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Portraits de carcassonnais - Page 28

  • Que devient la maison de l'historien Gustave Mot (1885-1979) ?

    Qui connaît ou à entendu parler de Gustave Mot à Carcassonne ? À dire vrai trop peu de personnes, mis à part les historiens locaux. Pourtant, cet employé à la SNCF fut toute sa vie un passionné de sa ville. Une espèce d'autodidacte qui nous laissa un ouvrage sur l'histoire de la ville basse.

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    Mot fait partie de cette armée des ombres, qui a travaillé et travaille encore bénévolement pour l'amour de l'histoire locale. Un très grand nombre d'entre-eux n'ont jamais suivi de cursus universitaire, mais la passion qui les anime renverse tous les préjugés sur leur capacité de recherche. Ils connaissent les moindres recoins de la ville et apportent aux plus érudits, un savoir indispensable à leurs travaux.  

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    À sa mort en 1979, Gustave Mot a légué à la ville de Carcassonne sa maison située aux numéros 89 et 91 de la rue Jues Sauzède. Pendant de nombreuses années, elle fut occupée par le GARAE avant son installation dans la rue de Verdun. Cette maison appartient aujourd'hui à un particulier ; cela signifie t-il que la ville ou le département s'en est dessaisi ? Y avait-il une clause testamentaire du défunt qui indiquait ce que devait devenir ce bien ? On ne le saura certainement pas, mais quel manque de respect pour la mémoire du défunt !

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    L'imposte au dessus de la porte d'entrée de la maison de Gustave Mot

    Cette demeure a une histoire et surtout un véritable cachet. Joë Bousquet en fit une description précise lorsqu'il la visita. Nous avons retrouvé des photographies de son intérieur.

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    "Sur les murs, au plafond, dans les coins se dressaient des draperies, des bibelots, des meubles, tous de style Charles X, et si richement ornés de sphinx, de lions, de dragons que cette profusion d'appliques, donnait à l'ensemble la physionomie d'un décor chinois. Plus loin s'ouvrait une autre galerie, tapissée de noir et coupée de grecques rouges, elle offrait le spectacle d'une espèce de tombe étrusque extrêmement bizarre. Sans oublier un buste de Manon, sculpture en bois due à Gustave Mot, que l'on aurait dit surprise lors d'un chant, bouche ouverte, au moment où la voix module les notes les plus hautes. A l'arrière enfin régnaient les jardins aux murs incrustés de mosaïques et de symboles, où les fûts de colonnes antiques gênaient parfois la marche vers d'éclatants arbustes, orangers et citronniers, qui devaient leur vigueur et leur couleur au sang que chaque jour l'érudit allait recueillir pour eux auprès des abattoirs."

    (Les Audois / 1990)

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    Les vitraux

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    Le jardin de l'orangerie

    Comment a t-on pu laisser partir ce patrimoine ?

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    Une rue et un impasse portent le nom de Gustave Mot, derrière le cimetière La Conte.

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  • Paul Tomas, chef machiniste et régisseur de plateau au Théâtre municipal

    Originaire de Peyriac-de-Mer, Paul Tomas entre d'abord au service menuiserie de la mairie de Carcassonne en 1951. Il a alors 17 ans. De cette époque, il se souviendra des corridas organisées à Patte d'oie dans des arènes démontables en bois. On y voit les toreros Luis Miguel Dominguin, Ortega et Ordonnez.

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    © Carlos Recio

    De septembre 1954 à mars 1957, il sert sous les drapeaux au Maroc dans l'armée de l'air. Il travaille à l'entretien des bases et voyage de Rabat à Casablanca, de Mekness à Fez. Retour en France et à Carcassonne, où il participe à la création des décors du premier Festival de Carcassonne en 1957.

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    L'équipe des décors du Théâtre municipal

    De 1965 à 1971, il est employé comme machiniste et voit passer les plus grands artistes : Brel, Brassens, Ferrat, Bécaud, etc... Les souvenirs bons ou moins bons se bousculent dans sa tête :

    "L'un des meilleurs souvenirs est la venue de Gérard Lenorman qui, en février 1980, a fêté avec nous son anniversaire en toute simplicité. En revanche, le souvenir du passage de Dalida est beaucoup moins plaisant. Une lampe avait grillé pendant le spectacle, et elle était entrée dans une colère noire à l'entracte."

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    Paul Tomas et Jean Alary

    Jean Alary - directeur du Théâtre municipal - propose en 1979 à Paul Tomas un billet de chef de plateau. L'aventure dura quatorze années. Malgré un temps de réflexion, Paul accepta.  Dès lors, il mena de main de maître, tel un chef d'orchestre, son équipe de dix techniciens.

    "Au cours de ces années, s'est créée une amitié et une solidarité qui est propre aux gens du théâtre et que l'on ne retrouve pas ailleurs."

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    Paul Tomas, Mme Olivan, Jeannot Resplandy, Thierry Ravillard

    Du coeur et de la disponibilité, autour de qualités dont a dû faire preuve Paul Tomas. A de nombreuses reprises, il a fallu déployer beaucoup de patience pour répondre aux caprices des stars. Son dévouement fera dire à son épouse : "Tu devrais faire installer un lit au théâtre".

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    L'équipe du Festival 1984

    On reconnaîtra le jeune Georges Bacou qui est aujourd'hui le directeur du théâtre 

    Depuis 1957 et jusqu'en 1993, Paul Tomas s'occupa de la régie et de l'équipe technique du Festival de Carcassonne. Les machinos étaient des agents municipaux se portant volontaire pour la durée de l'événement culturel estival. Il y eut des coups de gueule et des fous rires. Une bête noire surtout : la pluie ! Des souvenirs, ces techniciens en ont à la pelle mais il y en a un qui est cher à leur coeur.

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    © Droits réservés

    Grillade au Festival de la Cité

    "Deux fois, l'opéra de Paris est venu à Carcassonne. A chaque fois, on a vécu des moments formidables et une vraie complicité s'est installée entre nous. Les soirées se sont terminées par des grillades conviviales. Comme on sait le faire dans notre midi."

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    © Midi Libre

    L'équipe technique du Festival 1993

    Paul Tomas prit sa retraite en novembre 1993, non sans un pincement au coeur. On ne laisse pas tant de souvenirs et d'amitiés derrière soi sans une certaine nostalgie. Il aura connu deux directeurs : Jean Alary et Jacques Miquel. Aujourd'hui, Paul Tomas vit retiré à Roullens entouré de l'affection de sa famille et de son petit-fils Nathan qui a tant d'admiration pour ce papy si méritant.

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    © Carlos Recio

    Paul Tomas avec le brigadier du théâtre

    A titre personnel, j'ai connu Paul Tomas depuis mes débuts sur scène à l'âge de cinq ans, jusqu'à sa retraite. Un homme peu bavard et parfois austère, mais quelle efficacité dans le travail ! Comme beaucoup de ceux qui paraissent bougon, Paul Tomas possède une grande générosité d'âme. Finalement, un paradoxe dans ce midi où les gens sont souvent superficiels en amitié. Après sa retraite, il laissa la place à Michel Choureau. Ensuite, la ville de Carcassonne et la directrice du théâtre Madame Nicole Romieu, ne remplacèrent pas les machinistes attitrés, partis à la retraite. Ce fut le début de la fin, car machiniste est une véritable profession dans l'art du spectacle. Cela ne s'improvise pas ! Fini les grillades, fini les rigolades...

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    Mme Olivan (Costumière), Mme Pujol (Billeterie), Paul Tomas (Régie de plateau); Thierry Ravillard (Lumières), ?, Jeannot Resplandy (Machinerie), ?

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  • Où est passée la donation "Ferdinand Alquié" à la ville de Carcassonne ?

    Dans le discours qu'Henri Tort-Nouguès prononça le 27 février 1989 à l'occasion de l'inauguration de la plaque apposée sur la façade de l'illustre philosophe Carcassonnais, on apprend qu'il a été fait donation à la ville de Carcassonne de l'ensemble de ses archives. Renseignements pris auprès de témoins de l'époque, c'est M. Tort lui-même qui aurait convaincu Denise Alquié - la veuve du philosophe - de céder l'ensemble des livres, discours, correspondances, manuscrits à la la commune. Cette transaction se serait faite dans les règles et devant notaire ; après quoi, l'ancienne Bibliothèque municipale en aurait reçu l'inventaire. Or, depuis le déménagement de celle-ci en 2010 vers les locaux de Montquier, nous ignorons ce qu'il est advenu de cette donation. Nous ne doutons pas qu'elle ait été bien conservée. Toutefois, il est dommage que les universitaires n'aient pas connaissance de ce dépôt, qui n'est en l'état accessible que sur demande. En effet, depuis sept ans Carcassonne n'a plus de Bibliothèque. Cela peut paraître extraordinaire pour une capitale départementale, mais c'est ainsi.

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    © Droits réservés

    Raymond Aron, Ferdinand Alquié, Vahl et Maurice Merleau-Ponty

    Nous voici donc réunis ce soir du 27 février 1989 à Carcassonne pour rendre hommage à notre compatriote Ferdinand Alquié, professeur à la Sorbonne et membre de l'Académie des Sciences Morales et Politiques, décédé il y a de cela quatre ans le 28 février 1985, après une implacable maladie.

    Tous ceux qui sont ici ce soir et parmi eux des anciens élèves, et de très vieux amis, savent les liens anciens et profonds  qui m'unissaient à Ferdinand et à Denise Alquié, à travers Pierre Marie Sire dont il était l'ami le plus fidèle, et connaissent l'attachement que celui-ci et son épouse avaient gardé pour la terre languedocienne où ils aimaient retrouver leurs vieux amis et les souvenirs d'un lointain passé. Et ce soir, nous sommes réunis pour évoquer sa mémoire mais aussi pour une autre raison.

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    © Droits réservés

    Henri Tort-Nouguès et Ferdinand Alquié

    En effet, Madame Ferdinand Alquié vient de faire don à la ville de Carcassonne, à la Bibliothèque municipale d'un lot exceptionnel de manuscrits, d'oeuvres de notre maître, d'ouvrages et de Revues de philosophie et de littérature, d'une correspondance importante et des cours enregistrés lors de son séjour aux Etats-Unis à l'université de Yale.

    Aussi je veux tout de suite, au nom des élèves, des étudiants, des amis, de tous ceux qui l'ont connu, admiré et aimé, apporter le témoignage de notre gratitude et de notre reconnaissance à Madame Alquié : un grand merci, ma chère Denise, empreint d'affection car je ne pourrai poursuivre ce discours. Mais je veux aussi, au nom de tous ses amis, et me faisant l'interprète de Madame Alquié, adresser, cette fois à Monsieur Raymond Chésa, Maire de Carcassonne, le témoignage de notre gratitude. Lorsque je suis venu vous parler de ce projet, vous avez tout de suite accepté de recueillir ce lot de manuscrits et de livres qui viendront enrichir le patrimoine culturel de notre ville. Vous avez compris, à l'heure où l'on parle tant de décentralisation culturelle, quel intérêt majeur il y avait pour la ville de Carcassonne et sa Bibliothèque Municipale, de posséder cet ensemble d'oeuvres philosophiques, littéraires et artistiques.

    Un grand merci au nom de ceux qui sont présents, au nom des Carcassonnais, merci au nom de tous ceux pour qui la culture authentique est une composante et une valeur essentielle de l'homme. Et merci aussi de servir ainsi la mémoire d'une de nos compatriotes les éminents.

    Merci aussi à Madame Eychenne, à René Piniès, au fidèle entre les fidèles J-P Amiel de l'aide précieuse qu'ils m'ont apporté dans cette difficile entreprise. Car Ferdinand Alquié était né à Carcassonne le 18 décembre 1906, au 2 rue Omer sarraus, à l'endroit où s'élève aujourd'hui Le Terminus et avait résidé longtemps au 2 boulevard de Varsovie.

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    Son père, Joseph Alquié était professeur de physique au vieux lycée de la rue de Verdun. Et c'est dans cet établissement que Ferdinand Alquié accomplit sa scolarité avec comme condisciples Jean-Paul Amiel, René Nelli, Maurice Nogué, Henri Ferraud et tant d'autres que je ne peux citer. Il eut, comme professeur de philosophie, Claude Louis Estève, qui eut une influence déterminante dans le choix de sa carrière et lui fit connaître Joë Bousquet. Très rapidement, il deviendra un élément des plus importants parmi ceux qui se réunissaient autour du grand poète blessé, avec Claude Louis Estève, René Nelli, François-Paul Alibert, Pierre et Maria Sire, Molino, Jean Ballard.... Avec eux, il créa la revue "Chantiers" et comme eux, il sera un des fidèles collaborateurs des "Cahiers du sud".

    Elève exceptionnellement brillant, après le baccalauréat, il montera à Paris poursuivre des études de philosophie, licences, diplômes d'études supérieures, et sera reçu 1er à l'agrégation de philosophie en 1931. Il passera un an à Mont-de-Marsan, puis reviendra comme professeur au lycée de Carcassonne de 1932 à 1937. Nommé à Paris, il enseignera dans différents lycées (St-Louis, Rollin, Condorcet) dans les classes de première supérieure, à Henri IV, et à Louis-le-Grand, jusqu'en 1947. Docteur es lettres, il reviendra dans le midi comme professeur à la Faculté des lettres de Montpellier de 1947 à 1952, puis comme professeur à la Sorbonne jusqu'en 1976, date de sa retraite. Il sera élu à l'Académie des Sciences Morales et Politiques en 1975 et partagera sa retraite entre Paris, Montpellier et Carcassonne où il revenait assez souvent. Et comme je le disais tout à l'heure, il s'éteindra à Montpellier le 28 février 1985.

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    © Droits réservés

    Pierre Clarac remet l'épée d'Académicien à Ferdinand Alquié

    C'est là, tracée à grands traits, résumée et schématisée, une carrière universitaire exceptionnelle. Alquié fut un homme de grand savoir et de réflexion. Il fut aussi homme d'action, et un professeur admirable, un philosophe authentique, mais il ne fut pas que cela. A une époque particulièrement sombre de notre histoire, alors que certains se faisaient les théoriciens de l'engagement et du risque (sans s'engager et rien risquer), Ferdinand Alquié rejoignait à Paris les rangs de la Résistance. Membre du réseau "Darius", il échappa même de justesse, avec son épouse Denise, à une souricière de la Gestapo, dans cette rue de Levis que je connais si bien.

    Titulaire de la médaille de la Résistance et de la Croix du combattant volontaire, à la Libération il reprit simplement ses cours de philosophie dans son lycée avec sa modestie, sa scrupuleuse conscience, ce dévouement total qu'il mettait dans l'exercice de son métier. Il continue d'élaborer et d'échafauder une ouvre dont je crois pouvoir dire qu'elle est une des plus importantes, la plus marquante de notre siècle. Il n'est pas possible, dans le temps qui nous est imparti, d'énumérer et les titres de ses oeuvres et ceux de ses conférences et de ses communications innombrables. 

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