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Ecrivains - Page 3

  • Roger Peyrefitte (1907-2000), un romancier pédéraste à Alet-les-bains

    Nous n’allons pas ici rédiger une biographie de cet auteur de romans dont la vie particulière, dirons-nous, fit les beaux jours des journaux à scandale de l’époque. Il existe pour cela des écrits et des spécialistes bien plus renseignés que nous le sommes. Nous avons choisi de porter à la connaissance du lecteur les moments de l’existence de Peyrefitte à Alet-les-bains.

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    Après des études chez les frères lazaristes, à la faculté des lettres de Toulouse et enfin à l’Ecole des Sciences politiques, Roger Peyrefitte embrassa d’abord la carrière de diplomate. Au début à Athènes en 1933, où il sera déchu de son poste cinq années plus tard pour avoir débauché l’amant d’un amiral grec. Grâce aux relations qu’il entretient avec Madame de Barante, proche de Pierre Laval, il est nommé à Paris et travaille aux côtés de Fernand de Brinon, collaborateur notoire des Allemands au sein du gouvernement de Vichy. La libération de la France vaudra à Peyrefitte d’être exclu des postes diplomatiques et d’être alors contraint de se tourner pleinement vers la littérature ; une activité débutée quelques années auparavant.

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    En 1940, au moment où Peyrefitte se trouve dans le creux de la vague, il se retire à Alet-les-bains dans la demeure acquise par ses parents. C’est là que sera écrit « Les amours particulières » (Prix Renaudot en 1945), un roman autobiographique exposant les relations amoureuses entre jeunes garçons au sein d’un institut catholique. De ce livre à scandale achevé en 1941 à Toulouse et édité deux ans plus tard, sera tiré un film en 1964 qui ne fera qu’enfler la polémique.

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    La maison de Roger Peyrefitte, aujourd'hui Hôtel de ville d'Alet

    Peyrefitte, à l’instar d’André Gide et de son ami Carcassonnais François-Paul Alibert, nourrit une passion dévorante pour les adolescents. Comme Gide qui allait visiter Alibert à Carcassonne - quand ce dernier était directeur du Théâtre de la Cité - avant de partir en safari sexuel tous les deux en Afrique du Nord, Henry de Montherlant s’était rendu à Alet-les-bains en janvier 1941 chez Peyrefitte. Ce dernier possédait à Limoux une meute de jeunes garçons qu’il aimait croquer aux coins de rues et échangeait ses exploits avec l’Académicien, non moins friand de cher fraîche. Les relations épistolaires codifiées entre les deux hommes ont été publiées chez Robert Laffont en 1983. Peyrefitte comme Gide se définit comme pédéraste : « Homophilie, mot épouvantable, qui pue la pharmacie je n’aime pas plus celui de pédophile, et je lui préfère le mot plus franc de pédéraste, qui ne l’est pas moins (Propos secrets). André Gide n’avait-il pas écrit lui-même : « J’appelle pédéraste celui qui, comme le mot l’indique, s’éprend de jeunes garçons (Corydon / 1911).

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    Roger Peyrefitte s’était également épris d’un garçon de 13 ans, figurant dans le film de 1964. Alain-Philippe Malagnac d’Argens de Villèle finit par devenir son amant, son fils adoptif, puis son secrétaire particulier. Le compagnon d’Amanda Lear, épousée à Las Vegas, mourra prématurément dans l’incendie de sa maison. Peyrefitte, auteur de grand talent malgré des penchants sexuels contestables qui aujourd’hui lui vaudraient les tribunaux, finira sa vie dans le scandale, la diffamation et l’opprobre. Le dandy de Saint-Germain-de-près, amis du couple Halliday - Vartan et fervent débauché des nuits tropéziennes, se perdra dans des propos antisémites et des phrases dégoulinantes sur les plateaux de télévisions.

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    Peyrefitte est décédé à l’âge de 93 ans de la maladie de Parkinson le 5 novembre 2000 à Paris. La cérémonie religieuse eut lieu en l'église Notre-Dame-de-Grâce de Passy. Son corps repose dans un caveau du cimetière d’Alet-les-bains.

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    Biographie de Roger Peyrefitte parue en 2011

    Sources

    Henry de Montherlant et Roger Peyrefitte / Correspondance / 1983

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  • Pierre Andreu (1909-1987), un écrivain atypique

    Pierre Andreu naît à Carcassonne le 12 juillet 1909 dans une famille de la petite bourgeoisie locale. Son grand père Aloys, natif de Civita Vecchia en Italie, était en garnison à Carcassonne comme sergent et avait fait la connaissance de Marie Rancoule, fille d’un serrurier de la ville originaire d’Alzonne. Tout semblait opposer ces deux familles. Si Aloys Andreu, percepteur à Mouthoumet et fermement républicain embrassait le radicalisme en cette fin du XIXe siècle, les Rancoule étaient plutôt militants Royalistes. A l’ombre de l’église Saint-Vincent, ils priaient pour le retour du roi Henri V, comte de Chambord et dernier des Bourbons.

    Si Enric cinc venia deman.                       Si Henri V venait demain.

    A quanta festa. A quanta festa !    Ah ! Quelle fête. Ah ! Quelle fête. 

    Si Enric cinc venia deman.                         Si Henri V venait demain.

    O quanta festa que fariam !          Ah ! Quelle fête que nous ferions !

    Pierre Andreu raconte que dans les années 1880-1890, il était facile de duper au moment des élections les notables réactionnaires : urnes truquées, bulletins de l’adversaire graissés, etc. La municipalité républicaine de Carcassonne avait arrêté toutes les affaires avec le serrurier Rancoule, en raison de ses idées monarchistes. Quant à Aloys, son maigre salaire de fonctionnaire ne faisait pas de lui un nanti, car il dépensait davantage que ce qu’il gagnait. C’est dans ce creuset que naquit en 1878 leur fils Théodore Andreu, le futur père de Pierre. Après des études au lycée de Carcassonne aux côtés de ses camarades de classe, issus de bonnes familles de la ville (Delluc, Salvetat, Peytavy, De Vezian, Estève, Parazols, Combes, Lacombe, Meyran, Lordat, Peyrens, Courtial), Théodore voulut entrer à Polytechnique mais dû se résoudre à faire médecine. Après sa thèse, il s’installe à Carcassonne chez le compositeur de musique Paul Lacombe et épouse en 1908 Rose Hérail, issue d’une famille industrielle mazametaine ruinée. Pierre Andreu sera leur fils unique…

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    Pierre Andreu dans les années 30

    A l’âge de trois ans, celui qui allait devenir plus tard journaliste, essayiste et biographe quitte Carcassonne avec ses parents et s’installe à Paris (quartier Javel). Durant son adolescence, sa pensée est socialiste ; il s’enthousiasme lorsqu’en 1924 le Cartel des gauches remporte les élections. En classe de seconde, il adhère à la L.A.U.R.S (Ligue d’Action Universitaire Républicaine et Socialiste) présidée par un jeune homme : Pierre Mendès-France. Il arborait fièrement au lycée l’insigne de la ligue, au milieu de ses camarades des Jeunesses patriotes et de ceux de l’Action Française, ancrés à l’extrême-droite. Après un baccalauréat obtenu avec mention et un brillant accessit en histoire à la Sorbonne, Pierre Andreu s’inscrit en droit et en Sciences politiques en 1927. Quelques années pendant lesquelles, il vivote et au gré des rencontres découvre Apollinaire, Jarry, Max Jacob, Mallarmé. Il écrit également son premier livre qui reçoit les encouragements de Grasset, l’éditeur. 

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    Max Jacob avant son arrestation par la Gestapo

    A vingt ans, Andreu monte l’escalier de la rue Nollet et frappe à la porte de celui qu’il admire, le poète Max Jacob. C’est le début d’une amitié qui durera jusqu’à la mort du poète, le 5 mars 1944. Il publiera en 1982 un livre sur Jacob en forme de biographie « Vie et mort de Max Jacob ». La pensée politique socialisante de Pierre Andreu s’étiole dans les années 1930 tout en conservant son idéal humaniste, pour aller progressivement vers le camp adversaire. C’est-à-dire ce qu’il qualifiera lui-même de « fasciste » à la fin de la décennie. Il entre au P.P.F (Parti Populaire Français) fondé par Jacques Doriot, un ancien du Parti Communiste Français qui se distinguera sous l’Occupation comme le meilleur allié idéologique des nazis. Pierre Andreu quittera ce parti réactionnaire en 1936, le jugeant pas assez à gauche et beaucoup trop totalitaire. C’est aussi l’époque où il se lie d’amitié avec Pierre Drieu la Rochelle, auquel il consacrera une biographie en 1979. A la fin de la Seconde guerre mondiale, Pierre Andreu entre à l’O.R.T.F et défend l’action culturelle. Entre 1966 et 1970, il sera même directeur de cette antenne à Beyrouth et défendra la cause Palestinienne en se montrant pro-arabe. 

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    Si Andreu peut être considéré comme très à droite, son amitié pour Jacob et Georges Sorel contrebalance cette caricature des étiquettes. A la fin de sa vie, il se rapprochera d’ailleurs de ses premières amours en soutenant Mitterrand et en se liant avec Jacques Julliard, tout en conservant des relations au sein des militants royalistes. L'ensemble des ses correspondances, écrits et documents sont conservés à l'IMEC (Institut des Mémoires de l'Edition Contemporaine). Pierre Andreu s’est éteint le 25 mars 1987 à Paris (Ve) et est inhumé au cimetière de Grenelle.

    Quelques œuvres

    Histoire des prêtres ouvriers (1960)

    Grandeurs et erreurs des prêtres ouvriers (1955)

    Le rouge et le blanc (1977)

    Georges Sorel

    Vie et mort de Max Jacob (1982)

    Drieu la Rochelle (1979)

    Sources

    Le rouge et le blanc : 1928-1944 / 1977

    I.M.E.C

    Etat-Civil / ADA 11

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  • François Fonvieille-Alquier (1915-2003)

    Qui connaît François Fonvieille-Alquier à Carcassonne ? Et pourtant... C'est dans cette ville qu'il naquit le 10 février 1915 et que sa mère Gabrielle, institutrice de son état, résidera jusqu'à la fin de sa vie. Pupille de la Nation, le jeune François ne connut pas son père qui se laissa tuer le 25 août 1914 sur le front en Meurthe-et-Moselle par conviction pacifiste. Il sera adopté par le magistrat Henri Alquier.

    Elève brillant au lycée de Carcassonne, Fonvieille-Alquier obtint son baccalauréat en 1932 avant de poursuivre ses études à la faculté de Montpellier et d'en sortir diplômé de philosophie, psychologie, sociologie... Au sein du campus, il se faire élire comme représentant des étudiants du Comité antifasciste de Montpellier. N'oublions pas qu'à cette époque, la montée des nationalismes se fait ressentir en Espagne, Italie puis en Allemagne. Ce sera le combat de sa vie... En 1938, François Fonvielle-Alquier est nommé comme professeur dans l'Aude, puis à Montluçon (Allier) comme professeur adjoint de philosophie. Ente temps, il s'est marié avec une Carcassonnaise dont il divorcera en 1941. Durant la guerre civile espagnole, il participe aux convois de livraison d'armes pour les Républicains avant d'être envoyé à Limoges pour enseigner. Dans cette ville, ses activités communistes déplaisent au régime de Vichy qui le fait condamner, avant de le révoquer le 29 avril 1941.

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    © Archives municipales de Limoges

    Sous l'occupation allemande, Fonvieille-Alquier dirige le Front National de Libération (organe communiste de la Résistance) à l'appel du P.C le 15 mai 1941. Il devient ensuite l'un des fidèles bras-droit du colonel Georges Guingouin au sein du maquis du Limousin. Fonvieille est vice-président du Comité Régional de Libération en 1945, puis Premier adjoint au maire de Guingouin au Conseil municipal de Limoges. Il dirige également le journal l'Echo du Centre, journal qui encore aujourd'hui continue à informer les limougeauds. Chroniqueur régional à Libération de 1941 à 1964, il quitte le Parti Communiste suite à l'invasion de la Hongrie par les soviétiques. Profondément humaniste, Fonvieille s'oppose à toute forme de totalitarisme et particulièrement au stalinisme. 

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    Le livre ci-dessus lui vaut d'être condamné en 1966 pour offense au chef de l'Etat, en l'occurrence le général de Gaulle. Il s'agit d'un pamphlet contre les déviances du Gaullisme.

    "L'après-gaullisme ? Nous y sommes déjà, ou presque. Deux tours, et le système fut ébranlé. Trois petits tours, et puis s'en vont truands, enfants de chœur, combinards et barbouzes... Le gaullisme alimentaire trouvera d'autres râteliers. Tant pis pour les renards, les loups, les crocodiles... Mais pitié pour l'immense troupeau des moutons ! Le gaullisme sentimental se sentira comme orphelin... La France midinette est fragile du cœur et prompte à s'enflammer. Chez nous, les sauveurs se pressent au portillon ; ils offrent, tous les vingt ans, leurs services et un homme à aimer. Il faudra, pour nous guérir de l'infantilisme, une médecine de cheval et une cure d'insolence.  Ici, les coups d'Etat réussissent quand les banquiers font cadrer leurs intérêts avec les passions des grenouilles qui demandent un roi, ou ce qui en tient lieu... Refaire un citoyen exige qu'on torde le cou à l'imbécile qui se cache au tournant de son cœur, prêt à bondir quand passe le képi. Assez de ce respect qui suinte de partout ! Place à l'impertinence ! (François Fonvieille-Alquier)".

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    Chez Robert Laffont en 1963 : "Ils ont tué Jaurès !" 

    "Ce n'était pas seulement le récit de l'assassinat, mais une réflexion d'ensemble sur le mouvement qui avait conduit à la guerre, frissonnante d'affection pour ses héros et de colère contre la droite nationaliste."

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    L'un de ses derniers livres, édité en 1985

    François Fonvieille-Alquier est décédé le 14 février 2003 à 88 ans. Il nous paraissait important de faire connaître aux Carcassonnais, la vie et le combat de l'un de leurs concitoyens. Une rue de Limoges porte son nom...

    Sources 

    Amis du Musée de la Résistance de la Haute-Vienne / Bull.61 / 2003

    http://maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/spip.php?article50614, notice FONVIEILLE-ALQUIER François [FONVIEILLE François, Louis, Bernard, écrit parfois FONTVIELLE dit] par Jacques Girault, version mise en ligne le 10 juin 2009, dernière modification le 30 juin 2013.

    Who's Who

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