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Vieux quartiers

  • L'école des sorciers d'Harry Potter n'est-elle pas à Carcassonne ?

    On la croirait sortie de l’imagination de la romancière J-K Rowling et aurait pu servir de décor extérieur pour le tournage des films d’Harry Potter, cette maison atypique dans Carcassonne a toujours suscité de nombreux fantasmes. Découpez ses contours et créez à l’arrière-plan une nuit de pleine lune traversée par quelques chauve-souris, vous aurez une ambiance d’Halloween. Quels secrets sont enfermés dans l’histoire de cette maison ?

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    Fils d’un homme d’affaires issu d’une famille de pareurs de draps, Mathieu Camille Laborde (Carcassonne 1865- Montolieu 1955) naît au domaine de la Madeleine près du hameau de Montredon. Après avoir été admis au concours des Ponts-et-chaussées, il épouse en 1888 Marie Alès (1869-1945), la fille d’un tonnelier originaire de Sigean installé derrière le Palais de justice. Le couple aura deux enfants : Emilie Anne (1887) et Marthe (1896). Mathieu Laborde fait alors l’acquisition d’une maison au n°18 (actuel n°20) de la route minervoise dans lequelle il vit avec sa famille. Lorsque survient le décès d’Adolphe Alès (1834-1890), l’employé des Ponts-et-chaussées décide de quitter l’administration pour prendre la succession de son beau-père. Dans la presse locale, on lit : « Maison Alès aîné, Laborde, gendre successeur. Vente et location de futailles. Route minervoise.

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    Les bureaux de Laborde, n°18 route minervoise

     » Le choix de s’installer dans ce nouveau quartier, à proximité directe du Canal du midi et de la gare de chemin de fer, s’explique d’autant plus que les barriques débarquent directement depuis les quais. La société Vidal frères située à l’angle de l’avenue Foch fabrique des fûts ; Mathieu Laborde propose surtout de louer des wagons-foudres. Adieu le transport par péniches, on achemine le vin par le rail. Laborde a donc parfaitement saisi l’opportunité de transformer l’artisanat de beau-papa en une affaire juteuse. Il fait donc l’acquisition de terrains  derrière la rue Tourtel, appartenant à Pierre Casimir Emile Montpellier, maître de forges à Quillan.

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    © Généanet

    Prosper Montpellier, adjoint au maire de Roullens

    Conseiller général d’Axat et membre du parti orléaniste, Pierre Casimir Emile Montpellier administre également les biens du comte de la Rochefoucauld. Issu d’une famille de propriétaires de Roullens, avec son frère Prosper - marchand de bois - il possède de nombreux terrains à l’arrière de la rue Antoine Marty. Il échange en 1871 avec la ville la couverture de l’aqueduc qui passe dans la future rue Tourtel contre des parcelles pour urbaniser le quartier. C’est ainsi qu’après la mort de Prosper en 1892, en échange des terrains qu’il avait laissés à la ville pour le percement de la nouvelle artère, son nom fut donné à l’actuelle rue Montpellier. En bordure de celle-ci, Mathieu Laborde fait construire les ateliers de sa société de location de futailles. Son développement est tel qu’il créé une succursale à Azille en 1897.

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    Les établissements Laborde vers 1910. Le bâtiment à l'arrière a été détruit au début des années 2000 pour construire la Résidence Montesquieu.

    Trois ans plus tard, Laborde administre la Société méridionale des wagons-foudres, nouvellement fondée au premier étage du Grand café continental. Son siège social s’établit dans ses ateliers jusqu’en 1906, date de leur déménagement au n°40 de la Grand rue (actuel n°38, rue de Verdun).

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    Les tonneliers de chez Laborde

    La fortune aidant, l’entrepreneur ne peut guère se contenter désormais du standing d’une maison sans envergure. Il fait entreprendre au début du XXe siècle la construction d’une maison de maître dans un style Art-nouveau, très inspiré du nord de la France. Elle est très probablement achevée au cours de l’année 1905, au moment où la famille vient y habiter.

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    Le portail a conservé les initiales de Mathieu Laborde

    Nous attribuons l’exécution de cette demeure à l’architecte Léon Vassas, inspecteur des travaux du Grand Palais à l’Exposition Universelle de 1900. Les plans ont pu être dessinés par Charles-Emille Saulnier (1828-1900) et achevés par Vassas, mais en comparant ce que fera plus tard l’architecte montpelliérain à Carcassonne c’est peu probable. Le 25 août 1900, Saulnier annonce qu’il vient de s’assurer pour l’exécution de sa nombreuse clientèle, la collaboration de Léon Vassas. Saulnier se sait malade ; il mourra au mois de décembre 1900. Alors pourquoi Vassas ? Il suffit de regarder l’architecture des Bains douches (1909) et de la maison Lamourelle (1911) pour observer des similitudes dans le dessin.

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    Le n°11 de la rue Montpellier est sans doute le plus beau témoin de l’architecture du début du siècle à Carcassonne. Il s’agit d’une maison meulière à pan coupé, construite avec des matériaux typiques de l’architecture Art-nouveau comme la brique, la céramique, le verre peint.

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    Tout nous renvoie aux habitations observées dans la vieille ville d’Arcachon ou de Nogent-sur-Marne, par exemple. Sur les deux côtés de la façade, on retrouve les Initiales ML entrelacées dans un élégant fer forgé. Son maître d’oeuvre nous a laissé une véritable œuvre d’art !

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    La Société méridionale des wagons-foudres

    Avait-il dissimulé une partie de son argent dans la construction cette maison pour échapper au fisc ? En 1923, Mathieu Laborde est condamné pour dissimulation sur les bénéfices de guerre. La loi du 1er juillet 1916 taxait les bénéfices réalisés pendant le conflit grâce aux commandes militaires, mais l’entrepreneur ne s’était pas départi de la somme de 1 007 924 francs. Condamné par le tribunal correctionnel de Carcassonne à quatre mois de prison et 10 000 francs d’amende, il sera  seulement relaxé en appel de la prison. Les wagons-foudres de Laborde continueront à rouler sous la direction de sa fille, Madame Fabre-Laborde, à la gare de Madame près de Villalbe. Ils disparaitront avec la mort de leur fondateur le 15 juin 1955.

    Sources

    Toujours selon le même travail de recherche que les articles précédents.

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  • Inédit ! La construction urbaine de l'avenue Foch, près de la gare

    Au début du XIXe siècle, la ville basse est encore à l’étroit entre ses remparts médiévaux. Seules quelques maisons se distinguent ça-et-là au milieu des champs à l’extérieur des vieilles fortifications. Au bout de la rue des Carmes (actuelle rue Clémenceau), après avoir franchi la route impériale vers Toulouse, nous rencontrons le Faubourg du Tivoli en bordure duquel l’hôtel Saint-Jean Baptiste se trouve bien esseulé. La traversée du Canal du midi à travers la ville que les consuls avaient refusé au XVIIe siècle, va totalement modifier l’aspect de ce quartier. Au mois de mai 1810, le nouveau port édifié en bordure de la colline de Grazaille, coupe la route menant à Villemoustaussou. Le pont Marengo chevauche le canal afin de ne pas rompre le passage sur cette voie de communication vers la Montagne noire. L’endroit devient assez rapidement un carrefour commercial grâce aux nombreuses denrées débarquées depuis les péniches sur les quais. A l’extrémité du pont en direction de la ville, l’auberge du sieur Embry accueille les commissionnaires et leurs attelages. Elle longe le canal sur la partie comprise entre le boulevard du Canal (avenue Joffre) et la nouvelle route vers le minervois.

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    © ADA 11

    Plan du Canal du midi en 1814

    L’ensemble de ces bâtiments ne va pas cesser de s’agrandir et de se moderniser durant la seconde moitié du XIXe siècle, avec l’arrivée d’un nouveau moyen de communication révolutionnaire : le chemin de fer. Le canal du midi n’est pas en nos murs depuis quarante ans que déjà l’acheminent des marchandises par bateaux devient obsolète, supplanté par la machine à vapeur. Dire que les élus Carcassonnais ont payé à la compagnie du canal un prix bien plus élevé pour traverser la ville, que celui qu’elle leur avait proposé à l’époque de Pierre-Paul Riquet. En 1857, la ligne des Chemins de fer du Midi passe à Carcassonne et la gare des voyageurs s’établit en face du port du canal. La route vers Villemoustaussou doit être déviée pour contourner les bâtiments ; le nouveau pont de Sébastopol enjambe le canal.

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    © Henri Alaux

    La situation en 1850

    Sur l’ancienne auberge Embry, le commissionnaire de transport Alfred Sarrand (1811-1857) s’est proposé de louer en 1855, deux grands magasins pour le grains et le fourrage ainsi qu’un pavillon avec partie de jardin pour café ou restaurant. Ce dernier local, situé en face de la gare projetée, promet d’offrir toutes les garanties de réussite. Les entrepôts de la Maison Sarrand seront occupés par Jules Esquirou pour le dépôt des charbons et des cokes. Au mois de mai 1867, le cafetier François Soum créé à l’Hôtel Sarrand, un affenage pouvant contenir jusque’à quatre-vingt bêtes dans des conditions d’installation inconnues jusqu’ici à Carcassonne. Originaire de Puichéric, ce propriétaire détenait autrefois le Café du nord, à l’angle de la rue des Carmes. Nous l’avons connu sous le nom de Grand café Continental.

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    © ADA 11

    Le Grand hôtel du chemin de fer

    C’est d’après nos déductions à cette époque que fut construit le Grand hôtel du chemin de fer en bordure de l’actuelle avenue Foch. Il possède un affenage avec de grandes écuries et l’on peut encore apercevoir une tête de cheval sculptée au sommet de la façade. Le long du jardin des plantes (square Chénier) partent chaque jour les voitures et omnibus en direction des villages alentours. Le Grand hôtel du Chemin de fer voit se succéder un grand nombre de propriétaires et de gérants à partir des années 1880. Pierre Resseguier, chevaux et voitures de louage, déménage depuis le faubourg de la paix le 11 décembre 1883 au Grand hôtel Jaffus. Le même établissement appelé également Grand hôtel de la gare passe entre les mains de Pierre Théron, fondateur du Grand hôtel du parc à Vernet-les-Bains. Il s’adjoint les services en cuisine de Justin Chaffiol, originaire de Laure-Minervois, dont la restauration bourgeoise ravit les gourmets. C’est ce dernier qui achètera l’établissement le 16 octobre 1886 (Meublé à neuf - 40 chambres) et le gardera jusqu’à ce qu’il devienne l’Hôtel Bristol.

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    L’hôtel possède en son extrémité, un joli pavillon de style Napoléon III qui est occupé par le Café Adé. Acquis par Bernard Sicre et son épouse Jeanne Cassignol, il portera ensuite le nom de Café des deux gares. Tout simplement parce que la gare des tramways de l’Aude s’est établi en face sur l’autre côté du port. Au début du XXe siècle, les rails du tramway longent la route minervoise, passent devant le Grand hôtel de la gare et arrivent à leur terminus à la station dont nous venons de parler. Le café des deux gares fut pendant de nombreuses années le siège de l’A.S.C lorsque celle-ci jouait à XV.

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    La maison Dumontant-Drevet, au centre

    En descendant l’avenue Foch, nous nous trouvons en face d’une très jolie façade mitoyenne à l’hôtel du Chemin de fer. Nous avons connu à cet endroit, le café musical Le métronome. L’immeuble appartient à ses débuts à la famille Dumontant-Drevet. Jean-Marie Dumontant possède une usine de plâtre en 1848 sur la route de Pennautier, ainsi qu’une maison sur le bord du canal près du pont de la paix qui sera expropriée par la Compagnie des Chemins de fer du midi. Le couple s’installe alors sur l’actuelle avenue Foch à côté de l’hôtel du chemin de fer.

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    Après le décès de son mari, Jeanne Marie Drevet adopte en 1885 Paul Drevet, son neveu. Né le 10 novembre 1855 à Sainte-Croix de Quintillargues (Hérault), fabricant de plâtre, sera juge au Tribunal de commerce, Président du conseil d’administration de la Société méridionale de Transport de Force et Président de la Chambre de commerce de 1905 à 1923. Ce n’est qu’après la mort de sa mère adoptive en 1890 que Paul Drevet entreprend des travaux sur la façade de l’habitation au bord du canal. Elle s’orne d’un balcon et de plusieurs sculptures décoratives dans le style de l’Art-nouveau.

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    La dernière belle demeure sur cette partie de l’avenue est la propriété de la famill Vidal. Fils de Raymond Vidal, pareur de draps, Louis Vidal (1827-1893) s’installe comme marchand de bois et menuisier. Avec ses ouvriers, il assemble des charpentes avant de se tourner vers la fabrication des fûts, dans ses ateliers donnant sur la route minervoise. Son fils Edmond (1857-1936), bachelier es-sciences, travaille dans l’entreprise familiale puis se tourne vers le négoce des vins. Au début des années 1880, au moment où la viticulture représente la principale activité industrielle du département, les barriques arrivent par le port du canal du midi ou par wagons juste à côté du domicile des Vidal. Edmond qui s’est lancé en politique sur la liste municipale de Gaston Fédou, abrite les bureaux du journal républicain « Le bon sens ». Marié en 1885 à Jeanne Antoinette Bellonet originaire d’Agde, il créé la société Vidal frères cette année-là.

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    La fortune l’amène à bâtir une très belle maison de maître donnant sur la canal et un bâtiment avec des cuves à vin, sur la ruelle Montagné. Edmond Vidal devient un personnage important du Syndicat du commerce des vins, le Vice-président de la Chambre de commerce et l’administrateur de la Banque de France. Il reçoit le 22 mars 1930, la légion d’honneur. Son frère Gaston, né en 1862, occupe la fonction de maire de Pieusse jusqu’en 1919. La société Vidal frères, gérée par Denis Vidal, est liquidée le 13 décembre 1954. Il reste de cette famille, ce très bel immeuble dont nous ne savons rien de l’architecte. Nous évaluons sa date de construction autour des années 1885.

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    La maison Vidal frères, avenue Foch

    Sources

    Le bon sens, le courrier de l'Aude, la fraternité

    Etat-cil / ADA 11

    Listes de recensement de la population

    Annuaires 

    Base léonore de la Légion d'honneur

    Sans compter les heures passées à enquêter

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2020

  • À la recherche du riche passé architectural du boulevard Marcou

    Depuis les comblement des fossés ceinturant la Bastide au XVIIIe siècle, l’espace compris entre le Bastion des moulins et la Porte de Toulouse prit successivement les noms de Promenade Ouest, de boulevard du Calvaire, de boulevard du lycée (1883) et de boulevard Marcou (1898). Au milieu du XIXe siècle, on apercevait encore les vestiges des anciens remparts sur le côté droit en remontant vers l’actuelle place Davilla, tandis qu’à gauche s’étendaient les terrains encore vierges de l’enclos Gaubert. A l’instar du boulevard Saint-Michel (Barbès), le plan d’alignement de 1869 allait ordonner la construction des nouveaux immeubles parallèlement aux vieux murs médiévaux. Les très belles maisons de maître édifiées par les familles enrichies dans le négoce du vin et qui jalonnent le boulevard Marcou, témoignent encore de ce passé exceptionnel. Il s’agit d’une histoire méconnue, oubliée. Nous vous proposons donc de parcourir le boulevard Marcou à partir du côté gauche en descendant vers la place Davilla, puis de remonter par le côté droit vers le Calvaire.

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    Au mois de décembre 1871, Auguste Théodore Lauth (né à Strasbourg en 1843) qui vient d’acquérir une parcelle à l’enclos Gaubert, écrit à la mairie afin que celle-ci lui cède la partie du terrain communal qui borde la route n°119. Il se propose d’édifier une maison avec remises, écuries et magasins sur l’ensemble de sa future propriété. Cousin du banquier et maire de Strasbourg Ernest Lauth, Auguste Théodore avait émigré dans l’Aude avant l’annexion de l’Alsace-Lorraine à la Prusse comme son parent, le brasseur Frédéric Philippe Lauth. Avec son épouse Mélanie Gœtelmann († 1916), il avait acquis le domaine de Lacanade à Fontiès-Cabardès et avait placé sa fortune dans le négoce du vin. Fervent républicain proche des idées de Marcou, Auguste Lauth n’a aucun mal à obtenir la cession du terrain, mais à la condition que le plan d’élévation de la maison soit dessiné par l’architecte municipal (Léopold Petit), tout comme la grille délimitant le terrain. A l’instar des familles alsaciennes ayant émigré dans l’Aude comme les Lauer (brasseurs) ou Scheurer (organistes), les Lauth optent pour la nationalité française en 1872. Un lien relie Auguste Lauth à notre Cité médiévale ; il était cousin avec Emile Boeswillwald, l’architecte qui reprit les restaurations après la mort de Viollet-le-duc.

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    Le balcon de la villa avec son blason 

    A l’angle du boulevard Barbès s’élève donc à partir de 1873 une villa de maître, dont la façade n’a rien à envier à celles construites sur la côte d’azur à la même époque. Nous ignorons pour quelles raisons mais Lauth, devenu conseiller municipal et conseiller d’arrondissement, ne s’acquitte toujours pas de sa dette envers la mairie après douze ans. Après avoir fait construire à côté un nouvel immeuble de style Hausmannienn dans lequel il va loger, Auguste Lauth décide de louer sa villa à Amédée Labeaute en 1889 (Cf, Claude Marquié, La dépêche, 2001 d’après les souvenirs de Paul Detours). Permettez-nous de nous interroger. Le sieur Labeaute, propriétaire à Cailhau, s’était marié avec Cécile Thérèse Guillermine Guillard d’Arcy ; une jeune femme dont la généalogie nobiliaire remonte au moins au XVIe siècle. Comment donc un fervent républicain aurait-il pu orner la grille de sa ville de fleur de lys ?

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    Pourquoi donc le balcon est-il décoré avec les armes d’une famille aristocratique dont le symbole comme le heaume représente le titre de marquis ? Comment expliquer l’on ait donné le nom de « Villa Sainte-Gracieuse » à une maison construite par un protestant, eux qui ne reconnaissent aucun saint ? Sans compter que c’est le baron Detours (chrétien fervent et royaliste), héritier des Labeaute, qui s’installera ensuite dans cette villa jusqu’à sa vente à Joachim Estrade.

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    La maison d'Auguste Lauth, n°3. Sur le fronton, les initiales du maître des lieux "A.L"

    À la suite de la maison d’Auguste Lauth (n°3), Jules Bastide (époux d’Irma Paraire) vendit sa demeure à M. Rieux en 1892. Au numéros 7 et 9, la maison Carayol. Elle fait l’angle avec la rue de la mairie prolongée percée en 1881 et qui prend le nom du philosophe Jean-Jacques Rousseau en 1883. Au cours de la décennie la municipalité carcassonnaise, profondément anti-cléricale, décide de modifier les noms de rues. Les saints disparaissent au profit des philosophes des lumières (Voltaire, Rousseau) ou des illustres républicains comme Barbès.

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    Sur le prolongement du boulevard Marcou jusqu’au couvent des sœurs Marie Auxillaitrice (actuel immeuble Jaur), on trouve d’autres maisons de négociants : MM. Sigé (propriétaire de la métairie du Viguier), Victor Boyer et Léon Parlange (originaire du Cantal). Elles communiquent avec leurs magasins situés sur l’allée l’Iéna.

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    La clôture sur l'ancien rempart médiéval avec ses balustres

    Plaçons-nous désormais à l’angle de la rue de Verdun. Au n°97, vivait le médecin Emile Guillard D’Arcy, né en 1802 à Castelnaudary ; Il y mourra en 1866. L’une de ses filles, l’autre s’étant mariée avec Amédée Labeaute, épousa le lieutenant-colonel Ancenay en 1877. Cet officier nommé à Carcassonne pour prendre le commandement du 17e régiment de Dragons, y rencontra Marguerite Guillemine Félicité Guillard d’Arcy. Il vécurent jusqu’à leur décès dans la belle demeure du beau-père. Benoît Fernand Ancenay (Pouilly Saint-Genis 1837- Carcassonne 1904) décide en 1887 de solliciter l’alignement de sa maison le long du boulevard. Sur les vestiges des anciens remparts, il se propose d’embellir l’endroit avec une clôture surmontée de balustres. Elles sont l’œuvre de Léopold Petit. La ville de son côté, s’engage à faire enlever les lieux d’aisance et à accorder une ligne d’eau à M. Ancenay. Si à cette époque, on voyait encore les ruines de la tour de la porte de Toulouse et les remparts, les travaux les ont fait disparaître.

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    Le Café de l'Aude avec sa façade ornée de mascarons

    A l’angle de la rue Aimé Ramond (n°115) et du boulevard Marcou (n°6) se trouvait le Café de l’Aude tenu par Joseph Bendine (1822-1883). Originaire de Roquefeuil, ce tailleur de pierre avait fondé cet établissement au début des années 1870 avec son épouse Jeanne Rouzaud. Dans le nouveau quartier, ce lieu attirait les sympathisants du Cercle Barbès qui y tenaient leurs réunions. On y dansait et faisait la fête sous les lampions à la belle saison. En 1890, le fils Bendine emprunte 9000 francs au Crédit foncier pour moderniser et agrandir le café. Cinq and plus tard, il est vendu à Firmin Cuxac (originaire de Nébias), dont un membre de la famille possédait la Villa Roy. Après la Première guerre mondiale, l’établissement disparut au profit de Jean Ganet, marchand de machines agricoles.

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    Très bel immeuble modernisé et réhabilité par le Groupe Marcou

    Au n°8, ce bel immeuble a été construit sur le chemin de ronde du rempart médiéval sur demande de M. Protais puis des héritiers Bonnafous et Bérail vers 1880. Il fait l’angle avec la ruelle des Pénitents noirs, devenue la rue Arago.

    Merci à Jacques Blanco pour être allé me prendre quelques clichés sur le terrain

    Sources

    Délibérations des conseils municipaux

    Etat-Civil / ADA 11

    Le courrier de l'Aude, La fraternité

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