On lui aurait donné le bon Dieu sans confession avec sa gueule d'ange de premier communiant et pourtant...
© ADA 11
C'est bien le diable qui se dissimulait derrière René Bach, agent du SD (Gestapo) de Carcassonne du 20 avril 1943 au 18 août 1944 après avoir proposé ses services comme interprète à la Kommandantur dès le 1er novembre 1943. Du haut de ses 23 ans, l'alsacien de Voellerdingen (Bas-Rhin) - Eh ! oui, il était français - a su se rendre utile et même faire preuve de zèle. Pour 3000 francs mensuels, plus quelques extras dérobés à ses victimes, il est passé en peu de temps, maître en coups de matraques et nerfs de boeufs.
La villa du 67 route de Toulouse
Affuté aux pires techniques d'interrogatoires comme celles de la baignoire ou des brûlures sur les doigts, simulant l'exécution par pendaison ou arme à feu, la villa de la route de Toulouse fut le théâtre de ses méfaits. Ne croyez pas qu'il n'en fut pas moins efficace sur le terrain, comme à Trassanel où à Belcaire.
© Pablo Iglesias
Le 28 juillet 1945, la majorité des jurés (Yvonne Marcillac, Pierre Carbonne, Albert Sirven, Jacques Riffaud) de la cour d'assise de l'Aude répondent Oui à l'ensemble des 97 questions mettant en cause l'accusé pour vols, coups et blessures, meurtres et tentatives de meurtre, crimes de trahison. En foi de quoi, la cour le condamne à la peine de mort ; ceci après l'audition des témoins et victimes de l'agent du SD :
Reine Bayle (Belcaire), Pierre Vacquier (Camurac), Roger Malet, Joseph Dieuzer (Carcassonne), Claire Comminges épouse Bringuier (Carcassonne), Antoine Rodriguez (Bram), Miguel Amantegui (Carcassonne), Jean Lopez (Carcassonne), Vincent Miralles, Marieront Antoine (Narbonne), Laurent Durand (Villeneuve-Minervois), Dr Camus (Narbonne), Henri Tournié (Carcassonne), Joseph Audirac (Quillan), Louis Ferral (Le bousquet), Louis Bousquet (Le Bousquet), Baptiste Seguy, Antoine Mortez (Le Bousquet), Gaetan Tristan (Le Bousquet), Jean Pijoan (Roullens), Francisco Rovira (Carcassonne), Mercedes Nunez (Carcassonne), André Verdier (Carcassonne), Pierre Tabouil (Mas Saintes-Puelles) et Robert Molinier (Castelnaudary).
Un Pourvoi est adressé par son avocat. Il est rejeté le 14 août 1945
© Google maps
C'est ici sur le champ de tir de Romieu, à la sortie de Carcassonne en direction de Bram, qu'est conduit René Bach au matin du 6 septembre 1945.
Procès Verbal d'exécution
L'an mil neuf cent quarante cinq et le six septembre à 6 heures sur l'invitation de Monsieur le Procureur de la République de Carcassonne, nous Darles, Juges d'instruction à Carcassonne, assisté de Marty, notre greffier, et en présence de M. Moulais, substitut de M. le Procureur de la République. Nous sommes transportés à la Maison d'arrêt de Carcassonne, ou en notre présence le condamné Bach, 24 ans, interprète à Carcassonne, 8 rue P. Curie a été livré à l'Officier commandant le peloton chargé de mettre à exécution l'arrêt de la cour de justice de l'Aude du 28 juillet 1945. Le condamné a été conduit au terrain de Romieu près Carcassonne où l'exécution a eu lieu par fusillade à 7 heur
Bach est ensuite inhumé en toute discrétion dans Carcassonne, où il repose depuis 70 ans. La concession a été acquise par sa famille, ainsi que la pierre tombale. Au milieu de ce lieu de repos éternel figurent également les martyrs du Quai Riquet, des résistants, des miliciens fusillés à la Libération. Finalement René Bach n'avait-il pas raison lorsqu'il déclara à son procès ?
"Toutes les affaires ont été faites parce que les Français se sont dénoncés entre eux"
René Bach
Décédé
Le 6 septembre 1945
à l'âge de 24 ans
P.D.P.L*
Concession
à
perpétuité
* Priez Dieu Pour Lui
Après la destruction de la villa de la Gestapo en janvier dernier c'est finalement le seul témoin historique qui la relie à elle. Tout cela a bien existé et nous ne souhaitons pas que cela puisse être un jour remis en cause. Nous savons que d'autres peuvent être d'un avis différent ; peut-être craignent-ils qu'elle ne devienne un lieu de dévotion à la gloire du nazisme. Nous respectons leur conscience, tout en assumant la nôtre.
Sources
Archives de l'Aude
Midi-Libre / Juillet 1945
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Commentaires
mais pourquoi il est là ce traître ce sanguinaire sa famille pouvait pas l'emmener ?notre sol est souillé par sa présence il a fait tant de mal...il ne faut jamais oublier ce qui a été c'est notre devoir de mémoire ...et il faut que nos enfants et petits enfants sachent l'horreur de la guerre.....merci Martial j'aurais jamais cru cela j'en suis révoltée ....ne jamais pardonner...c'est trop atroce....
J'ai passé mes 20 premières années en face de cette rue, je suis rentrée dans plusieurs de ces maisons et jamais l'histoire de ce locataire n'a été évoquée. De même que j'étais dans l'ignorance totale de ce qui s'était passé dans la maison de la rte de Toulouse alors que j'habitais à moins de 100 m, jusqu'à ce que je vous lise il y a 2 ou 3 ans.
Mes parents sont venus s'installer là dix ans après la fin de la guerre et peut être qu'ils n'étaient pas au courant non plus, ils ne sont plus là pour m'en dire plus. Mais je dois pouvoir interroger des personnes (90 ans et 85 ans) que je vais bientôt voir.
Les contemporains de la guerre voulaient oublier pour se tourner vers un avenir libre, ok mais il est clair que c'est aux générations suivantes de faire vivre cette mémoire. Tant de torturés et tant de morts, on ne peut pas les oublier !!!
Nous n'oublions pas toutes les atrocités de cet individus, nos parents en ont souffert.
Et pour un devoir de mémoire, nous serons nombreux (je l'espère) au Quai Riquet dans quelques jours pour l'anniversaire de la "libération de Carcassonne" pour nous souvenir dans le recueillement.
Pierre-Baptiste
Le dernier "écrit" sur la libération de Carcassonne qualifie de "curieuse" l'inscription sur la pierre tombale en dechiffrant PDA.!!!
Merci Martial, en bon historien, de donner la bonne graffie et la bonne lecture
Oups, ce n'était pas "graphie" qu'il fallait employer mais inscription.
Désolée.
Il semblait bizarre en effet qu'il ait été emporté comme on a pu le lire jusqu'à présent.
Qu'elle honte...! Comment cela est-il possible?