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  • Le congrès national de la jeunesse radicale, le 18 avril 1937 à Carcassonne.

    Albert Tomey lors du congrès de Carcassonne

    Le 18 avril 1937, le Congrès des Jeunesses Radicales se tint à Carcassonne sous la présidence de Jean Mistler,  député de l’Aude et président de de la commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale. Quelques 6000 personnes, selon le parti, s’étaient rassemblées dans la capitale audoise pour suivre les débats et les discours de la vieille garde du parti. En vérité, la salle de l’Odéum ne pouvait pas accueillir plus de deux mille personnes. Les parlementaires et maires des principales villes du pays avaient pris leurs quartiers à l’Hôtel moderne et du commerce, rue de la République. Parmi les soixante prévus pour prendre la parole, on notait la présence d’Albert Tomey (Maire de Carcassonne), Yvon Delbos, Albert et Maurice Sarraut, Clément Raynaud (Sénateur de l’Aude), Delthil (Sénateur du Tarn-et-Garonne), Gaston Riou (Député), Lamoureux et Sableau. A l’intérieur de la grande salle du manège de la caserne Laperrine, on avait aménagé le banquet de 3300 convives.

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    L'Odeum

    À cette époque, le parti radical socialiste est déjà depuis fort longtemps la première force politique du département de l’Aude. Au niveau national, celui-ci a fait alliance avec d’autres partis de gauche dans le gouvernement du Front Populaire, issu des élections de 1936. Tiraillé entre l’extrême gauche et les partis réactionnaires d’une droite fascisante, il a trouvé sa place dans une espèce de juste milieu républicain dans lequel se combattent les idées révolutionnaires : « Le parti radical est l’adversaire de toutes les dictatures et de ceux qui ne comprennent pas la liberté à sens unique », s’exclame Clément Raynaud. On revoit dos à dos, les communistes considérés comme les agitateurs des masses populaires, et l’extrême droite : « Si on était antifasciste, on ne pouvait qu’être radical », prétend Edouard Daladier. Le maire du Havre s’en prend sans le nommer aux sympathisants de Moscou : « Pas de drapeau rouge ! Pas d’Internationale ! Pas de poing levé ! ». Durant ce congrès, on en vient à remettre en cause l’intérêt de se maintenir dans la majorité gouvernementale du Front Populaire. Les jeunes radicaux souhaiteraient que l’on s’éloigne des partis marxistes. Marcel Sableau, le président des jeunesses radicales, enfonce le clou : « Le droit syndical ce n’est pas le sabotage du travail national. Le droit au travail, ce n’est pas l’éviction des travailleurs qui veulent librement choisir leurs syndicats et leurs chefs. » Les vieux dirigeants comme Albert Sarraut, cherchent à donner des gages à cette jeunesse. Le fils de l’ancien maire de Carcassonne Omer Sarraut, pose les conditions d’un soutien au Front Populaire : « Le Parti radical ne saurait s’acheminer vers une acceptation quelconque de la Révolution marxiste […] Il faut convaincre les masses ouvrières que si elles ont des droits, elles ont aussi des devoirs. La persistance du désordre social ne peut aboutir qu’à l’anarchie. A ce prix, nous restons attachés au Front Populaire. » Le 21 juin, Léon Blum (SFIO) démissionnera et le radical Camille Chautemps prendra la tête du gouvernement.

    En politique étrangère, c’est un mouvement profondément pacifiste. À l’heure où l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne ont choisi des dictatures, les dirigeants de la France préfèrent négocier la paix coûte que coûte avec leurs voisins. Quitte à se renier et à laisser Franco écraser la République espagnole à cause d’une non-intervention pour venir au secours de la démocratie. Comme Delbos, on s’évertue à dire en 1937 que la non-intervention abrègera la guerre civile espagnole : « Ai-je besoin d’ajouter qu’en même temps que nous voulons empêcher la guerre d’Espagne de se généraliser, nous souhaitons de tout coeur en hâter la fin ? Il est évident que plus la non-intervention sera effective, moins les hostilités pourront se prolonger. » Il est vrai que la peur du communisme chez les radicaux, les a peut-être inclinés à agir ainsi. Yvon Delbos s’explique : « Cette volonté de fermer toutes les issues par où la guerre pourrait passer explique notre attitude dans les affaires d’Espagne. Je sais, mes chers amis, que je n’ai pas besoin de la justifier devant vous. N’admettant pas la fatalité de la guerre, vous n’admettez pas davantage celle des conflits idélogiques qui y conduiraient. C’est pour éviter ce glissement avec le danger des rivalités dans les fournitures d’armes et de l’entrée en jeu des amours propres nationaux, que nous avons provoqué un accord de non-intervention qui avait, en outre, pour objet de laisser le peuple espagnol maître de son destin. » C’est sans doute ce qui poussa les radicaux, après que les républicains furent vaincus, à reconnaître le régime franquiste comme unique représentant de l’Espagne. Un régime qui avait chassé par les armes, un pouvoir démocratiquement élu par les urnes. Quel en fut le marché ? Franco s’engageait à ne point intervenir contre la France en cas de conflit avec Hitler et Mussolini. La France en retour rendait au dictateur les armes et l’argent de la République espagnole, placés dans notre pays. C’est le fameux traité Bérard-Jordana.

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    Albert Tomey, Yvon Delbos, Maurice et Albert Sarraut

    On rappelle l’attachement à la Société des Nations et l’on forge sa force dans l’alliance avec l’Angleterre : « Par là, les trois grandes démocraties d’Angleterre, des Etats-Unis, et de France sont comme la Minerve aux yeux clairs dont le glaive protégeait l’olivier. » Les radicaux se bercent d’illusions après avoir laissé Hitler violer la zone démilitarisée le 7 mars 1936. Il loue la médiation pour la paix et fonde leurs espoirs sur des alliances chimériques : « Le pacte franco-soviétique, que l’on brandit comme un épouvantail, mais qui n’en est pas moins une efface garantie de paix. » Staline n’a t-il pas brisé cet accord obtenu en février 1936, en signant le pacte germano-soviétique de non agression le 23 août 1939 ?

    Un an plus tard, une grande partie des radicaux votera les Pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Ils l’avaient déjà nommé comme ambassadeur de France auprès de Franco. C’est même un certain Jean Mistler qui fera rédiger l’acte qui enterrera définitivement la République. Le naufrageur de la République obtiendra en retour d’être placé au Conseil National de Vichy. Le Dr Tomey deviendra le Président du Conseil départemental de l’Aude, nommé par Pétain. Le Dr Henri Gout fut l’un de nos élus de l’Aude a ne pas se compromettre avec le régime de collaboration. 

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