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  • Le stade nautique de Carcassonne, au Païchérou vers 1930

     On avait entendu parler vaguement les anciens au sujet d’une piscine naturelle au Païchérou dans laquelle une société de natation organisait des compétitions, mais à ce jour personne ne s’était penché sur le sujet. Nous avons donc souhaité combler une lacune en effectuant des recherches, afin de préciser ce qui, jusqu’à présent, restait de l’ordre du on-dit. A l’aide de la presse spécialisée de l’époque et des journaux locaux, il nous a été possible de retracer depuis sa création en 1927, l’histoire du stade nautique du Païchérou.

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    La plage 

    A cet endroit depuis le XIXe siècle, il existe une plage comprise entre le barrage élevé par l’ingénieur Henry Bouffet et la propriété de M. Charry, très prisée des Carcassonnais à la belle saison. A l’extrémité de la païchère, l’endroit est passé dans la légende populaire sous le nom « les enfers » en raison du remous et des tourbillons d’eau qui entraînèrent subitement de nombreux nageurs vers le fond du fleuve. Comment en l’espace de quelques secondes, la plage située en contre-bas pouvait-elle se retrouver sous plusieurs mètres d’eau et causer bien des noyades ?

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    © Martial Andrieu

    Baignade près du barrage du Païchérou vers 1900

    Il n’y a pas plus de monstre dans le Loch-Ness en Ecosse que de diable dans l’Aude… Tous les ans pour la réparations de ses usines, l’industriel propriétaire des Moulins du roi ouvrait les vannes de la digue du Païchérou, sans prévenir personne. Aussitôt, la plage se creusait de trous de trois mètres d’eau et tous les ans on enregistrait des noyades. Jusqu’au jour où la société de natation qui, nous le verrons, s’entraînait au-dessus du barrage découvrit par hasard les modifications dans le lit du fleuve. A ces frais, elle fit poser une pancarte qui évita aux baigneurs d’être surpris par la montée des eaux. Il fallut quand même attendre l’été 1935…

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    © Martial Andrieu

    Devant la piscine des Tritons de la Cité

    Les premiers balbutiements d’un club de natation à Carcassonne remontent à 1928 avec le "Sauvetage de l'avenir", mais il faudra attendre le 25 avril 1934 (Journal Officiel) pour que le premier club structuré voit le jour. Il s’agit des « Tritons de la Cité » placés sous la présidence de l’architecte départemental M. Bourely et la vice-présidence du Dr Lauze. L’association siège au Café de la comédie (rue Courtejaire) et à la guinguette du Païchérou.

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    © Martial Andrieu

    La piscine des Tritons de la Cité

    Un colosse de 2,02 mètres pour 155 kg, ancien seconde ligne de l’ASC à XV, est le capitaine de l’équipe de Water-polo des Tritons de la Cité. Il s’agit de René Galou (1909-1978) dit Babache qui avait pied dans l’Aude, là où les autres s’évertuaient à tenter de rester à flot. Il fut recordman régional du 200 mètres brasse en 3 minutes 8 secondes. Pour mémoire, le recordman du monde en 1936, l'américain Jack Kasley, nage en 2 minutes 37 secondes. Dans un bassin, pas dans un fleuve avec le courant ; c'est dire la performance de Galou.

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    Dans cette formation on relève également les noms de Fournier, Miquel, Garridou, Fages, Andrieu et Guilhem. Elle s’illustra en 1936 au cours de nombreuses rencontres régionales, non seulement au Païchérou mais également à Sète, Perpignan, Cerbère, etc. Notons le passage d’un article du Languedoc sportif qui illustre la mentalité de l’époque : « Cette partie ne produit pas l’impression des matchs joués la semaine précédente, lors des championnats. Sans doute, parce que les équipes étaient mixtes. »

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    © Martial Andrieu

    Dans cette piscine naturelle aménagée dans le fleuve faute d’infrastructure adaptée, nageurs et dirigeants avaient créé de toutes pièces leurs installations : ligne d’eau, plongeoir, planches de virages… Au début des années 1930, l’ouvrier n’avait guère l’occasion ni les moyens d’aller à la mer. Il fallut attendre les premiers congés payés le 20 juin 1936, votés grâce au Front populaire. C’est dire si bien peu de gens avaient appris à nager, néanmoins grâce aux Tritons de la Cité les écoliers de moins de seize ans purent passer le brevet de nageur scolaire. L’épreuve comprenait un départ plongé sur une distance de 25 mètres sans limite de temps.

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    Au moment des compétitions dont certaines avaient lieu en nocturne, une vaste tribune en bois et trois rangées de chaises étaient disposées au bord de l’Aude en face de la guinguette. Le 14 août 1939, on assista à la traversée de Carcassonne sur une distance de 2,5 km avec Thierry, Quintilla, Cadenac (Juniors) et Nunez, Ribes, Saurel, Garridou et Sampiétro (Séniors). Les Tritons de la Cité comptaient également les nageurs suivants : Lespinasse, Mario, Lambert, Cau, Vordy, Grossetête, Saunière, Huc, Colombier, Ressiguier, Reynès dit "Souplard" et Molinier.. Mario, qui fit office d’entraîneur, quitta le club en 1941 pour Cannes où il devint moniteur.

    Malgré les efforts des dirigeants du club, l’engouement pour les compétitions de natation à Carcassonne restait encore marginal après guerre. La municipalité préférait investir pour le rugby à XIII bien plus populaire, plutôt que construire une piscine. Les promesses ne manquaient pourtant pas… Dans les souvenirs de Jacques Blanco, les membres du club qui avaient quitté le fleuve depuis la fin de la guerre s’entraînèrent dans le Canal du midi, puis dans un bassin industriel de la zone de l’Estagnol en 1958.

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    © Nathalie Amen-Vals / L'Indépendant

    La piscine du Païchérou

    Il faudra attendre 1959 pour que la mairie daigne bâtir la première piscine de la ville au Païchérou. Et encore… Parce que M. Quintilla s’engagea à donner le terrain jouxtant sa guinguette. L’inauguration aura lieu l’année suivante, sous l’égide de la municipalité de Jules Fil dans laquelle Henri Gastou était adjoint au maire. Membre des « Dauphins de la Cité » qui venait de fusionner avec la section natation de l’ASC, M. Gastou occupait les fonctions de président du Comité du Languedoc. La fusion donna naissance au Club Nautique Carcassonnais dans lequel on retrouvait des pionniers comme Germain Lamy et Paul Vordy.

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    Dans quelques mois la piscine du Païchérou sera détruite. Le Pôle aqualudique de la ville de Carcassonne viendra prendre sa place. Ouverture prévue : novembre 2020.

    Sources

    Le courrier de l'Aude, L'express du midi, Languedoc sportif, l'Auto

    Recherches, synthèse et rédaction / Martial Andrieu

    Remerciements pour leur aide

    Serge Galou, Jacques Blanco

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2019

  • A l'origine du Monoprix, dans la rue de la gare...

    C’est en 1832 que Jean-Pierre Comeléran (1807-1872), fils d’un cultivateur de Montlegun, se lança dans le commerce en créant un premier magasin dans une ancienne maison de gravures, au numéro 28 de la rue de la Gare. Transféré ensuite sur une partie de l’emplacement de l’actuel Monoprix, il ouvrit une annexe un peu plus loin. En 1865, cette annexe fut jointe à la maison principale et dès lors, débuta une série d’agrandissements et d’inaugurations de nouveaux rayons qui aboutirent à la démolition de trois immeubles sur lequel il fut bâti le nouveau « Bazar Combéléran ». Cette transformation est l’œuvre de son fils Zephyrin (1842-1919) - Président du Tribunal de commerce de Carcassonne - qui obtint, par jugement du tribunal civil en date du 28 août 1976, que son nom de famille passât de Comeléran à Combéléran. Nous allons voir comment cet entrepreneur zélé réussit à développer l’affaire familiale en modifiant l’aspect de la principale artère commerçante de la ville.

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    © Martial Andrieu

    Comme nous pouvons le remarquer sur cette unique photographie ci-dessus, le bazar Combéléran était réparti avant sa transformation sur plusieurs immeubles mitoyens. acquis au fil des années. A l’angle, la chapellerie Léon Arnal se trouve occupée de nos jours par la boutique Kindiliz, anciennement Chipie. En 1898, Zéphyrin Combéléran obtient l’autorisation de détruire ses immeubles afin de construire le nouveau bazar auquel il donnera plus le nom de « Nouvelles galeries ». Au printemps, les travaux de démolition débutent et M. Combéléran demande l’alignement pour son futur grand magasin. Fruit d’un long et douloureux débat, la municipalité Sauzède avait voté le 21 octobre 1897 pour l’élargissement de la rue de la gare de quatre mètres, ceci malgré l’alignement de 1869 qui ne le permettait que sur deux mètres. Le projet Combéléran relança une polémique qui s’était un peu apaisée, car l’élargissement de quatre mètres n’était pas sans conséquences pour les finances de la ville. Si toute la rue devait désormais se plier au nouvel alignement, ceci ne se ferait qu’au prix fort des expropriations et des procédures judiciaires. L’express du midi, informe ses lecteurs qu’étant « donné les frais considérables qu’entraîneraient les façades et les superficies à acquérir pour opérer l’alignement, les loyers, qui sont déjà fort élevés dans cette rue, attendraient des prix fantastiques que les commerce se refuserait à payer. Il est incontestable que, pour la plupart des immeubles, il faudrait recourir aux procès et aux jurys d’expropriation et la ville sait ce qu’il en coûte, soit par le différent Patry, soit par le différent Roumens, place aux herbes. »

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    Après avoir été déboutée par la préfecture suite aux préconisations du Conseil des bâtiments civils, la mairie va s’adresser au gouvernement afin d’obtenir gain de cause. Renvoyée vers le préfet de l’Aude Rouzier-Joly, la décision fut la même et la ville dut se contenter d’un recul de deux mètres. C’est la raison pour laquelle l’actuel Monoprix se trouve en retrait de la rue. Il l’est effectivement de deux mètres sur l’alignement, mais de quatre au niveau de l’entrée sur le côté saillant donnant rue de la République. Une entorse à la règlementation…

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    Le 15 mai 1899, les « Nouvelles galeries » sont inaugurées. Trois jours avant, le curé de Saint-Vincent était venu bénir le nouvel établissement à la demande des époux Combéléran, en réunissant l’ensemble du personnel. Dix ans plus tard, le patron fêtera en grande pompes l’anniversaire du magasin et mettra en avant les 77 ans de la création de l’enseigne. Zéphyrin Combéléran mourra le 4 juin 1919 à Carcassonne.

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    Jusqu’au début des années 1920, le nom gardera celui des « Nouvelles galeries » en restant dans le giron de la famille. La création de la Société des Galeries de Paris (Bazar, nouveautés, alimentation) dont le siège s’établit à Carcassonne, aura pour effet de prendre possession de l’ancien Bazar Combéléran. A cette époque, le bâtiment avait gardé sa structure d'origine : sous-sol, rez-de-chaussée et étage. On accédait à celui-ci par un escalier situé au fond et en face de l'entrée qui desservait l'étage d'où, en s'appuyant au balcon, on pouvait regarder le rez-de-chaussée. Quant au sous-sol, il fut inondé par un violent orage le 5 juin 1963.

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    La famille Coquille devant les Galeries de Paris

    Dans les années 1970, le directeur est M. Georges Gros et son responsable national, Bruno d’Aboville. On parle alors de Galeries de Paris, Monoprix. Les vieux Carcassonnais disent encore qu'il vont faire leurs courses aux Galeries. Malgré la disparition de l'enseigne, le nom est resté dans le langage courant.

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    © Claude Marquié

    Monoprix en 1978 lors de la piétonnisation de la rue Clémenceau

    Monoprix, enseigne fondée en 1932 et désormais propriété du groupe Casino, rythme la vie commerciale du centre-ville de Carcassonne depuis plus de quarante ans. Si jamais Monoprix venait à fermer, ce serait la fin de l’ensemble des boutiques de la Bastide dans un secteur hautement sinistré par l’exode vers les zones à la périphérie. Aussi, chacun y va de sa prière et de ses incantations afin que ce bâtiment reste ouvert. Cette année il a fêté ses 120 ans ; une belle occasion pour lui souhaiter un bon anniversaire et un prochain ravalement de sa façade.

    Sources

    Recherches, synthèse et rédaction / Martial Andrieu

    Courrier de l'Aude, Express du midi, Etat-Civil...

    Photo en-tête : Midi-Libre

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  • La mémoire d'Henri Gout passée sous silence à Carcassonne...

    C'est parce qu'aucun responsable politique de l'Aude - à fortiori de gauche - et qu'aucun journal local ne l'a évoqué dans ses colonnes, qu'ici nous vous rendons compte d'une célébration qui est curieusement passée sous silence à Carcassonne. Le 10 juillet dernier, la mémoire du député Henri Gout - futur maire de Carcassonne - a été honorée par le Président de l'Assemblée Nationale à Vichy. Capture d’écran 2019-08-03 à 14.41.02.png

    © Droits réservés / Assemblée nationale

    Richard Ferrand rendit hommage aux 80 parlementaires réunis en Congrès à l'opéra de Vichy qui, le 1er juillet 1940, refusèrent courageusement de voter les Pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Seuls deux parlementaires de l'Aude s'y opposèrent tandis que six s'associèrent à la majorité favorable à la nouvelle constitution : Jean Bousgarbiès, Léon Castel, Jean Guilhem, Jean Mistler, Clément Raynaud, Albert Sarraut. A l'occasion du 79e anniversaire, une plaque a été dévoilée sur la façade de l'opéra de Vichy. Elle porte les noms d'Henri Gout et de Léon Blum (Député de Narbonne).

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    Le vote des Pleins pouvoirs dans un contexte particulier lié à l'armistice, sonna la fin de la République et du régime parlementaire. La gouvernance était remise entre les mains d'un seul homme, avec les conséquences que nous connaissons. L'acte des 80 courageux sera ensuite réprimé par le gouvernement de Vichy, à tel point que certains finiront emprisonnés ou déportés.

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    Le Congrès à Vichy le 1er juillet 1940

    A La Libération, alors que les anciens parlementaires ayant voté les Pleins pouvoirs seront rendus inéligibles et frappés d'Indignité nationale, le Dr Henri Gout deviendra maire de Carcassonne.

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    Henri Gout

    (1876-1953)

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