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  • 14 juillet 1942 : Une opinion publique Carcassonnaise sous surveillance...

    Le 14 juillet 1942, une importante manifestation en faveur de la République réunit au moins 2000 personnes à Carcassonne, malgré l’interdiction du gouvernement de Vichy. Parmi les personnes à l’origine de ce rassemblement se trouvait Albert Picolo, le docteur Henri Gout et Georges Bruguier. Tout ce monde défila fièrement à la barbe des partisans les plus fanatiques du Maréchal Pétain, le Service d’Ordre Légionnaire dont plusieurs membres intégreront en février 1943 la Milice départementale de l’Aude ; cette organisation française responsable de l’arrestation de juifs, maquisards, communistes, etc.

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    Au pied de la statue de Barbès qui avait été fondue par la mairie de Carcassonne, les manifestants républicains entonnèrent la Marseillaise. Le gouvernement de Vichy refusait qu'on la chante pour ne pas déplaire aux Allemands, mais il se disait patriote en collaborant avec eux.

    A la suite de cet évènement, le service de contrôle postal de Vichy intercepta de très nombreuses lettres, en prit connaissance avant de les remettre à leurs destinataires. Il fut ensuite dressé un rapport remit aux autorités compétentes de la préfecture. Autant dire que le S.A.C entre 1960 et 1981 et les écoutes téléphoniques de l’Elysées sous François Mitterrand n’avaient eu qu’à s’en inspirer. Aujourd’hui, les réseaux sociaux mis sous surveillance ne permettraient plus l’émergence de la Résistance et pourraient même envoyer très rapidement des milliers de dissidents dans des camps. 

    Les meneurs de la manifestation du 14 juillet 1942 ne tarderont pas d’ailleurs à être inquiété avant d’être incarcérés à la Maison d’arrêt de Carcassonne. Ci-dessous, une partie des lettres interceptées après la fête nationale interdite.

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    Le Service d'Ordre Légionnaire de l'Aude

    Jacques est furieux. Il y a eu en ville une grosse manifestation gaulliste, dans les 3000 personnes. Le préfet a empêché les SOL et les compagnons de disputer les manifestants. Jacques voulait se battre. Pauvre France. Pauvre Maréchal. Quelle ville Carcassonne…

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    Le 14 juillet a provoqué de la part des Gaullistes une manifestation devant la caserne Laperrine, devant Barbès, sur le boulevard. Ces cochons ont chanté la Marseillaise, parce qu’il ne leur était pas permis de chanter l’Internationale. Car à Carcassonne, les Gaullistes sont communistes. La police d’état est venue mettre de l’ordre à tout ça. Et je vous prie de croire que tout a été calmé. Cela m’a mise en colère et il a fallu que je parte. D’ailleurs, je n’étais pas la seule. Si vous aviez vu Henry, c’était effrayant, honteux, et ça me dégoûte des Anglais pour la vie…

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    Nous avons eu une belle manifestation sur le boulevard Barbès qui était noir de monde. Les SOL sont arrivés et la bagarre a été évitée de justesse par le préfet qui a fait montre de beaucoup de cran. Après une Marseillaise retentissante, la foule a défilé sans incident. Cependant, ce matin et je ne sais pas s’il n’y a pas une relation avec les évènements, nos chers hôtes de la Cité ont repris leur défilé chanté dans les rues, chose qu’ils ne faisaient plus depuis au moins un mois. Ils sont toujours corrects, mais leur nombre a diminué de moitié.

    Les hôtes sont les Allemands qui, bien qu'en zone libre, s'étaient installés à la Cité avec la Commission d'armistice.

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    Hier, 14 juillet on a manifesté autour de la statue de Barbès, tout Carcassonne était à voir, la contrepartie chantait la Marseillaise le poing levé, et quand la voiture des Allemands est passée tout le monde sifflait.

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    Vous avez certainement entendu de Gaulle inviter les « patriotes » à manifester à 6h30 sur les places publiques des villes le 14 juillet. Les Carcassonnais ont entendu cet appel, et nous Lorrains aussi. Donc, hier à Carcassonne, sur le boulevard, un monde fou attendait 6h30. A cette heure, la Marseillaise a été entonnée, répétée plusieurs fois avec d’autres chants républicains. La police de la ville est d’abord intervenue pour faire évacuer les promenades où au moins un millier d’hommes et de femmes montaient et descendaient. Alors un renfort de policiers d’Etat est arrivé et nous a fait circuler. Mais nous chantions toujours, et comme une voiture d’Allemands passait, on les siffles et hués. Quelques petites bagarres ont commencé entre les SOL et des patriotes. Et voilà à 7 heures et demi tout était à peu près calme. Tel a été le 14 juillet 1942 à Carcassonne et je crois, dans chaque ville.

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    Une relation lamentable vient d’arriver ce soir aux SOL de Carcassonne. Yves est rentré désespéré. On leur a fait faire une bourde monumentale à l’occasion du 14 juillet. Primo, ce matin quelques rares personnes avaient pavoisé et quelques SOL allaient prier ces personnes de retirer leurs drapeaux. Du moment que les monuments publics étaient officiellement pavoisés, les gens avaient aussi le droit de le faire… Ce soir a été pire. M. de Gaulle avait donné l’ordre à ses fidèles d’aller chanter la Marseillaise devant un monument rappelant la défunte IIIe (République, NDLR). Ici c’était devant le socle de Barbès puisque Barbès n’est plus là. On réunit quelques SOL à leur permanence, puis au moment où tous les Gaullistes (environ 2000) sont bien rassemblés, M. Imbart, ordonne à mes 60 SOL de foncer dedans. Le chef qui est sous Imbart, donne l’ordre contraire, le préfet se précipite, au devant d’eux, la police les empêche de passer. Ils se sont bagarrés avec la police. Et qui est un comble pour eux qui sont faits au contraire pour maintenir l’ordre. Imbart a démissionné, mais cela n’empêche pas qu’il ait ridiculisé à tout jamais les SOL dans Carcassonne. Avant de faire sa contre-manifestation, il aurait dû s’entendre d’abord avec le préfet et la police, ne pas arriver au moment où la manifestation battait son plein, surtout 60 contre 2000. Ils auraient seulement pu empêcher les rassemblements. J’espère bien que cette histoire ne s’est produite qu’à Carcassonne et que les autres chefs SOL n’auront pas fait de gaffes pareilles dans des endroits aussi importants. On ne peut soupçonner Imbart, mais il aurait agi pour « couler » ce mouvement, qu’il n’aurait pas mieux réussi.

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    En attendant, on se sent tout de même libre dans notre zone de demi liberté. On l’a vis au 14 juillet. Il y eut ici une manifestation assez imposante. Chant de Marseillaise, près du socle vide de la statue de Barbès. Les SOL ont voulu intervenir, mais en furent empêchés par le préfet en personne. Sera-ce la lutte du pot de terre contre le pot de fer ? Dans tous les cas, il y eut une gaffe quelque part. Ailleurs, le mot d’ordre venu de l’étranger a été suivi avec enthousiasme. Est-ce un plébiscite ou une manœuvre préparatoire ?

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    Georges vous a narré tout au long nos tribulations de mardi. Que j’étais anxieuse de ne pas le voir rentrer à plus de 8 heures. Que c’était beau et émotionnant cette soirée-là. Jamais, je ne l’oublierai. Quel enthousiasme encore pour notre bonne République. j’en ai pleuré et tremblé sur les jambes, que de monde ! Hélas, mon pauvre Géo aurait pu payer chez sa déveine de ses trouver au milieu de jeunes qu’il a voulu défendre pour quelques paroles bien inoffensives.

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    L’on nous a fait manger des œufs du Maroc qui étaient pourris, pas mal de gens ont été intoxiqués, ainsi que du mouton traité au formol. Je crois qu’ils veulent achever de nous empoisonner, le pain qui est immangeable, je crois que nous avançons avec tout cela à un cataclysme et ça commence bien. Ici, le jour du 14 juillet a été marqué à Carcassonne par une grandiose manifestation. La Marseillaise a été chantée au socle désert de Barbès par plus de 15000 personnes, une grande bagarre a été évitée par le préfet qui est intervenu à temps. Elle aurait été provoquée par les SOL sans le préfet, il y aurait eu des morts et des blessés ; cette société est une société de vandales puisque chez nous, une nuit ils ont cassé les grandes glaces chez les commerçants qui étaient républicains, d’ailleurs la police les a arrêtés. Ils étaient 7 de ce parti néfaste les SOL. Ils les ont relâchés apr§s 3 ou 4 jours de tôle. Si ça avait été du parti républicain, ils auraient été envoyés dans un camp de concentration. Voilà comment nous sommes gouvernés. A Marseille, il y a eu le 14, six blessés.

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    Ici, le 14 juillet un défilé préparé clandestinement a eu lieu à Carcassonne. D’origine républicaine sans conteste (Dr Gout, Bruguier figurant parmi les manifestants) la foule plusieurs milliers d’affamés ou insuffisamment rassasiés ont défilé devant le socle de Barbès en chantant la Marseillaise. Pas méchant du tout… cela a failli mal tourner avec les SOL qui seraient intervenus sans l’attitude énergique du préfet qui s’est montré pour une fois habile en cette circonstance. Quant aux SOL, ils se sont fait siffler et pour le ridicule ont bien rempli leur rôle… peut-être un copieux déjeuner avait annihilé leurs facultés de jugement en cette journée qui reste malgré tout notre fête nationale. 

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    Ceci est un fait paraît-il, il y avait 60 SOL et une centaine de placiers contre 4 ou 5000 manifestants ou curieux. Il a fallu que le préfet soit un homme pour prévenir la bagarre. Il donna l’ordre affirmatif aux SOL et aux policiers de rester tranquilles, et si les autres s’énervaient trop, il avait le droit recourir à l’armée. Personne ne bougea plus, cela vaut mieux, mais le point noir restera quand même. Il se pourrait qu’on mette les Carcassonnais en quarantaine, a-t-on chuchoté ce matin…

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    Voici le 14 juillet à Carcassonne ; défilé devant Barbès. De 15 à 20 000 personnes se sont groupées et ont chanté la Marseillaise et le chant du Départ. Si vous aviez vu cette foule en délire, comme il y faisait bon. On sentait un vent de liberté passer au-dessus de nos têtes. Comme c’était beau, des vieillards pleuraient, des poitrines se gonflaient comme jamais je ne l’avais vu. Des chants s’élevaient de tous les cœurs. Je ne puis vous décrire exactement car c’était trop puissant, trop touchant, c’était quelque chose dont je me souviendrai tout ma vie. Les SOL ont voulu faire du zèle, car ils désiraient la bagarre pour qu’on emboîte quelques uns.Mais rien ne s’est produit. Tout a marché d’une façon merveilleuse. le soir à 7h30, la moitié de la population s’est rendue au Monument. On a chanté la Marseillaise. Là, nous nous sommes dispersés. Puis vers 8h30, un petit groupe est allé décrocher le drapeau qui devait être salué par les SOL. Vers 9 heures, un autre petit groupe est allé enlever les lettres d’or qui étaient sur une gerbe de fleurs du monument aux morts où il y avait écrit de la part des « collaborateurs ». Cette belle phrase a été supprimée.

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    Le S.O.L de l'Aude sur la place Davilla en 1941.

    Le rapport de l'Inspecteur-adjoint au préfet de l'Aude

    Le 18 juillet 1942, l’Inspecteur-adjoint Pradleles, Président de la Commission de Contrôle Postal de Carcassonne écrit au préfet de l’Aude

    J’ai l’honneur de vous adresser ci-dessous le compte-rendu, que vous m’avez demandé, des réactions de l’opinion concernant, la manifestation du 14 juillet. A cette occasion, pendant les journées des 15,16 et 17 juillet et 18 juillet, 3871 lettres furent lues par les Services du contrôle. Du point de vue politique trois tendance se dégagent de la manifestation qui a eu lieu à Carcassonne, lors du 14 juillet.

    a/ Pour la majorité des manifestants le 14 juillet a été l’occasion de montrer leur attachement à la République. Les ex-parlementaires qui menaient le cortège ont renforcé l’idée de beaucoup que le gouvernement actuel n’était que transitoire et que bientôt l’ancien régime serait rétabli. De nombreuses personnes furent très émues par « cette manifestation républicaine ».

    b/ Les partisans de de Gaulle obéissant à un mot d’ordre de Londres, participèrent au défilé « pour montrer aux gens de Vichy et aux Allemands de quel côté étaient les cœurs ».

    c/ Certains qui étaient venus pour assister à une réunion purement patriotique furent stupéfaits de voir l’esprit qui y présidait.

    C’est cette dernière impression qui ressort en grand epartie dans le courrier où les correspondants constatent que la population est restée attachée à un régime et à des dirigeants qui ont mené le pays à la défaite. Beaucoup craignent que cette manifestation qui n’a pas été la seule en zone libre ait des répercutions profondes quant aux rapports franco-allemands particulièrement en ce qui concerne les prisonniers. Beaucoup donnent tort au gouvernement d’avoir laissé fêter le 14 juillet. Ils voient dans les manifestations qui eurent lieu des mouvements de désordre dirigés contre le Maréchal et son œuvre. On estime maladroite la position prise par Vichy à cette occasion qui aurait montré au grand jour le trouble des esprits et la désunion qui ne cesserait de régner parmi les Français.

    Ces diverses tendances ont naturellement amené des heurts qui ont forcé les quelques agents présents d’intervenir. La faiblesse du service d’ordre est sévèrement critiquée, les correspondants estiment que ceux qui en étaient chargés auraient été débordés si « ça avait mal tourné ». Le préfet est vivement pris à partie à cette occasion et accusé de collusion avec la bande des Sarrautistes « qui a mené la danse ». Aux dires de certains, c’est à la carence des services de Police qu’est due l’intervention du SOL qui à cette occasion est sévèrement jugé et accusé de maladresse même par des légionnaires qui, de ce fait, auraient donné leur démission.

    Par contre, de nombreux correspondants rendent hommage au préfet qui est venu lui-même sur les lieux de la manifestation et qui a su prendre les décisions judicieuses qui s’imposaient quand les choses faillirent se gâter par l’intervention du SOL.

    Source

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  • Marie-Paule Fabre assassinée par la barbarie nazie à Monze, le 17 juin 1944

    © memorial genweb

    Dans l’après-midi du 17 juin 1944, un soldat allemand qui avait déserté son unité de Panzer se présenta au domicile de M. Ferrié à Montirat dans l’Aude. Visiblement, Friedrich Walter ne semblait pas dans son état normal lorsqu’il insista auprès de Mlle Ferrié afin que celle-ci lui cédât un costume civil pour se rendre en Espagne. Comme la jeune femme se refusait à répondre favorablement à sa demande, le soldat se mit à saccager la maison en criant et en gesticulant. Sous le menace de son arme, il échangea alors son portefeuille contre celui de M. Ferrié, qui contenait sa carte d’identité et divers papiers personnels.

    Après quoi, cherchant à s’enfuir par tous les moyens, il épaula son fusil et tira en direction d’un motocycliste sans toutefois réussir à l’atteindre. Ce fou furieux, aussi dangereux qu’une bête sauvage traquée, ne s’en tint pas là. Il allait faire une première victime en la personne de Jean Llagonne qui venait d’avertir M. Ferrié que sa maison venait d’être pillée. 

    Friedrich Walter partit alors sur la route en direction de Monze. En chemin, il rencontra Marie-Paule Fabre et M. Caverivière ; il les força sous la menace de son arme, à l’accompagner. A Monze, il parvint à semer la terreur dans la population et, après avoir saccagé la maison de M. Caverivière, il repartit en direction de l’Alaric avec son otage. La jeune fille de 18 ans n’en menait pas large et par crainte du pire n’osait pas s’écarter de son ravisseur. Alertés, les gendarmes français et la Feldgendarmerie se mirent à la poursuite du déserteur. Mademoiselle Fabre tenta alors de s’enfuir mais le soldat allemand ne lui en laissa pas l’opportunité ; il mit fin précocement à la vie d’une jeune femme de 18 ans, innocente victime de la barbarie nazie et de sa propagande mortifère. Friedrich ne fut arrêté qu’après une chasse à l’homme assez longue et ramené à Carcassonne par la Feldgendarmerie. On ne sait ce qu’il est advenu de lui par la suite.

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    © L. Petit / Genweb

    Un monument fut érigé sur la colline de Monze en mémoire de Marie-Paule Fabre. Son inscription reprend les termes inscrits sur son acte de décès dressé le 19 juin 1944 à Pradelles-en-val où elle était née le 2 août 1926 : « A la mémoire de Marie-Paule Fabre, lâchement tuée par la police allemande le 17 juin 1944 à l’âge de 18 ans. » Or, l’enquête du 14 février 1946 de la Commission sur les crimes de guerres (U.N.W.C.C) révèle les faits et la vérité sur les causes du décès de Mlle Fabre. C’est à la lumière de ces détails que nous avons réalisé cet article qui, pour la première fois, évoque le souvenir douloureux de ce 17 juin 1944 à Montirat et à Monze. Nous espérons que des témoignages viendront enrichir prochainement notre article dans les commentaires de ce blog.

    Sources

    U.N.W.C.C (United Nations War Crimes Commission) / 14.02.1946

    Archives de victimes civiles / Cæn

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  • La construction des rocades de Carcassonne de 1980 à 2008

    Au début des années 1970, l’Etat subventionne un ensemble de mesures permettant l’équipement, la règlementation et l’exploitation de la voirie. Le premier Plan de circulation courra entre 1974 et 1980, époque au cours de laquelle les villes sont étouffées par l’engorgement dû au passage incessant des véhicules dans leur centre-ville. A Carcassonne, ce sont 40 000 véhicules dont 7000 poids-lourd qui traversent chaque jour le boulevard Omer Sarraut - classé comme Route Nationale 113 - pour rejoindre Toulouse. Les riverains n’en peuvent plus et la municipalité se désespère de voir enfin se terminer l’Autoroute et la rocade Ouest, dont les retards de construction sont imputables à l’Etat. En 1978, le premier tronçon de l’A 61 ne se pratique que dans le sens de Toulouse vers Narbonne. Quant à la rocade Ouest qui fait la liaison entre l’échangeur de l’autoroute et la route de Toulouse, il ne sera inauguré que le 18 février 1980. Entre-temps, la mairie oblige les poids-lourd à transiter par Montréal d’Aude et Bram pour rejoindre la capitale régionale de Mid-Pyrénées, ce qui ne fait que déplacer le problème dans ces petites communes. Certains parmi eux, s’affranchissant de la déviation, passent quand même dans Carcassonne ; les contraventions dressées par la police municipale n’y changent rien. Afin de dénouer ce nœud Gordien, le maire Antoine Gayraud prend un arrêté en 1979 interdisant aux camions de traverser la ville, mais cette mesure se heurte à l’autorité préfectorale. Celle-ci ne veut pas en entendre parler tant que la rocade Ouest ne sera pas achevée ; or, c’est bien l’Etat qui est responsable de ces atermoiements. La population devra donc patienter…

    Rocade Ouest

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    © Patrice Cartier

    Echangeur de Carcassonne-Ouest en 1980

    Mise en service à partir du 18 février 1980, cette portion de contournement de Carcassonne par l’Ouest se divise en deux parties. La première, va de la CD 118 à la CD 119 et est raccordée à la brettelle de l’autoroute A61. Elle a nécessité la mise en déblais, la réalisation de talus anti-bruits et un aménagement paysager complémentaire afin que les nuisances restent supportables aux riverains. La vitesse de référence à cette époque n’excède pas 60 km/h.

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    © Patrice Cartier

    La construction de Mammouth (Géant-Salvaza) et la rocade en 1981

    La seconde, va de la CD 119 à la RN 113. Son tracé ne présenta pas de difficultés particulières, mais se heurta à des contraintes naturelles comme le franchissement du Canal du Midi ou plus techniques, comme celle de la ligne SNCF Bordeaux-Sète. La vitesse de référence n’excède pas 80 Km/h.

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    Le pont sur le Canal du Midi en 1979

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    Le pont sur le Canal du Midi en 2019

    L’ensemble de la rocade coûta au total 35 millions de francs, financés pour 25 millions par l’Etat, 2 600 000 par la Société Autoroutière du Sud de la France et 7 millions par la ville de Carcassonne. Six ouvrages d’art et deux ouvrages de rétablissement de l’Arnouze furent construits tout au long de son parcours. A ceux-là, il faut ajouter la passerelle de 40m de long qui relie St-Jacques III et le Viguier depuis 1981.

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    Si le chantier prit autant de retard c’est à cause du délai excessif qui a précédé la signature de l’arrêté de cessibilité des terrains. Plusieurs associations constituées par des riverains ne souhaitaient pas vendre leurs parcelles et les négociations durèrent deux ans. Tout eut pour effet d’augmenter les coûts de construction et de prolonger l’attente.

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    Le pont de chemin de fer près de Leclerc en 1979

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    Le pont de chemin de fer en 2019

    Cette rocade Ouest dont nous venons de fêter les quarante années d’existence, présente aujourd’hui des carences inadaptées à la fluidité du traffic. Tout au long de la journée, deux goulots d’étranglement aux rond-points Géant-Salvaza et de Leclerc, forment des ralentissements de plusieurs minutes. Il deviendra urgent de trouver une solution, sans compter que les véhicules de secours n’ont aucune voie pour se frayer un passage.

    Liaison Sud

    Il faut ici emprunter le terme de liaison, tel qu’il fut donné par les pouvoirs publics lors de la construction. En effet, on ne saurait employer le nom de rocade pour une voie hétéroclite ressemblant à un boulevard extérieur prenant pour partie d’anciennes routes et une portion créée en 1981. La première tranche débuta par la réalisation de la partie comprise entre la route de Limoux pour rejoindre le nouvel hôpital général qui prendra ensuite le nom du maire Antoine Gayraud.

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    Le pont du Garigliano

    On édifia un pont sur l’Aude, longtemps communément appelé « Pont de l’hôpital » et qui, aujourd’hui, se nomme « Pont de Garigliano » en souvenir de cette bataille de 1944. La seconde tranche débuta le 1er juin 1979 par la construction d’ouvrages d’art et s’étend de la Cité médiévale au carrefour du lycée Charlemagne. Là, encore, le maire ne put lancer rapidement les travaux en raison des lourdeurs de l’administration de l’Etat, principal pourvoyeur de fonds du projet. La mise en circulation de la liaison sud prévue au début de 1981, dut attendre l’année suivante. Il s’agit aujourd’hui d’une route inadaptée aux risques de la circulation et qui n’offre pas de garanties de sécurité suffisantes. Lorsqu’on vient de la route de Saint-Hilaire, il faut couper la voie principale à un endroit où la visibilité est quasi nulle pour s’engager vers le pont de l’hôpital. Plusieurs personnes y ont laissé leur vie, comme les époux Carbo de Villalbe en 1994.

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    Une liaison dangereuse 

    La liaison sud est tellement peu rapide et accidentogène que les usagers préfèrent payer l’autoroute à l’échangeur de Géant-Salvaza et sortir à celui de Trèbes, que de se risquer à contourner par là. Est-il normal que le service public ne soit pas ici correctement rendu aux usagers, quand on dépense des milliards sur des rond-points le plus souvent inappropriés ?

    Rocade Nord-Ouest

    C’est sûrement le plus important serpent de Carcassonne ! Déjà, avait-il été évoqué en 1982 pour le second plan de circulation financé par l’Etat (1982-1988). En 1989, on visitait les lieux du futur chantier pour la portion allant de Leclerc au Pont-Rouge. Faisant fi de tout le passé historique, on acquit les terrains en bordure du talus de l’actuel Conseil départemental pour construire cette rocade sur l’ancien tracé du Canal royal du Languedoc. C’est en effet à cet endroit que passait l’ouvrage de Riquet jusqu’en 1810, année où il fut dévié dans Carcassonne. La terre et les déblais qui servirent à construire la voie provenaient du creusement des parkings souterrains ayant mis au jour des vestiges archéologiques. Tout ceci bien amalgamé, en dehors des règles et sans aucune protestation, fut concassé et déversé sur le chantier de la rocade. Cette portion fut inaugurée au début des années 1990. Là, encore une fois, il semblerait qu’il n’ait pas été prévu d’élargir la route sur le Fresquel car la rocade se trouverait en zone inondable. Aussi, on ne compte plus les ralentissements à cet endroit aux heures de pointe.

    Rocade Nord-Est

    Jusqu’en 2008, les automobilistes venant de Narbonne furent contraint de rentrer en ville puis d’emprunter la route minervoise pour rejoindre le Pont-Rouge. Les négociations entre le service des domaines et les propriétaires des terrains démarrèrent durant l’été 2001. Ce sont près de 36 ha nécessaires à la réalisation des travaux qu’il fallut acquérir. Sans compter le déplacement des lignes électriques à haute tension.

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    © plies.cerema.fr

    La rocade Nord-Est longe de 3100 mètres se dota de 5 ouvrages d’art dont deux sur la ligne SNCF Bordeaux-Sète réalisés par l’entreprise Castells et d’un viaduc sur l’Aude de 224 mètres. Il fallut attendre l’année 2003 pour que le chantier de ce dernier soit lancé par l’entreprise Baudin-Châteauneuf, spécialisée dans la réalisation de ponts. A son crédit, citons le pont de Tancarville, le Charles de Gaulle à Paris, les viaducs pour le TGV Méditerranée. Le viaduc de la rocade Nord-Est de Carcassonne long de 224 mètres, 12 mètres de large et 10 mètres de hauteur est le plus imposant de l’Aude après celui de Port-la-Nouvelle ; il aura coûté 4 millions d’euros. Les atermoiements de l’Etat alourdirent la facture sur deux ans, passant de 11 millions en 2001 à 23 millions en 2003 se répartissant ainsi : Etat et Région 27,5 %, Département et Ville 22,5 %. Le transfert de compétence de l’Etat vers le département de l’Aude en 2007, à un moment où le chantier n’était pas achevé, fut un cadeau empoisonné. Toutefois, les services du département surent relever le défi avec opiniâtreté.

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    © piles.cerema.fr

    Cette fois l’INRAP eut la chance de pouvoir effectuer 473 sondages sur 23 ha de terrain, soit 9,6% de la surface totale, pour la recherche archéologique préventive. Sur le plateau de Montredon, on a mis au jour des silos à grain et des fondations datant du Néolithique. Près de Berriac, un propriété et des bâtiments gallo-romains.

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    © JL Bibal / La dépêche

    L’ouverture et l’inauguration de la dernière rocade de Carcassonne se fit le 18 décembre 2008 en présence des représentants de l’état et des élus de la ville, du département et de la région. L’aménagement paysager se poursuivit jusqu’en 2010 avec la plantation de 2000 arbres pour un budget alloué par le département de l’Aude de 231 000 euros. Les Pins d’Alep, mûriers blancs, chênes verts, érables, saules et cornouillers  furent mis entre les mains de l’entreprise DLM Espaces verts. Il est regrettable que l’on ait pas choisit de planter quelques platanes que, par ailleurs, le conseil départemental fait abattre régulièrement sur nos routes et qui procuraient beaucoup d’ombres.

    Sources

    Bulletins municipaux 1979, 1980, 1982, 2004

    Journal télévisé F.R.3  Languedoc-Roussillon 1978

    La dépêche 2008

    Quelques souvenirs personnels

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