Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

- Page 4

  • Le chef du maquis de Villebazy a t-il été assassiné au sein du 81e régiment d'infanterie ?

    Cette question reste à ce jour sans réponses. Pourtant, la petite fille du Lieutenant Jacques alias Antonin Arnaud se la pose depuis plusieurs années. Comment ce chef droit et adulé de ses hommes a t-il pu disparaître dans des conditions aussi troubles ? Tué, au cours d'une méprise.

    Jacques.jpg

    © Elodie Bérard

    Le lieutenant Jacques, chef du maquis de Villebazy

    Antonin Arnaud naît le 1er janvier 1924 à Lunel dans l'Hérault. Marié le 28 mars 1942 à Perpignan, il tente, comme beaucoup de jeunes, d'échapper au Service du Travail Obligatoire. Depuis février 1943, le futur réfractaire est appelé à partir travailler en Allemagne. C'est alors qu'il décide avec son épouse de s’enfuir et de rejoindre un maquis en Haute-Savoie. Il participe aux combats des Glières opposant à partir de février 1944, la Résistance à la Milice française. Arrêté par les troupes de Joseph Darnand. Il est gardé par elles dans un hôtel de Thônes avec son épouse et son fils mais réussit l’exploit de s’échapper en sautant du 2e ou 3e étage.

    A l’issu de cette évasion, il se réfugie dans l’Aude et fonde le 1er mars 1944 le maquis de Villebazy, appelé plus tard « Corps Franc Lorraine ». Lorraine, car son ancien maquis en Haute-Savoie portait ce nom. Antonin Arnaud prend le pseudonyme de Jacques, au sein de ce groupe de résistance constitué de 15 hommes en avril 1944. Il est ravitaillé par Honoré Désarnaud, futur maire de Villebazy. Ce dernier, chef cantonal de la Résistance pour le canton de Saint-Hilaire, faisait le lien entre Jean Bringer et Jacques. Au cours de l'été 1944, la Milice et les troupes Allemandes mènent des actions afin d'anéantir les maquis. Villabasy n'échappe pas à ces attaques, grâce à des dénonciateurs payés par la Gestapo. Le 18 juillet 1944, c'est Georges R qui indique son emplacement. Entre le 20 et le 23 juillet, les maquisards se replient sur Lairière, mais des accrochages ont lieu avec les Allemands qui n’ont pas cessé de les pourchasser. La veille de l'arrestation de Jean Bringer - chef FFI de l'Aude -Villebazy se replie sur Missègre à l’Est de Limoux. Au même moment, une grande réunion des chefs de la Résistance se déroule à la Digne d’Aval pour la constitution d’un nouveau maquis (Myriel, Vals adjoint d’Astier, Roubaud (chef départemental des M.U.R). C'est le lendemain, 29 juillet 1944, que Jean Bringer sera arrêté par la Gestapo.

    19981129040.jpg

    Jean Bringer

    Depuis 72 ans, on nous ressert la même explication : Fernand Fau, agent de la Gestapo infiltré dans la Résistance, se présente chez Maurel à Carcassonne. Ce dernier est agent de liaison de Jean Bringer. Fau a paraît-il une lettre signée de Jacques - chef du maquis de Villebazy -dans laquelle il demande des ordres de repli à Bringer (Myriel). Son maquis aurait été attaqué par les Allemands. Maurel se rend alors à la clinique du Bastion (Dr Delteil) où se trouve Bringer avec René Chiavacci (agent de liaison). La clinique Delteil servait de lieu de réunion à la Résistance. Bringer rédige alors les ordres et part accompagné de Chiavacci et de Maurel remettre la réponse à Fau pour Jacques. Peu de temps après Chiavacci puis Bringer sont arrêtés par Fau et la Gestapo. Cette version supposerait que Antonin Arnaud (Jacques) soit dans la combine, ou ait fait preuve de légèreté vis à vis de Fau.

    1464481969.2.jpg

    © ADA 11

    René Bach

    Regardons de plus près... Qui raconta cette version ? René Bach, agent de la Gestapo, à son procès en juillet 1945. Fernand Fau lui aurait raconté l'arrestation de Bringer, dans l'après-midi au siège du SD. Il fit cette déposition devant la Cour de Justice. Le problème, c'est que Fau sera éliminé par le Résistant Robert le 19 août 1944 sans que l'on puisse l'interroger. Mme Bringer s'étonnera que l'on n'ait pas cherché à le prendre vivant... Bach n'a jamais été un témoin oculaire de l'arrestation de Bringer, on s'en tient donc à ce que lui aurait rapporté le Gestapiste Fau. Maurel aurait pu en témoigner ; curieusement, il ne se présentera pas au procès de Bach. On ne l'interrogera pas ; il n'y pas même une déposition de sa part dans l'instruction. Il était en vie et vivait dans les Haute-Pyrénées, car nous avons retrouvé sa trace. Quant à Chiavacci, Bach l'accusera d'avoir désigné Bringer à ces services, comme étant le chef de la Résistance. Les nombreuses contradictions de Chiavacci permettent de le penser. Or, ce dernier était connu pour être un homme de main de la Résistance, agent de liaison sans envergure. Nous savons que Bringer avait imposé une cloisonnement très strict des différents services de la Résistance audoise. Certes, Chiavacci connaissait Bringer, mais les agents de liaisons n'étaient pas mis dans la confidence ni des projets, ni des chefs de réseaux.

    2113587922.jpg

    La clinique du Bastion

    Chiavacci a été arrêté quelques heures avant Bringer devant l'école du Bastion, avec de sa compagne - infirmière à la clinique Delteil. Amenés à la Gestapo route de Toulouse, elle sera relâchée et ira prévenir Delteil. Ce dernier restera, au lieu de s'enfuir. Il sera arrêté quelques temps après. Entre temps, pourquoi Delteil n'a t-il pas cherché à prévenir Bringer ? Là encore, enfumage à Carcassonne ! Non, Jean Bringer n'a pas été arrêté sur le boulevard Barbès, comme certains l'écrivent, mais vers 14h30 sur le Pont d'Artigues. Après la réunion de midi à la clinique où il vit à ses dépens l'agent Fernand Fau, il remonta déjeuner chez ses logeurs dans la rue Alfred de Musset. Où se rendait-il à 14H30 sur le pont d'Artigues ? A une réunion où devait se trouver Francis Vals (Chef du Comité de Libération et futur député socialiste). La Gestapo trouva sur lui des Bons du trésor de la banque d'Alger. Evidemment, pour savoir cela il faut aller fouiller dans les archives du Service Historique de la Défense. En 1953, Daraud (chef de la police politique à la Libération) déclarera que plusieurs fois il mit en garde Bringer de ne plus aller à la clinique Delteil. Qu'il ne voulut pas l'écouter. Que lui-même ne s'y rendait plus depuis longtemps, cela lui faisait peur."

    Cette thèse complotiste peut être renforcée par le fait que Chiavacci et Delteil ne partiront pas à Baudrigues le 19 août 1944. Au lieu d'être exécutés avec Bringer et Ramond, il seront relâchés par les Allemands lors de leur départ. Delteil ira même témoigner en faveur du sous-chef de la Gestapo de Carcassonne à son procès en 1953 à Bordeaux. Quant à Maurel - employé SNCF, né à Verzeille-, la Gestapo ira perquisitionner chez lui mais ne réussira pas à l'arrêter. Un coup de chance ? 

    Revenons un peu à l'ordre de repli qu'aurait demandé par lettre Jacques à Jean Bringer...Ceci est une pure invention, car la veille (28 juillet 1944) le maquis de Villebazy s’était déjà replié sur Missègre. Il n’avait pas besoin des ordres de Myriel puisqu’il s’était déjà replié. De plus, lors de la grande réunion qui s’est tenue ce jour-là à La digne d’aval, Myriel a pu être tenu au courant de ce repli. Sachons que le maquis de Villebazy était placé sous les ordres de Négrail, chef du secteur de Limoux. La digne d’Aval et Missègre en faisaient partie.

    26904476_10214419187821185_56150825397435333_n.jpg

    La maison qui logeait Bringer avant son arrestation


    Il nous semble que jamais Jacques n’a demandé un ordre de repli à Myriel. La lettre amenée par Fau aurait pu être faussement signée de Jacques et le mot de passe donné par un complice. Bringer serait ainsi tombé dans un piège. Quels complices ? Chiavacci et Maurel ne sont sans doute que la face immergée de l'iceberg. Curieusement, Chiavacci bien qu’emprisonné par la Gestapo et à la Libération, par la Police politique, finira ses jours tranquillement. Pourquoi aurait-on dénoncé Bringer ? Les mobiles ne manquent pas : Politique, financement de la Résistance, vols des parachutages.

    L'engagement de Jacques dans le 81e régiment d'infanterie

    Général Zeller. 15 décembre 1944.jpg

    © Centre de la mémoire combattante

    Le général Zeller à Carcassonne en décembre 1944

    La fille d’Antonin Arnaud vient de naître. Nous sommes quelques mois après la Libération de l’Aude et l’ancien chef du maquis de Villebazy décide de continuer le combat contre les Allemands. Il s’engage avec le 81e RI formé à Carcassonne le 15 décembre 1944 par le général Zeller. Le lieutenant « Jacques » conserve son grade d’ancien FFI dans le 1er bataillon commandé par le capitaine Frank, alias Lucien Maury. Ce dernier avait été le chef du maquis de Picaussel dans l’Aude. Dans ce même bataillon, se trouvent le capitaine Martinet et le lieutenant Fontrouge.

    Le 16 février 1945 à quatre heures du matin à Niffer (Alsace), Jacques décède à la suite de ses blessures. Une rafale de mitraillette l'atteint à la tête et au thorax. L' acte de décès est dressé par Jacquemond Marius, sous-lieutenant au 81e régiment d’infanterie, sur la déclaration de Camarata Jean, médecin adjoint au 81e RI et de Arrecot Paul, infirmer au 1er bataillon du 81e RI. Les circonstances de la mort de Jacques ne sont pas très claires... 

    "La veille de sa mort, Antonin Arnaud, réussit l’exploit en plein jour sur le nez des blockhaus ennemis, de s’emparer d’un canot pneumatique camouflé sous la berge et utilisé par les patrouilles allemandes pour passer le Rhin. Il a supplié son chef de bataillon (Lucien Maury, NDLR) de lui laisser traverser le Rhin pour opérer une reconnaissance en territoire allemand. Mais si, en raison du dispositif peu dense cette opération est facile pour les patrouilles nocturnes de l’ennemi, la réciproque n’est pas vraie. Le chef de bataillon s’est donc refusé à sacrifier des hommes de l’autre côté du Rhin où l’ennemi est puissamment organisé." (Annuaire des anciens du 81e RI - Lucien Maury)

    De son côté, le capitaine Piquemal (Bataillon du Minervois) rapporte que : "Ricaud fait un rapport à Régis Bès sur les circonstances de la mort de Jacques : le lieutenant a dit à ses hommes qu’à partir de ce soir, il n’y aurait plus de sommations. Ordre de tirer à vue. Peu de temps après, Jacques était atteint - suite à une méprise, par une rafale de mitraillette tirée à bout portant par l’un de ses hommes."

    Le lieutenant Antonin Arnaud obtient la citation suivante à titre posthume le 24 mars 1945 du Lieutenant-colonel Gauvin (81e RI), accompagnée de la Croix de guerre avec étoile de bronze.
    "Chef de Corps Franc. Officier intrépide, brave jusqu’à la témérité, volontaire pour toutes les missions dangereuses. Est tombé mortellement frappé au cours d’une embuscade sur les bords du Rhin, à l’Est de Niffer, le 15 février 1945." 
    Le 18 décembre 1946, Mme Arnaud reçoit l’avis de décès avec la mention « Mort pour la France », ainsi que deux attestations de décès pour que ces enfants puissent être adoptés par la Nation.

    Tué ou assassiné

    D'après des militaires que nous avons interrogés, le tir par méprise serait pratiquement impossible. Si nous retenions l'hypothèse d'un acte volontaire de la part de l'un des hommes, il faudrait étudier les raisons d'un éventuel règlement de compte. Soit, on a fait payer à Jacques l'arrestation de Bringer. Ceci nous paraît improbable compte tenu de ce que nous avons exposé plus haut. Soit, une vengeance s'est opérée au sein du bataillon. Qui pouvait lui en vouloir ? Au mois de juin 1944, Jacques fit fusiller Marcel Basque au sein de son maquis, accusé d'être un milicien et d'avoir volé le châtelain de Ladern. Y avait-il l'un de ses frères dans le 81e régiment d'infanterie ? Est-ce l'œuvre d'un résistant ayant, comme beaucoup, rejoint le maquis en juillet 1944, où d'un milicien engagé dans le bataillon pour se blanchir de ses fautes ? Notons la présence de B dans le 2e bataillon du 81e RI qui transporta le corps du capitaine Charpentier, assassiné dans la clinique Delteil le 6 septembre 44. Il y a aussi M qui sera condamné en 1952 par le tribunal militaire de Bordeaux pour assassinats et vols. 

    Sources

    Archives du Service Historique de la Défense

    Archives de l'Aude

    Annuaire des anciens du 81e RI

    _____________________________________

    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2018

  • Ces Carcassonnais qui ont tourné dans "Le miracle des loups" en 1961 avec Jean Marais

    Inutile de rappeler que le film "Le miracle des loups" d'André Hunebelle fut tourné en 1960 dans la Cité de Carcassonne, au lac de Saint-Ferréol et sur le vieux pont de Rieux-en-Val. Nous avons déjà consacré un article à ce sujet. Aujourd'hui, il nous parait intéressant de nous attarder sur les Carcassonnais qui participèrent au tournage. Qui se souvient que parmi eux, deux furent choisis pour doubler les deux héros du film : Jean Marais et Rosa Schiaffino ?  

    Hélène Mailhol

    Enversdudécor HélèneBeneteau3.jpg

    Hélène Mailhol épouse Bénéteau, née à Puicheric. Elle était coiffeuse rue Aimé Ramond et avait pour l’habitude de sortir le samedi soir avec une amie dans un bar musical Le Club.

    Un soir Jean Alary lui parle du tournage du Miracle des loups et lui présente André Hunebelle dont elle ignorait qu’il était réalisateur. Celui-ci lui dit qu’elle a à peu près la même stature que Rosanna Schiaffino et lui propose d’être sa doublure. Elle refuse d’abord car elle travaille mais le salaire pour 4 jours représentant 2 mois de travail elle finit par accepter. Pensant que sa patronne ne lui donnerait pas ces 4 jours, elle lui dit qu’elle ne se sent pas bien. Elle joue la doublure de l’actrice italienne pour les scènes tournées au lac de Saint-Ferréol. Rosanna Schiaffino tournait en effet deux films en même temps, l’un à Carcassonne, l’autre à Nice et faisait des allers-retours entre les deux lieux de tournage. Hélène l’a donc remplacé pour le réglage des éclairages et mouvement de caméra et pour quelques scènes où l’on ne voyait as l’actrice en gros plan : une scène dans les bois, une scène de dos dans les bras de Jean Marais qui a été charmant avec elle, lui a demandé si elle n’avait pas trop le trac et signé un autographe.

    Elle a ensuite fait partie des figurants en costumes pour la scène de l’entrée de Louis XI à Carcassonne. Péronne. Seules les personnes aux premiers rangs étaient habillées en costume. Elle se souvient avoir mangé avec l’équipe dans une cantine sous une toile de tente et côtoyé ainsi Jean Marais et Guy Delorme et un peu Roger Hanin. Quand elle a repris le travail le lundi, sa patronne lui a demandé si elle allait mieux. Quand Hélène a répondu oui, la patronne lui a sorti le journal où elle était en photo, présentée comme doublure de R. Schiaffino.

    (Témoignage recueilli par Isabelle Debien)

    Francis Bassoua

    Mailhol.jpg

    Francis Bassoua et Hélène Mailhol

    Francis Bassoua avait été choisi pour doubler Jean Marais, lors des séquences tournées au lac de Saint-Ferréol. Comme d'ailleurs Hélène Mailhol, pour Rosanna Schiaffino.

    Jeanine Baluc

    Capture d’écran 2018-01-13 à 09.32.40.png

    Une jeune carcassonnaise Jeanine Baluc née à Fleury d’Aude, ancienne élève du lycée de la Cité est repérée par A. Hunebelle. Il lui propose de faire des essais qui s'avèrent positifs. Elle est engagée pour le rôle de la camérière de Jeanne de Beauvais et double à l’occasion R. Schiaffino. Au moment du tournage, elle aspirait à devenir actrice, avait un projet de film avec René Clair et de disque chez Barclay. Mais son nom n'est semble-t-il pas passé à la postérité.

    (Texte d'Isabelle Debien)

    Gérard Authier

    Miracle des loups 5 G. Authier et Bernard Génie.jpg

    Gérard Authier, à droite

    A ce moment, je suis au lycée Saint Stanislas, en cours ! Un groupe de jeune dont mon copain Bernard Génie décide d'aller toquer au bureau du Directeur, le Chanoine Louis Estagerie, un brave homme qui nous donne l'autorisation d'absence. Le 6 avril, nous nous trouvons devant le château Comtal pour la sélection. il valait mieux être soldat que seigneur ou paysan car le cachet journalier était plus élevé. Le 7 avril, je me retrouve dans le chemin de ronde déguisé en paysan à côté de Jean Marais qui se glissait au pied de la muraille pour une courte scène. Le lendemain j'étais costumé en seigneur placé dans la tribune du tournoi, le 9 était repos dominical et le 10, j'assistais à l'arrivée du Roi à Péronne, Louis XI joué par Jean-Louis Barrault (montée vers la porte d'Aude) Les autres jours mon copain Bernard et moi avions réussi à être sélectionné pour un rôle de soldat et nous avons assisté au tournoi appelé " jugement de Dieu" qui dura plusieurs jours pendant lesquels, nous étions quasiment au garde à vous durant toute la journée alignés le long du terrain. L'équipement était lourd mais c'était une belle expérience qui permit de voir de près, et évoluer de grands acteurs dans des scènes épiques où les nombreux trucages avaient beaucoup d'importance.

    Miracle des loups 2.jpg
    Le mardi 11 avril avait lieu à l'Odéon une soirée de gala au profit des vieillards avec la présence de Jean Marais, du préfet, du maire, enfin de toutes les autorités civiles militaires et religieuses, comme on disait à l'époque. Le film présenté en grand spectacle était la Princesse de Clèves qui venait de sortir à Paris et donc les deux acteurs principaux étaient Jean Marais et Marina Vlady. La grande salle de l'Odéon était comble. J'y assistais sans acquitter mon ticket d'entrée ! Savais-je déjà à 17 ans que les plus fortunés ne paieraient pas leur place et que l'argent récolté ne changerait guère le quotidien de nos miséreux vieillards ? Belle soirée où tout le gratin carcassonnais s'était donné rendez-vous, mais où personne ne partagea son manteau en deux pour le donner aux pauvres.
    Vanités des vanités ... tout est vanité ! (Gérard Authier)

    Antoine Espanol

    tony1.jpg

    Le jeune Antoine Espanol, plus connu aujourd'hui sous le pseudonyme d'Anton de Ciutad. Le "gafet" se tenait à côté de Jean Marais, pour immortaliser l'instant par une photographie.

    Maryse Coquille

    Maryse.jpg

    Maryse Coquille et sa sœur Dominique avec Jean Marais.

    Jacques Blanco

    882705476.jpg

    Au centre, Jacques Blanco. 

    Parmi les 300 autres figurants, nous pourrons citer MM.Fredien, Guy Tissière, Villalba, Canis, Azizi, Sabatié. Combien en oublions-nous ? Si vous aussi vous avez été figurant dans ce film, transmettez vos anecdotes afin d'améliorer cet article. Les photos sont également les bienvenues.

    Sources

    Journaux Locaux

    Isabelle Debien, Gérard Authier

    L'envers du décor / Georges Savi

     ______________________________________

    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2017

  • Petits tripatouillages politiques à Carqueyrolles après la Libération

    Nous savons par le témoignage de Lucien Roubaud, alors chef du Comité Régional de Libération, qu'un petit nombre de résistants intellectuels, fréquentant la chambre de Joë Bousquet s'étaient organisés afin de se distribuer les postes au moment de la Libération. Dans la Résistance audoise (Lucien Maury / 1980), Roubaud ne paraît pas tendre avec le creuset littéraire de la rue de Verdun.

    299989195.jpg

    Lucien Roubaud

    "Existait aussi à Carcassonne un groupe de résistants qui se préoccupaient de choisir les hommes devant occuper les postes importants à la Libération. Je le sais, car un émissaire est venu me proposer le poste d'Inspecteur d'Académie. J'ai décliné cet honneur, Gilbert de Chambrun, alerté, est venu contacter ce groupe qui a refusé de faire autre chose que la propagande orale et la préparation de l'après-libération."

    Cette réflexion doit être éclairée par un évènement survenu au début de l'été 1944. Le mot propagande prend ici tout son sens dans sa bouche. En effet, lors d'une réunion du Comité Régional de Libération, une vive altercation opposa Gilbert de Chambrun et Lucien Roubaud d'une part, à Henri Noguères et Francis Missa d'autre part. Ces derniers, membres du Parti Socialiste clandestin, souhaitaient faire de la propagande afin de placer les socialistes après-guerre au sein des futurs comités de libération. A contrario, Roubaud qui n'était d'aucun parti à cette époque, même s'il avait des sympathies pour le communisme, ne voulait pas entendre parler des socialistes. Il fallait d'abord libérer militairement la région. La commission des conflits du Conseil National de la Résistance fut saisie ; elle donna raison à Roubaud. La haine et la rancune fut si féroce que dans l'Histoire de la Résistance d'Henri Noguères (5 volumes), il n'y a pas une ligne sur Roubaud. Cherchez un nom de rue dans Carcassonne à celui qui, avec Albert Picolo - un autre oublié - organisa la Résistance dans notre ville. Vous n'en trouverez pas... Plus la Libération de l'Aude approcha et plus la politique d'avant-guerre reprit ses droits. Au sein des comités, on plaça les hommes pour remplacer les Vichystes à la tête des mairies, préfecture, Conseils départementaux, etc.  Charpentier, chef des parachutages de l'Aude, sera retrouvé mort entre Palaja et le Mas des cours le 6 septembre 1944. L'enquête conclura que le Résistant fut tué dans la clinique Delteil par le Dr Cannac. Lors du procès de ce meurtre, une partie des résistants Carcassonnais dira que Charpentier était un traitre ; l'autre partie, extérieure au département défendra la victime comme un authentique patriote. Or, Charpentier était un protégé d'Henri Noguères, dont il défendra la mémoire en se portant partie civile. La pauvre victime n'a t-elle pas fait les frais d'une vengeance sur fond de querelle politique ? Tout ceci mérite réflexion...

    P1060164.jpg

    © Médiathèque de Carcassonne

    Joë Bousquet par Bernon

    Revenons au groupe d'intellectuels dont parle Roubaud, désireux selon lui de se partager les postes. Le 28 décembre 1944, on apprend dans le Midi-Libre que le poète Joë Bousquet va devenir le président du Syndicat d'Initiative. Jusqu'à présent, le Dr Jean Girou occupait ces fonctions.

    "Il faudra, dit J. Bousquet, lui assigner dès maintenant un but assez lointain. Ce but pourrait être de jeter les bases d'une société franco-anglaise. Ce ne sera pas une simple succursale de la société franco-anglaise de Paris. Cette société sera autonome et son but sera de faire coopérer les deux pays par le dedans, par l'âme même et non pas seulement par la tête. Carcassonne est le lieu rêvé pour la réalisation de tels projets. Il est difficile de trouver en France un lieu plus apte à faire séjourner des Anglais pendant un temps relativement long. Il pourrait s'établir une entente entre les hôteliers pour que cette publicité soit commune. Une deuxième conséquence d'un ordre différent serait de toujours servir le Syndicat d'Initiative pour favoriser l'échange scolaire des jeunes gens et jeunes filles entre l'Angleterre et la France. On pourrait chaque année envoyer quelques bons sujets aptes à profiter des voyages et de même nous recevrions en France des jeunes Anglais et jeunes Anglaises. Une troisième conséquence serait de ressusciter l'ancien bulletin du Syndicat d'Initiative, mais en élargissement grandement sa portée. On demanderait à d'excellents écrivains d'y apporter leur talent et nous pourrions ainsi donner à ce bulletin un intérêt international. Il serait possible également de s'adresser aux directeurs des revues anglaises, pour qu'ils nous fassent parvenir des livres édités en langue anglaise. Il se constituerait ainsi assez rapidement une précieuse bibliothèque. Enfin, pour assurer l'unité d'action de l'hôtellerie audoise, il serait nécessaire d'obtenir la création d'une fédération des hôteliers audoise."

    3551196817.png

    © Musée de Narbonne

    Jean Girou

    Si Bousquet prenait la tête du Syndicat d'Initiative, le Dr Girou devait-il en être alors exclu ? Les tripatouillages sur fond de querelles politiques et de règlements de comptes battaient leur plein. Nous n'avons pas trouvé, pour le moment, d'enquête du comité d'épuration concernant Jean Girou. Toutefois, l'ancien président de l'ordre des médecins de l'Aude s'était rangé plutôt du mauvais côté. Il restera président de l'ESSI (Syndicat d'Initiative de l'Aude) jusqu'en 1963, année où il on lui indiqua la sortie. Dans un courrier à René Nelli, il manifeste son amertume.

    "Merci d'abord pour le témoignage d'amitié dans mon éviction scandaleuse de l'ESSI à Carcassonne menée par Sablayrolles avec la complicité de Drevet, Noubel et Bonnafous."

    A la lumière de ces quelques réflexions, il appartient à chacun désormais de se faire une idée sur la vie politique Carcassonnaise, telle qu'elle fut menée depuis la Libération. 

    Sources

    ADA 11

    Archives Nationales

    Midi-Libre / 18.12.1944

    __________________________

    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2017