme le « Cinéma des familles » qu’il vendra en 1913 à Gaston Cazanou. Cet homme vertueux qui finira sa vie devant un peloton d’exécution - fusillé pour l’exemple durant la Grande guerre - fonda le 3 octobre 1912 la Société Anonyme « Terminus-Cité » devant Maître Auriol, notaire à Carcassonne. Dans quels buts ? Démolir l’ancien Hôtel Saint-Jean-Baptiste (avenue de la gare), l’immeuble contigu lui faisant angle sur la route de Toulouse (Bd Omer Sarraut) et construction le nouvel établissement.

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    Vendu à la Société « Terminus-Cité » par Léopold Lignon demeurant à Saint-Hilaire pour la somme rondelette de 200 000 francs, l’hôtel Saint-Jean-Baptiste va disparaître du paysage. Une clause permet à Marie Bigué veuve Ricard, locataire dans l’hôtel, de résilier son bail moyennant une indemnité de 40 000 francs.

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    © Collection H. Alaux

    La dernière locataire de l'hôtel

    L’immeuble contigu sur le côté de l’actuel boulevard Omer Sarraut qui appartenait à la veuve d’Henri Sorel, Caroline-Jeanne Prax, et à sa fille Henriette, sera cédé pour 120 000 francs. Quant au fabricant de sandales Fidel Perxachs, locataire des locaux à la famille Sorel, il accepta de partir moyennant la somme de 15 000 francs. C’est à partir de cette époque que Perxachs transféra sa boutique au 36 de la Grand rue (rue de Verdun). L’acquisition de l’ensemble de ces immeubles se fit contractuellement le 1er novembre 1912.

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    L'immeuble démoli sur lequel se trouve le cinéma "Le Colisée"

    La construction de l’hôtel Saint-Jean-Baptiste ayant été soumise au plan d’alignement, la Société Terminus-Cité dut se soumettre à la même loi. Le Conseil municipal dans sa séance du 29 novembre 1912, autorisa la société à lui vendre 140 m2 en bordure de l’ancien hôtel au prix de 70 000 francs.

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    L'avenue avant la destruction de l'hôtel St-jean Baptiste

    Le Grand Hôtel Terminus recula, s’aligna parfaitement sur l’Hôtel des deux gares (Hôtel Bristol) et la ville vit l’avenue de la gare s’élargir d’autant. Entre la vente des immeubles, la mise aux enchères du mobilier (fauteuils, canapés, tapis, rideaux…) et le début de la démolition, il ne sera écoulé qu’un mois et demi. Les premiers coups de pioche furent donnés le 15 décembre 1912. En seulement un an et demi, le Grand Hôtel Terminus sortira de terre pour être inauguré à la veille de la Grande guerre.

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    Sur cette photographie inédite issue de l'une de mes plaques de verre, on voit les débuts de la démolition de l'hôtel Saint-jean-Baptiste.

    Sources

    Recherches, synthèse et rédaction / Martial Andrieu

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2019

  • Des origines du square Sainte-Cécile à celui de Gambetta

    Ils ne sont plus guère nombreux les Carcassonnais qui ont vu encore debout l'ancien square avec son kiosque à musique, sa cascade, ses micocouliers, ces cygnes, sa grotte, etc. Bientôt, il ne nous restera plus que les photos et quelques livres de notre histoire locale pour apprendre ce qu'il fut avant le mois de mars 1944.

    En 1240, le Couvent des Cordeliers à l'Est de la Cité est détruit lors de l'insurrection de Trencavel. Saint-Louis ordonne sa reconstruction sur l'emplacement de l'actuel Square Gambetta. En 1355, le Prince Noir ne laissera que des ruines après avoir incendié la Ville basse. Le Couvent des Cordeliers est rebâti en face de la Porte de la rue Mage (rue de Verdun). Lors des guerres de religion, sur ordre de l'autorité militaire, le couvent sera rasé afin de défendre la ville contre les Huguenots. Les matériaux resteront sur place jusqu'en 1589 ! Une grande partie d'entre eux permettra de construite le Bastion de la Figuère (aujourd'hui disparu) et l'enceinte ceinturant la ville. Il faudra 4050 charrettes de pierres pour réaliser ce travail. A la Révolution, ce terrain est attribué à Hyacinthe Robert et devient en partie un jardin potager : "L'Horte des Cordeliers". La partie Ouest est dévolue aux Marchands de charbon et de bois. La construction du Pont neuf entre 1841 et 1846 aura pour effet de niveler le sol. Le 18 janvier 1880, le nouveau square adopte sa forme rectangulaire. Le travaux ne débuteront finalement que sous le Second-Empire, après 1859. Maisons et dépendances sont expropriées ; en attendant, la place sert pour la vente de bijoux, cirques, représentations théâtrales, etc. Quand le square est enfin achevé, il prend le nom de Sainte-Cécile, la patronne des musiciens.

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    C'est le 7 juillet 1883, par décision du Président de la République, que le Square change de nom. Il faut honorer Léon Gambetta, avocat et homme politique. Les Carcassonnais se divisent entre les partisans de la musique à qui on enlève l'identité, les ceux de la République fiers que l'on distingue Gambetta. Comme pour la place aux Herbes, les vieux Carcassonnais disaient encore "Square Sainte-Cécile". La place Carnot c'est moins poétique, d'autant plus que le Président de la République Sadi Carnot avait été victime d'un assassinat perpétré par un anarchiste italien. 

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    On avait cru que la guerre et ses bombardements avaient épargnés Carcassonne. Hélas, c'était sans doute sans compter sur les lois de la stratégie militaire, capable de toutes les destructions. Au mois de mars 1944, les Allemands qui occupent toujours la ville, décident de raser le Square Gambetta. Depuis le débarquement en Provence, ils craignent que les alliés ne rentrent dans Carcassonne par la route de Narbonne. Afin d'avoir une vue dégagée depuis la rue de Verdun, ils décident d'abattre tout ce qui se trouve dans cette ligne droite vers le Pont neuf. Ils ne vont pas se salir les mains... Comble de l'ignominie de cette armée barbare, ils vont exiger que les Carcassonnais le fassent eux-mêmes. Des hommes sont requis par la municipalité, beaucoup traînent les pieds. D'autres, sont menacés de représailles.

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    C'est avec lenteur que le square disparaît. Dès le 27 mars 1944, la cascade est démolie. Dans l'après-midi, le romantique kiosque à musique est attaqué. A 18 heures, il est à terre.

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    © ADA 11 / Chanoine Sarraute

    Le square le 25 août 1944

    Le 28 mars, les poissons des bassins et les cygnes majestueux sont recueillis et mis en d'autres lieux privés. Seuls, les platanes des allées sont préservés grâce un employé communal. Le centre du square se retrouve complètement rasé et transformé en glacis. Des vestiges de ce square se trouvent chez des particuliers. Certaines statues ont été mises à l'abri, d'autres n'ont jamais été retrouvées.

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  • À l'auberge des "Trois-Couronnés"...

    Il vous aura sans doute échappé en regardant cette plaque émaillée, que l'accentuation de la lettre E modifie tout le sens historique de cette rue. Pour tous les Carcassonnais et à fortiori les éditeurs de plans, il s'agit de la rue des trois couronnes. Nous avons ici l'exemple d'une déformation linguistique populaire ayant abouti à la suppression de l'accentuation. Les nouvelles plaques ont finalement adopté cette modification, sans se soucier de l'aspect historique. Pire ! Cette erreur devient aujourd'hui une vérité qu'il convient de battre en brèche. Un peu d'histoire...

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    L'hôtel construit en 1992 dans cette rue

    Probablement à l'emplacement actuel de la Brasserie du Dôme se trouvait l'auberge des Trois-Couronnés. Son existence est rapportée en 1593 sur un acte de Maître Grangis (Index du Dr Cayla). Le 21 juin 1601, le sieur Reich "réclame à la ville une indemnité tant pour les arbres qui avaient été pris chez lui, pour les fortifications de la ville, que pour le logement qu'il avait fourni aux pestiférés, à son logis des Trois-Couronnés" (Cartulaire de Mahul / Tome VI). C'est donc cette auberge qui aurait donné le nom à l'artère qui mène au Pont vieux. Qui étaient donc ces Trois Couronnés ?

    trois-couronnés

    Il s'agit des Rois mages que nous avons retrouvés dans un vieux dictionnaire portant le substantif des "Trois Couronnés". Ceux-là même chargés de présents qui, selon l'Evangile, les ont portés aux pieds de l'enfant Jesus. Dans un poème de Maurice de Guérin (1810-1839), ce doute semble levé :

    Qui mena par des plaines

    lointaines

    Aux pieds du divin enfant

    Je vais marchant avec elle

    Fidèle

    Comme les trois couronnés

    Et comme eux je suis en quête,

    Poète,

    De la crèche où, nouveaux-nés,

    L'auberge des Trois-Couronnés faisait bien référence aux Rois mages. La disparition de l'accent transforme un participe passé en nom commun. Voilà donc comment on efface par là même, l'histoire d'un lieu et sa référence chrétienne. Il serait bon qu'à la lumière de cet article, des modifications soient entreprises pour réparer cette erreur.

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